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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 22 MARS 2023
N° 2023/ 120
N° RG 21/03934
N° Portalis DBVB-V-B7F-BHDYZ
[L] [O]
C/
[W] [G]
[U] [G]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Marjorie RIDEAU
Me Lionel ALVAREZ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge des contentieux de la protection de FREJUS en date du 08 Février 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-19-675.
APPELANTE
Madame [L] [O]
née le [Date naissance 4] 1968 à [Localité 8] (13), demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Marjorie RIDEAU, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMES
Monsieur [W] [G]
né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 9] (77), demeurant [Adresse 2]
Madame [U] [G]
née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 6] (16), demeurant [Adresse 2]
représentés par Me Lionel ALVAREZ, membre de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte sous seing privé daté du 11 décembre 2013, avec effet au 17 décembre 2013, Monsieur et Madame [G] ont consenti à Madame [O] un bail d’habitation non meublé pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction, portant sur une maison d’habitation de quatre pièces, correspondant au lot de copropriété n° 638, situé dans la résidence « [Adresse 7] ), moyennant paiement d’un loyer mensuel de 1 039 €, outre une provision sur charges de 60 €.
Se plaignant d’un chauffage défectueux affectant le logement et d’un préjudice de jouissance consécutif, par exploit d’huissier daté du 24 juin 2019, Madame [O] a assigné les époux [G], en réparation, devant le tribunal d’instance de FREJUS. Elle demandait au tribunal de dire que les bailleurs avaient manqué à leurs obligations, notamment celle d’assurer à leur locataire la jouissance paisible du bien loué, de les condamner à lui verser la somme de 5 400 € au titre de son préjudice de jouissance, celle de 69,12 € au titre de son préjudice matériel, celle de 3 000 € au titre de son préjudice moral et celle de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.
Par jugement en date du 8 février 2021, le Tribunal de proximité de FREJUS a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les défendeurs, débouté Madame [O] de l’intégralité de ses prétentions, condamné la requérante à verser aux époux [G] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et l’a condamnée aux entiers dépens de la procédure.
Par déclaration au greffe en date du 16 mars 2021, Madame [O] a interjeté appel de ce jugement. Elle demande à la Cour d’infirmer le jugement rendu par le Tribunal de proximité de FREJUS du 8 février 2021 en ce qu’il l’a déboutée de l’intégralité de ses prétentions, l’a condamnée à verser aux époux [G] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et l’a condamnée aux entiers dépens de la procédure. Elle sollicite que Monsieur et Madame [G] soient déboutés de toutes leurs demandes, condamnés solidairement à lui verser la somme de 5 400 € en réparation de son préjudice de jouissance, de 69,12 € en réparation de son préjudice matériel, de 3 000 € en réparation de son préjudice moral et de 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d’appel.
A l’appui de son recours, elle fait valoir :
que ses bailleurs ont manqué à leur obligation de fournir un logement décent dans la mesure où la température minimale de 18° C n’était pas atteinte en permanence, en raison de pannes récurrentes.
qu’ils ne peuvent s’exonérer de leur responsabilité en affirmant avoir réalisé les réparations nécessaires ou que les pannes ne leur étaient pas imputables dans la mesure où il s’agit d’une obligation de résultat.
qu’ils ne peuvent davantage s’exonérer de leur responsabilité en arguant d’un cas de force majeure dans la mesure où un vice de construction ne constitue pas une telle circonstance.
que les époux [G] ont également manqué à leur obligation d’assurer la jouissance paisible de la chose louée car elle a été contrainte de supporter des températures très basses au cours de trois hivers et même d’acheter un chauffage d’appoint ce qui lui a occasionné un préjudice de jouissance et un préjudice matériel.
que l’ensemble de ces manquements ont eu un impact sur sa santé physique et mentale et ont généré chez elle lassitude et énervement, constitutifs d’un préjudice moral.
