Your cart is currently empty!
1ère Chambre
ARRÊT N°
N° RG 20/04314 – N° Portalis DBVL-V-B7E-Q45A
Mme [U] [N] épouse [Z]
C/
M. [H] [N]
S.C.I. BEG ER LANN
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 02 NOVEMBRE 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre
Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre entendue en son rapport
Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 07 Juin 2022
ARRÊT :
contradictoire, prononcé publiquement le 02 novembre 2022 par mise à disposition au greffe, après prorogation du délibéré annoncé au 20 septembre 2022 à l’issue des débats
****
APPELANTE :
Madame [U] [N] épouse [Z]
née le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 11] (92)
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Stéphanie D’HAUTEVILLE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
Monsieur [H] [N]
né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 12] (56)
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représenté par Me Mikaël BONTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Hassiba JEFFROY, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT
La S.C.I. BEG ER LANN, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 8]
Représentée par Me Mikaël BONTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Vianney DE WIT du Cabinet FIDAL, Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
FAITS ET PRÉTENTIONS
M. [N], aujourd’hui retraité et âgé de 75 ans, a hérité de ses parents au début des années 90 d’un terrain situé à [Localité 9].
Suivant acte authentique du 1er juillet 1999, il a fait donation de la nue-propriété indivise de cette parcelle à ses deux filles [G] [N] et [U] [N] épouse [Z].
Par acte authentique du 2 octobre 1999, enregistré le 23 novembre 1999 à la conservation des hypothèques de [Localité 10], la société civile immobilière Beg Er Lann a été créée avec pour objet de gérer ce bien immobilier.
Les apports et parts sociales ont été répartis comme suit :
– M. [N] a apporté l’usufruit de ce terrain nu estimé à 39.634 € et recevait en échange 25.998 parts sociales,
– Mme [D] son épouse recevait 100 parts sociales en échange d’un apport en numéraire de 150 €,
– Les filles de M. et Mme [N] apportaient chacune une moitié indivise de la nue-propriété dudit terrain évaluée chacune à 46.239 € en échange de 30.330 parts sociales chacune.
M. [N] a été nommé gérant de la SCI.
Au début des années 2000, une maison traditionnelle d’environ 150 m² habitables a été construite sur ce terrain par M. [N], financée, ainsi que son aménagement et son ameublement, par apport de fonds personnels en compte-courant d’associés.
Pendant les 15 premières années d’occupation de la villa, la famille [N] s’y retrouvait pour les vacances, les jours fériés ou week-end prolongés, Noël et fêtes familiales.
En 2008, M. et Mme [N] se sont séparés, leur divorce étant ultérieurement prononcé par jugement du tribunal de grande instance de Vannes le 22 septembre 2011.
Mme [N] est restée vivre dans la résidence principale à [Localité 6], de 300 m² habitables, à quelques mètres de la mer, dont l’achat avait été financé au cours de la vie commune.
M. [N] est venu vivre dans la maison familiale de [Localité 8]. Il en a fait sa résidence principale. Il y vit toujours aujourd’hui, accompagné de Mme [T] [O] avec laquelle il s’est pacsé.
Une dispute de famille est survenue au cours de l’été 2015, entre :
– M. [N],
– Sa fille [U] [Z] et le mari de celle-ci [J] [Z], dont il est dit qu’il assurait la comptabilité de la sci.
Suivant délibération d’assemblée générale du 29 septembre 2015, la sci Beg Er Lann autorisait la souscription d’un commodat, prêt à usage de longue durée de 30 ans, au profit de M. [N]. L’acte authentique du 29 septembre 2015, modifié le 13 octobre 2015, était enregistré au service de la publicité foncière les 29 octobre 2015 et 15 janvier 2016.
Mme [U] [Z] a contesté avoir été convoquée à cette assemblée générale du 29 septembre 2015.
Des assemblées générales ordinaires de la sci étaient convoquées les 5 et 20 juillet 2017, puis les 26 juillet 2018, 6 et 27 décembre 2019 et 3 décembre 2020.
En 2017, M. [N] a mis au vote de l’assemblée générale ordinaire, deux résolutions par lesquelles :
– il aurait été mis fin au prêt à usage signé le 29 septembre 2015,
– et y aurait été substitué un bail d’habitation, à signer avec lui.
Mme [Z] a voté contre ces deux résolutions.
Par acte en date du 27 septembre 2018, elle a fait assigner M. [N] et la sci Beg Er Lann en demandant notamment l’annulation des délibérations de l’assemblée générale du 29 septembre 2015 et de l’acte notarié du même jour.
Par un jugement du 1er juillet 2020, le tribunal judiciaire de Lorient a :
– jugé prescrite l’action de Mme [Z] pour les faits et actes antérieurs au 29 septembre 2015,
– débouté Mme [Z] de ses demandes en nullité des délibérations des assemblées générales du 29 septembre 2015 et 27 décembre 2019, en nullité de l’acte notarié du 29 septembre 2015, de ses demandes en dommages-intérêts et de ses demandes tendant à voir juger son père occupant sans droit ni titre du bien immobilier appartenant à la sci Beg Er Lann ainsi que de ses demandes principale, subsidiaire et très subsidiaire en paiement d’un loyer,
– débouté Mme [Z] de sa demande en frais irrépétibles,
– condamné Mme [Z] à payer la somme de 4.000 € à M. [N] et celle de 4.000 € à la sci Beg Er Lann au titre des frais irrépétibles,
– condamné Mme [Z] aux dépens recouvrés en application de l’article 696 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision en toutes ses dispositions.
