Bijouterie : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01135

·

·

Bijouterie : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/01135

16 novembre 2023
Cour d’appel de Paris
RG
20/01135

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 16 NOVEMBRE 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01135 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNLW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 18/08178

APPELANTE

Madame [G] [L]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Jason BENIZRI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1543

INTIMÉE

Société FREY WILLE PARIS, placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de Commerce de Paris en date du 17/04/2020

PARTIES INTERVENANTES

Association AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 5]

N’ayant pas constitué avocat, assignation à personne morale le 15 décembre 2022

SCP BTSG prise en la personne de Me [T] [F] ès qualités de mandataire liquidateur de Société FREY WILLE PARIS

[Adresse 1]

[Localité 4]

N’ayant pas constitué avocat, assignation à personne morale le 15 décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Septembre 2023, en audience publique,les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Sandrine MOISAN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente

Madame Isabelle MONTAGNE, présidente

Madame Sandrine MOISAN, conseillère, rédactrice

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [G] [L] a été engagée par la société Frey Wille Paris dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée du 8 juin 2017, en qualité de Brand Manager – Responsable du développement de la marque FREY WILLE en France, statut Cadre, Niveau 5, Echelon 1, la convention collective applicable étant celle de la Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie.

Par lettre du 19 juin 2018 adressée à Mme [L], la société Frey Wille Paris a indiqué envisager de rompre le contrat de travail et l’a convoquée à un entretien préalable fixé au 27 juin suivant.

Mme [L] a adressé un courrier à la société Frey Wille Paris, sise à [Localité 14], aux termes duquel elle demande l’organisation d’élections professionnelles.

Par courriel du 20 juin 2018 adressé à la société Frey Wille Paris, Mme [L] a fait part de sa surprise de recevoir une convocation à un entretien préalable, a expliqué que lors de leur entretien de la veille elle avait fait remarquer que la situation de la société s’améliorait significativement depuis son arrivée, qu’elle avait surtout annoncé son souhait d’organiser des élections professionnelles, le personnel étant informé de longue date de sa démarche, précisant informer l’inspection du travail de ce traitement manifestement illicite et discriminatoire.

Par courrier en réponse du 21 juin 2018, la société Frey Wille Paris, en la personne de M. Wille, a contesté les termes du courriel envoyé par Mme [L] et indiqué qu’il était préférable de la mettre à pied à titre conservatoire.

La société Frey Wille Paris a notifié à Mme [L] son licenciement pour insuffisance professionnelle par courrier du 30 juin 2018.

Contestant son licenciement, Mme [L] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris par requête du 30 octobre 2018.

Par jugement du 10 janvier 2020, notifié aux parties par lettre du 15 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a :

-débouté Mme [L] de l’ensemble de ses demandes,

-débouté la SARL Frey Wille Paris de ses demandes,

-condamné Mme [L] aux dépens.

Le 10 février 2020, Mme [L] a interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 17 avril 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Frey Wille Paris et a désigné la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] ès qualité de liquidateur judiciaire.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 6 mai 2020, Mme [L] demande à la cour :

-d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 10 janvier 2020 en toutes ses dispositions et par conséquent’:

à titre principal’:

-de dire que son licenciement est frappé de nullité,

-de condamner la société Frey Wille Paris à la réintégrer,

-de condamner la société Frey Wille Paris à lui verser à les sommes suivantes’:

-96 000 euros de salaires échus depuis le licenciement jusqu’à la décision (à parfaire au jour de l’arrêt d’appel),

-5 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

-3 000 euros d’article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire’:

-de dire que le licenciement de Mme [L] est abusif,

-de condamner la société Frey Wille Paris à verser à Mme [L] les sommes suivantes’:

-50 400 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive,

-5 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

-4 200 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière,

-3 000 euros d’article 700 du code de procédure civile.

Mme [L] a fait signifier ses conclusions à la SCP BTSG prise en la personne de Maître [T] [F], ès qualité de liquidateur de la société Frey Wille Paris, par acte d’huissier de justice du 10 septembre 2020.