Monsieur et Madame [G] concluent à la confirmation du jugement entrepris, en toutes ses dispositions. Ils demandent donc à la Cour de débouter Madame [O] de l’ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel.
Ils soutiennent :
qu’ils n’ont pas manqué à leur obligation de fournir un logement décent car le bien loué comportait bien une installation permettant un chauffage normal et que celle-ci était en bon état de fonctionnement.
qu’ils n’ont pas davantage manqué à leur obligation d’assurer la jouissance paisible du logement loué car ils ont correctement entretenu le logement en réglant toutes les factures d’entretien, y compris celles qui demeuraient à la charge de la locataire.
que ne peut leur être reprochée la non-réalisation d’autres travaux d’entretien puisqu’ils en ignoraient la nécessité car Madame [O] ne les a pas mis en demeure de réaliser ces travaux et avait souscrit un contrat avec une société d’entretien, à même de traiter l’ensemble des pannes.
que les dysfonctionnements récurrents affectant le système de chauffage sont, en tout état de cause, la conséquence d’une conception hâtive du réseau de chauffage lors de la construction, ce qui caractérise un cas de force majeure.
qu’il est possible que Madame [O] ait subi une gêne en raison des pannes de chauffage mais que celles-ci ne leur sont pas imputables.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que, par acte sous seing privé en date du 11 décembre 2013, avec effet au 17 décembre 2013, Monsieur et Madame [G] ont consenti à Madame [O] un bail d’habitation non meublé pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction, portant sur une maison d’habitation de quatre pièces, correspondant au lot de copropriété n° 638, situé dans la résidence « [Adresse 7] ), moyennant paiement d’un loyer mensuel de 1 039 €, outre une provision sur charges de 60 € ;
Qu’à partir du mois d’octobre 2014, Madame [O] a commencé à se plaindre de problèmes de chauffage récurrents ;
Attendu que, sur le fondement des dispositions de l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ;
Qu’un décret en Conseil d’Etat définit le critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en ‘uvre échelonnée ;
Que, selon ce même article, le bailleur est obligé de délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement et d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués ;
Attendu que l’article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 dispose que le logement doit comporter des équipements de chauffage en bon état d’usage et de fonctionnement ;
Que l’article 3 du décret précité dispose que le logement loué doit comporter une installation permettant un chauffage normal ;
Attendu que l’article R. 111-6 du Code de la construction et de l’habitation dispose que les équipements de chauffage des logements compris dans un bâtiment d’habitation doivent permettre de maintenir à 18° C la température au centre des pièces ;
Que le bailleur est seulement obligé de fournir au locataire un logement répondant aux caractéristiques précitées, sans que l’obligation de maintenir à 18° C la température au sein du logement puisse être considérée comme une obligation de résultat ;
Attendu que l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dispose que le locataire doit prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives ;
Que le décret n° 87-712 du 26 août 1987 relatif aux réparations locatives précise que l’entretien annuel de la chaudière, le changement éventuel des pièces de fonctionnement, le remplacement des bilames, pistons, membranes, boîtes à eau, de l’allumage piézo-électrique, des clapets, des joints des appareils à gaz, le rinçage et le nettoyage des corps de chauffe et tuyauteries sont à la charge du locataire ;
Attendu que l’attestation d’entretien de la pompe à chaleur établie par la société SAVELYS, le 30 avril 2014, fait état d’ « essais et contrôles concluants » et donc d’un bon état de fonctionnement du système de chauffage à cette date ;
Que les interventions suivantes ont révélé des réparations à effectuer, notamment la réinitialisation, le réarmement du disjoncteur, la vérification du fonctionnement pression température à la suite de l’intervention du 17 octobre 2014, le nettoyage du filtre à tamis à la suite de l’intervention du 14 janvier 2015 et le nettoyage et rinçage du détecteur de débit d’eau encrassé à la suite de l’intervention du 3 mai 2017 ;
