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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 22 MARS 2023
N° 2023/ 127
N° RG 22/06441
N° Portalis DBVB-V-B7G-BJKUN
S.A. LOGIREM
C/
[F] [R]
[V] [M] divorcée [R]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Stéphane GALLO
Me Frédéric AMSELLEM
Me Adeline POURCIN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité d’AUBAGNE en date du 20 Avril 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-20-0002.
APPELANTE
S.A. LOGIREM
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège sis [Adresse 2]
représentée par Me Stéphane GALLO, membre de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur [F] [R]
né le [Date naissance 1] 1981, demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Frédéric AMSELLEM, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Christine DISDIER, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [V] [M] divorcée [R]
née le [Date naissance 4] 1983 à [Localité 7] (54), demeurant [Adresse 8]
représentée par Me Adeline POURCIN, membre de la SARL ADELINE POURCIN AVOCAT, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Les 24 et 30 septembre 2009, Monsieur et Madame [R] ont conclu un bail d’habitation avec la SA LOGIREM portant sur un logement situé [Adresse 3] à [Localité 6].
Le 13 juillet 2018, un commandement de payer la somme de 2 205,76 € au titre des loyers et charges impayés et de justifier de l’occupation des lieux a été adressé aux locataires par remise à étude.
Le 6 septembre 2018, un procès-verbal de constat d’abandon des lieux a été dressé par Maître [E] et, par acte d’huissier en date du 20 septembre 2018, la SA LOGIREM a sollicité, par voie de requête, le constat de la résiliation du bail consenti aux époux [R] du fait de l’inoccupation des lieux en vue de reprendre les lieux abandonnés.
Selon ordonnance sur requête du 8 octobre 2018, le président du tribunal d’instance d’AUBAGNE a constaté l’abandon des lieux et la résiliation du bail, a ordonné la reprise des lieux par la SA LOGIREM et a condamné les époux [R] à régler leur dette locative arrêtée au 31 juillet 2018.
Par courrier en date du 14 septembre 2020, Monsieur [R] a formé opposition à l’ordonnance précitée.
Par jugement en date du 20 avril 2021, le tribunal de proximité d’AUBAGNE a déclaré non avenue l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018, a constaté l’irrecevabilité des demandes au fond, a dit qu’il n’y avait lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et a condamné la SA LOGIREM aux dépens.
Par déclaration au greffe en date du 19 mai 2021, la SA LOGIREM a interjeté appel de ce jugement afin qu’il soit réformé en toutes ses dispositions. Elle demande à la Cour de déclarer recevable la signification de l’ordonnance sur requête comme ayant été réalisée dans le délai de deux mois, de déclarer recevable la saisie-attribution pratiquée, de débouter Monsieur [R] de l’ensemble de ses demandes et de dire que l’opposition formée par Monsieur [R] à l’encontre de l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 a été formée hors délai. Elle demande, en outre, à la Cour de dire que la décision est opposable à Madame [M] [V], de dire que Monsieur [R] est redevable de l’intégralité des sommes qui lui sont réclamées, de le condamner à lui verser la somme de 7 088,51 €, arrêtée au 12 octobre 2020, la somme de 600 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.
A l’appui de son recours, elle fait valoir :
que la signification de l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 est intervenue dans le délai de deux mois, ayant été réalisée le lundi 10 décembre 2018 dans la mesure où il n’était pas possible de le faire le jour de l’expiration du délai, à savoir le samedi précédent.
que la saisie-attribution du 5 mars 2020 a été régulièrement signifiée à personne le 6 mars 2020 ce qui a permis de prolonger le délai d’opposition dont disposait Monsieur [R] jusqu’au 24 juillet 2020 dans la mesure où celui-ci a expiré pendant la période juridiquement protégée en raison de l’état d’urgence sanitaire, de sorte que l’opposition formée par l’intimé, le 14 septembre 2020, a été faite hors délai.
que Monsieur [R] demeure débiteur d’une dette locative à hauteur de la somme de 7 088,51 € dans la mesure où il s’est engagé, aux termes du bail signé le 30 septembre 2009, aux côtés de son ex-épouse.
que la dénonce de la saisie-attribution n’avait pas à faire mention du délai d’opposition à l’ordonnance sur requête mais qu’elle comporte bien la mention du délai d’un mois dans lequel doit être effectuée toute contestation de la saisie-attribution pratiquée de sorte que Monsieur [R] n’est pas fondé à mettre en cause la régularité de cette dénonce.