Mme [Z] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 10 septembre 2020.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Mme [Z] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 1er juin 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l’alinéa 1er de l’article 455 du code de procédure civile.
Elle sollicite de la cour de :
À titre principal :
– la juger recevable et bien fondée en son appel,
– la juger recevable et bien fondée en ses demandes,
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il :
– a jugé prescrite son action pour les faits et actes antérieurs au 27 septembre 2015,
– l’a déboutée de ses demandes en nullité des délibérations des assemblées générales du 29 septembre 2015 et 27 décembre 2019, en nullité de l’acte notarié du 29 septembre 2015,
– l’a déboutée de ses demandes en dommages et intérêts,
– l’a déboutée de ses demandes tendant à voir juger son père occupant sans droit ni titre du bien immobilier appartenant à la sci Beg Er Lann, ainsi que de ses demandes principale, subsidiaire et très subsidiaire au paiement d’un loyer,
– l’a déboutée de sa demande en frais irrépétibles,
– l’a condamnée à payer, au visa de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 4.000 € à M. [N] et celle de 4.000 € à la sci Beg Er Lann et l’a condamnée aux dépens, recouvrés conformément à l’article 696 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau :
– la juger recevable et bien fondée en son action et ses demandes,
– débouter M. [N] et la sci Beg Er Lann de l’ensemble de leurs demandes,
En conséquence,
– juger que l’assemblée générale extraordinaire des associés de la sci Beg Er Lann du 29 septembre 2015 a été irrégulièrement convoquée, ne pouvait valablement délibérer, et notamment, ne pouvait habiliter son gérant, M. [N], à consentir à son profit, en son nom personnel, un prêt à usage portant sur le bien immobilier de la sci Beg Er Lann, et est irrégulière,
– prononcer la nullité de toutes délibérations de l’assemblée générale extraordinaire des associés de la sci Beg Er Lann, en date du 29 septembre 2015 et des actes subséquents,
– prononcer la nullité du prêt à usage conclu entre la sci Beg Er Lann et M. [N], le 29 septembre 2015,
– juger que l’assemblée générale ordinaire des associés de la sci Beg Er Lann, en date du 27 décembre 2019, ne pouvait valablement délibérer, et notamment, ne pouvait ratifier l’autorisation de conclure le commodat à effet du 29 septembre 2015 ni sa résiliation ni consécutivement autoriser la conclure le commodat à effet du 29 septembre 2015 ni sa résiliation ni consécutivement autoriser la conclusion d’un contrat de bail d’habitation à effet du 1er janvier 2020 stipulant un loyer mensuel dérisoire de 870 €, s’apparentant à un prêt à usage et caractérisant un abus de majorité,
– prononcer la nullité de toutes délibérations de l’assemblée générale des associés de la sci Beg Er Lann en date du 27 décembre 2019 et des actes subséquents dont le prêt à usage du 29 septembre 2015, l’acte de résiliation du 6 mars 2020, le bail d’habitation du 6 mars 2020 et les délibérations de l’assemblée générale du 3 décembre 2020,
Sur l’action exercée par Mme [Z], associée de la sci Beg Er Lann, en réparation du préjudice subi par la sci Beg Er Lann,
– juger que M. [N] occupe sans droit ni titre le bien appartenant à la sci Beg Er Lann depuis au moins le 1er janvier 2009,
– juger que Mme [Z], en sa qualité d’associée de la sci Beg Er Lann, est recevable et bien fondée à exercer l’action en réparation du préjudice subi de ce fait par la sci Beg Er Lann,
En conséquence, sur le bien-fondé des demandes indemnitaires formées par Mme [U] [Z],
A titre principal,
– condamner M. [N] à payer à la sci Beg Er Lann la somme de 261.036,36€ en réparation du préjudice de jouissance qu’elle subit du fait de ses agissements, pour la période allant du 1er janvier 2009 au 20 septembre 2018, date de délivrance de l’assignation,
– condamner M. [N] à payer à la sci Beg Er Lann une indemnité de jouissance d’un montant de 2.750€ par mois à compter du 20 septembre 2018, date de délivrance de l’assignation et jusqu’à libération complète des lieux par lui ou conclusion entre la sci Beg Er Lann et lui-même d’un bail d’habitation conforme aux dispositions légales et statutaires et au prix du marché ce qui n’est pas le cas de celui conclu le 6 mars 2020,
A titre subsidiaire,
– condamner M. [N] à payer à la sci Beg Er Lann la somme de 99.000€ en réparation du préjudice de jouissance qu’elle subit du fait de ses agissements, pour la période allant du 29 septembre 2015 au 20 septembre 2018, date de délivrance de l’assignation, ainsi qu’une indemnité de jouissance d’un montant de 2.750€ par mois à compter de la date de délivrance de la présente assignation et jusqu’à libération complète des lieux par lui ou conclusion entre la sci Beg Er Lann et lui-même d’un bail d’habitation conforme aux dispositions légales et statutaires et au prix du marché ce qui n’est pas le cas de celui conclu le 6 mars 2020,
A titre infiniment subsidiaire,
– désigner tel expert qu’il lui plaira pour se rendre sur place au [Adresse 3] [Localité 8], examiner l’état du bien immobilier de la sci Beg Er Lann, et fixer sa valeur locative depuis le 1er janvier 2009,
– juger que l’ensemble des frais d’expertise seront mis à la charge de M. [N],
A titre extrêmement subsidiaire,
