Bail d’habitation : 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/05938

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Bail d’habitation : 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/05938
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 23/03/2023

****

N° de MINUTE : 23/316

N° RG 21/05938 – N° Portalis DBVT-V-B7F-T7CA

Jugement (N° 20-000561) rendu le 14 Octobre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Valenciennes

APPELANT

Monsieur [A] [J]

né le [Date naissance 9] 1967 à [Localité 19] ([Localité 13])

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 17]

Représenté par Me Dominique Gomis, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/21/013048 du 06/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)

INTIMÉES

Madame [U] [F]

intervenant volontairement suite à reprise d’instance

née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 11]

[Localité 15]

Madame [R] [F]

intervenant volontairement suite à reprise d’instance

née le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 14]

Madame [B] [F] épouse [H]

Intervenant volontairement suite à reprise d’instance

née le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 13]

Madame [O] [F]

intervenant volontairement suite à reprise d’instance

née le [Date naissance 4] 1982 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 12]

Madame [Z] [S]

intervenant volontairement suite à reprise d’instance

née le [Date naissance 10] 1995 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 16]

[Localité 14]

Représentés par Me Loïc Ruol, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 06 décembre 2022 tenue par Véronique Dellelis magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Catherine Menegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023 après prorogation du délibéré en date du 09 février 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 18 novembre 2022

****

Par acte sous seing privé du 14 avril 2015, Mme [X] [S] a consenti à M. [A] [J] un bail d’habitation portant sur un immeuble à usage d’habitation situé [Adresse 8] à [Localité 17], avec un loyer fixé à la somme de 0 euros par mois contre la réalisation de travaux de clôture, de travaux de toiture et de remise à neuf de l’intérieur de l’habitation.

Le 29 juillet 2019, un procès verbal de constat d’huissier concernant les conditions d’occupation de ce logement a été dressé sur la demande de la propriétaire, l’huissier instrumentaire ayant été autorisé à se rendre dans le logement par ordonnance sur requête.

Par acte d’huissier du 2 mars 2020, M. [A] [J] a été sommé de justifier de la souscription d’une assurance locative.

Par acte d’huissier du 11 juin 2020 dénoncé le 12 juin 2020 par courrier électronique adressé au Préfet du Nord, Mme [X] [S] a fait assigner M. [A] [J] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes afin d’obtenir, sous bénéfice de l’exécution provisoire, le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de bail aux torts du locataire, l’expulsion immédiate de ce dernier avec suppression du délai de 2 mois, ainsi que des occupants du logement sis [Adresse 8] à [Localité 17] si besoin avec l’aide de la force publique et d’un serrurier, la condamnation du locataire au paiement de la somme de 600 euros au titre d’une indemnité d’occupation mensuelle, jusqu’au départ des lieux, la condamnation du locataire au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile, la condamnation du locataire au paiement des entiers dépens de l’instance.

Suivant jugement contradictoire en date du 14 octobre 2021, auquel il est expressément renvoyé pour un exposé complet de la procédure antérieure et du dernier état des demandes et moyens des parties le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes a :

– déclaré Mme [X] [S] recevable en son action en résiliation et expulsion,

– prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail en date du 14 avril 2015 conclu entre Mme [X] [S] et M. [A] [J], et ce à compter de l’assignation du 11 juin 2020,

– ordonné qu’à défaut pour M. [A] [J] d’avoir libéré le logement sis [Adresse 8] à [Localité 17], au plus tard deux mois après la notification au préfet du commandement d’avoir à quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec, si besoin, le concours de la force publique et au transport des meubles laissés dans les lieux à ses frais dans tel garde-meuble désigné par l’expulsé ou à défaut par le bailleur,

– débouté M. [A] [J] d’une demande reconventionnelle en paiement à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance,

– ordonné une expertise avec pour mission après avoir préalablement pris connaissance des faits et documents de la cause, après avoir régulièrement convoquées les parties et leurs conseils :