Monsieur [R] conclut à la confirmation du jugement rendu par le tribunal de proximité d’AUBAGNE le 20 avril 2021 en toutes ses dispositions. Il demande à la Cour de débouter la SA LOGIREM de l’ensemble de ses demandes, de la condamner à lui verser la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens d’appel.
Il soutient :
qu’il n’a jamais été avisé de l’existence de l’ordonnance rendue le 8 octobre 2018 puisqu’il n’a jamais été destinataire d’une signification régulière relativement à cette ordonnance.
que la dénonce de la saisie-attribution, réalisée le 6 mars 2020, ne fait pas mention du délai d’opposition à l’ordonnance du 8 octobre 2018 de sorte que cette dénonce n’a pas pu faire courir le délai d’opposition.
qu’il n’a jamais signé de contrat de bail avec la SA LOGIREM, que sa signature a été imitée par son ex-épouse et qu’il n’a jamais habité le logement de sorte qu’il ne peut être débiteur des loyers dus au titre de la location de l’appartement litigieux.
qu’il n’a acquiescé à la saisie-attribution que dans le seul but de débloquer son compte bancaire.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que, les 24 et 30 septembre 2009, Monsieur et Madame [R] ont conclu un bail d’habitation avec la SA LOGIREM portant sur un logement situé [Adresse 3] à [Localité 6] ;
Que le 13 juillet 2018, un commandement de payer la somme de 2 205,76 € au titre des loyers et charges impayés et de justifier de l’occupation des lieux a été adressé aux locataires par remise à étude ;
Que le 6 septembre 2018, un procès-verbal de constat d’abandon des lieux a été dressé par Maître [E] et, par acte d’huissier en date du 20 septembre 2018, la SA LOGIREM a sollicité, par voie de requête, le constat de la résiliation du bail consenti aux époux [R] du fait de l’inoccupation des lieux afin de reprendre les lieux abandonnés ;
Que selon ordonnance du 8 octobre 2018, le président du tribunal d’instance d’AUBAGNE a constaté l’abandon des lieux et la résiliation du bail, a ordonné la reprise des lieux par la SA LOGIREM et a condamné les époux [R] à régler leur dette locative arrêtée au 31 juillet 2018 ;
Que par courrier en date du 14 septembre 2020, Monsieur [R] a formé opposition à l’ordonnance précitée ;
Attendu qu’aux termes de l’article 1er du décret n° 2011-945 du 10 août 2011 relatif aux procédures de résiliation de baux d’habitation et de reprise des lieux en cas d’abandon, peut être formée par requête la demande tendant à voir constater la résiliation du bail en vue de la reprise des locaux abandonnés ;
Que sur le fondement des dispositions de l’article 5 du décret précité, une expédition de l’ordonnance revêtue de la formule exécutoire est signifiée, à l’initiative du bailleur, au locataire et aux derniers occupants du chef du locataire connus du bailleur ;
Que l’ordonnance est cependant non avenue si elle n’a pas été signifiée dans un délai de deux mois ;
Qu’en application des dispositions de l’article 6 du même décret, le locataire ou tout occupant de son chef peut former opposition à l’ordonnance ;
Que l’opposition est formée dans un délai d’un mois suivant la signification de l’ordonnance par déclaration ou remise adressée au greffe ;
Qu’il résulte des dispositions de l’article 642 du Code de procédure civile que le délai qui expirait normalement un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant ;
Qu’en application des dispositions de l’article 1er et de l’article 2 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020, toute formalité prescrite à peine d’irrecevabilité qui aurait dû être accomplie pendant la période allant du 12 mars au 23 juin 2020 inclus sera réputée avoir été faite à temps si elle a été effectuée dans le délai légalement imparti à compter du 24 juin 2020 ;
Que sur le fondement des dispositions de l’article R. 211-3 du Code des procédures civiles d’exécution, la dénonciation d’une saisie-attribution doit, notamment, comporter l’indication du délai d’un mois dans lequel toute contestation de l’acte doit être formée ;
