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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51Z
14e chambre
ARRET N°
PAR DEFAUT
DU 20 OCTOBRE 2022
N° RG 22/00808 – N° Portalis DBV3-V-B7G-U7X3
AFFAIRE :
[R] [F]
C/
[L] [P]
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 17 Janvier 2022 par le Juge des contentieux de la protection de SAINT GERMAIN EN LAYE
N° RG : 12-21-0009
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 20.10.2022
à :
Me Stéphanie TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [R] [F]
née le 11 Février 1970 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELARL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20220088
Assistée de Me Valérie SCHNEIDER-MACOU, plaidant avocat au barreau de Paris, substituée par Me BEGOUEN.
APPELANTE
****************
Madame [L] [P]
[Adresse 1]
[Localité 2]
INTIMEE DEFAILLANTE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Septembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nicolette GUILLAUME, Présidente,
Madame Marina IGELMAN, Conseiller,
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,
EXPOSÉ DU LITIGE
Par contrat du 20 février 2016, Mme [F] a donné à bail à Mme [P] un appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 1] pour un loyer mensuel de 880 euros, provision sur charges incluses.
Des loyers étant demeurés impayés Mme [F] a fait signifier un commandement de payer visant la clause résolutoire le 18 janvier 2021.
Par acte d’huissier de justice délivré le 19 mai 2021, Mme [F] a fait assigner en référé Mme [P] aux fins d’obtenir principalement la résiliation du contrat, l’expulsion et la condamnation au paiement.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 17 janvier 2022, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Sainte Germain en Laye a :
– constaté la suspension jusqu’au 25 mai 2023 des effets de la clause résolutoire contenue dans le bail conclu le 20 février 2016 entre Mme [F] et Mme [P],
– débouté Mme [F] de toutes ses autres prétentions,
– condamné Mme [F] aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 9 février 2022, Mme [F] a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Dans ses dernières conclusions déposées le 14 avril 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Mme [F] demande à la cour, au visa des articles 490, 699, 700, 834 et 835 du code de procédure civile, de :
– la juger recevable et bien fondée en son appel et ses demandes ;
– infirmer l’ordonnance de référé du juge des contentieux et de la protection du 17 janvier 2022 dont appel en toutes ses dispositions ;
statuant à nouveau,
– juger les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail d’habitation du 20 février 2016 réunies à la date du 18 mars 2021 ;
– juger que la clause résolutoire contenue dans le bail d’habitation du 20 février 2016 a produit tous ses effets dès le 19 mars 2021 ;
– juger que le bail d’habitation du 20 février 2016 est en conséquence résilié à compter du 19 mars 2021 ;
– ordonner l’expulsion de Mme [P] ainsi que celle de tous occupants de son chef, des locaux situés [Adresse 1], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir jusqu’à libération complète et effective des locaux, avec l’assistance de la force publique, d’un serrurier et le cas échéant, d’un huissier de justice afin de faire constater et estimer les réparations locatives, assisté, s’il l’estime utile, d’un technicien ;
– ordonner le placement sous séquestre des effets mobiliers qui sont susceptibles de se trouver dans les locaux et de constituer une sûreté pour le paiement des sommes dues, et pour les autres meubles, le transport de ceux qui seraient laissés dans les lieux dans tel garde meuble désigné par lui ou à défaut par le bailleur, au frais de l’expulsé ;
– condamner à titre provisionnel Mme [P] à lui verser une indemnité d’occupation égale au loyer de 880 euros mensuels à compter du 25 mai 2021, et ce jusqu’à la libération complète et effective des locaux ;
– condamner Mme [P] au paiement des entiers dépens dont distraction au profit Maître Stéphanie Teriitehau, conformément aux dispositions des articles 699 et suivants du code de procédure civile ;
– condamner Mme [P] au paiement de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [P], à qui la déclaration d’appel et les conclusions d’appel ont été signifiées le 25 avril 2022 à l’étude de l’huissier, n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 juillet 2022
MOTIFS DE LA DÉCISION
Mme [F] expose au soutien de son appel que sa locataire ne paie plus régulièrement son loyer depuis août 2020, que le commandement de payer du 18 janvier 2021 lui a été signifié à personne et que les effets de la clause résolutoire sont donc définitivement acquis depuis le 18 mars 2021.
Elle fait valoir que l’interdiction faite au débiteur de payer des dettes nées antérieurement à la décision de recevabilité de la commission de surendettement, prévue par l’article L. 722-5 du code de la consommation, ne fait pas obstacle aux effets d’une clause résolutoire déjà acquise.
