Bail d’habitation : 22 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01778

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Bail d’habitation : 22 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01778
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 22//09/2022

****

N° de MINUTE : 22/820

N° RG 21/01778 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TQ7A

Jugement (N° 1119000186) rendu le 05 mars 2021 par le tribunal de proximité de Tourcoing

APPELANT

Monsieur [H] [R]

né le 27 décembre 1962 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Emilie Cheval, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Monsieur [K] [O]

né le 02 janvier 1963 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Sébastien Habourdin, avocat au barreau de Béthune substitué par Me Jean-Louis Capelle, avocat au barreau de Béthune

(bénéficie d’une aide juridictionnelle partielle numéro 591780022021004353 du 22/05/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)

Madame [Y] [F]

née le 11 décembre 1963 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Sébastien Habourdin, avocat au barreau de Bethune substitué par Me Capelle Jean Luc, avocat au barreau de Béthune substitué par Me Jean-Louis Capelle, avocat au barreau de Béthune

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 59178/02/21/009544 du 21/09/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)

DÉBATS à l’audience publique du 22 février 2022 tenue par Louise Theetten magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Louise Theetten, conseiller

Catherine Menegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022 après prorogation du délibéré en date du 15 septembre 2022 après prorogation du délibéré en date du 5 mai 2022(date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 14 janvier 2022

****

Par acte sous seing privé du 12 novembre 1999 et à effet du 1er décembre suivant, M. [H] [R] et son épouse ont donné à bail à M. [K] [O] et Mme [Y] [F] un immeuble individuel à usage d’habitation situé [Adresse 1], moyennant un loyer de 670,78 euros (4 512,50 francs) majoré d’une provision sur charges de 17,07 euros (112,50 francs).

Par acte d’huissier du 17 avril 2018, M. [R] a fait assigner M. [O] et Mme [F] devant le juge des référés du tribunal d’instance de Lille aux fins d’obtenir le constat de l’acquisition de la clause résolutoire, l’expulsion des locataires, leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 6 526,84 euros au titre des loyers impayés outre une indemnité d’occupation et des frais de procédure.

Pur ordonnance du 1er octobre 2018, le juge des référés du tribunal d’instance de Lille s’est déclaré incompétent au profit du juge des référés du tribunal d’instance de Tourcoing.

Par jugement contradictoire du 5 mars 2021, auquel il est renvoyé pour un plus ample rappel des éléments de fait et de procédure, le tribunal de proximité de Tourcoing a :

– dit qu’au regard de l’accord des parties, la présente décision est rendue au fond et non pas en référé,

– constaté que l’arrêté préfectoral déclarant l’immeuble, sis [Adresse 1], insalubre avec possibilité d’y remédier n’a pas été levé,

– rejeté la demande formulée par M. [R] tendant à voir constater ou prononcer la résiliation du bail d’habitation du 12 novembre 1999 pour acquisition de la clause résolutoire,

– rejeté les demandes en expulsion de M. [O] et Mme [F], et en condamnation de ceux-ci au paiement d’une indemnité d’occupation formulées par M. [R],

– constaté que M. [R] a manqué à ses obligations de délivrance d’un logement décent à l’égard de ses locataires, M. [O] et Mme [F],

– ordonné la diminution du montant du loyer dû par M. [O] et Mme [F] de 20 % pour la période du 1er septembre 2017 au mois de septembre 2019 inclus,

– dit qu’à compter du mois d’octobre 2019 et jusqu’au mois de mars 2020 inclus, le loyer est fixé à 0 euro,

– rappelé que, depuis le mois suivant la notification de l’arrêté d’insalubrité du 24 février 2020, le paiement du loyer est suspendu ce jusqu’à la levée de l’arrêté d’insalubrité après complète réalisation des travaux prescrits,

– condamné solidairement M. [O] et Mme [F] à verser à M. [R] la somme de 10 117,97 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision, au titre de l’arriéré de loyers arrêté au mois de février 2020,