– les entendre en leurs explications et réclamations,

– relater celles-ci de façon sommaire,

– prendre connaissance de tous document utiles à l’accomplissement de la mission, notamment du contrat de bail :

– se rendre sur les lieux,

– examiner l’immeuble objet du litige,

– déterminer sa valeur locative à la date de location ou à une date la plus proche aux fins de fixation du montant de l’indemnité d’occupation,

– décrire les désordres affectant le bien dont le locataire est la cause (destruction, malfaçons, défaut d’entretien),

– préconiser les travaux propres à y remédier) en indiquer le coût et la durée, de façon plus générale, indiquer les dommages subis par la bailleresse et fournir à la juridiction compétente tout élément de fait de nature à lui permettre de déterminer le chiffrage des préjudices,

– dit que l’expert désigné pourra, en cas de besoin, s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir simplement avisé les conseils des parties et le magistrat chargé du contrôle des expertise,

– dit que l’expert devra adresser un pré-rapport aux parties qui, dans les deux semaines de la réception lui feront connaître leurs observations (‘dires’),

– dit que l’expert, conformément aux dispositions de l’article 276 du code de procédure civile, répondra par écrit aux dires des parties en les intégrant de façon synthétique dans son rapport définitif,

– dit que l’expert devra déposer on rapport définitif au greffe du tribunal dans les SIX MOIS de sa saisine, sauf prorogation dûment sollicitée auprès du juge chargé du contrôle des opérations d’expertise, et en adresser une copie au conseils de parties,

– fixé à la somme de 1 000 euros le montant de l’avance à consigner à la régie de ce tribunal, par Mme [X] [S], dans le délai d’un mois il compter de la présente décision, à titre provisoire à valoir sur la rémunération de l’expert, sauf si elle bénéficie de l’aide juridictionnelle auquel cas les frais d expertise seront avancés par le trésor public,

– dit qu’à défaut de consignation ou de justification du bénéfice de l’aide juridictionnelle au service des expertisés dans le délai et selon les modalités imparties, la désignation de l’expert sera caduque, sauf décision de relevé de caducité qui ne pour a être prise par le juge chargé du contrôle des expertisés qu’au vu d’un motif légitime,

– dit que la juridiction de jugement pourra tirer toutes conséquences de droit du défaut de communication par les parties des documents à l’expert,

– dit qu’en cas d’empêchement, l’expert sera remplacé par ordonnance sur requête du juge chargé du contrôle des expertises,

– rappelé que la rémunération de l’expert sera établie dès le dépôt du rapport en fonction notamment de diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni,

– désigné en qualité de juge chargé du contrôle des expertises tout juge au tribunal judiciaire de Valenciennes aux fins de surveiller les opérations d’expertise et dit qu’il pourra être saisi sur requête, de tout incident,

– renvoyé l’affaire à l’audience du 7 avril 2022 à 14 h, le présent jugement valant convocation des parties,

– enjoint Mme [X] [S] à produire tout document manuscrit de sa main à une date contemporaine de celle figurant sur les documents contestés,

– enjoint les parties à comparaître personnellement le 2 décembre 2021 à 13h30 dans les locaux du tribunal judiciaire de Valenciennes au 18, place du 8 mai 1945 aux fins de composer sous la dictée du juge des échantillon d’écriture,

– dit que la présente décision sera notifiée par le greffe du tribunal à Monsieur le Préfet du Nord en application de l’article R. 412-2 du code des procédures civiles d exécution,

– réservé les frais irrépétibles et les dépens,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Par acte d’huissier en date du 29 octobre 2021, le jugement a été signifié à M. [A] [J] par un acte ayant fait l’objet d’un dépôt en l’étude de l’huissier.

M. [A] [J] a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 25 novembre 2021, sa déclaration d’appel critiquant chacune des dispositions de la décision entreprise.

[X] [S] a constitué avocat le 9 février 2022.