– juger qu’en tout état de cause, M. [N] reconnaît devoir à la sci Beg Er Lann une somme de 53.305,32€ à titre de loyers pour les mois de janvier 2015 à décembre 2019,
– condamner M. [N] à payer à la sci Beg Er Lann cette somme de 53.305,32€,
– dire que cette somme porte intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2018, date de délivrance de l’assignation,
– ordonner la capitalisation de ces derniers,
Sur la demande subsidiaire de condamnation in solidum formée par M. [N] et par la sci Beg Er Lann,
À titre principal,
– débouter M. [N] et la sci Beg Er Lann de leurs demandes de condamnation de Mme [U] [Z] in solidum avec M. [N] au paiement d’une indemnité d’occupation au profit de la sci Beg Er Lann,
– juger que Mme [U] [Z] ne saurait être condamnée in solidum au paiement des sommes dues par M. [N] à la sci Beg Er Lann,
– juger que M. [N] est seul débiteur de l’intégralité des sommes que la cour le condamnera à payer à la sci Beg Er Lann,
À titre subsidiaire,
– limiter la condamnation de Mme [U] [Z] au paiement à la sci Beg Er Lann d’une somme de 12.205,48€ pour son occupation du bien immobilier de la sci Beg Er Lann sur la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 10 août 2015 sur une base de valeur locative de 2.750€ par mois,
– juger que toute somme mise à la charge de Mme [U] [Z] viendra s’imputer sur son compte courant d’associée, créditeur à hauteur de 1.151€ au 31 décembre 2017,
À titre très subsidiaire,
– limiter la condamnation de Mme [U] [Z] au paiement à la sci Beg Er Lann pour son occupation du bien immobilier de la sci Beg Er Lann sur la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 10 août 2015 sur la base des valeurs locatives alléguées par M. [N], soit à la somme de 3.760,35€,
– juger que toute somme mise à la charge de Mme [U] [Z] viendra s’imputer sur son compte courant d’associée, créditeur à hauteur de 1.151€ au 31 décembre 2017,
Sur la réparation du préjudice subi personnellement par Mme [Z],
– condamner M. [N] à payer à Mme [Z] la somme de 1.000€ en réparation des préjudices subis par elle du fait de ces agissements fautifs,
En tout état de cause,
– condamner M. [N] à payer à Mme [Z] la somme de 8.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, outre les dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
M. [N] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 16 mai 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l’alinéa 1er de l’article 455 du code de procédure civile.
Il sollicite de la cour de :
À titre principal,
– confirmer en tous ses chefs le jugement de première instance rendu par le tribunal judiciaire de Lorient entre les parties en date du 1er juillet 2020
– par conséquent,
– juger irrecevables les demandes de Mme [U] [Z] en ce qu’elles sont prescrites et pour défaut d’intérêt à agir,
Et y ajoutant :
– juger irrecevable la demande de Mme [U] [Z] relative aux résolutions de l’assemblée générale du 3 décembre 2020 comme nouvelle,
– les dire et juger au surplus mal fondées et par conséquent,
– l’en débouter,
À titre subsidiaire,
– dire et juger que Mme [Z] a, tout comme le défendeur, occupé la maison propriété de la sci Beg Er Lann sans versement de loyer ou redevance, ni contribution aux dépenses de la société,
– dire et juger que Mme [Z] continue d’en faire usage afin de stocker des meubles et effets personnels,
– dire et juger que Mme [Z] est débitrice in solidum, de toute indemnité qui pourrait être due au titre de la mise à disposition par la sci Beg Er Lann,
Dans tous les cas,
– condamner Mme [U] [Z] à lui payer la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Madame [U] [Z] aux entiers dépens,
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir en toutes ses dispositions, y compris à l’égard des dépens.
La sci Beg Er Lann expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA et remises au greffe le 16 mai 2022, auxquelles il est renvoyé en application de l’alinéa 1er de l’article 455 du code de procédure civile.
Elle sollicite de la cour de :
À titre principal,
– confirmer en tous ses chefs le jugement de première instance rendu par le tribunal judiciaire de Lorient entre les parties en date du 1er juillet 2020,
Par conséquent,
– dire et juger irrecevables les demandes de Mme [U] [Z] en ce qu’elles sont formées pour le compte de la société sci Beg Er Lann,
– dire et juger irrecevable comme nouvelle la demande d’annulation des résolutions de l’assemblée générale de la société sci Beg Er Lann qui s’est tenue le 3 décembre 2020,
– dire et juger au surplus mal fondées et par conséquent,
– l’en débouter,
A titre subsidiaire,
– dire et juger que Mme [Z] a tout comme le défendeur, occupé la maison propriété de la sci Beg Er Lann sans versement de loyer ou redevance, ni contribution aux dépenses de la société,
– dire et juger que Mme [Z] continue d’en faire usage, afin de stocker des meubles et effets personnels
– dire et juger que Mme [Z] est débitrice in solidum, de toute indemnité qui pourrait être allouée à la concluante, la sci Beg Er Lann,
Dans tous les cas,
– condamner Mme [U] [Z] à payer à la sci Beg Er Lann la somme de cinq mille euros (10.000 €) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [U] [Z] aux entiers dépens,
– ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir en toutes ses dispositions, y compris à l’égard des dépens.