Mme [L] a fait signifier la déclaration d’appel à l’AGS CGEA IDF OUEST et à la SCP BTSG prise en la personne de Maître [T] [F], ès qualité de liquidateur de la sociétéFrey Wille Paris, par actes d’huissier de justice du 15 décembre 2022.

L’association AGS CGEA IDF OUESTa fait savoir par message électronique du 11 janvier 2023 qu’elle ne serait ni présente, ni représentée.

Maître [T] [F], ès qualité de liquidateur de la société Frey Wille Paris n’a pas constitué d’avocat.

Les intimées n’ont pas conclu.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 juin 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 22 septembre 2023.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 30 juin 2018 adressée à Mme [L] contient les motifs suivants :

‘Vous avez été engagée en CDI le 8 juin 2017 par la société Frey Wille en qualité de Brand Manager – Responsable du développement de la Marque FREY WILLE, en France, statut cadre, Niveau 5, Echelon 1.

En cette qualité, comme mentionné à votre contrat, vous deviez notamment :

– développer la notoriété et l’image de la marque en France ;

– définir les stratégies marketing locales en relation avec la stratégie du groupe et mise en oeuvre des actions marketing ;

– animer le réseau français et développer les ventes en boutique ;

– gérer opérationnellement et administrativement le réseau de partenaires en collaboration avec les représentants commerciaux.

Pourtant, vous n’avez pas su démontrer les qualités et compétences nécessaires pour mener à bien vos missions.

1- il vous est reproché une insuffisance professionnelle qui s’est traduite notamment par une gestion inappropriée et parfois fantaisiste de la société.

Ainsi nous avons relevé différents exemples :

– une implication inadéquate dans les boutiques(…)

-une absence de participation au développement du réseau ainsi qu’une absence de coordination avec les représentants commerciaux(…)

– des frais exposés à tort (…)

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, qui caractérisent une inadéquation au poste, je vous notifie par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle(…).’

Mme [L] prétend que son licenciement est discriminatoire, et en conséquence nul, d’une part, parce que son contrat de travail a été rompu sans autorisation préalable de l’inspection du travail alors qu’elle avait demandé l’organisation d’élections professionnelles, d’autre part, parce que son licenciement est motivé par cette demande d’organisation d’élections professionnelles et non par une prétendue insuffisance professionnelle.

Elle expose que son employeur lui reproche de s’être rendue de façon récurrente au magasin d’usine de [Localité 13] pour faire ses achats à prix avantageux, et de ne pas justifier d’un travail sur tous les points de vente, mais que les témoignages sont unanimes s’agissant de son professionnalisme et de son implication, et qu’aucun lien n’est établi entre son travail, toujours loué par son employeur, et les pertes de chiffre d’affaires et de résultat net.

S’agissant des frais prétendument exposés à tort, elle soutient que M Wille lui avait demandé de ‘gâter’ les salariés pour leurs performances, et que les notes ont toujours été validées par Mme [Z].

Elle affirme que les témoignages démontrent que son licenciement repose uniquement sur sa demande d’organisation d’élections professionnelles et non sur une prétendue insuffisance professionnelle.

A titre subsidiaire, Mme [L] soutient que son licenciement est abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Elle expose que les griefs d’implication inadéquate dans les boutiques, d’absence de participation au développement du réseau, et d’absence de coordination avec les représentants commerciaux sont lapidaires et faux comme le prouvent les attestations.

Elle conteste ne pas avoir été au niveau attendu ainsi que la dégradation des résultats, affirmant que son salaire a augmenté qu’on lui a confié la boutique de Bruxelles, qu’il a été fait appel à son expertise pour la boutique de Londres, qu’elle a été félicitée pour les chiffres réalisés lors de la période de Noël 2017.

Elle explique que si elle n’a pas obtenu de témoignages de salariés parisiens c’est parce que M. Wille s’y rendait une fois par mois, et qu’une atmosphère de crainte s’était établie, que ses déplacements à [Localité 10] étaient motivés non par le fait que ses parents y vivent, mais par le souhait de M. Wille, et qu’on ne lui a jamais demandé de se rendre à [Localité 7], [Localité 8], [Localité 9], [Localité 11] ou [Localité 12].

Enfin, Mme [L] affirme, qu’en tout état de cause, son licenciement a été vexatoire et que la procédure a été irrégulière, dès lors que son employeur l’a félicitée lors d’un entretien informel du 19 juin 2018, et que le lendemain elle a reçu une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement, outre une mise à pied.

Ni la société Frey Wille Paris, ni son liquidateur judiciaire, ni l’AGS CGEA IDF OUEST n’ont conclu.

Conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas est réputée s’ approprier les motifs du jugement.

Aux termes de l’article L.2411-6 du code du travail, l’autorisation de licenciement est requise, pendant une durée de six mois, pour le salarié ayant demandé à l’employeur d’organiser les élections au comité social et économique ou d’accepter d’organiser ces élections.

Il précise, d’une part, que cette durée court à compter de l’envoi à l’employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation syndicale a, la première, demandé ou accepté qu’il soit procédé à des élections, d’autre part, que cette protection ne bénéficie qu’à un seul salarié par organisation syndicale ainsi qu’au premier salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a demandé l’organisation des élections.

Le contrat de travail des salariés bénéficiaires d’une protection spéciale ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur sans l’autorisation préalable de l’inspection du travail, formulée, le cas échéant, après avis du comité social et économique.

La protection accordée au salarié qui, le premier, a demandé l’organisation d’élections, ne lui est acquise qu’à compter de l’intervention aux mêmes fins d’une organisation syndicale.

En l’espèce, Mme [L] n’établit ni avoir été mandatée par une organisation syndicale, ni de l’intervention d’une organisation syndicale pour relayer sa demande.

Dans ces conditions, Mme [L] n’établit pas avoir la qualité de salariée protégée, de sorte qu’elle ne peut reprocher à la société Frey Wille de ne pas avoir demandé l’autorisation de l’inspection du travail, préalablement à son licenciement.

En conséquence le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Aux termes de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être sanctionnée en raison notamment de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes.

L’article L1132-4 du même code dispose que toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.

En vertu de l’article L. 1134-1 du code du travail dans sa version en vigueur à compter du 20 novembre 2016, lorsqu’un litige survient en raison d’une discrimination syndicale, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Par courrier du 19 juin 2018, la société Frey Wille a convoqué Mme [L] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Mme [L] communique aux débats un courrier non daté adressé à la société Frey Wille sise à [Localité 14], aux termes duquel elle demande ‘d’engager dès à présent la procédure d’organisation des élections des délégués du personnel prévu par l’article L2314-3 du code du travail.’

Est agrafé à ce courrier une fiche de dépôt d’un courrier recommandé international destiné à la société Frey Wille faisant apparaître un tampon de la poste du 19 juin 2018, de sorte qu’il est permis de penser que ce courrier a été adressé le même jour que le courrier de convocation à un entretien préalable.

Cependant, l’heure de l’envoi n’étant pas précisée, Mme [L] n’établit pas que ce courrier aurait été envoyé avant l’entretien qu’elle a eu avec son employeur le même jour.

Il ne résulte des éléments de la procédure, ni que la demande d’organisation d’élections professionnelles aurait été formulée par Mme [L] de longue date, ni qu’elle aurait été soutenue par une organisation syndicale.

L’appelante ne communique aucune pièce, et notamment aucun courrier, qui pourrait établir qu’elle aurait eu des activités syndicales et des échanges au sujet de l’organisation d’élections professionnelles avec son employeur avant l’envoi de son courrier.

Sur les huits témoignages versés aux débats par Mme [L], seuls deux font référence à cette demande d’organisation d’élections professionnelles, sans mentionner de désaccord ou conflit avec l’employeur à ce sujet.

Par ailleurs, la saisine de l’inspection du travail par Mme [L] n’a manifestement donné lieu à aucune suite.

Enfin, dès le 21 juin 2018, la société Frey Wille a contesté tout lien entre son projet de licencier Mme [L] et sa demande d’organisation d’élections professionnelles expliquant qu’elle savait que son employeur avait l’intention d’organiser de telles élections et déplorant l’utilisation de cette information à des fins de personnelles, après s’être montrée menaçante lors de leur entrevue du 19 juin.