Attendu que l’ordonnance sur requête rendue par le tribunal de proximité d’AUBAGNE en date du 8 octobre 2018 relève des dispositions du décret n°2011-945 du 10 août 2011 puisqu’elle a constaté l’abandon des lieux donnés à bail, la résiliation du bail conclu entre la SA LOGIREM et les époux [R] et a ordonné la reprise des lieux par la société bailleresse ;
Attendu que la SA LOGIREM entend obtenir la réformation du jugement rendu le 20 avril 2021 par le tribunal de proximité d’AUBAGNE en ce qu’il a déclaré non avenue l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 ;
Qu’elle fait valoir, à l’appui de cette prétention, que l’opposition formée par Monsieur [R] à l’encontre de cette ordonnance aurait été formée au-delà de ce délai d’un mois ;
Attendu, en effet, que Monsieur [R] a formé opposition à l’ordonnance du 8 octobre 2018 par courrier en date du 14 septembre 2020 ;
Que cette ordonnance lui avait été signifiée le 10 décembre 2018 ;
Que cette signification devait pourtant être réalisée avant le 8 décembre 2018 ;
Qu’elle a donc été signifiée au-delà du délai de deux mois applicable en l’espèce ;
Attendu, néanmoins, que le 8 décembre 2018 était un samedi ;
Que le délai de signification était donc prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant ;
Qu’il s’agissait du lundi 10 décembre 2018 ;
Que la signification de l’ordonnance sur requête doit donc être réputée avoir été réalisée dans le délai de deux mois applicable en l’espèce ;
Attendu que l’acte de signification du 10 décembre 2018 prévoyait que si la signification n’avait pas été faite à personne, l’opposition serait recevable jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles, en tout ou partie, les biens du débiteur ;
Que cette première mesure d’exécution est intervenue le 5 mars 2020 sous la forme d’une saisie-attribution pratiquée sur le compte bancaire de Monsieur [R] ;
Que cette saisie-attribution a été régulièrement dénoncée à personne le 6 mars 2020 ;
Que la dénonciation de la saisie-attribution comporte, en effet, la mention du délai d’un mois dans lequel la contestation de l’acte peut être réalisée ;
Que cette dénonciation n’avait, en revanche, pas à faire mention du délai permettant de former opposition à l’ordonnance sur requête dans laquelle elle puise son fondement ;
Que le délai d’un mois dont Monsieur [R] disposait pour former opposition à l’ordonnance a donc expiré le 6 avril 2020 pendant la période juridiquement protégée en raison de la crise sanitaire, laquelle a pris fin le 23 juin 2020 ;
Qu’un nouveau délai d’un mois a donc commencé à courir à compter du 24 juin 2020 et a expiré le 24 juillet 2020 ;
Que l’opposition formée, en date du 14 septembre 2020, par Monsieur [R] à l’encontre de l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 est donc irrecevable car réalisée hors délai ;
Qu’il convient donc de réformer le jugement rendu le 20 avril 2021 par le tribunal de proximité d’AUBAGNE en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition formée par Monsieur [R] et non avenue l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 ;
Que cette ordonnance sur requête reprend donc ses pleins effets ;
Attendu qu’il sera alloué à la SA LOGIREM, qui a dû engager des frais irrépétibles pour défendre ses intérêts en justice, la somme de 600 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que Monsieur [R], qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,
INFIRME le jugement rendu par le Tribunal de proximité d’AUBAGNE le 20 avril 2021 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT l’opposition formée, en date du 14 septembre 2020, par Monsieur [R] à l’encontre de l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 irrecevable ;
DIT que l’ordonnance sur requête du 8 octobre 2018 reprend ses pleins effets ;
CONDAMNE Monsieur [R] à verser à la SA LOGIREM la somme de 600 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
LE CONDAMNE aux dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIERE LEPRESIDENT