– condamné M. [R] à réaliser les travaux prescrits par l’arrêté d’insalubrité du 24 février 2020 et annexés au présent jugement, ce dans le délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision,

– condamné M. [R] à verser à M. [O] et Mme [F] la somme de 6000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi,

– condamné M. [R] à rembourser à M. [O] et Mme [F] la somme de 2245,21 euros au titre de la facture d’électricité,

– ordonné la compensation, à due concurrence, des sommes dues réciproquement entre les parties

– autorisé M. [O] et Mme [F] à s’acquitter de leur dette en 23 mensualités de 78 euros chacune et une 24ème mensualité qui soldera la dette en principal, frais et intérêts,

– précisé que chaque mensualité devra intervenir avant le 20 de chaque mois et pour la première fois le 20 du mois suivant la signification de la présente décision,

– dit qu’à défaut du versement d’une seule mensualité, la totalité de ce qui reste dû deviendra de plein droit immédiatement exigible,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné M. [R] aux entiers dépens ainsi qu’au paiement à M. [O] et Mme [F] d’une indemnité procédurale de 1000 euros,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

M. [R] a relevé appel de cette décision par déclaration du 26 mars 2021, déclaration d’appel critiquant chacune des dispositions de la décision entreprise.

M. [O] et Mme [F] ont constitué avocat le 14 avril 2021.

Dans ses dernières conclusions en date du 10 novembre 2021 , M. [R] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du tribunal de proximité de Tourcoing du 5 mars 2021 en toutes ses dispositions,

En conséquence :

– débouter M. [O] et Mme [F] de l’ensemble de leurs demandes reconventionnelles, fins et conclusions,

– juger que la clause résolutoire contenue au bail est acquise depuis le 11 mars 2018 et que le bail est résilié depuis cette date,

– ordonner l’expulsion des locataires des lieux loués ainsi que de tout occupant de leur chef passé le délai de deux mois à compter du commandement de quitter les lieux qui sera délivré et ce avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est,

– condamner solidairement M. [O] et Mme [F] au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer depuis le 11 mars 2018 jusqu’à avril 2020, date de la notification de l’arrêté d’insalubrité,

– condamner solidairement M. [O] et Mme [F] à payer à M. [R] la somme de 22 561,60 euros au titre des loyers impayés et indemnités d’occupation arrêtés au 4 avril 2020, outre les intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,

– condamner solidairement M. [O] et Mme [F] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement M. [O] et Mme [F] aux entiers frais et dépens d’instance.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 20 août 2021, M. [O] et Mme [F] demandent à la cour de :

– déclarer M. [R] mal fondé en son appel,

– confirmer la décision entreprise,

Y ajoutant,

– condamner M. [R] à payer à M. [O] et Mme [F] la somme de 1800 euros sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais engagés en cause d’appel,

– condamner M. [R] aux entiers frais dépens de première instance et d’appel.

Il est renvoyé aux conclusions pour un exposé détaillé des demandes et des moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION:

Le présent arrêt est rendu sur le fondement des articles 6, 7 et 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et 1719 du code civil, 2 et 3 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent, 1240 du code civil, L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation dans sa version applicable au litige, 696 et 700 du code de procédure civile.

Si Mme [F] est la seule signataire du bail, les parties s’accordent sur la qualité de locataire de M. [O].

Sur l’état du logement :

L’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent, lequel s’entend d’un logement ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, doté des éléments d’équipement le rendant conforme à l’usage d’habitation et présentant les caractéristiques définies par le décret n°2002-120 du 30 janvier 2002.

Le bailleur est également obligé d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués.

En l’espèce, le logement a été pris à bail en 1999, il s’agit d’une maison individuelle occupée depuis plus de 20 ans par les locataires.

