Bière Madeleinoise, une marque valide 
Bière Madeleinoise, une marque valide 
Ce point juridique est utile ?

C’est à tort que l’INPI a fait droit à l’opposition à l’enregistrement de la marque « la « Madeleinoise » (présentée par la Ville de Madeleine) pour désigner des produits de la Bière.

Droits de la ville de la Madeleine

Si le terme « Madeleinoise » désigne une habitante ou un produit issu de la ville de la Madeleine, il n’est pas établi que le consommateur associera ce terme avec la ville de Madeleine, commune de taille moyenne située dans la région des Hauts-de-France. Ce terme renvoie par ailleurs à la « madeleine », pâtisserie connue du grand public.

En outre, la ville de Madeleine ne bénéficie d’aucune réputation particulière en matière de fabrication de bière et le produit que désigne la marque n’est pas fabriqué sur le ressort de cette commune.

Pas de provenance géographique d’un produit

Le signe ne vient donc pas désigner la provenance géographique du produit, de sorte qu’il n’est pas descriptif.

Droit de s’opposer à une marque

Pour rappel, il résulte des dispositions de l’article L711-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 13 novembre 2019, applicable au présent litige, que :

« La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Peuvent notamment constituer un tel signe :

a) Les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles ;

b) Les signes sonores tels que : sons, phrases musicales ;

c) Les signes figuratifs tels que : dessins, étiquettes, cachets, lisières, reliefs, hologrammes, logos, images de synthèse ; les formes, notamment celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant un service ; les dispositions, combinaisons ou nuances de couleurs. »

Par ailleurs, l’article L711-2 du même code dispose que :

« Le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont dépourvus de caractère distinctif :

a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;

b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;

c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. [‘] »

Le caractère distinctif s’entend ainsi comme un signe arbitraire, permettant au consommateur d’individualiser les produits ou services de la marque par rapport à ceux de même nature proposés par des concurrents.

République Française
Au nom du Peuple Français
 
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 22/09/2022
 
****
 
N° de MINUTE :
 
N° RG 21/02992 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TU2C
 
Décision (N° 18/4503915)
 
rendue le 29 avril 2021 par l’Institut [7] de [Localité 3]
 
APPELANTE
 
[Adresse 4]
 
prise en la personne de son maire en exercice,
 
ayant son siège social [Adresse 2]
 
Madeleine
 
représentée par Me Bernard Franchi, membre de la SCP Processuel, avocat au barreau de Douai
 
assistée de Me Amélie Capon, membre de la SELARL Capon & Rault Avocats, avocat au barreau de Lille
 
INTIMÉ
 
Monsieur le directeur général de l’Institut [7]
 
dont le siège social est [Adresse 1]
 
[Adresse 5]
 
[Localité 3]
 
représenté par Mme [O] [Y], munie d’un pouvoir
 
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
 
Catherine Bolteau-Serre, présidente de chambre
 
Sophie Tuffreau, conseiller
 
Jean-François Le Pouliquen, conseiller
 
— ——————–
 
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps
 
DÉBATS à l’audience publique du 23 mai 2022 tenue en double rapporteur par Catherine Bolteau-Serre et Jean-François Le Pouliquen après accord des parties et après rapport oral de l’affaire par [X] [H]. Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
 
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Jean-François Le Pouliquen, conseiller en remplacement de Catherine Bolteau-Serre, président empêché, et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
 
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 25 avril 2022
 
****
 
EXPOSÉ DU LITIGE
 
La commune de Madeleine a déposé le 28 novembre 2018 auprès de l’Institut national de la propriété intellectuelle, ci-après INPI, une demande d’enregistrement n° 18/4503915 portant sur la dénomination « la MADEleinoise » destinée à distinguer les produits suivants : « Bières ».
 
Le 21 mars 2019, l’INPI a notifié au déposant une objection provisoire à enregistrement l’avisant que l’objet de sa demande était susceptible de tomber sous le coup des dispositions des articles L 711-1 à L 711-3, L712 -2 et L 712-7 du code de la propriété intellectuelle au motif que le signe déposé n’était pas susceptible de distinguer les produits ci-dessus mentionnés de ceux d’une autre entreprise et qu’il pouvait servir à en désigner une caractéristique.
 
Par courrier du 25 avril 2019, la commune de Madeleine a présenté des observations contestant le bien-fondé de la notification.
 
Le 15 octobre 2019, l’INPI a notifié à la commune de Madeleine un projet de décision aux termes duquel il maintenait son objection.
 
Le 14 décembre 2019, la commune de Madeleine a présenté des observations contestant le projet de décision.
 
Par décision du 29 avril 2021, l’INPI a rejeté la demande d’enregistrement.
 
La commune de Madeleine a formé un recours contre cette décision le 28 mai 2021.
 
La commune de Madeleine et le directeur de l’INPI ont été convoqués par le greffe pour l’audience du 23 mai 2022.
 
Le dossier a été communiqué au ministère public, lequel l’a visé le 8 février 2022 en sollicitant « l’infirmation » de la décision rendue par l’INPI.
 
*
 
* *
 
Dans ses conclusions déposées le 28 février 2022, la commune de Madeleine demande à la cour de :
 
‘déclarer recevable et bien fondé le recours en annulation formé par la commune de Madeleine à l’encontre de la décision de Monsieur le directeur général de l’INPI du 29 avril 2021
 
‘annuler la décision de Monsieur le directeur général de l’INPI du 29 avril 2021 en ce qu’elle a décidé : « la demande d’enregistrement n° 18/4503915 est rejetée »
 
‘dire que la décision à venir sera notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception et par les soins du greffe, à la commune de Madeleine et au directeur général de l’INPI aux fins de procéder à l’enregistrement de la marque française « la MADEleinoise » n° 18/4503915
 
‘statuer ce que de droit sur la charge des dépens.
 
Dans ses observations déposées le 8 février 2022, le directeur général de l’INPI, régulièrement représenté à l’audience, soutient son mémoire au terme duquel il fait valoir que sa décision est bien fondée.
 
MOTIFS DE LA DÉCISION
 
Il résulte des dispositions de l’article L711-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 13 novembre 2019, applicable au présent litige, que :
 
« La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.
 
Peuvent notamment constituer un tel signe :
 
a) Les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles ;
 
b) Les signes sonores tels que : sons, phrases musicales ;
 
c) Les signes figuratifs tels que : dessins, étiquettes, cachets, lisières, reliefs, hologrammes, logos, images de synthèse ; les formes, notamment celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant un service ; les dispositions, combinaisons ou nuances de couleurs. »
 
Par ailleurs, l’article L711-2 du même code dispose que :
 
« Le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.
 
Sont dépourvus de caractère distinctif :
 
a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
 
b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;
 
c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle. [‘] »
 
Le caractère distinctif s’entend ainsi comme un signe arbitraire, permettant au consommateur d’individualiser les produits ou services de la marque par rapport à ceux de même nature proposés par des concurrents.
 
À l’appui de son refus d’enregistrer la marque, l’INPI fait valoir que le signe « la MADEleinoise », qui qualifie quelqu’un ou quelque chose issu de la ville de la Madeleine, sera appréhendé par le consommateur comme désignant directement un produit et sa provenance, à savoir des bières provenant de la Madeleine, que la différence dans la typographie du signe déposé n’est pas de nature à conférer un caractère distinctif suffisant de sorte que le signe sera perçu par le consommateur comme désignant une bière provenant de Madeleine et non une marque.
 
En l’espèce, si le terme « Madeleinoise » désigne une habitante ou un produit issu de la ville de la Madeleine, il n’est pas établi que le consommateur associera ce terme avec la ville de Madeleine, commune de taille moyenne située dans la région des Hauts-de-France. Ce terme renvoie par ailleurs à la « madeleine », pâtisserie connue du grand public.
 
En outre, la ville de Madeleine ne bénéficie d’aucune réputation particulière en matière de fabrication de bière et le produit que désigne la marque n’est pas fabriqué sur le ressort de cette commune. Dans ses observations du 24 avril 2019, la commune explique ainsi que la bière est réalisée par une brasserie située à [Localité 8] et que son originalité consiste dans l’ajout dans la recette de fabrication d’un miel provenant de ruches installées au sein de l’hôtel de ville.
 
Le signe ne vient donc pas désigner la provenance géographique du produit, de sorte qu’il n’est pas descriptif.
 
La décision de l’INPI sera dès lors annulée.
 
PAR CES MOTIFS
 
La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe,
 
Annule la décision du directeur de l’INPI du 29 avril 2021 ;
 
Dit que la présente décision sera notifiée par le greffe aux parties et au directeur général de l’INPI.
 
Le greffier,Pour le président,

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