Bail d’habitation : 22 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/03939

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Bail d’habitation : 22 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/03939
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N° RG 22/03939 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OKQJ

Décision du Juge des contentieux de la protection de nantua en référé du 25 avril 2022

RG : 12-21-0031

S.A. LYONNAISE DE BANQUE

C/

[C]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 22 Mars 2023

APPELANTE :

La LYONNAISE DE BANQUE, Société Anonyme au capital social de 260 840 262 euros, inscrite au Registre du commerce et des sociétés de LYON sous le numéro 954 507 976, dont le siège social est sis [Adresse 4], poursuite et diligences de son dirigeant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Antoine ROUSSEAU de la SELARL B2R & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 781

INTIMÉE :

Mme [Z] [C] divorcée [E]

née le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 5] ([Localité 5])

[Adresse 3]

[Localité 1]

Signification de la déclaration d’appel le 29 juin 2022 à domicile

Défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 07 Février 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Février 2023

Date de mise à disposition : 22 Mars 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Bénédicte BOISSELET, président

– Karen STELLA, conseiller

– Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Par acte sous seing privé du 14 septembre 2020, la SA Lyonnaise de Banque a donné à bail un local à usage d’habitation sis [Adresse 3] à [Localité 1] aux époux [E]. Le loyer d’un montant mensuel principal de 900 euros est accompagné d’une provision mensuelle sur charges d’une montant de 150 euros.

Les loyers n’étaient pas réglés régulièrement.

Suivant assignation en référé du 7 octobre 2021, la société Lyonnaise de Banque a assigné en référé [J] [E] et [Z] [C] épouse [E] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Nantua.

En cours d’instance, la bailleresse s’est désistée de ses demandes contre [J] [E] faute de preuve de son engagement dans le bail, en dirigeant ses demandes contre Madame [E], laquelle n’a pas comparu ni été représentée lors de la dernière audience sur renvoi.

Par ordonnance du 25 avril 2022, le juge des référés a’:

Constaté le désistement d’instance à l’encontre de [J] [E] ;

Condamné [Z] [C] épouse [E] à payer à la SA Lyonnaise de Banque la somme provisionnelle de 8 434,33 euros au titre des loyers et charges impayés au 17 novembre 2021 échéance de novembre incluse ;

Débouté la SA Lyonnaise de Banque de sa demande de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail ;

Déclaré son incompétence sur la demande subsidiaire au titre du prononcé de la résiliation du bail ;

Débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné [Z] [C] épouse [E] aux dépens de l’instance.

Le juge a statué sur les fondements des articles 834 et 835 du Code de procédure civile et retenu en substance que’:

[Z] [E] n’a pas contesté être titulaire du bail litigieux ;

Le décompte des impayés n’a pas été contesté. La dette ne souffre d’aucune contestation sérieuse ;

Le bail prévoyait une clause résolutoire en cas d’impayés ;

Le commandement de payer du 28 avril 2021 ne vise pas ladite clause et ne contient pas les mentions 1°, 4°, 5° et 6° de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989. Il ne satisfait pas aux conditions de validité et ne peut produire d’effet ;

La demande de prononcé de la résiliation judiciaire du bail excède les pouvoirs juridictionnels du juge des référés ;

Il ne sera pas fait droit aux demandes d’expulsion et d’indemnité d’occupation.

Le 31 mai 2022, le conseil de la SA Lyonnaise de Banque a interjeté appel de l’ordonnance en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire et en ce que le juge s’est déclaré incompétent pour prononcer la résiliation du bail.

La procédure a été orientée à bref délai suivant les articles 905 à 905-2 du Code de procédure civile et les plaidoiries fixées au 7 février 2023 à 9 heures.

La déclaration d’appel et des conclusions ont été signifiées à Madame [E] le 29 juin 2022 à domicile à la personne de sa mère ayant accepté de recevoir l’acte. Madame [E] n’a pas constitué avocat. L’arrêt sera rendu par défaut.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 juin 2022, la S.A Lyonnaise de Banque demande à la Cour de’:

INFIRMER l’ordonnance du juge des référés en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire et en ce qu’il s’est déclaré incompétent pour prononcer la résiliation du bailleresse.

Vu l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989,

PRONONCER la résiliation de plein droit en date du 28 juin 2021, le bail conclu le 14 septembre 2020 au vu de la clause résolutoire.

A titre subsidiaire,

En application des articles 1224 et 1227 du Code civil :

PRONONCER la nullité à défaut de résiliation du bail à la date du’«’sic’» jugement ;

ORDONNER l’expulsion de Madame [E] et tout occupant de son chef avec au besoin le concours de la force publique ;

CONDAMNER Madame [C] épouse [E] à lui payer la somme de 8 434,33 euros au titre des loyers, charges, indemnités d’occupation dus au 17 novembre 2021.

Pour la période postérieure une indemnité d’occupation correspondant à la valeur du loyer applicable outre charges et taxes jusqu’au départ effectif des lieux, outre la somme de 443,30 euros au titre des frais et émoluments énoncés au commandement du 28 avril 2021,

CONDAMNER Madame [E] à lui verser la somme de 2’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance.

A l”appui de ses prétentions, l’appelante fait notamment valoir que’:

elle a mis en demeure Madame [E] de payer la somme de 3 150 euros pour les loyers d’octobre et novembre 2020 et janvier 2021. En vain, le courrier recommandé avec accusé de réception n’ayant pas été retiré. Le 28 avril 2021, le commandement de payer a été délivré. Il visait la clause résolutoire et portait sur la somme de 4 443,90 euros.

le délai de deux mois a été visé et la CCAPEX a été avisée de la signification du commandement de payer.

aucun apurement de la dette n’a été entrepris dans les deux mois. Les impayés se sont élevés à 6 300 euros au 13 juillet 2021 et à 8 434,33 euros au 17 novembre 2021. Elle a dû assigner le 7 octobre 2021. Elle a appris que les époux [E] avait divorcé le 11 janvier 2021. Monsieur [E] a informé le bailleur que son ex-épouse avait fait une fausse signature électronique. Madame [C] a informé par mail du 30 mars 2022 qu’elle partirait le 18 avril 2022, ce qu’elle n’a pas fait ;

le juge a relevé un moyen d’office non soulevé par Madame [E] et sans l’inviter à produire ses observations. Il a manqué à son devoir de respecter le principe du contradictoire. S’il l’avait invitée à s’expliquer, elle aurait pu lui indiquer que le bail contenait un article VIII sur la clause résolutoire, que son commandement de payer visant la clause résolutoire informait bien du délai de deux mois pour apurer la dette, qu’à défaut, une procédure en résiliation/expulsion pouvait être engagée, qu’il était possible de saisir le fonds de solidarité pour le logement dont l’adresse est dûment apparente outre qu’il est possible de solliciter des délais de paiement en justice ;

l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 a bien été respecté.

Sur les demandes subsidiaires, Madame [E] a commis une fraude. Le bail n’était pas régulier. Dans certains cas, le juge doit passer outre une contestation superficielle ou dilatoire et prononcer la nullité du bail et à défaut la résiliation du bail à la date du «’sic’» jugement.

Pour l’exposé des moyens développés par les parties, il sera fait référence conformément à l’article 455 du Code de procédure civile à leurs écritures déposées et débattues à l’audience du 7 février 2023 à 9 heures.

A l’audience, les conseils des parties ont pu faire leurs observations et/ou déposer ou adresser leurs dossiers respectifs. Puis, l’affaire a été mise en délibéré au 22 mars 2023.

En cours de délibéré, la Cour a demandé par RPVA le 6 mars 2023 la pièce n°4 dans son entièreté puisque seule la première page recto figurait dans le dossier de pièces de la SA Lyonnaise de Banque. Cela a été fait le jour même.

MOTIFS

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la Cour «’constater’» ou «’dire et juger’» ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du Code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Sur la constatation de la résiliation du bail d’habitation et ses conséquences de droit

Selon l’article 834 du Code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

En matière d’acquisition de plein droit de la clause résolutoire, la condition d’urgence est toujours virtuellement considérée comme établie, l’occupation devenant ipso facto sans droit ni titre.

En application de l’article 24 I de la loi du 6 juillet 1989 «’toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. »

Le commandement de payer doit contenir à peine de nullité’:

1° la mention que le locataire dispose d’un délai de deux mois pour payer sa dette,

2° le montant mensuel du loyer et des charges,

3° le décompte de la dette,

4° l’avertissement qu’à défaut de paiement ou d’avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s’expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d’expulsion,

5° la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l’adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière,

6° la mention de la possibilité pour le locataire de saisir à tout moment la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du Code civil.

La Cour constate que le premier juge a soulevé d’office des moyens juridiques sans solliciter les observations notamment de la requérante, la Lyonnaise de Banque, en considérant que le commandement de payer ne contenait pas certaines mentions à peine de nullité et qu’il ne pouvait pas produire effet. Ce faisant, il a commis un manquement à son devoir tiré de l’article 16 du Code de procédure civile.

Or, l’appelante, en sa qualité de bailleresse, démontre à hauteur d’appel que son commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 28 avril 2021, dont il n’est pas contesté qu’elle figurait bien au bail litigieux, satisfaisait bien à toutes les exigences formelles à peine de nullité par l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

Le premier juge, qui a dû comme la Cour n’être destinataire que de la première page du commandement de payer sans avoir cru nécessaire de solliciter la pièce dans son entièreté, a commis une erreur d’appréciation puisque le commandement de payer visant la clause résolutoire du bail en date du 28 avril 2021 contenait bien les mentions exigées contrairement à ce qu’il a considéré.

La Cour infirme l’ordonnance dont appel en toutes ses dispositions et statuant à nouveau’:

constate la résiliation de plein droit du bail liant la société Lyonnaise de Banque à Madame [Z] [C] divorcée [E] en date du 14 septembre 2020 à effet au 28 juin 2021 ;

autorise l’expulsion de Madame [C] divorcée [E] et tout occupant de son chef et de ses biens garnissant le local d’habitation situé [Adresse 3] à [Localité 1] à défaut pour elle d’avoir libéré volontairement les lieux passé un délai de deux mois à compter d’un commandement d’avoir à quitter les lieux avec au besoin le concours de la force publique et d’un serrurier.

La SA Lyonnaise de Banque n’a pas dévolu à la Cour le chef de l’ordonnance qui a d’ores et déjà condamné Madame [C] divorcée [E] à lui payer la somme provisionnelle de 8 434,33 euros au titre des loyers, charges, indemnités d’occupation dus au 17 novembre 2021. Ce chef d’ordonnance est par conséquent définitif. La Cour n’en est pas saisie.

En revanche, la Cour, compte tenu de la constatation de la résiliation du bail, fait droit à la demande de la société Lyonnaise de Banque de condamnation de Madame [C] à lui payer à compter de novembre 2021 jusqu’à la date de libération effective des lieux concrétisée par la remise des clefs, une indemnité d’occupation mensuelle correspondant à la valeur du loyer applicable augmenté des charges et taxes qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi normalement en précisant qu’il s’agit d’une provision.

En effet, en application de l’article 835 al 2 du Code de procédure civile, le juge des référés peut toujours accorder une provision lorsque l’obligation à paiement n’est pas sérieusement contestable, ce qui est le cas en l’espèce en tant que conséquence de droit de la résiliation d’un bail d’habitation lorsque l’occupant reste sans droit ni titre dans les lieux.

Sur les demandes accessoires

L’article 491, alinéa 2, du Code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L’article 696 dudit code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En équité, selon l’article 700 du Code de procédure civile, le juge peut allouer une indemnité pour les frais non compris dans les dépens en la mettant à la charge de la partie condamnée aux dépens sauf décision contraire et motivée.

La Cour constate que les chefs d’ordonnance portant sur des frais irrépétibles et les dépens de première instance ne lui ont pas été dévolus dans la déclaration d’appel. Ils sont donc définitifs.

[Z] [C], succombant à hauteur d’appel, doit être condamnée aux dépens d’appel qui comprendront également la somme de 443,30 euros au titre des frais et émoluments énoncés au commandement du 28 avril 2021,

En équité, la Cour rejette la demande de la SA Lyonnaise de Banque au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, celle-ci n’ayant communiqué au juge des référés qu’un commandement de payer visant la clause résolutoire ne comportant pas toutes les pages, communication de pièce imparfaite qu’elle a réitérée à hauteur d’appel. Sa carence est directement à l’origine de la nécessité d’interjeter appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l’appel :

Infirme l’ordonnance déférée sur le rejet de la demande de constatation de la résiliation du bail d’habitation, de condamnation provisionnelle à une indemnité d’occupation et d’expulsion ;

Statuant à nouveau sur ces points :

constate la résiliation de plein droit du bail liant la SA Lyonnaise de Banque à Madame [Z] [C] divorcée [E] en date du 14 septembre 2020 a effet au 28 juin 2021 ;

autorise l’expulsion de Madame [Z] [C] divorcée [E] et tout occupant de son chef et des biens garnissant le local d’habitation situé [Adresse 3] à [Localité 1] à défaut pour elle d’avoir libéré volontairement les lieux passé un délai de deux mois à compter de la signification d’un commandement d’avoir à quitter les lieux avec au besoin le concours de la force publique et d’un serrurier ;

condamne [Z] [C] divorcée [E] à payer à la SA Lyonnaise de Banque à titre provisionnel une indemnité d’occupation mensuelle correspondant à la valeur du loyer applicable augmenté des charges et taxes qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi normalement,à compter de novembre 2021 jusqu’à la date de libération effective des lieux concrétisée par la remise des clefs à la bailleresse ;

rappelle que les meubles seront mis aux frais de l’expulsée en un lieu désigné et à défaut ils seront laissés sur place ou entreposés avec obligation de les retirer dans un délai fixé par voie réglementaire ;

Y ajoutant,

Condamne [Z] [C] divorcée [E] aux entiers dépens d’appel qui comprendront également la somme de 443,30 euros au titre des frais et émoluments énoncés au commandement du 28 avril 2021;

Rejette la demande de la SA Lyonnaise de Banque au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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