MOTIFS DE L’ARRÊT
À titre liminaire, il convient de rappeler que l’office de la cour est de trancher les points qui lui sont soumis et non de donner suite à des demandes de “constater”, “dire” ou “dire et juger” qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile mais la reprise des moyens censés les fonder.
1) Sur la prescription de l’action en paiement d’indemnités d’occupation de 2009 à 2015
Mme [Z] soutient une action ut singuli au visa de l’article 1843-5 du code civil au terme de laquelle elle demande à la cour, à titre principal, de prononcer la nullité de toutes délibérations de l’assemblée générale extraordinaire des associés de la sci Beg Er Lann, en date du 29 septembre 2015 et des actes subséquents et de prononcer la nullité de toutes délibérations de l’assemblée générale des associés de la sci Beg Er Lann en date du 27 décembre 2019 et des actes subséquents dont le prêt à usage du 29 septembre 2015, l’acte de résiliation du 6 mars 2020, le bail d’habitation du 6 mars 2020 et les délibérations de l’assemblée générale du 3 décembre 2020.
Cette action vise à faire déclarer M. [N] occupant sans droit ni titre à compter de 2009. Elle sollicite que celui-ci soit condamné à verser une indemnité d’occupation d’un montant de 261.036,36 € à la sci Beg Er Lann en réparation du préjudice de jouissance qu’elle subit du fait de ses agissements, pour la période allant du 1er janvier 2009 au 20 septembre 2018, date de délivrance de l’assignation. Au soutien de ses prétentions, elle indique que l’article 1844-14 du code civil doit être appliqué en l’espèce et avance une décision de jurisprudence de 2018 rendue au visa de l’article L. 235-9 du code de commerce dans laquelle la cour de cassation a rappelé que l’action en nullité des délibérations sociales se prescrit par trois ans à compter du jour où elles sont prises, sauf dissimulation entraînant une impossibilité d’agir. Mme [Z] affirme n’avoir été avisée du contenu du procès-verbal de l’AGE du 29 septembre 2015 que le 24 septembre 2018. L’action en annulation des délibérations de cette AGE ayant été introduite par assignation du 27 septembre 2018, elle s’estime recevable à agir, son action n’étant pas prescrite.
M. [N] soutient que l’action exercée ut singuli par Mme [Z] ne vise pas seulement à faire annuler la résolution de l’assemblée générale tenue le 29 septembre 2015, mais à faire déclarer son père occupant sans droit ni titre de la propriété [Adresse 7]. Il indique que l’appelante y séjournait jusqu’à 2015 et que la maison contient encore actuellement ses effets personnels. De plus, l’action a été engagée le 27 septembre 2018, soit près de 9 ans après le début du fait générateur invoqué. Ainsi, selon lui, la prescription des faits serait acquise et les demandes formulées au titre de l’action indemnitaire seraient en conséquence irrecevables.
La sci Beg Er Lann soutient que Mme [Z] poursuit son intérêt personnel et non l’intérêt social. Elle avance que l’action ut singuli fondée sur l’article 1843-5 du code civil ne peut viser qu’à rechercher la responsabilité du gérant au titre des agissements attentatoires à l’intérêt social et que les seules demandes pouvant être formulées dans ce cadre sont des demandes indemnitaires tendant à réparer le préjudice subi par la société. Or, le fait de solliciter une indemnité d’occupation ou le paiement d’un arriéré de loyers ne relève pas de la faute délictuelle du gérant dans l’exercice de sa fonction. Elle ajoute que l’action ut singuli ne peut pas être intentée en vue d’obtenir l’annulation d’une délibération de l’assemblée générale ou du conseil d’administration.
En droit, aux termes de l’article 1843-5 du code civil, outre l’action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l’action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société, en cas de condamnation, les dommages-intérêts sont alloués à la société. Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l’exercice de l’action sociale à l’avis préalable ou à l’autorisation de l’assemblée ou qui comporterait par avance renonciation à l’exercice de cette action. Aucune décision de l’assemblée des associés ne peut avoir pour effet d’éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans l’accomplissement de leur mandat.
Par ailleurs, le critère discriminant l’action personnelle de l’action réelle repose sur la nature juridique du droit subjectif en cause. Ainsi, l’action personnelle ne peut être exercée que par le sujet actif de l’obligation (créancier ou ses ayant-cause) et seulement contre le sujet passif de l’obligation (ou ses ayant-cause). Les actions personnelles sont celles par lesquelles il est demandé la reconnaissance ou la sanction d’un droit personnel, quelle que soit la source de ce droit (contrat, quasi-contrat, délit, quasi-délit).
L’action réelle, quant à elle, peut être exercée par tous ceux qui invoquent un droit réel sur la chose et contre tous ceux qui méconnaissent ce droit.
De cette distinction, il résulte que l’action visant un occupant sans droit ni titre a un régime juridique étranger à celui encadrant le bail d’habitation.
Une telle action est fondée sur la protection du droit de propriété et vise l’expulsion de l’occupant concerné. Constituant à ce titre une action en revendication, il résulte de la jurisprudence qu’il s’agit d’une action réelle immobilière laquelle est imprescriptible.