Dans ces conditions, les éléments, dans leur ensemble, ne permettent pas de supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en lien avec la demande d’organisation d’élections professionnelles.

En conséquence et par motifs ajoutés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [L] de ses demandes de nullité du licenciement et en paiement d’indemnités et de salaires en lien.

Il convient de rechercher si, comme le prétend Mme [L], son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Il appartient à la juridiction saisie d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L.1232-1 du code du travail, selon lequel le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

L’insuffisance professionnelle, qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu’elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

L’insuffisance professionnelle, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute.

Il résulte des termes du courrier de licenciement précédemment rappelé que l’employeur s’est placé sur le seul terrain de l’insuffisance professionnelle, concluant de la façon suivante : ‘compte tenu de l’ensemble de des éléments, qui caractérisent une inadéquation au poste, je vous notifie par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle.’

Dans ces conditions, la cour, à la suite des premiers juges, doit se limiter à rechercher si les faits reprochés à la salariée sont constitutifs d’une insuffisance professionnelle.

En premier lieu, la société Frey Wille reproche à Mme [L] une implication inadéquate dans les boutiques, une absence de participation au développement du réseau, ainsi qu’une absence de coordination avec les représentants commerciaux.

Le contrat de travail conclu entre les parties le 8 juin 2017 stipule que la salariée est garante du développement du chiffre d’affaires et de l’image de la marque Frey Wille en France et que, sans que cette énumération présente un caractère exhaustif, elle sera chargée des tâches suivantes :

– développement de la notoriété et de l’image de la marque en France : pilotage des actions de communication, de publicité, des relations de presse en lien avec les intervenants externes, notamment l’agence de communication (rédaction du plan média, présence sur les réseaux sociaux, organisation d’évènements etc) ;

– définition de la stratégie marketing locale en relation avec la stratégie du Groupe, et mise en oeuvre des actions marketing ;

– animation du réseau français et développement des ventes en boutique : gestion quotidienne des boutiques en collaboration avec les superviseurs des boutiques, management des équipes (formation, motivation et gestion du personnel), développement de l’activité (suivi et analyse des performances, soutien dans la vente et promotion des collections, définition et respect des objectifs commerciaux…) ;

– gestion opérationnelle et administrative du réseau français en lien avec le siège social à [Localité 14]: définition des objectifs, suivi des indicateurs d’activité, gestion des aspects juridiques et RH du réseau etc.) ;

– développement du réseau (ouverture des boutiques en France, recherches des emplacements…) et coordination avec le réseau de partenaires en collaboration avec les représentants commerciaux.

Pour contester les griefs d’implication inadéquate dans les boutiques, d’absence de participation au développement du réseau et d’absence de coordination avec les représentants commerciaux, Mme [L] se prévaut de huit attestations datant de mai ou juin 2018, dont sept ont été rédigées par des salariées dont elle était la responsable hiérarchique, et une par une assistante de direction.

En matière prud’homale, la preuve est libre. Dès lors rien ne s’oppose à ce que soient examinées des attestations établies par des personnes travaillant sous la responsabilité de la salariée licenciée, la valeur et la portée de ces attestations devant en conséquence être examinées.

Une attestation émane d’une assistante de direction, quatre attestations ont été établies par la responsable adjointe, la directrice et deux conseillères de vente de la boutique de [Localité 13], et trois ont été rédigées par la directrice, la directrice adjointe et une conseillère de vente de la boutique de [Localité 10].

Toutes ces attestations vantent les qualités humaines et professionnelles de Mme [L], mais ne reflètent que les points de vue de salariées des boutiques de [Localité 10] et [Localité 13].

Or, la société Frey Wille Paris reproche à Mme [L] de s’être déplacée trop fréquemment dans ces deux boutiques.

Aux termes de ses écritures, Mme [L] explique qu’elle ne s’est pas rendue à [Localité 7], [Localité 8], [Localité 9], [Localité 11] ou [Localité 12], parce que cela ne lui a pas été demandé et relevait du travail des commerciaux.

Cependant, aux termes du contrat de travail conclu avec la société Frey Wille Paris, Mme [L] avait une mission d’animation du réseau français et de développement des ventes en boutique comprenant la gestion quotidienne des boutiques, le management des équipes et le développement de l’activité, de sorte que sa mission ne portait pas uniquement sur les boutiques de [Localité 10] et [Localité 13].