L’état des lieux d’entrée décrit un immeuble en bon état d’usage général. Certains des éléments d’équipement comme les meubles de cuisine et le carrelage mural de cette pièce de service, le papier peint de la salle à manger étant neufs ou excellents. Sont à relever toutefois, une auréole d’humidité sur le bas de mur mitoyen côté cheminée du séjour, la moquette de la chambre du premier étage côté rue qui ‘gondole un peu’, la moquette de la chambre du premier étage côté jardin qui présente quelques traces, le volet de la chambre 3 qui ne s’ouvre pas

Aussi, le premier juge ne pouvait retenir que généralement le qualificatif ‘bon’ décrit un état moyen.

Il n’est pas justifié de travaux pour traiter les causes de l’humidité constatée dans le séjour ni avant la prise à bail, ni après.

En septembre 2017, les locataires ont, par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 5 septembre, demandé au mandataire du bailleur, en charge d’assurer la gestion locative de l’immeuble, le remboursement d’une facture de la SASU D. KO d’un montant de 2245,21 euros relative au raccordement phase et neutre du disjoncteur principal aux tableaux à l’installation de 13 disjoncteurs, invoquant une urgence à la suite d’un court circuit les ayant privés d’électricité. Ils indiquaient en post scriptum qu’il leur avait été indiqué que l’installation n’était pas conforme.

Suivant constat d’huissier du 19 septembre 2019, dressé à la demande des locataires: les peintures et menuiseries de la façade sur rue sont en mauvais état ; à l’entrée dans l’habitation la plaque au sol permettant l’accès au compteur d’eau est rouillée et gondolée ; les murs de la pièce principale en rez de chaussée sont en très mauvais état et présentent les stigmates d’une humidité importante ; le chauffage du logement est assuré par des radiateurs électriques d’appoint, le convecteur gaz étant manifestement ancien ; plusieurs carreaux du puits de lumière sont fissurés ;  le plafond de la salle de bains et du couloir s’est effondré du fait d’une infiltration d’eau et les menuiseries bois de la salle de bains et des portes-fenêtres sont vétustes.

A la suite d’une visite de l’agence régionale de santé (l’ARS) du 14 novembre 2019, une procédure visant à faire constater l’insalubrité remédiable du logement a été mise en oeuvre.

Le rapport de visite, dont le contenu a été exactement retranscrit par le premier juge, description à laquelle il est expressément référé, met évidence des non conformités du logement au règlement sanitaire départemental en ce que le logement :

– est grevé d’humidité : infiltrations, condensation avec développement de moisissures et remontées telluriques. Au rez de chaussée, les murs présentent d’importantes traces d’humidité en lien avec des remontées telluriques. Dans la chambre du second étage, les traces d’humidité sont en lien avec le mauvais état du chéneau, lequel a déjà fait l’objet de réparation provisoire, et un problème de solin. Dans la salle de bains et le SAS, le toit terrasse a été dégradé par d’importantes infiltrations compte tenu de la faible pente de la toiture.

– n’est pas protégé contre les infiltrations d’air parasite. Sont relevés une absence d’isolation spécifique des toitures et de l’enveloppe du bâtiment et le défaut d’étanchéité à l’air de la porte d’entrée et de la fenêtre du salon munies de simple vitrage.

– les dispositifs de sécurité des personnes présentent un danger pour la sécurité du fait de leur composition, la plaque permettant l’accès au compteur d’eau est dangereuse de même qu’une latte de plancher affaissée de la chambre du 2ème étage

– la pièce du séjour est insuffisamment éclairée pour être considérée comme pièce principale

– le convecteur à gaz servant de chaudière n’est pas conforme et l’installation électrique non plus

– le logement n’est pas équipé en salon, cuisine, cabinet d’aisances et salle de bains d’un système de renouvellement de l’air adapté aux besoins d’une occupation normale

– l’état de la salle de bains ne permet pas de considérer qu’elle permet les opérations d’hygiène corporelle dans des conditions de salubrité normale (article 32 du règlement sanitaire départemental)

– l’installation de chauffage est insuffisante pour assurer un chauffage normal.