Tel n’est pas le cas, en revanche, de l’action tendant à obtenir un loyer en exécution d’un bail ou d’un prêt à usage, que celle-ci soit exercée à titre personnel ou dans l’intérêt de la société. Dans ce dernier cas, elle est soumise à la prescription triennale de l’article 1844-14 du code civil à partir du moment où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Au cas présent, dans la mesure où il s’agit pour Mme [Z] d’intenter une action tendant ‘ non à l’expulsion de M. [N] (tel que cela ressort expressément de son mail du 23 février 2016, pièce n°3 de Mme [Z]), mais à contester l’occupation par M. [N] de la propriété Beg Er Lann sans loyer ou selon versement d’un loyer d’un montant qui serait insuffisant ‘ à la recherche de l’indemnisation d’un éventuel préjudice de jouissance et le paiement d’une indemnité d’occupation par M. [N], ainsi qu’à la condamnation de ce dernier à lui verser une somme de 1.000€ en réparation des préjudices éventuellement subis par elle du fait de ces agissements fautifs, l’action ne peut être qualifiée que d’action personnelle.
Il résulte par ailleurs des pièces et arguments produits par les parties que Mme [Z] séjournait en famille dans la maison concernée pendant ses périodes de congés a minima jusqu’à l’été 2015, au cours duquel une dispute a eu lieu entre les époux [Z] et M. [N]. Dès lors, Mme [Z] a parfaitement eu connaissance des faits qu’elle invoque à l’appui de ses prétentions, à savoir l’occupation de la maison par son père, jusqu’à cette date.
Les demandes de Mme [Z] formulées à titre principal sur les faits et actes antérieurs au 27 septembre 2015 sont en conséquence prescrites.
C’est à bon droit que le tribunal a jugé son action irrecevable de ces chefs.
Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.
2) Sur l’intérêt et la qualité à agir
Mme [Z] soutient que c’est à tort que les premiers juges estimaient qu’elle mêle tout à la fois des demandes en qualité d’associée minoritaire et à titre personnel, pour son compte et pour celui de la sci (jugement page 4). Selon elle, la demande de nullité des délibérations des assemblées générales extraordinaire du 29 septembre 2015 et ordinaires du 27 décembre 2019 et du 3 décembre 2020, ainsi que celle du prêt à usage fondée sur les articles 1843-5 et 1850 du code civil l’est en son nom personnel en qualité d’associée de la sci et non pas pour le compte de cette dernière.
M. [N] conteste l’intérêt et la qualité à agir de Mme [Z], cette dernière ayant selon lui intenté une action de nature strictement personnelle à l’encontre de son père, à l’exclusion de tout intérêt social. Selon lui, Mme [Z] ne saurait prétendre poursuivre en son nom propre l’annulation d’actes juridiques auxquels elle n’est aucunement partie (le commodat et le bail), ne pouvant agir qu’à travers la sci Beg Er Lann, seule partie à ces contrats conclus avec M. [N]. En outre, il soutient que l’action ut singuli est limitée à des demandes indemnitaires, ce qui ne correspond pas à une demande fondée sur la nullité d’un acte.
La sci Beg Er Lann conteste de façon identique l’intérêt et la qualité à agir de l’appelante, soulignant que ses demandes personnelle et ut singuli se superposent et se confondent dans ses écritures, si bien qu’elle ne poursuivrait ‘ en l’absence de qualité comme d’intérêt né et actuel pour réclamer au nom de la sci une indemnité d’occupation contre son gérant ‘ que son intérêt propre.
En droit, il résulte de l’article 1843-5 alinéa 1er du code civil que, outre l’action en réparation du préjudice subi personnellement, un ou plusieurs associés peuvent intenter l’action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation du préjudice subi par la société, en cas de condamnation, les dommages-intérêts sont alloués à la société.
Il résulte en outre des dispositions de l’article 1850 du même code que chaque gérant est responsable individuellement envers la société et envers les tiers soit des infractions aux lois et règlements, soit de la violation des statuts, soit des fautes commises dans sa gestion.
L’article 31 du code de procédure civile dispose que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Au cas particulier, Mme [U] [Z], en tant qu’associée, a un intérêt et la qualité pour contester ‘ dans l’hypothèse où celles-ci seraient irrégulières et préjudiciables à la société ‘ les délibérations de la sci. Intérêt et qualité à agir sont à distinguer du bien-fondé de l’action, qui doit être examiné au regard de la régularité de la convocation aux assemblées générales de Mme [Z] et des griefs qui en découlent.
En conséquence, il y a lieu de considérer Mme [Z] comme recevable en son action.
3) Sur la demande d’annulation des délibérations de l’AGE du 29 septembre 2015
Mme [Z] soutient qu’il résulte des articles 1844 alinéa 1er et 1844-10 alinéa 3 du code civil, ainsi que de l’article 40 du décret n°78-704 du 3 juillet 1978 repris par les statuts de la société Beg Er Lann (sa pièce n°2 page 15) que tout associé peut se prévaloir de son absence de convocation à une assemblée générale et solliciter la nullité des actes passés par les organes de la sci et des actes subséquents. Elle soutient n’avoir pas été régulièrement convoquée contrairement à ce que mentionne le procès-verbal d’AGE du 29 septembre 2015 et que M. [N] lui aurait dissimulé le commodat conclu à son profit jusqu’à la convocation des assemblées générales des 5 et 20 juillet 2017. L’AGE du 29 septembre 2015 ne pouvait, selon elle, habiliter le gérant à consentir à son profit, en son nom personnel, un prêt à usage portant sur le bien immobilier géré par la sci.