Toutefois, l’intimée est décédée le [Date décès 7] 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 905-2 du code de procédure civile, M. [A] [J] a notifié ses conclusions le 25 février 2022.

Par ordonnance en date du 10 mars 2022, le conseiller chargé de la mise en état a constaté l’interruption de l’instance du fait du décès de d'[X] [S].

Par conclusions de reprise d’instance transmises le 10 juin 2022, Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F] , Mme [O] [F] et Mme [Z] [S], qui seront éventuellement désignés dans la suite de l’arrêt sous l’appellation les consorts [F]-[S] ont notifié leur intervention volontaire à la procédure en leur qualité d’héritiers de la défunte.

Par ses dernières conclusions en date du 15 novembre 2022, M. [A] [J] demande à la cour de :

– infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Valenciennes, et, statuant à nouveau :

A titre principal,

– constater l’existence d’une promesse réciproque de vente entre Mme [X] [S] et M. [A] [J],

– constater l’aveu judiciaire de Mme [X] [S] dans sa requête déposée au tribunal de grande instance de Valenciennes le 6 septembre 2019 faisant état de l’existence de l’accord entre Mme [X] [S] et M. [A] [J] sur la vente au prix de 150 000 euros du bien immobilier sis au [Adresse 8] à [Localité 17] et du versement de la somme de 18 900 euros au titre des acomptes sur les 150 000 euros,

– constater l’engagement écrit de Mme [X] [S] de procéder au remboursement intégral des sommes perçues en cas d’échec de la vente du bien immobilier,

Par conséquent :

-constater la résiliation de plein droit du bail locatif à la date du 27 mai 2015, date de l’acceptation de la promesse réciproque de vente,

A titre subsidiaire,

– constater l’indécence du logement à la date de conclusion du bail en avril 2015,

Par conséquent :

– dire et juger Mme [X] [S] responsable de l’état indécent et vétuste du logement,

– prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs de la bailleresse,

En tout état de cause,

– infirmer la mesure d’instruction ordonnée par le juge de première instance, en l’espèce l’expertise judiciaire,

– user de son pouvoir d’évocation, et ainsi, :

– prononcer la résolution de la vente au prix de 150 000 euros du bien immobilier sis au [Adresse 8] à [Localité 17] conclue entre les parties le 27 mai 2015 aux torts exclusifs de la bailleresse eu raison de l’inexécution du contrat,

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S], en qualité d’héritiers de Mme [X] [S] à la restitution de la somme de 18 900 euros correspondants au remboursement des acomptes perçus par Mme [X] [S] conformément à l’engagement écrit pris par Mme [X] [S] lors de la promesse réciproque valant vente du bien,

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] en qualité d’héritiers de Mme [X] [S] au paiement de la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi par M. [A] [J],

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] es qualités d’héritiers de Mme [X] [S] au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution de l’obligation de vente,

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] en qualité d’héritiers de Mme [X] [S] à payer à M. [A] [J] la somme de 29 256 euros en remboursement des clôtures installées,

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] en qualité d’héritiers de Mme [X] [S] à payer à M. [A] [J] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dont distraction sera faite au profit de Me Dominique Gomis en application des dispositions relatives à l’aide juridictionnelle,

– condamner solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] en qualités d’héritiers de Mme [X] [S] aux dépens,

– débouter solidairement Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] en qualités d’héritiers de Mme [X] [S] de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

Par leurs dernières conclusions en date du 8 septembre 2022, les consorts [F]-[S] demandent à la cour de :

– constater la reprise d’instance par les consorts [F] et [S],

– constater que M. [A] [J] abandonne sa demande de restitution de la somme de 18 900 euros pour n’avoir pas été tranchée par le juge de première instance,

– déclarer M. [A] [J] irrecevable en sa demande d’infirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail pour ne pas avoir été invoqué dans ses premières conclusions au fond,

Subsidiairement le déclarer mal fondé,

En conséquence,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de bail et débouter M. [A] [J] de sa demande,

– déclarer M. [A] [J] irrecevable en sa demande tendant au remboursement de la clôture installée comme étant une demande nouvelle,

Subsidiairement,

– déclarer M. [A] [J] irrecevable en sa demande tendant au remboursement de la clôture installée comme étant prescrite,

En tout état de cause,

– débouter M. [A] [J] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner M. [A] [J] à verser aux parties intimées une indemnité procédurale de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens qui seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle.