Le préfet du Nord a pris un arrêté le 24 février 2020 déclarant l’insalubrité remédiable du logement sans interdiction d’habiter, ledit arrêté a été notifié le 4 mars 2020. Il a été prescrit à M. [R] les travaux suivants:

– remise en état des accessoires de toiture et raccordement aux réseaux d’eaux pluviales

– remise en état de la toiture secondaire (étanchéité et stabilité)

– recherche et suppression des causes d’humidité

– réalisation d’une isolation thermique adaptée à la nature du bâtiment et ses caractéristiques

– remise en état des menuiseries pour en assurer l’étanchéité, le fonctionnement normal et la stabilité

– mise en sécurité de l’escalier d’accès aux étages et notamment pose/fixation correcte des garde-corps

– remplacement de la trappe d’accès au compteur d’eau par un dispositif adapté

– remise en état des planchers pour en assurer la stabilité et la planéité

– prise de toute disposition pour rendre habitable la pièce à usage de séjour

– remise en état des murs intérieurs, des sols et des plafonds détériorés par l’humidité ou dégradés

– remise en état des installations de chauffage et des systèmes d’évacuation des gazs de combustion par un professionnel qualifié

– suppression de l’accessibilité des peintures contenant du plomb en cas de diagnostic positif

– mise en place d’un système de ventilation général et permanent

– mise en sécurité de l’installation électrique avec fourniture d’une attestation par un professionnel qualifié

– remise en état de la salle de bains

– mise à disposition d’un moyen de chauffage suffisant et sécurisé adapté aux caractéristiques du logement et notamment à l’isolation pour assurer une température de 19° au centre des pièces quelles que soient les conditions climatiques extérieures.

S’agissant de l’insuffisance des moyens de chauffage, il résulte tant du rapport de l’ARS que du constat d’huissier du 14 novembre 2019 dressé par Maître [E] à la demande de M. [R] que la chaudière a été coupée par les locataires en 2012. Ils ont installé des convecteurs d’appoint. Toutefois, malgré le caractère ancien du convecteur chaudière à gaz au vu des photographies du constat du 19 septembre 2019, M. [O] et Mme [F] ne démontrent ni que ce mode de chauffage était insuffisant, ni qu’il ne fonctionnait plus. Dans ces conditions, l’imputabilité de l’insuffisance du mode de chauffage au bailleur n’est pas établie.

S’agissant de la non conformité de l’installation électrique, si le remplacement des interrupteurs, prises de courant, coupe-circuits, ampoules et tubes lumineux est à la charge des locataires en application du décret 86-712 du 26 août 1987, l’installation d’une protection différentielle n’est pas à la charge du locataire. Par ailleurs, compte tenu d’une prise à bail en décembre 1999 et au vu de la correspondance des locataires du 3 septembre 2017 relative à un court-circuit, du devis et de la facture SASU D.KO portant notamment sur l’installation de 13 disjoncteurs, est caractérisée la vétusté de l’installation électrique et sa non conformité de sorte qu’il ne peut être reproché aucune faute des locataires, la cause exclusive de la non conformité de l’installation électrique. Le constat d’huissier du 18 novembre 2019 n’établit pas plus que les locataires sont à l’origine d’une manipulation du plomb du compteur.

Les autres désordres constatés dans le rapport de l’ARS ont soit une cause tenant à la configuration des lieux : défaut d’éclairement du séjour, isolation et menuiseries, non conformité des dispositifs de retenue des personnes et défaut de système de renouvellement de l’air, et/ou des causes dont la suppression incombe au bailleur : électricité, infiltrations par remontées telluriques, désordres affectant la toiture y compris la toiture secondaire compte tenu du défaut de pente, et dangerosité des dispositifs de retenue des personnes et de la plaque d’accès au compteur dont les photographies démontrent sa vétusté et du plancher. En conséquence il n’est pas caractérisé que le défaut d’entretien courant du logement relevé dans le rapport de l’ARS est en lien avec les désordres constatés.

