Bail d’habitation : 21 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18957

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Bail d’habitation : 21 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18957
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRET DU 21 AVRIL 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/18957 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVNQ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Octobre 2022 -Président du TJ de PARIS – RG n° 22/02708

APPELANT

M. [S], [L] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

INTIMEE

S.A.S. SOCIÉTÉ MEISSONNIER-WAGRAM prise en la personne de son représentant légal,

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Valérie FIEHL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1294

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 mars 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Florence LAGEMI, Président,

Rachel LE COTTY, Conseiller,

Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Marie GOIN

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence LAGEMI, Président et par Marie GOIN, Greffier, lors de la mise à disposition.

Par acte du 9 juillet 2021, la société Meissonnier-Wagram a consenti à M. [I] un bail d’habitation portant sur des locaux situés [Adresse 1] à [Localité 3], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 6.060 euros et d’une provision pour charges de 340 euros.

Les loyers n’ayant plus été réglés, la société Meissonnier-Wagram a fait délivrer à M. [I], par acte du 20 octobre 2021, un commandement de payer visant la clause résolutoire stipulée au bail, pour la somme en principal de 32.038,87 euros au titre de l’arriéré locatif.

Par acte des 28 janvier et 8 février 2022, la société Meissonnier-Wagram a fait assigner M. [I] et Mme [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins, notamment, de constat de l’acquisition de la clause résolutoire, expulsion et condamnation du défendeur au paiement, par provision, de l’arriéré locatif et d’une indemnité d’occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire du 10 octobre 2022, le premier juge a :

rejeté les demandes formées à l’encontre de Mme [C] ;

constaté que la dette locative visée dans le commandement de payer du 20 octobre 2021 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois ;

constaté en conséquence que le contrat conclu le 9 juillet 2021 entre la société Meissonnier-Wagram et M. [I] concernant les locaux situés [Adresse 1] à [Localité 3] est résilié depuis le 21 décembre 2021 ;

ordonné à M. [I] de libérer de sa personne et de ses biens, ainsi que de tous occupants de son chef, les lieux situés [Adresse 1] à [Localité 3] ainsi que, le cas échéant, tous les lieux loués accessoirement au logement ;

dit qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux ;

statué sur le sort des meubles laissés dans les lieux ;

condamné M. [I] à payer à la société Meissonnier-Wagram la somme provisionnelle de 70.438,87 euros au titre de l’arriéré locatif et d’indemnités d’occupation arrêté au 1er avril 2022, terme d’avril inclus, avec intérêts au taux légal sur la somme de 32.038,87 euros à compter du 20 octobre 2021 et sur le surplus à compter de la signification de la décision ;

condamné M. [I] à payer à la société Meissonnier-Wagram une indemnité d’occupation mensuelle et provisionnelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail et ce à compter du terme de mai 2022 et jusqu’à libération des lieux ;

rejeté toute autre demande ;

condamné M. [I] aux dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer et de l’assignation qui lui a été délivrée mais pas le coût de l’assignation délivrée à Mme [C] et à payer à la société Meissonnier-Wagram la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 novembre 2022, M. [I] a relevé appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif.

Par conclusions remises et notifiées le 5 janvier 2023, M. [I] demande à la cour de :

déclarer son appel recevable et fondé ;

infirmer ‘le jugement’ ;

statuant à nouveau, lui accorder un échéancier afin de lui permettre d’apurer sa dette sur une période de 24 mois.

Par conclusions remises et notifiées le 3 février 2023, la société Meissonnier-Wagram demande à la cour de :

juger M. [I] irrecevable à solliciter l’infirmation de l’ordonnance entreprise dans sa totalité ;

le débouter de l’intégralité de ses demandes ;

confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :

‘ rejeté les demandes formées à l’encontre de Mme [C] ;

‘ constaté l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 21 décembre 2021 ;

‘ ordonné à M. [I] de libérer de sa personne et de ses biens, ainsi que de tous occupants de son chef, les lieux situés [Adresse 1] à [Localité 3] ainsi que, le cas échéant, tous les lieux loués accessoirement au logement ;

‘ dit qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux ;

‘ statué sur le sort des meubles laissés dans les lieux ;

‘ condamné M. [I] à payer à la société Meissonnier-Wagram la somme provisionnelle de 70.438,87 euros au titre de l’arriéré locatif et d’indemnités d’occupation arrêté au 1er avril 2022, terme d’avril inclus, avec intérêts au taux légal sur la somme de 32.038,87 euros à compter du 20 octobre 2021 et sur le surplus à compter de la signification de la décision ;

‘ condamné M. [I] aux dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer et de l’assignation qui lui a été délivrée mais pas de celle délivrée à Mme [C] et à payer à la société Meissonnier-Wagram la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a d’une part, condamné M. [I] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle et provisionnelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi, à compter de mai 2022 et jusqu’à parfaite libération des lieux et, d’autre part, exclu des dépens le coût de l’assignation délivrée à Mme [C] ;

statuant à nouveau,

condamner M. [I] à lui payer, à titre provisionnel, une indemnité d’occupation mensuelle égale au double du loyer qui aurait été dû en cas de poursuite du bail, majorée des charges et taxes, à compter de l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à la libération des lieux ;

condamner M. [I] aux dépens de première instance qui comprendront le coût de l’assignation délivrée à Mme [C] et sa dénonciation à la préfecture ;