M. [N] se limite à conclure sur l’irrecevabilité de la demande et précise simplement, s’agissant d’une décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence citée par l’appelante, que cette décision ayant prononcé la résiliation d’un bail que le gérant d’une sci avait consenti à son propre profit est inapplicable en l’espèce car M. [N] n’a pas procédé sans autorisation de l’assemblée générale ni à des conditions anormales au regard des circonstances du marché et n’a pas violé de délibération antérieure qui aurait concerné la fixation d’un loyer minimum.
La sci Beg Er Lann soutient que Mme [Z] est mal-fondée en son action en ce qu’elle avait connaissance du fait que M. [N] avait établi sa résidence principale au sein du bien immobilier géré par la sci dès lors qu’elle y séjournait entre 30 et 40 jours par an avec sa famille, qu’elle y laissait leurs effets personnels ainsi que des biens tels qu’un bateau notamment, et que son mari ‘ M. [J] [Z] ‘ établissait les comptes de la société et inscrivait chaque mois entre 2008 et 2015 un loyer mensuel versé par son beau-père en contrepartie de l’occupation de la villa.
En droit, l’article 1844 alinéa 1er du code civil dispose que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.
Selon l’article 40 alinéa 1er du décret du 3 juillet 1978, les associés sont convoqués quinze jours au moins avant la réunion de l’assemblée, par lettre recommandée. Celle-ci indique l’ordre du jour de telle sorte que le contenu et la portée des questions qui y sont inscrites apparaissent clairement sans qu’il y ait lieu de se reporter à d’autres documents.
De plus, il résulte de l’article 1844-10 alinéa 3 du même code que la nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du présent titre, à l’exception du dernier alinéa de l’article 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général.
Il s’évince des textes précités que le défaut de convocation d’un associé à une assemblée fait encourir la nullité des délibérations qui y ont été votées.
Enfin, l’article 1844-14 du code civil prévoit que les actions en nullité de la société ou d’actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue.
En l’espèce, comme l’a relevé le premier juge, la preuve d’une convocation régulière de Mme [Z] à l’assemblée générale du 29 septembre 2015 n’étant pas rapportée et l’assignation sur ce fondement datant du 27 septembre 2018, la délibération litigieuse encourt la nullité pour défaut de convocation et de quorum.
Cette nullité doit néanmoins être examinée au regard de la teneur des assemblées générales suivantes et des délibérations adoptées.
4) Sur la demande d’annulation des délibérations de l’AGO du 27 décembre 2019
Mme [Z] soutient que c’est à tort que les premiers juges ont retenu, au visa de l’article 14 des statuts de la sci qu’une AGE n’était pas indispensable pour discuter des modalités d’occupation du bien par le gérant et qu’en conséquence, l’AGO du 6 décembre 2019 a, conformément aux dispositions de l ‘article 1844-13 du code civil, pour effet de couvrir les nullités encourues par l’AGE du 29 septembre 2015 pour défaut de convocation et de quorum (jugement entrepris page 5). Elle indique que la nullité ne saurait, quoi qu’il en soit, être couverte par l’AGO du 27 décembre 2019 au motif que la fraude corrompt tout. Elle soutient également que l’assemblée du 27 décembre 2019 ne peut être considérée comme régulière, alors qu’elle n’y était ni présente ni représentée contrairement à ce qui est indiqué au procès-verbal (pièce n°29) et n’avait pas eu connaissance du contenu du projet de bail préalablement à sa tenue. De plus, elle critique le montant dérisoire du loyer mensuel de 870 €, lequel serait dérisoire selon elle par rapport au prix du marché.
M. [N] réitère ses arguments concernant le défaut d’intérêt à agir de Mme [Z] et le fait qu’elle exercerait en réalité une seule et même action de nature strictement personnelle à l’encontre de son père, à l’exclusion de la défense de tout intérêt social.
La sci Beg Er Lann soutient que la s’ur de Mme [Z] a participé à l’AGO du 27 décembre 2019 et a apporté son vote favorable pour parvenir à la conclusion d’un bail d’habitation entre la sci et M. [N] et que, dès lors, elle ne serait plus fondée à introduire une action tendant strictement aux mêmes fins ‘ à savoir la conclusion d’un bail d’habitation en remplacement du commodat, auquel les associés ont décidé de mettre fin ‘ et que nul ne peut se contredire au détriment d’autrui.
En droit, l’article 1844-13 du code civil dispose que le juge, saisi d’une demande en nullité, peut, même d’office, fixer un délai pour permettre de couvrir les nullités. Il ne peut prononcer la nullité moins de deux mois après la date de l’exploit introductif d’instance.
Si, pour couvrir une nullité, une assemblée doit être convoquée, ou une consultation des associés effectuée, et s’il est justifié d’une convocation régulière de cette assemblée ou de l’envoi aux associés du texte des projets de décision accompagné des documents qui doivent leur être communiqués, le juge accorde par jugement le délai nécessaire pour que les associés puissent prendre une décision.
En l’espèce, l’article 14 des statuts de la sci impose la tenue d’une AGE pour la souscription d’emprunts auprès de tiers. Cette stipulation ne saurait être analysée comme imposant la tenue d’une AGE pour décider de la gestion du bien immobilier par bail ou prêt à usage et la location au gérant ne constitue pas, aux termes de l’article 2, une atteinte à l’intérêt social.
