Barème Macron : 18 janvier 2024 Cour d’appel de Pau RG n° 21/03779

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Barème Macron : 18 janvier 2024 Cour d’appel de Pau RG n° 21/03779
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AC/SB

Numéro 24/0165

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 18/01/2024

Dossier : N° RG 21/03779 – N° Portalis DBVV-V-B7F-IBNH

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

S.A.S. CHAMVYLE-INTERMARCHÉ

C/

[P] [J]

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 18 Janvier 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 12 Avril 2023, devant :

Madame CAUTRES-LACHAUD, Président

Madame SORONDO, Conseiller

Madame ESARTE, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

assistées de Madame LAUBIE, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A.S. CHAMVYLE- INTERMARCHÉ agissant poursuites et diligences de ses reprédsentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

Intermarché

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Maître LIGNEY de la SELARL DUALE-LIGNEY-BOURDALLE, avocat au barreau de PAU et Maître BLÜM de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PAU,

INTIMEE :

Madame [P] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Maître SANTI de la SELARL DARMENDRAIL/SANTI, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 20 OCTOBRE 2021

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : 19/00202

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [P] [J] (la salariée) a été embauchée par la société par actions simplifiée (SAS) Chamvyle (l’employeur), à compter du 7 avril 2010, suivant contrat à durée déterminée à temps partiel, en qualité de vendeuse niveau II, régi par la convention collective nationale de commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Elle a, par la suite, conclu un contrat de travail à durée indéterminée, passé à temps complet.

Le 1 février 2016, elle est devenue Manager rayon produit de la mer.

A compter du mois de janvier 2018, Mme [P] [J] a été placée en arrêt de travail.

Par avis du 23 janvier 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [P] [J] inapte à son poste en ces termes’:

«’État de santé incompatible avec les gestes répétés et le travail en force avec le membre supérieur droit, la manutention et le port de charges lourdes, le travail avec le membre supérieur droit au-dessus de l’horizontale, la position debout prolongée. Serait apte à un poste de travail léger (de type administratif, par exemple) ou à une formation qui respecte les restrictions ci-dessus.’»

L’employeur a proposé plusieurs postes de reclassement, lesquels ont été refusés par la salariée.

Le 27 février 2019, Mme [P] [J] a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement, fixé le 7 mars 2019.

Le 11 mars 2019, Mme [P] [J] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 4 juillet 2019, Mme [P] [J] a saisi la juridiction prud’homale.

Par jugement du 20 octobre 2021, le conseil de prud’hommes de Pau a’:

– dit que le licenciement de Mme [P] [J] par la SAS Chamvyle est nul,

– condamné en conséquence la SAS Chamvyle à verser à Mme [P] [J] les sommes de’:

*29.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* 5.283,33 euros bruts à titre du doublement de l’indemnité de licenciement,

* 6.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation relative à la santé et au repos,

* 5.815,18 euros bruts à titre de préavis,

* 581,51 euros bruts à titre de congés payés sur préavis,

* 12.992,09 euros bruts à titre de rappels d’heures supplémentaires,

* 1.299,20 euros à titre de congés payés sur le rappel d’heures supplémentaires,

– rejetant toutes prétentions plus amples ou contraires, débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

– condamné la SAS Chamvyle à verser à Mme [P] [J] la somme de 1 200 euros nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SAS Chamvyle aux entiers dépens.

Le 25 novembre 2021, la SA Chamvyle a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses conclusions adressées au greffe par voie électronique le 4 juillet 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la société Chamvyle-Intermarché appelante, demande à la cour de’:

> A titre principal,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de PAU en date du 20 octobre 2021 en ce qu’il a :

* dit le licenciement de Mme [P] [J] nul,

* condamné la Société Chamvyle à verser la somme de 29.000 euros nets à Mme [P] [J] à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* dit que les refus de Mme [P] [J] n’étaient pas abusifs,

* condamné la Société Chamvyle à verser la somme de 5.283,33 euros bruts à Mme [P] [J] au titre du doublement de l’indemnité de licenciement,

* condamné la Société Chamvyle à verser à Mme [P] [J] la somme de 5.815,18 euros bruts à titre de préavis, outre 581,51 euros bruts à titre de congés payés sur préavis,

* dit que Mme [P] [J] avait effectué des heures supplémentaires non rémunérées,

* condamné la Société Chamvyle à verser à Mme [P] [J] la somme de 12.992,09 euros bruts à titre de rappels d’heures supplémentaires, outre 1.299,20 euros à titre de congés payés sur le rappel d’heures supplémentaires,

* condamné la Société Chamvyle à verser la somme de 6 000 euros nets à Mme [P] [J] à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation relative à la santé et au repos,

* condamné la Société Chamvyle à verser à Mme [P] [J] la somme de 1 200 euros nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la Société Chamvyle aux entiers dépens.