Il est renvoyé aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé des demandes et des moyens des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Lors de l’audience, il a été indiqué que M. [A] [J] avait quitté le logement à la date du 30 novembre 2022.

MOTIFS :

Il convient à titre liminaire d’accueillir les consorts [F]-[S] en leur intervention volontaire à la procédure en qualité d’héritiers d'[X] [S].

Il sera précisé que M. [A] [J] a formé dans le dispositif de ses écritures diverses demandes tendant à ce que la cour ‘dise et juge’ ou ‘constate’ qui ne sont pas des demandes à proprement parler mais des simples rappels de moyens. Dès lors, la cour n’a pas à statuer par voie de dispositions spéciales sur ces différents chefs dans le cadre de son dispositif.

Sur la demande en résiliation du bail d’habitation du 14 avril 2015 :

Il résulte des pièces produites aux débats que suivant acte en date du 14 avril 2015, Mme [X] [S] a consenti à M. [A] [J] un bail d’habitation portant sur un immeuble à usage d’habitation situé [Adresse 8] à [Localité 17], avec réduction du loyer à la somme de 0 euros contre la réalisation de travaux de clôture, de travaux de toiture et de la remise à neuf de l’intérieur de l’habitation.

C’est sur la base de ce contrat que [X] [S] puis les consorts [F]-[S] ont sollicité la résiliation judiciaire du bail liant les parties et l’expulsion de M. [A] [J] en faisant valoir divers manquements contractuels de ce dernier, à savoir le défaut de prise en charge des réparations locatives, l’atteinte à la substance de la chose louée et le défaut de souscription d’une assurance garantissant les risques locatifs.

C’est également sur la base de ce contrat que le jugement entrepris a prononcé la résiliation judiciaire du bail liant les parties à compter de l’assignation et ordonné l’expulsion de M.[J], dispositions dont celui-ci demande l’infirmation au motif que le seul contrat liant les parties était une vente, dont l’existence démontrerait que M. [J] et [X] [S] avaient nécesairement convenu de la résiliation du bail antérieurement conclu.

Pour justifier de la réalité de cette vente, M. [J] avait essentiellement produit en première instance une lettre d'[X] [S] du 27 mai 2016 faisant état de son intention de vendre son immeuble à M. [J] pour le prix de 150 000 euros et plusieurs documents qui se présentaient comme des quittances par lesquelles [X] [S] reconnaissait avoir reçu diverses sommes versées mensuellement par M. [J] en acomptes sur une vente de son immeuble conclu entre les parties et moyennant le prix de 160 000 euros. Il sera rappelé que ces quittances ont été arguées de faux en première instance et que c’est dans ce contexte que le juge des contentieux de la protection a ordonné une vérification d’écritures, étant précisé à ce sujet qu’il ressort des conclusions des parties que cette mesure d’instruction a été effectivement réalisée à la suite du jugement querellé.

Les parties intimées font valoir que M. [J] s’est abstenu de formuler sa demande tendant à voir constater la résiliation conventionnelle du bail antérieurement conclu entre les parties dans ses premières conclusions du 25 février 2022 et qu’il est donc irrecevable à formuler une telle demande ultérieurement et ce au visa des dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile.

Cependant, en l’espèce, il convient de relever que la demande de M. [J] est nécessairement contenue dans ses premières conclusions d’appelant, par lesquelles il demandait l’infirmation du jugement en ce qu’il avait prononcé la résiliation judiciaire du bail et sollicitait la restitution des acomptes versés au titre de la vente dont il soutenait l’existence et pour laquelle il faisait valoir qu’elle correspondait au véritable état des relations contractuelles entre les parties, une telle vente ayant succédé au bail initialement conclu .

Il s’ensuit que cette demande doit être déclarée recevable.

Sur le fond, il convient d’observer que le dossier de M. [J] s’est enrichi en cause d’appel en ce sens que ce dernier a produit aux débats la requête par laquelle [X] [S] a obtenu du juge des requêtes la désignation d’un huissier pour procéder à la visite des lieux. Ladite requête en date du 7 mars 2019 pour laquelle Mme [S] était représentée par ses conseil était ainsi rédigée :

Monsieur [J] a effectivement occupé les lieux litigieux.

En contrepartie de cette occupation, et dans un second temps, Monsieur [J] versait une mensualité à Madame [S] sur le prix de vente de la maison fixé à la somme de 160 000 euros celle-ci variant chaque mois entre 300 et 600 euros.

En outre, Mme [S] signait tous les mois une reconnaissance de paiement rédigée par M. [J] par laquelle elle reconnaissait avoir perçu une somme d’argent liée au prix de vente de la maison.

Cette reconnaissance mentionnait également qu’à défaut de régularisation de la vente, les sommes ainsi versées à Mme [S] seraient reversées à M. [J].

En réalité, depuis plusieurs années, M. [J] dupe Mme [S] et n’a pas l’intention d’acquérir le bien litigieux pis encore il le dégrade au fil du temps.

Cette situation a atteint son paroxysme en fin d’année 2018 puisque depuis le mois de novembre 2018 M. [J] ne s’acquitte plus des mensualités à valoir sur le pris de vente.

Il ressort de ces déclarations faites par Mme [J] représentée par son conseil dans le cadre judiciaire que l’intéressée a reconnu que les relations contractuelles entre les parties s’étaient modifiées pour passer du bail au contrat de vente.

Il convient d’en conclure que l’intention commne des parties était ainsi de résilier le bail antérieur et de débouter les consorts [F] de leur demande de résiliation du bail du 14 avril 2015 ce dernier n’existant plus, concernant le logement sis [Adresse 8] à [Localité 17], et ce par infirmation sur ce point du jugement entrepris.

Sur la demande d’expulsion de M. [J] :

Une telle demande n’a plus en tout état de cause d’objet dès lors qu’il ressort des explications communes des parties données à l’audience que M. [J] a quitté le logement à la date du 30 novembre 2022.

Sur la demande de M. [J] tendant à la condamnation d'[X] [S] à la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance :

M. [J] ne conteste plus cette disposition du jugement entrepris dès lors qu’il soutient à titre principal que le bail conclu entre les parties n’existait plus.

Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [J] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance.

Sur les autres demandes :

Il sera précisé à titre liminaire qu’il a été démontré que les parties avaient abandonné le terrain contractuel du bail pour conclure une vente aux termes sur la vase d’un prix de 160 000 euros payable par mensualités d’un montant qui n’est pas complètement défini et pour une durée qui ne l’est pas davantage. M. [J] soutient à cet égard que la vente était parfaite par accord des parties sur le chose et sur le prix.

Cependant, cette vente qui suivant les pièces produites a été consentie sans exigibilité immédiate du prix, ce dernier étant payable par mensualités dont le montant n’a d’ailleurs pas été clairement défini. Il s’ensuit que la commune intention des parties est de conclure une forme de vente à terme pour laquelle M. [J] ne peut prétendre à sa validité puisqu’elle n’a pas été consentie par un acte athentique prévoyant les modalités de paiement du prix et notamment le nombre de mensualités devant être réglés . Il s’ensuit que M. [J] ne peut se prévaloir d’une vente parfaite dont la résiliation serait intervenue du fait de l’attitude d'[X] [S]. De surcroît, il ne ressort pas des éléments de la procédure que la résiliation de cette vente en réalité dépourvue de validité serait intervenue du fait d'[X] [S], alors que M. [J] ne prétend pas et ne justifie pas davantage avoir réglé des mensualités au titre de la vente au-delà du mois d’octobre 2018, [X] [S] ayant fait état dans sa requête d’un défaut de versement de toute mensualité à compter du mois de novembre 2018.

Dès lors les demandes des parties doivent être considérées comme une conséquence de l’anéantissement de la vente intervenue entre les parties, ces demandes étant formulées au titre des restitutions et remise des parties en leur état antérieur à cette convention faisant nécessaitement suite à cet anéantissement.

Sur la demande de M. [J] tendant au remboursement des acomptes sur la vente à hauteur de la somme de 18 900 euros :

Il a été indiqué ci-dessus que les termes de la requête aux fins de constat ont permis à la cour de conclure à l’existence d’une vente certes nulle conclue entre les parties et à la réalité de versements d’acompte au titre de cette vente.

Cependant, dès lors que cette requête ne contient aucun aveu précis par [X] [S] du montant des sommes qui auraient pu être réglées par M. [J], la requête se contentant d’évoquer des versements mensuels dans une fourchette de 300 à 600 euros et sans précision du point de départ desdites mensualités, et dès lors par ailleurs que [X] [S] a dénié en première instance la signature figurant sur les quittances et qui lui est attribuée, la vérification d’écritures décidée par le premier juge demeure parfaitement justifiée. Il résulte à cet égard des conclusions des parties intimées non contestées sur ce point que la mesure d’instruction a effectivement eu lieu à la date du 2 décembre 2021 avec réalisation d’ échantillons de signature.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a avant-dire droit sur la demande de restitution de la somme de 19 800 euros ordonné une vérification d’écriture, et ce sans qu’il y ait lieu pour la cour à évoquer en application des dispositions de l’article 568 du code de procédure civile.

Sur l’instauration d’une mesure d’expertise :

L’intervention d’un homme de l’art, pour chiffrer les éventuelles créances de réparation des propriétaires de l’immeuble dans le cadre de la remise des parties en leur état antérieur au contrat demeure également justifiée alors que les consorts [F]-[S] rapportent un commencement de preuve de dégradations commises par le constat d’huissier étabi par Maître [P] désigné par ordonnance sur requête le 29 juillet 2018, ce constat ayant énoncé que les extérieurs de la maison n’étaient pas entretenus , qu’il y avait la présence d’une végétation invasive mais que surtout, des cloisons avaient été détruites au regard des vestiges visibles de ces cloisons sur le sol et le plafond de la pièce de vie principale .

Par ailleurs, alors que M. [J] est nécessairement devenu occupant sans droit ni titre du logement, il convient de dire que c’est à bon droit que le jugement entrepris a par ailleurs inclus dans la mission d’expertise la détermination dela valeur locative du bien donné à bail et ce afin de fixer l’indemnité d’occupation due par M. [A] [J] depuis la date de son assignation en justice par [X] [S].

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

-avant-dire droit sur la demande d'[X] [S] aux droits de laquelle viennent les consorts [F]-[S], tendant à voir condamner M. [A] [J] au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour dégradation, ordonné une expertise judiciaire pour déterminer les dommages subis par l’immeuble sis [Adresse 8] à [Localité 17] et évaluer leur coût ;

-avant-dire droit sur la demande d'[X] [S] aux droits de laquelle viennent les consorts [F]-[S], tendant à voir condamner M. [A] [J] au paiement d’une indemnité d’occupation à compter de l’assignation du 11 juin 2020, inclus dans l’expertise judiciaire la détermination de la valeur locative de l’immeuble susvisé.

Sur les demandes de dommages et intérêts présentés par M. [A] [J] :

M. [A] [J] a formé dans ses dernières conclusions des demandes de dommages et intérêts soit une demande de dommages et intérêts à hauteur de 15000 euros pour résiliation fautive de la vente et une demande de dommages et intérêts à hauteur de 5000 euros pour préjudice moral.

Ces demandes n’ont pas été formulées dans les premières conclusions de M. [J] en date du 25 février 2022.

Si les demandes reconventionnelles sont recevables en cause d’appel au visa de l’article 567 du code de procédure civile , les demandes de M. [J] n’échappent pas à l’irrecevabilité prévue par les dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile qui énoncent que, à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Il convient de constater que cette irrecevabilité dans le dispositif de la présente décision, étant précisé de surcroît que M.[J] ne caractérise pas une résiliation fautive de la vente qui serait imputable à feu [X] [S].

Sur la demande en paiement du coût de la clôture ;

Cette demande n’encourt pas une irrecevabilité au titre du principe de l’irrecevabilité des demandes nouvelles en appel et ce dès lors que l’article 567 du code de procédure civile autorise les demandes reconventionnelles en appel.

Elle a par ailleurs été formulée dès les premières conclusions de M. [J].

Cependant, et alors que M. [A] [J] fonde sa demande sur une nullité ou résolution de la vente qui serait imputable à [X] [S], imputabilité qui ne ressort pas des éléments de la cause, et alors que la cour n’évoque pas sur le compte à faire entre les parties au titre de l’anéantissement de la vente, au titre des dégradations d’une part, et des améliorations d’autre part, il convient de déclarer la demande irrecevable en appel et d’inviter M. [J] à la reformuler devant le premier juge.

Sur les dépens et sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :

Il appartiendra au premier juge de statuer sur les dépens et sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance.

Il convient au regard de ce qui est jugé en cause d’appel et alors qu’aucune des parties ne peut prétendre avoir donné proposé une analyse exacte de leur situation juridique, de laisser à chacune des parties la charge de ses dépens d’appel.

Il y a lieu par conséquence de dire n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :

-avant-dire droit sur la demande de M. [A] [J] tendant à la condamnation des consorts [F] -[S] venant aux droits d'[X] [S] au remboursement de la somme de 18 900 euros, ordonné une vérification d’écritures ;

-avant-dire droit sur la demande d'[X] [S], aux droits de laquelle viennent les consorts [F]-[S], tendant à voir condamner M. [A] [J] au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour dégradation, ordonné une expertise judiciaire pour déterminer les dommages subis par l’immeuble sis [Adresse 8] à [Localité 17] et évaluer leur coût ;

-avant-dire droit sur la demande d'[X] [S], aux droits de laquelle viennent les consorts [F]-[S], tendant à voir condamner M. [A] [J] au paiement d’une indemnité d’occupation à compter de l’assignation du 11 juin 2020, inclus dans l’expertise judiciaire la détermination de la valeur locative de l’immeuble susvisé ;

Confirme les modalités de ces mesures d’instruction et dit n’y avoir lieu à évocation ;

Confirme enfin le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [A] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance ;

Infirmant pour le surplus le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Constate que le bail signé entre [X] [S] et M. [A] [J] a été résilié conventionnellement entre les parties et déboute par voie de conséquence Mme [U] [F], Mme [R] [F], Mme [B] [F], Mme [O] [F] et Mme [Z] [S] de ler demande en résiliation judiciaire du bail du 14 avril 2015 ;

Constate que la demande d’expulsion est devenue sans objet eu égard à la libération des lieux par M. [A] [J] intervenue le 30 novembre 2022 ;

Ajoutant au jugement entrepris,

Déclare les demandes de M. [A] [J] tendant à la condamnation des consorts [F]-[J] au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et de la somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts irrecevables :

Déclare la demande de M. [A] [J] tendant au paiement par les consorts [F]-[S] du montant de la facture de clôtures et dit qu’il appartiendra à l’intéressé de formuler une telle demande devant le premier juge ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d’appel ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.

Le Greffier Le Président

F. Dufossé V. Dellelis

 


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