Or, Mme [L] ne justifie nullement d’une implication dans d’autres boutiques que celles de [Localité 10] et [Localité 13], ni d’un travail de coordination avec les représentants commerciaux, alors qu’il s’agit de missions lui incombant expressément stipulées aux termes du son contrat de travail.

Il doit ainsi être considéré que s’agissant des griefs d’implication inadéquate dans les boutiques, d’absence de participation au développement du réseau et d’absence de coordination avec les représentants commerciaux, les faits énoncés par l’employeur dans le courrier de licenciement pour reprocher à Mme [L] une insuffisance professionnelle sont pertinents et suffisamment objectivés par les éléments de la procédure.

En second lieu, l’employeur reproche à Mme [L] d’avoir exposé des frais à tort, parmi lesquels des frais de petits déjeuners, déjeuners, goûters, gâteaux, et boissons.

Mme [L] ne justifie d’aucune consigne de son employeur visant à l’autoriser à exposer de telles dépenses aux frais de l’entreprise, afin de récompenser les équipes, tandis que les premiers juges ont relevé que les justificatifs de frais versés aux débats établissaient la poursuite de cette pratique par Mme [L], malgré l’alerte du 15 mars 2018 de l’expert-comptable de l’entreprise rappelant que les frais de repas du personnel ne pouvaient pas être pris en charge par l’employeur, les salariés bénéficiant de tickets restaurant pour leurs repas les premiers juges.

Ainsi, ce second grief est également suffisamment établi au regard des éléments de la procédure.

Il en résulte que, comme l’ont retenu les premiers juges, le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [L] de sa demande visant à dire que son licenciement est abusif, et de ses demandes de dommages-intérêts en lien.

Mme [L] prétend qu’en tout état de cause, le licenciement est vexatoire, et la procédure irrégulière.

Le licenciement peut causer au salarié un préjudice distinct de celui lié à la perte de son emploi, en raison des circonstances brutales ou vexatoires qui l’ont accompagné, permettant au salarié de demander réparation de son préjudice moral, sur le fondement de la responsabilité civile prévue aux articles 1240 et suivants du code civil dans leur version applicable à l’espèce.

En vertu de l’article L. 1232-2 du code du travail, l’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable cette convocation étant effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, indiquant l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

L’article L. 1232-6 du code du travail précise que la lettre recommandée de licenciement pour motif personnel ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date à laquelle le salarié a été convoqué à l’entretien préalable.

Si l’inobservation de la procédure n’entraîne pas la nullité du licenciement et ne lui donne pas nécessairement un caractère abusif, elle ouvre néanmoins droit à réparation.

Mme [L] explique que son employeur l’a félicitée et a évoqué des projets avec elle lors d’un entretien informel du 19 juin 2018, mais qu’elle a reçu le lendemain une convocation à un entretien préalable à une procédure de licenciement, que dans ces conditions la rupture est intervenue dans des conditions humiliantes et d’une violence morale inouïe.

Le contenu de l’entretien du 19 juin 2018 entre Mme [L] et son employeur n’est étayé par aucun élément de preuve objectif, tandis que la version de cette dernière est contredite par la société Frey Wille Paris.

La société Frey Wille Paris, qui envisageait de licencier Mme [L], l’a convoquée, avant toute décision, à un entretien préalable fixé au 27 juin 2018, cette convocation ayant été effectuée par lettre recommandée indiquant l’objet de la convocation.

L’entretien préalable a quant à lui eu lieu plus de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

La mise à pied à titre conservatoire a été notifiée par courrier du 21 juin 2018, et le licenciement a été notifié le 30 juin 2018, soit dans le respect du délai de deux jours ouvrables après l’entretien préalable, conformément aux dispositions de l’article L.1232-2 du code du travail.

Il s’ensuit que la procédure est régulière et que Mme [L] n’établit ni les conditions humiliantes, ni la violence morale alléguées.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [L] de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, et procédure irrégulière.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [L], qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [G] [L] aux dépens de la procédure d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x