à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la demande de délais de paiement serait accueillie,

réduire les délais accordés et dire qu’à défaut de paiement d’une seule échéance, la totalité de la dette deviendra exigible ;

condamner M. [I] au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère abusif de l’appel ;

le condamner au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 1er mars 2023.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu’aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande de délais de paiement

En application de l’article 24, V, de la loi du 6 juillet 1989, le juge peut accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

M. [I], sollicitant l’infirmation de la décision entreprise, demande que lui soit accordé des délais de paiement dans la limite de 24 mois pour s’acquitter de sa dette dont il ne conteste ni le principe ni le quantum. Il se déduit de cette demande que l’appelant sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire.

A l’appui de sa demande, il indique avoir traversé une période compliquée tant personnellement que professionnellement, qui a été aggravée par la crise sanitaire, expliquant que son activité a été arrêtée pendant le premier confinement et qu’il n’a plus été en mesure de régler les loyers.

Il verse aux débats son avis d’imposition sur les revenus 2021 qui démontre qu’il a perçu au cours de cette année un revenu annuel imposable de 24.135 euros, soit 2.011 euros par mois.

Cependant, M. [I] qui ne s’explique pas sur son activité professionnelle et ne produit aucune autre pièce que l’avis d’imposition susvisé, ne démontre pas être en capacité de régler, dans les délais sollicités, sa dette, arrêtée au 1er avril 2022, à la somme de 70.438,87 euros et qui a depuis continué à s’accroître.

La cour relève que depuis son entrée dans les lieux, M. [I] n’a réglé aucun loyer ainsi que l’établit le décompte produit, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation ; qu’il a pris en location, à compter du 19 juillet 2021, un appartement d’une superficie de 275,42 m², et s’est engagé à régler un loyer mensuel 6.060 euros outre une provision pour charges de 340 euros par mois alors qu’il justifie avoir perçu en 2021, un revenu mensuel de 2.011 euros et précise avoir rencontré des difficultés dès le premier confinement, lequel a eu lieu en mars 2020. Ces éléments démontrent que dès la signature du bail, l’appelant n’était pas en mesure de respecter son obligation contractuelle de paiement.

La demande de délais de paiement formée par M. [I] est donc injustifiée et sera rejetée.

L’ordonnance sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a constaté l’acquisition des effets de la clause résolutoire à la date du 21 décembre 2021, ordonné l’expulsion de M. [I] faute de départ volontaire de ce dernier des lieux donnés à bail et statué sur le sort des meubles.

Sur la demande de provision

Selon l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l’existence d’une obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut être accordé une provision au créancier, ou ordonné l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

L’obligation de M [I] au paiement d’une indemnité d’occupation, contrepartie de l’occupation des lieux devenue sans droit ni titre depuis l’acquisition de la clause résolutoire, ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

La société Meissonnier-Wagram demande que cette indemnité d’occupation soit fixée au double du loyer contractuel majoré des charges et taxes. Cependant, cette demande, qui n’est pas fondée sur une disposition du bail, n’est pas justifiée et sera donc rejetée.

L’ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu’elle a fixé l’indemnité d’occupation a un montant égal à celui du loyer contractuel majoré des charges et taxes, sauf à préciser que cette indemnité d’occupation est due à compter du 21 décembre 2021 et jusqu’à la libération effective des lieux.

L’ordonnance sera également confirmée en ce qu’elle a condamné M. [I] au paiement d’une provision de 70.438,87 euros correspondant au montant des loyers et des indemnités d’occupation arrêté au 1er avril 2022, terme d’avril inclus, outre intérêts au taux légal ainsi qu’indiqué dans son dispositif, la société Meissonnier-Wagram n’ayant pas actualisé sa créance à hauteur de cour.

Sur la demande de dommages et intérêts

L’action en justice, comme l’exercice du droit d’appel, ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d’erreur grossière équipollente au dol ou encore de légèreté blâmable. Ces exigences n’étant pas satisfaites en l’espèce, la société Meissonnier-Wagram sera déboutée de sa demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance a été exactement apprécié par le premier juge. La société Meissonnier-Wagram n’ayant contracté qu’avec M. [I], l’assignation qu’elle a délivrée à Mme [C] dont il est acquis qu’elle n’est pas l’épouse de ce dernier, n’était pas justifiée et ne peut être comprise dans les dépens.

L’ordonnance entreprise sera également confirmée en ce qu’elle a alloué à la société Meissonnier-Wagram une indemnité procédurale de 500 euros.

Succombant en ses prétentions, M. [I] supportera les dépens d’appel. Ayant contraint la société Meissonnier-Wagram à exposer des frais irrépétibles pour assurer sa défense devant la juridiction du second degré, l’appelant sera condamné à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions sauf à préciser que l’indemnité d’occupation est due par M. [I] à compter du 21 décembre 2021 ;

Déboute M. [I] de sa demande de délais de paiement ;

Déboute la société Meissonnier-Wagram de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne M. [I] aux dépens d’appel avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile et à payer à la société Meissonnier-Wagram la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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