Barème Macron : 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 21/04531

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Barème Macron : 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 21/04531
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRET DU 01 FEVRIER 2024

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/04531 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDXFS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 20/04140

APPELANTE

S.A.S. HAMON

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Eric FONTAINE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : DC188

INTIMEE

Madame [B] [J]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Montasser CHARNI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB69

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOST, Conseillère de la chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre

Madame Véronique BOST, Conseillère de la chambre

Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE

ARRET :

– contradictoire

– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [J] a été embauchée par la société Hamon, par contrat de travail à durée déterminée en date du 11 avril 2016, en qualité de comptable. Le contrat de travail s’est ensuite poursuivi pour une durée indéterminée.

La société Hamon exerce une activité de commerce de matériels et fournitures pour l’industrie du vêtement, et emploie moins de 11 salariés.

La convention collective applicable à la relation contractuelle était celle de la quincaillerie.

Le 2 janvier 2020, la société Hamon a remis en mains propres à Mme [J] une lettre de convocation à entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, fixé au 10 janvier 2020. La société lui a notifié dans le même temps une mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier en date du 22 janvier 2020, Mme [J] s’est vue notifier son licenciement pour faute grave.

Contestant le motif de son licenciement, Mme [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris.

Par jugement rendu le 15 février 2021, le conseil de prud’hommes de Paris, dans sa section commerce, a statué comme suit :

– fixe le salaire moyen brut mensuel de Mme [B] [J] à la somme de 3 255 euros

– requalifie le licenciement pour faute grave notifié à Mme [B] [J] en licenciement sans cause réelle et sérieuse

– condamne la SAS Hamon à payer à Mme [B] [J] les sommes suivantes :

*6 510 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

*651 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

*3 150 euros à titre d’indemnité de licenciement

*16 270 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

*1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– rappelle qu’au regard des dispositions des articles 1231 à 1231-7 du code civil, les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation du Conseil de prud’hommes et que les créances de nature indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision

– prononce l’exécution provisoire de droit de la présente décision conformément à l’article R 1454-28 du code du travail

– ordonne à la SAS Hamon de remettre à Mme [B] [J] les bulletins de paie conformes à la présente décision

– déboute Mme [B] [J] du surplus de ses demandes

– déboute la SAS Hamon de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– condamne la SAS Hamon aux entiers dépens.

La société Hamon a interjeté appel du jugement dont elle a reçu notification par courrier daté du 10 mai 2021 par déclaration déposée par voie électronique le 13 mai 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 22 mars 2022, la société Hamon demande à la cour de :

– la dire et juger recevable et bien fondée en son appel

– infirmer le jugement entrepris en l’ensemble de ses dispositions

Statuant à nouveau,

– dire et juger que le licenciement pour faute grave de Mme [J] est justifié

– la débouter en conséquence de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions

Subsidiairement,

– dire et juger que le licenciement de Mme [J] repose sur une cause réelle et sérieuse

– limiter en conséquence son indemnisation au paiement de l’indemnité de préavis des congés payés afférents et de l’indemnité conventionnelle de licenciement

Très subsidiairement,

– fixer le salaire mensuel moyen brut de Mme [J] à la somme de 3 000 euros

– réduire subséquemment à la somme de 6 000 euros l’indemnité de préavis de Mme [J]

– réduire subséquemment à la somme de 600 euros l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

– réduire subséquemment à la somme de 3 000 euros l’indemnité de licenciement

– limiter l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 3 000 euros, soit un mois de salaire, conformément au barème Macron

– dire et juger que les indemnités allouées porteront intérêt à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir

En tout état de cause,

– condamner Mme [J] à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner Mme [J] aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de Maître Fontaine, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 18 octobre 2021, Mme [J] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions

Y ajouter,

– condamner la société Hamon à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure et aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 20 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible immédiatement le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il appartient à l’employeur d’apporter la preuve de la gravité des faits fautifs retenus et de leur imputabilité au salarié.

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

« Nous avons eu à déplorer de votre part les agissements suivants, constitutifs de faute grave :

En votre qualité de comptable, vous vous êtes engagée, aux termes de votre contrat de travail, à observer la discrétion la plus stricte sur les informations confidentielles auxquelles vous avez accès à l’occasion ou dans le cadre de vos fonctions, et à ne les divulguer à quiconque.

Le 18 décembre 2019, nous avons été informés par vos collègues que vous leur aviez communiqué des informations confidentielles relatives aux éléments de rémunération des différents membres du personnel, aux conditions de défraiement de la Direction, ou encore au coût des prestations internet.

Vous avez accompagné la divulgation de ces informations de propos critiques à l’égard de la politique salariale et commerciale de la Direction, dans l’intention manifeste de semer le trouble et de démotiver vos collègues.

Vous avez dans le même temps sollicité un entretien auprès de Madame [L], Directrice Générale, pour exiger une revalorisation de votre rémunération, en l’informant que vous teniez un tableau comparatif des salaires.

Ces agissements constituent des manquements particulièrement graves à vos obligations contractuelles et mettent en cause la bonne marche de l’entreprise, comme ils compromettent de façon irrémédiable le rapport de confiance qui doit présider aux relations entre la Direction et la personne en charge de la comptabilité.

Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 10 janvier dernier ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.

Nous vous informons en conséquence que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité de celle-ci, votre maintien dans l’entreprise s’avère en effet impossible, y compris pendant la période de préavis.

Votre licenciement, sans indemnité de préavis et de licenciement, prend donc effet à compter du 22 janvier 2020, date d’envoi de la présente lettre.

La période non travaillée correspondant à votre mise à pied à titre conservatoire vous sera néanmoins rémunérée. »

La société soutient que le licenciement de Mme [J] est motivé par la violation caractérisée de l’obligation de confidentialité stipulée à son contrat de travail. Elle affirme que deux salariés sur neuf confirment que Mme [J] leur a divulgué le montant des rémunérations de leurs collègues, ainsi que le montant des honoraires versés au Président de la société.

Elle produit trois attestations de M. [W], Mme [L] et Mme [H], ces trois attestations ayant été établies en mai et juin 2020 après l’envoi par Mme [J] d’une lettre sollicitant des preuves étayant les griefs figurant dans la lettre de licenciement. La première indique de façon laconique « Madame [B] [J] (sic) m’a fait part en décembre 2019 de l’état des salaires des employés de la société Hamon et des frais de fonctionnement de la société notamment ceux attribués à Monsieur [E] ». L’attestation de Mme [H] n’est pas plus précise quant aux circonstances dans lesquelles Mme [J] aurait divulgué les salaires des employés de la société. Enfin l’attestation de Mme [L] n’évoque pas la divulgation des salaires mais une demande d’augmentation de salaire qu’aurait formulée Mme [J] et le fait que cette dernière aurait tenu un tableau Excel des rémunérations perçues par tous les salariés. M. [W] a rédigé une seconde attestation le 19 février 2021, postérieurement à la décision du conseil de prud’hommes, pour préciser tardivement que les divulgations reprochées à Mme [J] auraient eu lieu lors des pauses café et cigarettes. Aucune des attestations ne fait état des « propos critiques à l’égard de la politique salariale et commerciale de la Direction » auxquels la lettre de licenciement fait référence. Ces attestations, peu précises et circonstanciées, rédigées alors que Mme [J] avait sollicité des explications quant aux éléments dont disposait la société pour étayer les griefs énoncés dans la lettre de licenciement par des salariés encore en poste au moment de leur rédaction, sont insuffisantes à établir les griefs allégués. La cour relève, en outre, que le fait pour Mme [J] d’avoir établi un tableau des rémunérations n’est pas constitutif d’une faute grave et qu’il n’est pas fautif de solliciter une augmentation.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Au regard des bulletins de salaire produits, le salaire mensuel moyen de Mme [J] sera fixé à la somme de 3 000 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point et en conséquence quant au montant de l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et l’indemnité de licenciement.

En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, Mme [J], qui comptait plus de trois ans d’ancienneté dans une entreprise de moins 11 salariés, peut prétendre à une indemnité comprise entre 1 et 4 mois de salaire. Au regard de son âge au moment du licenciement (43 ans), de son ancienneté de plus de trois ans dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, et en l’absence d’élement sur sa situation postérieurement au licenciement, il convient de lui allouer, en réparation de son entier préjudice la somme de 9 000 euros.

Sur le remboursement des indemnités Pole Emploi

Les conditions d’application L. 1235-4 du code du travail étant réunies, il convient d’ordonner le remboursement des allocations de chômage versées au salarié dans la limite de 2 mois d’indemnités.

Sur les frais de procédure

La société Hamon sera condamnée aux dépens.

Elle sera également condamnée à payer à Mme [J] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu’il a fixé le salaire moyen brut mensuel de Mme [B] [J] à la somme de 3 255 euros et condamné la société Hamon à lui payer les sommes de :

* 6 510 euros à titre d’indemnité de préavis,

* 651 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 150 euros d’indemnité de licenciement

* 16 270 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

FIXE le salaire mensuel brut moyen de Mme [B] [J] à la somme de 3 000 euros,

CONDAMNE la société Hamon à payer à Mme [B] [J] les sommes de :

* 6 000 euros à titre d’indemnité de préavis,

* 600 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 000 euros d’indemnité de licenciement

* 9 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

DIT que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation en conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

ORDONNE le remboursement des indemnités chômage dans la limite de deux mois,

CONDAMNE la société Hamon aux dépens.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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