Au surplus, l’occupation d’une partie substantielle de la villa par les affaires de Mme [Z] et de sa famille démontrée par constat d’huissier (pièce n°4 de M. [N]) empêchait toute location du bien et ne permet pas une jouissance intégrale de celui-ci, justifiant ainsi la fixation du loyer à un prix moindre par rapport aux loyers comparatifs qu’elle produit dans sa pièce n°48.
Mme [Z] avait, ainsi qu’il en ressort de sa pièce n°34, parfaitement connaissance du montant de ce loyer dès 2010 ‘ son époux établissant les comptes de la sci ‘ soit huit ans avant qu’elle n’intente son action, sans que cela ne soulève aucune contestation de sa part ni sur l’occupation de la maison par son père après la séparation d’avec sa mère, ni sur le montant du loyer.
Mme [Z] était encore présente et a pris part au vote à l’AGO du 20 juillet 2017, tenue sur seconde convocation du fait de l’absence de celle-ci sur convocation pour le 5 juillet précédent, ainsi qu’il en ressort du procès-verbal qu’elle produit en pièce n° 9 et au cours de laquelle, conformément à son ordre du jour, ont notamment été examinées et soumises au vote les résolutions 4 à 6 portant sur les points suivants :
– ratification de l’autorisation de conclure un prêt à usage par la société Beg Er Lann au profit de M. [N] à effet du 29 septembre 2015,
– autorisation de résilier ledit prêt à usage à effet du 30 juin 2017,
– autorisation à donner au gérant de régulariser les loyers dus par l’ensemble des occupants depuis le 1er janvier 2014,
– autorisation de conclure un bail d’habitation par la société au profit de M. [N] à effet du 1er juillet 2017.
C’est lors de l’AGO tenue le 27 décembre 2019, sur seconde convocation faute de quorum le 6 décembre précédent, qu’ont finalement été adoptées à l’unanimité des membres présents les deux résolutions ci-dessous soumises au vote, à savoir :
– la ratification de l’autorisation de conclure un prêt à usage par la sci Beg Er Lann au profit de M. [N] à effet du 29 septembre 2015,
– l’autorisation de résilier ledit prêt à usage à effet du 31 décembre 2019,
– l’autorisation de conclure un bail d’habitation par la société au profit de M. [N] à effet du 1er janvier 2020 stipulant un loyer mensuel de 870 €.
Dûment convoquée, Mme [Z] était absente.
Concernant le contenu du bail, Mme [Z] produit dans sa pièce n° 17 un projet de bail daté de 2017, achevant de démontrer la connaissance des éléments qu’elle conteste.
Le bail d’habitation a été souscrit par devant notaire le 6 mars 2020 et est toujours en cours.
Ainsi que l’a relevé très justement le premier juge, cette assemblée du 27 décembre 2019 a eu pour effet de couvrir les nullités encourues par l’AGE du 29 septembre 2015.
L’appelante échoue ainsi à démontrer l’abus de majorité de M. [N].
L’ensemble de ses demandes de nullité des délibérations des assemblées générales de la sci Beg Er Lann du 29 septembre 2015 et des actes subséquents, du 27 décembre 2019 et des actes subséquents dont le prêt à usage du 29 septembre 2015, l’acte de résiliation du 6 mars 2020, le bail d’habitation du 6 mars 2020 et du 3 décembre 2020, seront en conséquence rejetées et le jugement confirmé.
5) Sur la demande d’annulation des délibérations de l’AGO du 3 décembre 2020
Mme [Z] demande l’annulation des résolutions de l’assemblée générale ordinaire du 3 décembre 2002 qui ont notamment porté sur :
– l’approbation du rapport de gérance sur l’activité de la société au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2019 au cours duquel :
* “la société a poursuivi son activité de gestion de biens immobiliers et réalisé un chiffre d’affaires nul, le bien immobilier appartenant à la sci étant mis à la disposition de M. [N] à titre gratuit, au terme d’un prêt à usage reçu par Me Alban Soeur (..) pour une durée de trente années ayant commencé à courir le 29 septembre 2015 pour se terminer le 28 septembre “1945” (pièce adverse n°16)
* “conformément aux résolution adoptées par l’assemblée générale du 27 décembre 2019, ont été reçus par Me Alban Soeur, notaire à AURAY, en date du 6 mars 2020, les actes suivants :
– la résiliation du prêt à usage susvisé, bail d’habitation consenti par la société au profit de M. [N] établi conformément au projet de bail d’habitation initialement transmis aux associés lors de l’assemblée du 7 juillet 2017 dont une copie du bail définitivement signé le 6 mars 2020 figure en annexe au rapport », ce qui était faux ne s’agissant pas du même-bail
– l’approbation des comptes de cet exercice clos le 31 décembre 2019 se soldant par une perte de 15.728 € du fait du prêt à usage litigieux notamment et prévoyant une progression des résultats bien inférieure à ce qu’elle devrait être du fait de sa résiliation et de la conclusion du nouveau bail également contesté.