Le bailleur ne peut valablement prétendre qu’il n’a jamais été informé de l’état du logement pour s’exonérer de sa responsabilité alors que pour les non conformités tenant à la configuration des lieux il connaissait ladite configuration et que pour les autres, l’obligation de délivrance d’un logement décent, inexistante lors de la prise à bail, s’est appliquée au cours des baux renouvelés et que M. [R] ne justifie d’aucune démarche antérieure à la présente procédure afin d’effectuer les travaux d’entretien ou de mise en conformité du logement lui incombant s’agissant d’un bail ayant commencé à courir au 1er décembre 1999, et notamment à la suite de la correspondance relative au court-circuit et aux travaux d’électricité effectués par les locataires.

Il ne justifie notamment pas de travaux d’entretien qu’il lui incombait de réaliser indépendamment de toute demande des locataires: entretien de la toiture en particulier.

L’imputabilité des désordres, hors insuffisance de chauffage, au bailleur est donc établie.

Sur la demande de résiliation du bail :

Les motifs du jugement ayant déclaré recevable en application de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 la demande de résiliation de bail pour défaut de paiement des loyers ne sont pas critiqués par les parties. En l’absence de moyens d’ordre public à relever d’office ils seront adoptés par la cour.

Le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 11 janvier 2018 porte sur la somme de 3 742, 82 euros au titre des loyers et charges. L’historique de compte du 28 décembre 2017 démontre que cette somme correspond aux loyers et charges d’octobre 2017 à janvier 2018.

Le juge pouvant en application de l’article 24 V de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 vérifier d’office les éléments de la dette, il convient de déduire la somme totale de 19,50 euros, correspondant aux frais accessoires non justifiés à hauteur de 2,40 euros, et aux frais de relances et de recommandé, pourtant prohibés par l’article 4 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014, à hauteur de 17,10 euros.

Les causes du commandement de payer n’ont pas été régularisées dans le délai de deux mois prévu par la loi et expirant le 12 mars 2018 à minuit, le 11 mars étant un dimanche.

Pour échapper au constat de la résiliation du bail, les locataires opposent les dispositions de l’article 1719 1° lesquelles énoncent que lorsque les locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion.

Pour rejeter la demande de résiliation de bail, le premier juge a retenu, sur le fondement des articles 1719 1° précité et L. 521-2 II et suivant du code de l’habitation dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2005-1566 du 15 décembre 2005 applicable à la date de l’arrêté d’insalubrité, ces derniers articles prévoyant la suspension du bail d’habitation à compter du premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté d’insalubrité jusqu’au premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté de levée de l’insalubrité, que la résiliation du bail est contraire à cette suspension qui n’est pas levée en l’absence d’arrêté pris en ce sens et que le logement malgré l’absence d’interdiction d’habiter est impropre à l’habitation.

Or, il convient d’examiner l’état du logement, en tenant compte uniquement des désordres imputables au bailleur, à la date de la délivrance du commandement de payer et à celle de la réunion des conditions d’acquisition de la clause résolutoire.

A ces dates, aucun arrêté déclarant l’insalubrité du logement n’était adopté de sorte que le bail n’était pas suspendu par l’arrêté du 24 février 2020. D’une part, il sera relevé que l’arrêté préfectoral n’a pas emporté interdiction temporaire d’habiter. D’autre part, si certaines non conformités existaient lors de la prise à bail tels que le défaut d’éclairement suffisant d’une pièce et l’absence de mécanisme de renouvellement de l’air suffisant, l’état du logement constaté en septembre 2019 résulte de l’effet du temps et de l’absence de travaux d’entretien par le bailleur. Aucun élément aux débats, et notamment l’attestation de la soeur de M. [O], ne permet de dater l’effondrement du plafond de la salle de bains ou la date à laquelle les remontées telluriques sont devenues telles que les murs ont été dégradés, l’ampleur desdites dégradations évoluant dans le temps. Aussi, il ne peut être considéré qu’à la date de délivrance du commandement et de l’acquisition de la clause résolutoire le logement était impropre à l’habitation.

Par ailleurs, pour solliciter le constat de la résiliation du bail M. [R] n’allègue pas le caractère impropre du logement à l’habitation mais une dette de loyers et charges de sorte que la prohibition de l’article 1719 du code civil doit être écartée.

En l’absence de régularisation des causes du commandement de payer dans le délai de deux mois prescrit par la loi, les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies depuis le 13 mars 2018.

Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de constatation et de résiliation du bail. Il sera donc constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies depuis le 13 mars 2018.

M. [O] et Mme [F] ne demandent pas de délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire et comme il sera ci-après retenu il n’y a pas lieu d’accorder d’office de tels délais aux locataires. Le bail est donc résilié au 13 mars 2018.

Sur la demande en paiement des loyers impayés et indemnités d’occupation :

Le locataire est tenu au paiement des loyers et charges aux termes convenus.

L’occupation du logement postérieurement à la résiliation du bail cause au propriétaire un préjudice réparé par l’allocation d’une indemnité d’occupation.

Le premier juge a réduit le montant des loyers de 20% à compter du 1er septembre 2017 compte tenu des désordres électriques évoqués par les locataires dans leur lettre et pour lesquels le bailleur n’a apporté aucune réponse malgré un courrier du gestionnaire indiquant avoir pris en compte la demande et attendre la réponse de M. [R], il a ainsi rejeté une suppression du loyer à compter du 1er septembre 2016 comme demandé en première instance par M. [O] et Mme [F].

En cause d’appel, M. [O] et Mme [F] demandent la confirmation du jugement sur la réduction opérée de septembre 2017 à septembre 2019 et sont en application de l’article 954 du code de procédure civile réputés s’être appropriés les motifs du jugement dès lors qu’ils n’invoquent aucun moyen nouveau à l’appui de leur demande de confirmation.

Toutefois, leur demande de réduction du loyer pour la période considérée est fondée sur un manquement du bailleur à ses obligations découlant du bail lequel a uniquement trait aux défauts de l’installation électrique, lesquels sont, sans qu’il soit besoin d’apprécier si les conditions d’une réduction de loyer était réunies, insuffisants à justifier une telle réduction.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a ordonné la réduction du loyer de 20% de septembre 2017 au 1er septembre 2019 et M. [O] et Mme [F] seront déboutés de ce chef de demande.

A la date de la résiliation du bail, terme de mars 2018 inclus, selon décompte du 12 octobre 2020, la dette de loyers et charges s’élevait à la somme de 6 527,45 euros, après déduction de la somme 19,50 euros et de 0,60 euros du mois de février 2018, lesdites sommes étant injustifiées comme indiqué précédemment dans le paragraphe de motivation relatif à la demande de résiliation du bail.

A compter de la résiliation du bail, seule une indemnité d’occupation est due.

En suite de l’arrêté préfectoral du 24 février 2020 notifié en mars 2020 et en application de l’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation dans sa rédaction issue de la loi n°2009-323 du 25 mars 2009, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l’occupation cessent d’être dus à compter du premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté.

Compte tenu du caractère évolutif dans le temps des désordres en lien avec les infiltrations et l’humidité dans le logement, l’état du logement constaté en septembre 2019 ne permet pas retenir que des manifestations d’infiltrations et d’humidité étaient déjà existantes à la date de résiliation du bail. Toutefois, en considération de l’absence de démarches du bailleur à la suite de l’information portée à sa connaissance du court circuit intervenu en septembre 2017, du défaut d’éclairement suffisant du séjour préexistant à la prise à bail, de l’absence de mécanisme de renouvellement de l’air adapté préexistant également à la prise à bail, le montant de l’indemnité d’occupation sera fixée à la somme mensuelle de 500 euros à compter de la résiliation du bail, étant précisé qu’il n’est pas justifié de la réalisation de travaux avant l’arrêté du 24 février 2020 autres que des travaux sur l’installation électrique le 24 novembre 2019 selon facture de même date.

Il est rappelé qu’à compter du 1er avril 2020, premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté du 24 février 2020, l’indemnité d’occupation mensuelle cesse d’être due, M. [O] et Mme [F] demeurant uniquement tenus au paiement des charges jusqu’au premier jour du mois suivant la notification de l’arrêté levant l’insalubrité, ladite levée n’étant pas justifiée en cause d’appel.

Ainsi au 31 mars 2020, au vu du décompte du 12 octobre 2020, il est dû au titre des indemnités d’occupation mensuelles exigibles jusqu’au 31 mars 2020 la somme totale de 5281,37 euros ((24 X500)- la somme des paiements et sommes imputées au crédit du compte locatif).

Au total, M. [O] et Mme [F] sont redevables de la somme de 11 808,82 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation mensuelles impayées au 31 mars 2020. Le bail stipulant une clause de solidarité, M. [O] et Mme [F] seront solidairement condamnés au paiement de cette somme en deniers et quittances valables.

Il est relevé que M. [R] ne demande pas la condamnation de M. [O] et Mme [F] au paiement d’une indemnité d’occupation qui serait due postérieurement à la levée de l’arrêté du 24 février 2020 au cas où elle interviendrait.

Sur la demande de réalisation de travaux :

Compte tenu de la résiliation du bail et de la qualité d’occupants sans droit ni titre de M. [O] et Mme [F], leur demande de réalisation de travaux ne peut être accueillie.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il ordonné des travaux.

Sur la demande de dommages-intérêts au titre d’un préjudice de jouissance :

L’indemnisation d’un préjudice de jouissance résultant du manquement du bailleur à son obligation de délivrance d’un logement décent n’est pas subordonnée à une mise en demeur préalable;

Le premier juge a alloué à M. [O] et Mme [F] une somme de 6 000 euros à M. [O] et Mme [F] en réparation de leur préjudice de jouissance subi à compter de septembre 2017 jusqu’au jugement.

Compte tenu de la résiliation du bail, M. [O] et Mme [F] ne peuvent prétendre à l’allocation d’une indemnité réparant leur préjudice de jouissance pour la période postérieure à la résiliation du bail.

Il convient d’évaluer s’il existait un préjudice de jouissance à compter du 1er septembre 2017.

Si le caractère progressif et évolutif dans le temps des désordres en lien avec les infiltrations et l’humidité dans le logement ne permet pas de retenir compte tenu de l’état du logement constaté en septembre 2019 que des manifestations d’infiltrations et d’humidité étaient déjà existantes avant la résiliation du bail, l’incident électrique dangereux de septembre 2017 en lien avec la non conformité de l’installation électrique et sa vétusté, l’absence de démarches de M. [R] pour mettre au normes cette installation à la suite de l’information portée à sa connaissance, le défaut d’éclairement suffisant du séjour lequel a une cause structurelle, l’absence de mécanisme de renouvellement de l’air adapté ayant également une cause structurelle justifient d’allouer une somme de 750 euros à M. [O] et Mme [F] en réparation du préjudice de jouissance subi du 1er septembre 2017 jusqu’à la résiliation du bail.

Le jugement sera infirmé sur les dommages-intérêts et M. [R] sera condamné à payer la somme de 750 euros à M. [O] et Mme [F].

Sur la demande de remboursement de la facture de travaux d’électricité :

Si, en application des articles 6 et 1144 du code civil, ce dernier article dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige, le locataire pour effectuer les travaux nécessaires dans le logement incombant audit bailleur doit en principe avoir été autorisé judiciairement à se substituer au bailleur après l’avoir mis en demeure de les exécuter, le locataire qui a exécuté, de sa propre initiative, des travaux incombant au bailleur, sans l’avoir mis préalablement en demeure de les exécuter, est toutefois en droit de demander le remboursement dès lors que les travaux présentent un caractère urgent.

En l’espèce, au vu de la facture SASU D.KO du 2 septembre 2017 et du devis du 1er septembre 2017 détaillant une prestation de raccordement phase et neutre du disjoncteur principal aux tableaux, l’installation de 13 disjoncteurs et la main d’oeuvre et le déplacement nécessaires et du courrier recommandé adressé le 4 septembre 2017, il est établi la réalité du court circuit intervenu le vendredi 1er septembre 2017 ainsi que la nécessité de procéder en urgence à des travaux sur l’installation afin que le logement soit alimenté en électricité pendant le week-end du 2 septembre 2017, date de réalisation des travaux, sans que M. [O] et [F] aient eu le temps de prévenir le bailleur ou son mandataire alors que EDF est intervenu avant la société pour tenter de réparer l’installation.

L’urgence à la veille d’un week-end et compte tenu de l’ampleur des désordres d’électricité est ainsi caractérisée et dispensait M. [O] et Mme [F] de mettre en demeure le bailleur.

En outre, le montant de la facture est adapté aux prestations nécessaires et effectuées par la société SASU K.DO, étant relevé que cette société n’a pas à nouveau procédé au remplacement du disjoncteur principal qui selon la correspondance du 3 septembre 2017 a été réalisée le 1er septembre par EDF mais à son raccordement et a installé des protections sur l’ensemble de l’installation.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné M. [R] à payer à M. [O] et Mme [F] la somme de 2 245,21 euros en remboursement de la facture.

Sur la compensation des créances respectives des parties et les délais de paiement :

Il sera ordonné la compensation des créances respectives des parties comme indiquée au présent dispositif.

Après compensation, le montant de la dette des locataires demeure élevée et compte tenu de leurs ressources évaluées mensuellement à la somme de 1890 euros au vu de l’avis d’imposition respectif de M. [O] et Mme [F], de la fiche de paye de septembre 2020 de M. [O] (calcul à partir du net imposable cumulé) et du relevé de prestations servies par pôle emploi à Mme [F] de septembre 2020 à août 2021, ils ne sont manifestement pas en mesure de s’acquitter de celle-ci dans le délai de 36 mois ouvert par la loi.

Il n’y a pas lieu de leur accorder d’office des délais de paiement.

Par ailleurs, en considération des besoins de M. [R], qui est un particulier, le jugement sera infirmé en ce qu’il a accordé des délais de paiement sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil, et M. [O] et Mme [F] seront déboutés de ce chef de demande.

Sur les mesures accessoires :

Succombant principalement, M. [O] et Mme [F] seront condamnés aux dépens de première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, et d’appel.

L’équité commande de dire n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, qu’en appel.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné M. [R] à payer à M. [O] et Mme [F] la somme de 2 245,21 euros au titre de la facture d’électricité ;

Infirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Constate que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire du bail du 12 novembre 1999 conclu entre d’une part M. [K] [O] et Mme [Y] [F] et d’autre part M. [H] [R] et portant sur le logement sis [Adresse 1] sont réunies depuis le 13 mars 2018 ;

Ordonne l’expulsion de M. [K] [O] et Mme [Y] [F] ainsi que tous occupants de leur chef des lieux sus-désignés à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à quitter les lieux et au besoin avec le concours de la force publique;

Condamne solidairement M. [K] [O] et Mme [Y] [F] à payer à M. [H] [R] en deniers et quittances valables la somme de 11 808,82 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation mensuelles impayés au 31 mars 2020, décompte arrêté au 12 octobre 2020, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Condamne M. [H] [R] à payer à M. [K] [O] et Mme [Y] [F] la somme de 750 euros en réparation de leur préjudice de jouissance subi du 1er septembre 2017 à la résiliation du bail ;

Ordonne la compensation, à due concurrence, des sommes dues réciproquement entre les parties ;

Dit n’y avoir lieu à accorder d’office des délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire à M. [K] [O] et Mme [Y] [F] ;

Déboute M. [K] [O] et Mme [Y] [F] de leur demande de réduction du loyer, et de leur demande de condamnation de M. [H] [R] à réaliser des travaux dans le logement;

Déboute M. [K] [O] et Mme [Y] [F] de leur demande de délais de paiement fondée sur l’article 1345-3 du code civil ;

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu’en cause d’appel ;

Condamne M. [K] [O] et Mme [Y] [F] aux dépens de première instance et d’appel.

Le GreffierLe Président

H. PoyteauV. Dellelis

 


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