Elle expose que, sur le fondement de l’article 24 VIII de la loi du 6 juillet 1989, le locataire doit continuer à s’acquitter du paiement des loyers et des charges en cours, ce qui n’était pas le cas lors de l’audience devant le premier juge, Mme [P] n’ayant réglé aucun loyer depuis mai 2021.
Sur ce,
Sur la résiliation du bail
En vertu des dispositions du premier alinéa de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, ‘toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux’.
Faute d’avoir payé ou contesté les sommes visées au commandement dans le délai imparti, le locataire ne peut remettre en cause l’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement.
Il est établi que Mme [P] n’a pas réglé les causes du commandement de payer qui lui a été délivré le 18 janvier 2021 dans le délai de deux mois qui lui était imparti, alors qu’à cette date la décision de recevabilité de la commission de surendettement n’était pas intervenue.
La bailleresse démontre donc que la clause résolutoire du bail était acquise le 18 mars 2021, l’acquisition de la clause résolutoire sera constatée et l’ordonnance attaquée sera infirmée de ce chef. Il sera fait droit à la demande subséquente d’expulsion, sous réserve de l’éventuelle suspension de la clause résolutoire qui sera examinée ci-dessous.
Sur la suspension de la clause résolutoire
En vertu des dispositions de l’article 24 VIII de la loi du 6 juillet 1989, ‘lorsqu’un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire a été imposé par la commission de surendettement des particuliers ou prononcé par le juge ou lorsqu’un jugement de clôture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire a été rendu, le juge suspend les effets de la clause de résiliation de plein droit pendant un délai de deux ans à partir de la date de la décision imposant les mesures d’effacement ou du jugement de clôture. (…)
Ce délai ne peut affecter l’exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges.
Si le locataire s’est acquitté du paiement des loyers et des charges conformément au contrat de location pendant le délai de deux ans mentionné au premier alinéa du présent VIII, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet’.
En application de ce texte, le locataire qui bénéficie de la suspension des effets de la clause résolutoire à compter de la décision de rétablissement personnel reste néanmoins tenu de s’acquitter de ses loyers pendant la période de deux années prévue, de sorte qu’en cas de défaut de paiement, la constatation de la résiliation du bail reprend son plein effet.
Or, en l’espèce, alors qu’une dette locative de 8 800 euros a été effacée, Mme [F] soutient qu’aucun loyer n’a été réglé par Mme [P] depuis la décision de la commission de surendettement du 26 mai 2021 et aucun élément du dossier ne permet à la cour de conclure qu’il en serait différemment.
Dès lors, il n’y a pas lieu d’ordonner la suspension de la clause résolutoire et l’ordonnance déférée sera infirmée de ce chef. En conséquence, l’expulsion de Mme [P] sera ordonnée selon les modalités prévues au dispositif.
Sur la demande d’indemnité d’occupation
Selon l’alinéa 2 de l’article 835 du code de procédure civile :’Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il (le président ) peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire’.
Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse. Le montant de la provision allouée n’a alors d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.
L’indemnité d’occupation correspond à la fois à une contrepartie de la jouissance des locaux et à la compensation du préjudice subi par le propriétaire du fait de la privation de la libre disposition des lieux.
En l’espèce, il convient de condamner Mme [P] à verser à Mme [F] à titre provisionnel une indemnité d’occupation mensuelle d’un montant de 880 euros, correspondant au montant prévu contractuellement du loyer et des charges, à compter du 25 mai 2021, et jusqu’à la libération complète et effective des locaux.
Sur les mesures accessoires
L’ordonnance sera infirmée en ce qu’elle a jugé sur les dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Partie perdante, Mme [P] sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, avec application au profit de l’avocat qui le demande des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
En équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,
Infirme l’ordonnance querellée ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Constate l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à compter du 18 mars 2021 ;
Ordonne l’expulsion de Mme [L] [P] ainsi que celle de tous occupants de son chef, des locaux situés [Adresse 1], avec l’assistance de la force publique, d’un serrurier ;
Ordonne la séquestration du mobilier garnissant les locaux aux frais et risques de la locataire sous réserve des dispositions des articles L. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;
Condamne Mme [L] [P] à verser à Mme [R] [F] à titre provisionnel une indemnité d’occupation mensuelle d’un montant de 880 euros à compter du 25 mai 2021 et jusqu’à la libération des lieux matérialisée par l’expulsion ou la remise des clés ;
Rejette toute autre demande,
Déboute Mme [R] [F] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [L] [P] aux dépens de première instance et d’appel avec application au profit de l’avocat qui le demande des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, présidente, et par Madame Élisabeth TODINI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GreffierLa Présidente