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de PAU en date du 20 octobre 2021 en ce qu’il a :

*débouté Mme [P] [J] de sa demande de reconnaissance de la nullité de plein droit du licenciement discriminatoire lié, directement ou indirectement, à l’état de santé et au handicap,

*débouté Mme [P] [J] de sa demande de réintégration,

*débouté Mme [P] [J] de sa demande de paiement de l’indemnité d’éviction pour une réintégration qui interviendrait le 11 mars 2021 égale à 54 091 euros outre les congés payés afférents de 5 409 euros, ou dans l’hypothèse d’une réintégration le 11 mars 2022 ou égale à 81 136 euros outre les congés payés afférents de 8 113 euros;

*débouté Mme [P] [J] de sa demande de paiement de l’indemnité forfaitaire spéciale pour travail dissimulé de 13 522,75 euros.

– considérer que le licenciement de Mme [P] [J] n’est en aucun cas entaché d’une nullité,

– considérer le licenciement de Mme [P] [J] comme reposant sur une cause réelle et sérieuse,

– considérer que le refus de Mme [P] [J] est abusif,

– constater que Mme [P] [J] n’a pas réalisé les heures supplémentaires prétendument mentionnées,

– débouter Mme [P] [J] de l’ensemble de ses demandes, fins, et conclusions,

– condamner Mme [P] [J] à porter et à payer à l’Association la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [P] [J] aux entiers dépens et autres frais non inclus dans les dépens.

> A titre subsidiaire,

– limiter à 6 mois de salaire le montant de l’indemnité en application de l’article L.1235-3-1,

– débouter Mme [P] [J] de sa demande d’indemnité de congés payés sur préavis de 581,51 euros,

– prendre en considération un salaire brut de base égal à 2 370,09 euros pour le calcul de l’indemnité égale à l’indemnité de préavis,

– limiter à 3 mois de salaire le montant des dommages et intérêts en application de l’article L.1235-3 et prendre en considération un salaire brut de base égal à 2 370,09 euros,

– réduire à la somme de 1 734.01 euros au titre de l’année 2016 et 1 958,14 euros au titre de l’année 2017 au titre de la contrepartie obligatoire en repos,

– débouter Mme [P] [J] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la violation de la durée maximale de travail et pour non-respect des règles relatives au repos, faute pour cette dernière de rapporter la preuve d’un préjudice subi,

Dans ses conclusions adressées au greffe par voie électronique le 5 avril 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, Mme [P] [J], intimée, formant appel incident, demande à la cour de’:

-débouter l’appelante de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du licenciement ou, subsidiairement, prononcer l’absence de cause réelle et sérieuse,

– confirmer également le jugement en ce qu’il a alloué l’indemnité de préavis, les congés afférents, des dommages-intérêts pour non-respect de la réglementation relative à la santé et au repos et des rappels d’heures supplémentaires, ainsi qu’une indemnité au titre des frais irrépétibles de première instance,

– L’infirmer pour le surplus.

> A titre principal, prononcer la nullité de plein droit du licenciement discriminatoire lié, directement ou indirectement, à l’état de santé ou au handicap, la salariée présentant des éléments de fait qui, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination, et l’appelante n’apportant pas la preuve, qui lui incombe, que le licenciement est justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination,

> A titre subsidiaire, prononcer la nullité de plein droit du licenciement en application de l’article L.1226-13 du code du travail, l’absence de consultation loyale des délégués du personnel, sur la base d’informations tronquées, et de vote relatif à l’avis, constituant la violation d’une garantie de fond ainsi que des règles constitutionnelles et européennes d’ordre public applicables aux victimes d’une maladie professionnelle,

> A titre encore plus subsidiaire le dire sans cause réelle et sérieuse, l’inaptitude étant en lien avec les manquements de l’employeur à l’obligation de sécurité,

– faire en outre droit à la demande relative aux heures supplémentaires, la salariée, qui ne supporte pas la charge de la preuve et n’a pas à étayer sa demande, présentant des éléments factuels et des pièces, revêtant un minimum de précision, alors que l’appelante est défaillante dans l’administration du mécanisme probatoire propre aux heures supplémentaires en l’absence de contrôle du temps de travail, en violation des articles 31 de la charte des droits fondamentaux de l’union européenne, L.3171-2, L.3171-3 et L.3171-4 du code du travail,

– prononcer la réintégration, de droit, sur le fondement de l’article L 1132-4 du code du travail,

– condamner, en conséquence, Chamvyle SAS à payer :

* Le montant total de l’indemnité d’éviction égale au montant de la rémunération entre la date du licenciement et la date de réintégration, (intégralité de la rémunération et accessoires de rémunération, congés payés, intéressement, etc..) et ce, sans déduire les revenus de remplacement, soit :

o 108.182 euros (27.045,50 x 4 ans), outre les congés payés afférents représentant 10.818,20 euros dans l’hypothèse où la réintégration interviendrait le 11 mars 2023, (sommes à parfaire),

> ou Subsidiairement, condamner l’appelante à payer :

* 55.000 euros de dommages-intérêts pour licenciement nul sur le fondement des articles L.1226-13 et L 1235-3-1 du code du travail ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse en faisant une appréciation in concreto du préjudice en écartant le barème Macron sur le fondement des articles 30 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 10 de la convention numéro 158 de l’OIT et 24 de la charte sociale européenne, d’une part, et sur le fondement du droit au procès équitable et du principe de la réparation intégrale du préjudice, d’autre part, ou encore plus subsidiairement, 26.168,33euros sur le fondement de l’article L 1235-3 du code du travail,

* 5.283,33 euros de solde de l’indemnité de licenciement égale au double de l’indemnité de l’article L.1234-9 du code du travail en application de l’article L.1226-14 du code du travail,

* 5.815,18 euros de préavis outre 581,51 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis en application l’article 5 de l’annexe III relative aux agents de maîtrise et techniciens à la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

> En tout état de cause, condamner l’appelante à payer :

* 12.992,09 euros de rappel d’heures supplémentaires, outre 2.404,41 euros de congés payés afférents, sur le fondement des articles 31 de la charte des droits fondamentaux de l’union européenne, L.3171-2, L.3171- 3 et L. 3171-4 du code du travail, interprétés à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’union européenne,

* 4.715,86 euros de rappel de contrepartie en repos obligatoire, outre 471,58 euros de congés afférents sur le fondement des articles L 3121-30 et L 3121-38 du code du travail,

* 15.166,62 euros d’indemnité forfaitaire spéciale pour travail dissimulé, sur le fondement des articles L.8223-1, L.3171-2 et L.3171-3 du code du travail et 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, interprétés à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’union européenne,

* 25.000 euros pour violation des durées maximales de travail et minimales de repos sur le fondement des principes constitutionnels du droit au repos et à la santé et des articles 6b) de la directive numéro 2003/88 et 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, interprétés à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’union européenne,

* 3.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– frapper les condamnations des intérêts au taux légal depuis la saisine du conseil de prud’hommes et faire application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil autorisant la capitalisation des intérêts.

– condamner l’appelante aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande au titre des heures supplémentaires et sur la contrepartie obligatoire en repos

Attendu qu’aux termes de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié’;

Que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles’;

Attendu que si la preuve des horaires de travail effectués n’incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments’;

Attendu que lorsqu’il retient l’existence d’heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de détail de son calcul, l’importance de celles-ci et les créances salariales s’y rapportant’;

Attendu que Mme [J] expose qu’elle a accompli de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées’;

Attendu qu’elle produit notamment’:

un relevé des heures accomplies alléguées semaine par semaine ;

des attestations de salariées indiquant que Mme [J] a effectué des heures supplémentaires. Mme [C] déclare avoir été témoin que sa collègue assurait du mardi au samedi la mise en rayon à compter de 5 heures (heure d’embauche confirmée par Mme [Z] et Mme [K]). Mme [D] spécifie quant à elle que Mme [J] pendant les périodes de fêtes effectuait des journées pouvant aller de 4 heures à 19 heures et participait aux inventaires de chaque mois’;

un courrier de l’employeur à la salariée en date du 20 juin 2019, postérieur au licenciement qui indique «Au mois de janvier 2016, vous souhaitiez partir. Vous nous aviez indiqué que vous aviez trouvé un poste identique mieux rémunéré.’Après avoir échangé longuement et prenant en compte vos motivations pour avancer nous vous avons proposé une amplitude horaire plus importante et une meilleure rémunération en passant du niveau 5 au niveau 6. Depuis ce jour là vous avez travaillé en parfaite autonomie. Effectivement le matin votre horaire de prise de poste était prévu pour 6 heures. Vous arriviez régulièrement entre 5heures et demi et 6 heures car vous disiez que vous vouliez prendre votre poste sans stress, boire le café et fumer la cigarette avec vos collègues, mais jamais à 5 heures, excepté sur votre seule initiative en période de noël’»’;

un avenant au contrat de travail en date du premier février 2016 matérialisant son passage au niveau 6. Cet avenant prévoit que sa rémunération constitue la contrepartie de son activité dans le cadre d’un horaire hebdomadaire de 41 heures, y compris le temps de pause conventionnel non assimilé à du temps de travail effectif, le travail du dimanche, les sujétions et majorations tenant aux modifications d’horaires en plus ou en moins, les heures supplémentaires habituelles (dans la limite précitée soit 6 heures par semaine) nécessitées pour le bon accomplissement de sa mission. Il est également spécifié que la répartition de son horaire de travail pourra être modifiée par la direction’;

ses bulletins de salaire à compter de décembre 2016′;

Attendu qu’il résulte de tous ces éléments que cette dernière produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments’;

Attendu que l’employeur fait état que la salariée n’a pas effectué d’heures supplémentaires non rémunérées’;

Attendu que l’employeur produit quant à lui notamment les éléments suivants’:

différentes attestations relevant que le montage du rayon alors occupé par Mme [J] ne nécessitait pas le temps indiqué par l’appelante’;

des attestations de salariés spécifiant que les heures supplémentaires réalisées ont été payées par l’employeur’;

des bulletins de salaire de différents salariés mentionnant le paiement d’heures supplémentaires’;

une attestation de Mme [R] qui indique que les horaires donnés à Mme [J] étaient en adéquation avec la charge de travail à effectuer et ne nécessitaient pas d’heures supplémentaires’;

Attendu que cependant l’employeur ne produit aucun élément précis sur les heures effectivement réalisées par la salariée’;

Que par son courrier en date du mois de juin 2019 adressé à la salariée et l’absence totale de mise en ‘uvre d’un décompte du temps de travail, l’employeur admet lui-même avoir implicitement accordé l’accomplissement d’heures supplémentaires’;

Attendu que l’employeur, qui soutient dans ses écritures devant la cour que la salariée était soumise à une convention de forfait en heures hebdomadaire, n’a produit au dossier aucun élément sur la récapitulation ou le relevé des heures effectuées

Attendu qu’au vu des éléments produits par les parties, la cour a la conviction, sans qu’il n’y ait besoin de mesure d’instruction, que la salariée a effectué des heures supplémentaires qu’il convient d’évaluer à la somme de 12 992,09 euros, outre celle de 1 299,20 euros au titre des congés payés afférents’;

Que le jugement déféré sera confirmé sur ce point’;

Qu’il convient également d’allouer à la salariée la somme de 4 715,86 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos ainsi que celle de 471,58 euros au titre des congés payés afférents, demande nouvelle en cause d’appel’qui ne constitue qu’un complément de la demande au titre des heures supplémentaires ;

Sur la demande au titre des dommages et intérêts pour violation des durées maximales de travail et minimales de repos

Attendu qu’en l’espèce, les parties reprennent devant la cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance’;

Qu’en l’absence d’élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu’elle adopte, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties au regard de la demande formulée’;

Qu’il convient d’y ajouter que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombant à l’employeur, aucun élément produit par celui-ci ne permet d’établir que les durées maximales de travail, quotidienne ou hebdomadaire, les temps de repos ou les temps de pause ont été bien respectés ou appliqués’; ‘

Attendu qu’il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à la salariée la somme de 6 000 euros de dommages et intérêts de ce chef’;

Sur la demande au titre du travail dissimulé

Attendu que l’article L 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié’;

Que l’article L 8221-5 dispose notamment qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli’;

Que toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle’;

Attendu que la mise en place par l’employeur d’un forfait en heures à compter de février 2016 sans prévoir de mesure du temps de travail ne peut suffire à caractériser, faute d’éléments tangibles au dossier, l’intention pour l’employeur de dissimulation’;

Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande de ce chef’;

Sur le licenciement

-Sur la nullité du licenciement

Attendu que selon l’article L.1132-1 du code du travail dans sa version applicable au présent litige, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L.3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français’;

Que l’article L.1132-4 poursuit que toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.

Attendu que selon l’article L.1133-3 du même code, les différences de traitement fondées sur l’inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l’état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectives, nécessaires et appropriées’;

Attendu que l’article L.1134-1 dispose que, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations’;

Qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles’;

Attendu qu’en l’espèce, Mme [J] estime avoir été victime d’une discrimination lors de son licenciement en raison de son état de santé et de son handicap’;

Attendu qu”elle verse aux débats notamment les éléments suivants’:

l’avis d’inaptitude du médecin du travail en date du 23 janvier 2019, qui indique «’état de santé incompatible avec les gestes répétés et le travail en force avec le membre supérieur droit, la manutention et le port de charges lourdes, le travail avec le membre supérieur droit au dessus de l’horizontale, la position debout prolongée. Serait apte à un poste de travail léger (de type administratif par exemple) ou à une formation qui respecte les restrictions ci-dessus’»’;

un courrier de l’employeur en date du 13 février 2019 adressé à la salariée de proposition de poste de reclassement en qualité de responsable d’accueil avec avenant de contrat de travail correspondant aux fonctions proposées’;

un courrier de réponse de la salariée à cette proposition en date du 18 février 2019 refusant le poste’;

un courrier de l’employeur à la salariée en date du 19 février 2019 lui proposant de nouveau le poste en y mentionnant expressément que les inventaires ne concernent que des tâches administratives, en y retirant la période d’essai et en modifiant le contenu des fonctions proposées. Dans le premier avenant figure la mention «’dans le cadre de vos attributions vous serez également amenée à exécuter des tâches d’entretien et de nettoyage,selon le roulement organisé pour l’ensemble des salariés’» et dans le deuxième avenant ne figure plus la fonction de l’entretien. Il convient de constater que les deux avenants stipulent expressément «’dans ce contexte, nous sommes amenés à vous proposer la présente modification de votre contrat de travail. Dans le cadre de ce contrat vous devez impérativement exclure les gestes répétés, le travail en force avec le membre supérieur droit, la manutention et le port de charges lourdes, le travail avec le membre supérieur droit au dessus de l’horizontale, la position debout prolongée’»’;

un courrier de réponse de la salariée en date du 21 février 2019 refusant la proposition de poste modifiée

une enquête administrative de maladie professionnelle de la caisse primaire d’assurance maladie concernant la salariée et la maladie «’syndrome du canal carpien’»’;

la notification de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de la maladie professionnelle «’syndrome du canal carpien’», maladie inscrite au tableau 57 en date du 27 août 2018′;

une enquête administrative de maladie professionnelle de la caisse primaire d’assurance maladie concernant la salariée et la maladie «’tendinite achilléenne gauche’»’;

la notification de prise en charge de sa maladie professionnelle «’tendinite achilléenne gauche’», inscrite au tableau 57 par courrier du 3 octobre 2018 émanant de la caisse primaire d’assurance maladie’;

les compte-rendus médicaux des médecins de la caisse primaire d’assurance maladie liés aux maladies professionnelles susvisées’;

la reconnaissance de travailleur handicapé de Mme [J] du 4 avril 20219 au 31 mars 2029 pour une demande déposée le 24 septembre 2018. La décision mentionne qu’il s’agissait d’une première demande’;

des attestations de Mme [S], [Z], [D], qui font état que Mme [J] faisait l’objet d’une pression morale de la part de l’employeur pour que son rayon soit prêt à l’ouverture du magasin net, de ce fait, exécutait des heures supplémentaires’;

une attestation de Mme [C] qui fait état qu’elle a pu voir Mme [J], durant la période des fêtes de fin d’année de 2016 boiter pendant plus d’une semaine sans jamais quitter son poste de travail’;

une attestation de Mme [K] qui fait état des mêmes faits que les précédentes attestantes et ajoute son expérience personnelle quant au non respect par l’employeur des préconisations du médecin du travail’;

Attendu qu’il convient de se référer à la définition du handicap telle que prévue par la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 soit «’toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un poly-handicap ou d’un trouble de santé invalidant’»’;

Que force est de constater, au vu des éléments médicaux et administratifs, que Mme [J] subit une altération substantielle suffisamment durable’ au niveau du bras gauche et de la main droite ;

Que par ailleurs la qualité de travailleur handicapé a été reconnue à compter du 4 avril 2019, soit très rapidement après le licenciement de Mme [J], lui permettant dès le mois d’avril 2019 de bénéficier de l’ensemble des mesures favorisant son maintien dans l’emploi ou l’accès à un nouvel emploi jusqu’en 2029′;

Attendu que cependant Mme [J] ne présente pas, au vu des pièces listées ci-dessus, des éléments de fait suffisants laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en raison de son handicap ou de son état de santé ‘;

Attendu que Mme [J] sollicite également que son licenciement soit jugé nul en raison de la violation des règles protectrices d’ordre public applicables aux victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelles’;

Attendu que l’employeur fait valoir que l’absence alléguée de consultation des délégués du personnel ne constitue aucunement un cas de nullité du licenciement’;

Attendu que conformément à l’article L.1226-10 du code du travail, lorsque le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article’L. 4624-4,’à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel’;

Que cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l’aptitude du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté’;

Attendu que l’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en ‘uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail’;

Attendu que les pièces du dossier déjà citées et présentes dans le dossier de l’employeur révèlent’:

que l’employeur a proposé à la salariée un poste de reclassement en qualité de responsable d’accueil au sein de l’entreprise par courrier en date du 13 février 2019′;

que par courrier remis en main propre en date du 5 février 2019 l’employeur a convoqué les délégués du personnel à une réunion devant se tenir le 8 février 2019 avec l’ordre du jour suivant «’consultation sur une proposition de reclassement concernant Mme [J], laquelle fait l’objet d’une inaptitude médicale prescrite par le médecin du travail’». Une note explicative est jointe au courrier détaillant les préconisations du médecin du travail, la création d’un poste de responsable d’accueil et les missions dévolues dans le cadre du reclassement. La note précise que la proposition ne prévoit aucune modification des horaires et de la rémunération’;

que le procès-verbal de réunion des délégués du personnel signé par les quatre délégués’;

que suite au refus de la salariée concernant la proposition du 13 février 2019, l’employeur lui a adressé un correctif à sa première proposition retirant la période d’essai, les tâches d’entretien et précisant que les tâches d’inventaire seront circonscrites à des saisies informatiques. Il est constant qu’il s’agit du même poste de reclassement à l’exception des tâches que la salariée avait indiqué dans son courrier de refus comme incompatibles avec les préconisations du médecin du travail ‘;

Attendu qu’en convoquant les délégués du personnel pour un avis sur l’inaptitude de Mme [J] et son reclassement à un poste de responsable accueil le 5 février 2019 et en rédigeant un compte rendu signé des délégués, l’employeur a satisfait aux obligations prévues par l’article L.1226-10 du code du travail’;

Qu’en effet l’employeur, en réalisant la proposition faite à la salariée par courrier en date du 19 février, concernant le même poste amendé des restrictions opérées par la salariée, n’avait pas à consulter de nouveau les délégués du personnel’;

Attendu que Mme [V] confirme d’ailleurs ce point dans son attestation aux termes de laquelle elle indique que lors de la réunion des délégués du personnel du 26 février 2019, l’employeur les a consultés sur le seul suivi de la proposition de reclassement faite à Mme [J]’;

Attendu que l’employeur a donc bien respecté les dispositions prévues à l’article susvisé concernant l’avis des délégués du personnel’;

Attendu que si la qualification de liberté fondamentale est reconnue à la liberté syndicale, en vertu de l’alinéa 6 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et qu’en ce sens est nul tout licenciement prononcé à l’égard d’un salarié en raison de ses activités syndicales, il ne saurait toutefois être déduit des faits de l’espèce, lesquels doivent être considérés comme une seule méconnaissance par l’employeur des règles de la procédure de licenciement, qu’ils constituent une violation de la représentation collective et syndicale des salariés dans l’entreprise’;

Qu’en l’absence de consultation du comité économique et social tel que prévu à l’article susvisé, le licenciement, à défaut d’être nul, pourrait être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse’;

Attendu qu’au surplus, le manquement à l’obligation de consultation des délégués du personnel ne constitue pas une violation de la liberté syndicale et est sanctionnée par l’application de l’article L.1226-15 al 1 à 3 du code du travail.

Attendu que la salariée sera donc déboutée de sa demande tendant à voir juger son licenciement nul sur ce fondement’;

Que le jugement déféré sera infirmé sur ce point’;

-Sur le bien fondé du licenciement

Attendu qu’en vertu de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité et de protection de la santé et de la sécurité physique et mentale doit en assurer l’effectivité en mettant en place des mesures de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation et une organisation et des moyens adaptés’;

Que l’employeur, alerté, manque à son obligation de sécurité dès lors qu’il est établi que l’altération de la santé du salarié résulte de la dégradation de ses conditions de travail et qu’il n’a pris aucune mesure pour y remédier’;

Attendu que Mme [J] fait valoir que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité, manquement ayant entraîné son inaptitude définitive’;

Attendu que les enquêtes de la caisse primaire d’assurance maladie relatives aux maladies professionnelles déclarées, déjà citées plus haut, contiennent explicitement un rapport circonstancié de l’employeur’;

Que le rapport contient’:

pour la maladie du syndrome du canal carpien et tendinite achilléenne gauche l’employeur a confirmé le poste de travail décrit par la salariée et l’exposition aux risques avec une seule réserve sur le travail sur la pointe des pieds, faisant valoir que cette posture est effectuée occasionnellement en raison du fait que la salariée a l’habitude de contourner le rayon pour accéder aux poissons qui se trouvent devant’;

Attendu que ces enquêtes ont été réalisées par la caisse primaire d’assurance maladie après visite du poste de travail réalisée en août 2018′;

Attendu que l’étal utilisé par la salariée faisait 8 mètres de long et 120 cm de hauteur du côté poissonnier’;

Attendu que la glace à positionner sur l’étal, si elle était transportée sur un chariot roulant, devait faire l’objet d’un positionnement à la pelle, dont l’employeur lui-même reconnaît par l’attestation de M. [G], qu’il’pouvait durer 25 minutes’;

Que dans le cadre de ses fonctions la salariée a, à de multiples reprises, soulevé des charges (réception des arrivages, sortie des marchandises du frigo, mise en place des marchandises sur l’étal)’;

Attendu que l’employeur ne produit au dossier qu’une publicité de bac à glace de 400 kilogrammes avec roues pivotantes pour soutenir que Mme [J] ne portait pas de charges lourdes de glace’;

Attendu que les conditions de travail imposées à la salariée, selon un rythme très soutenu au vu des heures supplémentaires accomplies, ont entraîné la survenance de deux maladies professionnelles alors même que son ancienneté dans le poste à temps complet n’était pas très importante’;

Attendu que rien au dossier ne permet d’établir que l’employeur a élaboré un document unique d’évaluation des risques alors même que le travail en poissonnerie implique l’utilisation d’objets tranchants, la réalisation de gestes répétitifs et le port de charges lourdes dans un univers humide et glissant’;

Qu’au surplus Mme [J], en tant que femme, se devait, au sein de la structure, et conformément à l’article R.4541-9 du code du travail «de «’ne pas porter des charges supérieures à 25 kilogrammes ou à transporter des charges à l’aide d’une brouette supérieure à 40 kilogramme, brouette comprise’»’;

Attendu que l’examen de l’ensemble de ces éléments démontre que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité, que ce manquement est incontestablement à l’origine de l’inaptitude professionnelle de Mme [J]’;

Attendu que son licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse’;

Que le jugement déféré sera infirmé sur ce point’;

Sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Attendu qu’en application de l’article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous, dont l’employeur reconnaît l’application dans ses conclusions’:

Ancienneté du salarié dans l’entreprise

(en années complètes)

Indemnité minimale

(en mois de salaire brut)

Indemnité maximale

(en mois de salaire brut)

8

3

8

Attendu que les éléments du dossier mettent en évidence que Mme [J], reconnue travailleur handicapé, âgée de 45 ans au moment de son licenciement et ayant un enfant, a été au chômage à la suite de la rupture du contrat de travail et ce de manière continue jusqu’au 18 août 2020. Elle justifie avoir touché des indemnités jusqu’au 31 mars 2021 et ensuite en 2022, de telle sorte qu’au vu du salaire de référence intégrant les heures supplémentaires accomplies, la somme de 20 200 euros constitue une très juste appréciation du préjudice subi par la salariée, sans qu’il soit nécessaire d’écarter les montants maximaux fixés par l’article susvisé’;

Attendu que le jugement déféré sera infirmé sur ce point’;

Sur l’indemnité sur le fondement de l’article L.1226-14 du code du travail

-Sur l’indemnité spéciale de licenciement

Attendu que conformément à l’article L.1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article’L. 1226-12’ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L.1234-5 ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité prévue par l’article’L. 1234-9′;

Que toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l’employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif’;

Attendu que les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l’emploi consécutive à l’accident du travail ou à la maladie professionnelle’;

Attendu qu’au vu des développements précédents, il y a lieu de dire que le refus du poste de reclassement proposé n’est nullement abusif dans la mesure où, s’il est approprié aux nouvelles capacités de Mme [J], il n’est nullement comparable à l’emploi précédemment occupé’;

Attendu que les premiers juges ont très exactement évalué le montant de l’indemnité spéciale de licenciement au vu des pièces salariales du dossier, les arguments de l’employeur n’étant pas déterminant(s) quant aux calculs opérés’;

Attendu que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a alloué à Mme [J] la somme de 5 283,33 euros de ce chef’;

-Sur l’indemnité compensatrice

Attendu que le calcul opéré par la salariée est conforme à la convention collective applicable et au salaire qu’aurait dû percevoir Mme [J] si elle avait continué à travailler durant la période de préavis’;

Qu’il lui sera alloué de ce chef la somme de 5 815,18 euros, le jugement déféré devant être confirmé sur ce point ‘;

Attendu cependant que cette somme, de nature indemnitaire, ne peut’en aucun cas ouvrir droit à paiement de congés payés, le jugement déféré devant être infirmé sur ce point’;

Sur l’application de l’article L.1235-4 du code du travail

Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail que lorsque le juge condamne l’employeur à payer au salarié une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement des dispositions de l’article L.1235-3 du même code, il ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limité de six mois d’indemnités de chômage ;

Qu’il résulte des mêmes dispositions que lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées, le juge doit ordonner ce remboursement d’office, sans pour autant liquider le montant de la créance de l’organisme intéressé, dès lors que celle-ci n’est pas connue ;

Attendu qu’il convient de condamner l’employeur à rembourser à Pôle Emploi les sommes dues à ce titre, dans la limite de 4 mois d’indemnités ;

Sur les intérêts

Attendu que les sommes dues au titre des créances salariales et l’indemnité conventionnelle de licenciement portent intérêts au taux légal à compter de la notification de la saisine du conseil des prud’hommes à l’employeur, les sommes dues au titre des dommages et intérêts portent intérêts au taux légal à compter de la décision qui les fixe, et ce avec capitalisation conformément à l’article 1343-2 du code civil’;

Sur les demandes accessoires

Attendu que l’employeur qui succombe sur le licenciement doit supporter les dépens de première instance et d’appel’;

Attendu qu’il apparaît équitable en l’espèce d’allouer à Mme [J], en cause d’appel la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort

CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Pau en date du 20 octobre 2021 sauf en ce qui concerne le licenciement nul, les dommages et intérêts pour licenciement nul’ et les congés payés sur indemnité équivalente à l’indemnité compensatrice de préavis;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Chamvyle – Intermarché à payer à Mme [P] [J] les sommes suivantes’:

20 200 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;

4 715,86 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos’;

471,58 euros au titre des congés payés sur contrepartie obligatoire en repos’;

CONDAMNE la SAS Chamvyle – Intermarché à rembourser à Pôle Emploi les sommes dues à ce titre, dans la limite de 4 mois d’indemnités ;

DIT que les sommes dues au titre des créances salariales et l’indemnité conventionnelle de licenciement portent intérêts au taux légal à compter de la notification de la saisine du conseil des prud’hommes à l’employeur, les sommes dues au titre des dommages et intérêts portent intérêts au taux légal à compter de la décision qui les fixe, et ce avec capitalisation conformément à l’article 1343-2 du code civil’;

CONDAMNE la SAS Chamvyle-Intermarché aux dépens d’appel et à payer à Mme [P] [J] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Arrêt signé par Madame CAUTRES-LACHAUD, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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