Que ces menues réparations étaient à la charge de la locataire ;
Attendu que les interventions de la société SAVELYS ont également mis en lumière des réparations à effectuer, à la charge des bailleurs, notamment le désembouage du circuit de chauffage et le nettoyage du filtre à tamis lors de l’intervention du 4 février 2015, le remplacement du récepteur du thermostat lors de l’intervention du 28 octobre 2016, une intervention au niveau du thermostat lors de l’intervention du 4 janvier 2017, le dépannage du filtre lors de l’intervention du 23 janvier 2017, un second désembouage de l’installation lors de l’intervention du 30 novembre 2017 et la réparation d’une fuite d’eau lors de l’intervention du 15 février 2018 ;
Que les bailleurs ont pris en charge l’ensemble de ces réparations, qui leur incombaient, dans un délai raisonnable ;
Attendu qu’il ressort, en outre, du rapport d’expertise contradictoire réalisé par le cabinet POLE DE [Localité 8] 2, en date du 17 juillet 2018, que les désordres affectant le système de chauffage provenaient du décollement des limailles et des boues restées collées tout au long du réseau et nécessitaient un nettoyage de toutes les canalisations de chauffage ;
Que les bailleurs ont supporté le coût des interventions réalisées à la suite de ce rapport d’expertise alors même que certaines d’entre elles relevaient d’une prise en charge par la locataire ;
Attendu que les courriers adressés par l’assureur protection juridique de Madame [O] les 6 septembre et 30 octobre 2018 ne permettent pas d’établir un quelconque manquement des bailleurs à leurs obligations légales ou contractuelles relativement au système de chauffage ;
Attendu, de surcroît, que l’attestation établie le 29 septembre 2020 par Madame [R] ne fait état que de dysfonctionnements du système de chauffage postérieurement au départ de Madame [O] du logement loué et ne permet donc pas de démontrer l’existence de tels dysfonctionnements au cours de l’occupation du logement ;
Attendu qu’il résulte de tout ce qui précède que les bailleurs n’ont pas manqué à leur obligation de fournir un logement décent, c’est-à-dire équipé d’un système de chauffage suffisamment performant, dans la mesure où ils ont réalisé l’ensemble des réparations préconisées par la société d’entretien et par le rapport d’expertise contradictoire dans le but de permettre à la locataire de chauffer convenablement le logement ;
Attendu, de plus, que Madame [O] se contente, pour démontrer que Monsieur et Madame [G] ont manqué à leur obligation de lui garantir la jouissance paisible du logement, d’alléguer que la température au sein du logement était durablement inférieure à 18° C ;
Attendu, néanmoins, que pour fonder ces allégations, l’appelante se contente de fournir des relevés météorologiques et des attestations de témoins relatifs aux températures extérieures, lors des périodes d’occupation du logement loué sans démontrer pour autant que la température au sein du logement était durablement inférieure à 18° C ;
Qu’il n’est, ainsi, pas établi que les époux [G] ont manqué à leur obligation d’assurer à leur locataire la jouissance paisible du logement donné à bail ;
Attendu que, sur le fondement des dispositions de l’article 1240 du Code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;
Que l’octroi de dommages-intérêts nécessite donc la démonstration d’une faute, d’un préjudice subi et d’un lien de causalité entre les deux ;
Attendu que Madame [O] réclame les sommes de 5 400 € en réparation de son préjudice de jouissance, de 69,12 € en réparation de son préjudice matériel et de 3 000 € en réparation de son préjudice moral ;
Attendu, néanmoins, que dans la mesure où aucun manquement ou fait fautif n’a été retenu à l’encontre des époux [G], l’engagement de leur responsabilité et l’indemnisation des préjudices allégués sont en conséquence exclus ;
Attendu qu’il sera alloué aux époux [G], qui ont dû engager des frais irrépétibles pour défendre leurs intérêts en justice, la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que Madame [O], qui succombe, supportera les dépens d’appel;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de proximité de FREJUS le 8 février 2021 ;
Y ajoutant,
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE Madame [O] à verser aux époux [G] la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
LA CONDAMNE aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT