Bijouterie : 25 mai 2023 Cour de cassation Pourvoi n° 22-14.651

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Bijouterie : 25 mai 2023 Cour de cassation Pourvoi n° 22-14.651

25 mai 2023
Cour de cassation
Pourvoi n°
22-14.651

CIV. 1

IJ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mai 2023

Rejet

Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 351 F-D

Pourvoi n° E 22-14.651

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2023

La société Créations Guiot de Bourg, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-14.651 contre l’arrêt rendu le 11 janvier 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 5 – 1re chambre), dans le litige l’opposant à la société Hermès Sellier, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la société Créations Guiot de Bourg, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Hermès Sellier, et l’avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 avril 2023 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, M. Jessel, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 janvier 2022), la société Hermès Sellier commercialise depuis plusieurs années un bijou en métal précieux « Chaîne d’Ancre » sous forme de bracelet et de collier composé d’une succession de maillons entrelacés entre eux formant une chaîne qui s’attache avec un fermoir en forme de T et décline cette composition dans une gamme de bijoux.

2. Ayant constaté, à la suite d’une retenue douanière, que la société Guiot de Bourg commercialisait des bracelets, des colliers, des boucles d’oreilles et des boutons de manchette portant atteinte, selon elle, à ses droits d’auteur sur le bijou « Chaîne d’Ancre » et ses dérivés et que ces bijoux étaient mis en vente sur internet, elle a assigné cette société en contrefaçon et en concurrence déloyale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La société Créations Guiot de Bourg fait grief à l’arrêt de dire la société Hermès Sellier recevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur sur le bijou « Chaîne d’ancre » exploité sous forme de bracelet et de collier, les boutons de manchettes Marine, les boutons de manchette Mini Chaîne d’ancre, le bracelet Granville, la bague Chaîne d’Ancre mini, la bague Maillon Ancre, le bijou Farandole et les boucles d’oreille Farandole, de dire que la bague « Chaîne d’ancre enchaînée grand modèle » de la société Hermès Sellier est protégée par le droit d’auteur et de dire la société Hermès Sellier recevable à agir en contrefaçon de droits sur les modèles communautaires DM/063981 et DM/078873 dont elle est titulaire, alors :

« 1°/ que pour être protégeable au titre du droit d’auteur, une œuvre doit être originale et porter l’empreinte de la personnalité de son auteur ; qu’en matière d’arts appliqués, la seule transposition d’éléments du domaine public dans un autre domaine ne suffit pas, à elle seule, à caractériser l’apport créatif de l’auteur ; que pour reconnaître le bénéfice de la protection du droit d’auteur au bijou « Chaîne d’ancre » revendiqué par la société Hermès Sellier, la cour d’appel se borne à énoncer, par motifs propres, que leur auteur a « fait œuvre de création en modifiant de façon substantielle tant la taille, la matière que les caractéristiques mêmes de la tige interne qui est perpendiculaire chez Hermès et non évasée de chaque côté comme pour les chaînes de navire, transformant pour la première fois les chaînes de l’industrie marine en bijou en les combinant avec un fermoir spécifique en forme de T ne répondant pas seulement à une nécessité technique et fonctionnelle mais résultant d’un choix créatif », et par motifs adoptés, que l’auteur « a transposé dans l’univers de la joaillerie pour la première fois en 1938 la physionomie des chaînes de navire empruntée au domaine public de l’industrie navale qu’il a combinée à un fermoir spécifique très visible » et « fait preuve d’effort créatif en donnant un aspect différent à la chaîne marine pour créer des bijoux dont les caractéristiques révèlent ses partis pris esthétiques et l’empreinte de sa personnalité »; qu’en se bornant ainsi à caractériser la transposition d’éléments du domaine public au domaine de la bijouterie, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ que, pour être protégeable au titre du droit d’auteur, une œuvre doit être originale et porter l’empreinte de la personnalité de son auteur ; que pour reconnaître le bénéfice de la protection du droit d’auteur aux bijoux boutons de manchettes Marine, boutons de manchette Mini-chaîne d’ancre, bracelet Granville, bague Chaîne d’ancre mini, bague Maillon d’ancre, collier, bracelet et boucle d’oreille Farandole revendiqués par la société Hermès Sellier, la cour d’appel se borne à énoncer, par motifs propres, qu’ils ont « une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique » et, par motifs adoptés, qu’ « il ressort de la présentation des caractéristiques de chaque bijou une physionomie propre à laquelle aucune antériorité n’est opposée, traduisant un parti pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur »; qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si et en quoi chaque bijou dont la protection était sollicitée, résultait d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de leur auteur, seul de nature à leur conférer le caractère d’une œuvre originale, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle. »

Réponse de la Cour

4. En premier lieu, en ce qu’il fait grief à l’arrêt de dire la société Hermès Sellier recevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur sur le bijou « Chaîne d’ancre » exploité sous forme de bracelet et de collier, les boutons de manchettes Marine, les boutons de manchette Mini Chaîne d’ancre, le bracelet Granville, la bague Chaîne d’Ancre mini, la bague Maillon Ancre, le bijou Farandole et les boucles d’oreilles Farandole ainsi que des droits sur les modèles communautaires DM/063981 et DM/078873 dont elle est titulaire, le moyen critique des motifs qui ne sont pas le soutien du dispositif qu’il attaque.

5. En second lieu, en retenant que la bague « Chaîne d’ancre enchaînée grand modèle » de la société Hermès Sellier se présente comme la combinaison d’un anneau ouvert fait de l’assemblage de trois chaînes incurvées composées de maillons « Chaîne d’Ancre » sous forme de trois rangées de tailles différentes, juxtaposées les unes aux autres et que cette combinaison spécifique traduit des partis pris esthétiques lui conférant une originalité empreinte de modernité, la cour d’appel en a caractérisé l’originalité.

6. Inopérant pour partie, le moyen n’est pas fondé pour le surplus.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. La société Créations Guiot de Bourg fait grief à l’arrêt de dire qu’elle a commis des actes de contrefaçon en important et commercialisant le collier et le bracelet Chaîne d’Ancre, les boutons de manchette Marine, les boutons de manchette Mini Chaine d’Ancre, le bracelet Granville, la bague Chaîne d’Ancre mini, la bague Maillon Ancre, le bijou Farandole et les boucles d’oreille Farandole, portant atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur de la société Hermès Sellier et aux droits de ses modèles communautaires DM/063981 et DM/078873, de lui interdire la poursuite de ces agissements, d’ordonner la destruction des bijoux saisis à ses frais une fois la décision devenue définitive et de la condamner à payer à la société Hermès Sellier la somme de 35 000 euros du fait des atteintes aux droits d’auteur et celle de 5 000 euros du fait des atteintes aux droits des modèles, alors « que la cassation à intervenir sur le premier moyen relatif au champ d’application de la protection au titre du droit d’auteur et du droit des dessins et modèles entraînera, par voie de conséquence, la censure du chef de l’arrêt constatant l’existence d’actes de contrefaçon et condamnant la société Créations Guiot de Bourg à les réparer, et ce en application de l’article 624 du code de procédure civile. »

 


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