Ces demandes tendraient selon elle aux mêmes fins que celles visant la nullité des délibérations du 29 septembre 2015 et du 27 décembre 2019 et étaient “virtuellement” comprises dans ses demandes soumises aux premiers juges, Mme [Z] poursuivant la nullité desdites délibérations et des actes passés subséquemment à savoir la nullité du prêt à usage de 2015, de sa résiliation, comme du bail de mars 2020, donc de toutes délibérations les mettant en ‘uvre ou approuvant leurs conséquences tels le rapport de la gérance ou les comptes annuels reflétant la gestion faite en exécution des décisions dont elle poursuivait la nullité en première instance. Elle ajoute que ces demandes seraient également la conséquence et le complément de ses demandes visant la nullité des délibérations des 29 septembre 2015 et 27 décembre 2019, puisque les délibérations du 3 décembre 2020 ont approuvé les conséquences des délibérations de 2015 et 2019, est encore recevable sur le fondement de l’article 566 du code de procédure civile.
M. [N] soutient que de telles demandes n’ont pas été énoncées dans les conclusions n° 1 et 2 de Mme [Z] et ajoute que ces demandes constituent des demandes nouvelles en cause d’appel. Il précise que Mme [Z] a été régulièrement convoquée mais que, dans le contexte qui est celui du litige, elle se désintéresse de la vie de la sci. Il indique, en outre, que la convocation et la tenue de l’AGO de 2020 et l’adoption des résolutions soumises au vote sont intervenues postérieurement au jugement et qu’elles ne modifient en rien la situation tranchée par le premier juge.
La sci Beg Er Lann soutient que Mme [Z] ne peut pas contester et ne conteste pas avoir été dûment convoquée à cette assemblée générale où elle ne s’est pas rendue ni même faire représenter. Elle ajoute que cette demande serait irrecevable car nouvelle en cause d’appel, n’étant pas l’accessoire des demandes formulées au titre des autres assemblées générales qui n’avait pas le même objet et non pas adopter les mêmes résolutions.
En droit, l’article 564 du code de procédure civile prévoit qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
L’article 565 du même code précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Par ailleurs, l’article 910-4 du même code dispose qu’à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Au cas présent, les demandes portant sur l’annulation des délibérations de l’AGO du 3 décembre 2020 concernent uniquement la gestion courante de la sci, à savoir le rapport de gérance et l’approbation des comptes, suite à un bail qui a été approuvé en 2019. De surcroît, le dispositif des conclusions notifiées par RPVA le 8 décembre 2020 par Mme [Z] dans son délai pour conclure, prévu par l’article 908 du code de procédure civile, ne contient pas de prétentions relatives aux délibérations de l’AGO du 3 décembre 2020 qui s’est tenue quelques jours auparavant. Dans la mesure où celles-ci ne sont ni liées à l’évolution du litige, ne tendent pas aux mêmes fins de contester le prêt à usage consenti par la sci à M. [N], qu’elles ne sont ni connexes ni complémentaires, elles doivent être considérées comme nouvelles tant sur le fondement des demandes nouvelles en cause d’appel qu’au regard du principe de concentration des demandes.
Ces demandes sont, dès lors, irrecevables et seront rejetées.
6) Sur les demandes de Mme [Z] au titre des indemnités de jouissance ou loyers de janvier 2015 à décembre 2019
Les prétentions de Mme [Z] étant rejetées, sa demande au titre des indemnités de jouissance ou loyers de janvier 2015 à décembre 2019 sera rejetée.
Les parties feront leur affaire des conséquences fiscales de la situation d’occupation de la maison litigieuse, notamment pendant la période du commodat d’octobre 2015 à décembre 2019.
Le premier jugement sera confirmé sur ce point.
7) Sur la demande de condamnation formée par M. [N] et la sci Beg Er Lann contre Mme [Z]
M. [N] et la sci Beg Er Lann demandent à la cour de dire et juger que Mme [Z] a, tout comme le défendeur, occupé la maison propriété de la sci Beg Er Lann sans versement de loyer ou redevance, ni contribution aux dépenses de la société, qu’elle continue d’en faire usage afin de stocker des meubles et effets personnels, qu’elle est débitrice in solidum, de toute indemnité qui pourrait être due au titre de la mise à disposition par la sci Beg Er Lann.
Ils n’ont toutefois pas chiffré leurs demandes de sorte que la cour ne peut donner aucune suite à cette prétention.
8) Sur la demande de dommages et intérêts
Les prétentions de Mme [Z] étant rejetées, sa demande au titre des dommages et intérêts d’un montant de 1.000 € en réparation des préjudices du fait des agissements qualifiés de fautifs reprochés à son père, se trouve dépourvue de justification et sera rejetée.
9) Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant, Mme [Z] supportera les dépens d’appel.
Par ailleurs, il n’est pas inéquitable de la condamner à verser à chacun des intimés la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel.
Le jugement sera confirmé s’agissant des frais irrépétibles de première instance.
Enfin, les demandes de Mme [Z] au titre des frais irrépétibles seront rejetées.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Lorient du 1er juillet 2020,
Y ajoutant,
Déclare irrecevable Mme [Z] en sa demande nouvelle d’annulation des délibérations de l’assemblée générale ordinaire du 3 décembre 2020,
Condamne Mme [U] [Z] aux dépens de l’instance d’appel,
Condamne Mme [U] [Z] à verser la somme de 5.000€ à M. [X] [N] et la somme de 5.000€ à la sci Beg Er Lann au titre des frais irrépétibles d’appel,
Rejette toutes autres demandes.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE