Bail d’habitation : 27 septembre 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01671

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Bail d’habitation : 27 septembre 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01671
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51A

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 27 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/01671 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UL65

AFFAIRE :

M. [V] [J]

C/

M. [L], [I] [M]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Janvier 2013 par le Tribunal d’Instance de COURBEVOIE

N° RG : 11-12-858

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 27/09/22

à :

Me Séverine CEPRIKA

Me Noémie CHARTIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [V] [J]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

ISRAEL

Représentant : Maître Séverine CEPRIKA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 110 –

Représentant : Maître Debborah-mélanie ABITBOL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

Monsieur [L], [I] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : Maître Noémie CHARTIER, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 50 – N° du dossier 21019

Représentant : Maître Dahbia CHALAL- FERTANE de la SELEURL LDCF AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1593 –

INTIME

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Juin 2022, Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat prenant effet le 1er août 2002, M. [L] [M] a consenti à M. [V] [J] un bail d’habitation portant sur un appartement situé au [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel de 3 431 euros, charges comprises.

Par acte d’huissier délivré le 28 septembre 2012, M. [M] a assigné M. [J] devant le tribunal d’instance de Courbevoie aux fins de :

– constater l’acquisition de la clause résolutoire prévue au bail et subsidiairement prononcer la résiliation,

– le condamner à lui payer la somme de 183 498, 68 euros au titre des loyers et charges impayés, outre 18 349,97 euros au titre de la clause pénale,

– dire que le dépôt de garantie lui restera acquis,

– ordonner la capitalisation trimestrielle des intérêts,

– le condamner à une indemnité d’occupation égale au montant du loyer outre les charges,

– ordonner l’exécution provisoire,

– le condamner aux dépens comprenant les frais du commandement et à payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 17 janvier 2013, le tribunal d’instance de Courbevoie a :

– condamné M. [V] à payer à M. [M] la somme de 170 744, 81 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2012, outre 17 074, 48 euros,

– prononcé la résiliation du bail à compter de ce jour,

– dit que M. [M] pourrait conserver le dépôt de garantie en paiement des sommes dues,

– ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil,

– condamné M. [V] aux dépens comprenant le coût du commandement de payer,

– ordonné l’exécution provisoire,

– rejeté les autres demandes.

Par déclaration reçue au greffe le 11 mars 2021, M. [J] a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance rendue contradictoirement sur incident le 27 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a :

– déclaré recevable l’appel interjeté par M. [J] le 11 mars 2021,

– débouté M. [M] de ses demandes,

– renvoyé l’affaire au 19 mai 2022 pour clôture et au 14 juin pour plaidoirie,

– débouté M. [M] de sa demande en paiement sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens de l’incident suivraient le sort de ceux de l’instance au fond.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 18 mai 2022, M. [J] demande à la cour de :

– le dire et juger recevable et bien fondé en ses demandes, fins, moyens et conclusions,

– constater la nullité de la signification de l’assignation introductive de l’instance (RG N°11-12-000858) en date du 28 septembre 2012,

– constater la nullité de la signification du jugement rendu le 17 janvier 2013 par le tribunal d’instance de Courbevoie (RG N°11-12-000858), en date du 13 mars 2013,

– constater la nullité du jugement rendu le 17 janvier 2013 par le tribunal d’instance de Courbevoie,

A titre subsidiaire :

– infirmer en toutes ses dispositions le concernant le jugement rendu le 17 janvier 2013 par le tribunal d’instance de Courbevoie à savoir en ce qu’il :

– l’a condamné à payer à M. [M] la somme de 170 744,81 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2012, outre 17 074,48 euros,

– a prononcé la résiliation du bail à compter du jugement,

– a dit que M. [M] pourrait conserver le dépôt de garantie en paiement des sommes dues,

– a ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil,

– l’a condamné aux dépens comprenant le coût du commandement de payer,

– a ordonné l’exécution provisoire,

Statuant à nouveau :

– constater la résiliation du contrat de bail et l’absence de dette locative due à M. [M],

– condamner M. [M] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre du préjudice moral subi,

– condamner M. [M] à lui payer la somme de 13 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 8 juin 2022, M. [M] demande à la cour de :

– le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes,

– dire et juger que la signification de l’assignation en première instance en date du 28 septembre 2012 était parfaitement régulière, de sorte que l’acte introductif d’instance n’était entaché d’aucune cause de nullité et ce, au motif que M. [J] ne fait aucunement état de l’existence d’un texte ou d’un grief,

– confirmer le jugement rendu le 17 janvier 2013 par le tribunal d’instance de Courbevoie dans toutes ses dispositions,

– rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions de M. [J],

– condamner M. [J] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance d’appel.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 9 juin 2022.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des conclusions signifiées le 10 juin 2022

Aux termes des articles 802 et 907 du code de procédure civile, les conclusions déposées postérieurement à l’ordonnance de clôture sont irrecevables.

M. [J] a signifié de nouvelles conclusions le 10 juin 2022, postérieurement à l’ordonnance de clôture prononcée le 9 juin 2022, sollicitant le rejet des conclusions signifiées par M. [M] le 8 juin 2022, sans solliciter la révocation de l’ordonnance de clôture.

Ces conclusions, signifiées postérieurement à l’ordonnance de clôture, sont irrecevables, tout comme les conclusions en réponse signifiées par M. [M], qui ne sollicite pas plus la révocation de l’ordonnance de clôture.

Sur la nullité des actes de procédures

M. [J] fait valoir que l’assignation et le jugement lui ont été délivrés selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile sans que l’huissier procède aux diligences suffisantes, en ne se rendant pas sur place et en ne procédant à aucune enquête de voisinage, outre que le bailleur avait connaissance de son adresse professionnelle puisqu’ils avaient échangé par courriel et que ses coordonnées professionnelles y apparaissaient, soulignant qu’au demeurant une simple recherche Google permettait de l’identifier au travers de sa société.

De son côté, M. [M] fait valoir que les diligences requises ont été effectuées, l’huissier ayant mis tous les moyens en ‘uvre pour tenter de rechercher M. [J], que ce dernier ne l’a pas informé de sa nouvelle adresse et qu’en réalité M. [J] a quitté le territoire français à la suite de la réception du commandement de payer visant la cause résolutoire, en sorte qu’il ne peut exciper de sa bonne foi.

Sur ce,

Aux termes de l’article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à qui l’acte doit être signifié n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l’huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte. Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l’huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l’acte objet de la signification.

Ainsi, la signification par procès-verbal de recherches infructueuses implique, selon l’article 659 du code précité que l’huissier de justice relate avec précisions les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte. De manière générale, il est établi que l’huissier de justice ne peut se contenter d’une vérification unique et formelle, mais doit mettre en ‘uvre plusieurs diligences élémentaires.

En l’espèce, tant l’assignation que le jugement, en date respectivement du 28 septembre 2012 et du 13 mars 2013, ont été signifiés selon les dispositions de l’article 659 du code de procédure civile à l’adresse du bail, où M. [J] ne résidait plus. Il ressort des deux procès-verbaux précités que l’huissier ne s’est pas rendu sur place, se contentant d’indiquer « le requis a restitué les clés et quitté les lieux suivant procès-verbal de constat dressé par l’Etude en date du 11 septembre 2012, rencontrée lors du constat, la gardienne de l’immeuble déclare ne pas connaître la nouvelle adresse du requis, les recherches sur les pages blanches sont restées infructueuses, mon mandant m’indique ne pas connaître la nouvelle adresse du requis », étant souligné que le procès-verbal de signification du jugement reprend mot pour mot les éléments figurant au procès-verbal de signification de l’assignation.

Ainsi, l’huissier se contente pour relater ses recherches, de se référer à ses actes précédents, ne mentionnant aucune diligence concrète hormis une recherche « sur les pages blanches », étant à cet égard observé que M. [J] démontre par la production d’une page Google que la simple mention de son nom permettait de retrouver au moins son adresse professionnelle, outre que celle-ci était connue de M. [M] puisqu’ils ont échangé de nombreuses fois par emails où apparaissait ses numéros de téléphone en France et en Israël notamment et où le nom de sa société apparaissait, en sorte que M. [M] disposait de l’adresse email, du numéro de portable en France et en Israël et de l’adresse professionnelle de M. [J] où les actes auraient pu être utilement signifiés.

En définitive, il ne résulte pas des éléments visés ci-avant plusieurs diligences de la part de l’huissier, en sorte que les investigations effectuées n’ont pas été suffisantes, puisque des investigations plus précises et plus approfondies auraient permis la notification des actes à M. [J].

Dès lors, les significations faites sur le fondement de l’article 659 encourent la nullité.

En vertu de l’article 114 du code de procédure civile, la nullité d’un acte de procédure ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité.

En l’espèce, l’irrégularité de la signification des actes a nécessairement causé un préjudice à M. [J] en le privant de la possibilité de présenter ses moyens de défense devant le premier juge, contrevenant dès lors à ses droits de la défense et caractérisant un grief.

En conséquence, l’assignation du 28 septembre 2012 et la signification du jugement du 13 mars 2013 sont nulles et ces nullités entraînent la nullité du jugement déféré.

Il est rappelé qu’en raison de la nullité du jugement, par suite de l’annulation de l’acte introductif d’instance et, subséquemment de l’absence d’effet dévolutif, l’appelant n’ayant conclu au fond qu’à titre subsidiaire, la cour ne peut statuer sur le fond du litige et doit renvoyer les parties à mieux se pourvoir.

Sur les demandes accessoires

M. [M], partie perdante, est condamné aux dépens d’appel.

La somme qui doit être mise à la charge de M. [M] au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d’appel par M. [J] peut être équitablement fixée à 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt rendu contradictoirement et mis à disposition au greffe,

Prononce la nullité de l’assignation du 28 septembre 2012 et de la signification du 13 mars 2013 du jugement,

Prononce en conséquence la nullité du jugement rendu le 17 janvier 2013 par le tribunal d’instance de Courbevoie,

Constate que la cour n’est pas saisie du fond du litige en l’absence d’effet dévolutif de l’appel,

Renvoie les parties à mieux se pourvoir,

Condamne M. [L] [M] aux dépens d’appel,

Déboute M. [L] [M] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [L] [M] à verser à M. [V] [J] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

 


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