Bail d’habitation : 16 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/00458

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Bail d’habitation : 16 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/00458
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 16 MARS 2023

N° 2023/209

Rôle N° RG 22/00458 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BIVJD

[B] [T] épouse [Z] [J]

C/

[L] [N]

[D] [N] épouse [N]

[P] [Z] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Lucas FAURE

Me Marjorie CANEL

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du Juge des contentieux de la protection de TOULON en date du 02 novembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/01276.

APPELANTE

Madame [B] [T] épouse [Z] [J]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/122 du 14/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le [Date naissance 4] 1987 à [Localité 11], demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Lucas FAURE, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Monsieur [L] [N]

né le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 8], demeurant [Adresse 10]

représenté par Me Marjorie CANEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Clara GALLET, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE et assisté de Me Jean-Christophe LEGROS, avocat au barreau de MONTPELLIER,

Madame [D] [C] épouse [N]

née le [Date naissance 1] 1949 en Italie, demeurant [Adresse 10]

représentée par Me Marjorie CANEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Clara GALLET, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Jean-Christophe LEGROS, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur [P] [Z] [J]

né le [Date naissance 3] 1981 à [Localité 7] (PORTUGAL), demeurant [Adresse 2]

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Catherine OUVREL, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine OUVREL, Présidente

Mme Angélique NETO, Conseillère

Madame Myriam GINOUX, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.

ARRÊT

Par défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023

Signé par Mme Catherine OUVREL, Présidente et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon bail sous seing privé du 25 janvier 2017, monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] ont donné en location à madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J], un logement situé [Adresse 2], moyennant un loyer mensuel de 950 €. Le loyer actualisé est de 988 € par mois.

Monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] ont fait délivrer un commandement de payer daté du 26 mars 2021visant la clause résolutoire du bail et ont mis en demeure madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] de leur régler la somme de 2 439,87 €.

Par ordonnance réputée contradictoire de référé en date du 2 novembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire, pôle de proximité, de Toulon a :

‘ condamné solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer en deniers et quittances à monsieur [L] [N] et monsieur [P] [Z] [J] la somme de 8 067,85 € à titre de provision représentant les loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au 1er septembre 2021, échéance du mois de septembre incluse, assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance,

constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties à la date du 26 mai 2021,

‘ ordonné, à défaut de départ volontaire, l’expulsion de madame [B] [T] épouse [Z] [J], monsieur [P] [Z] [J] et de tous occupants de leur chef, avec le concours de la force publique, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L 412-1 et suivants, R 411-1 et suivants, R 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

‘ condamné solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer en derniers et quittances à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] à titre provisionnel une indemnité d’occupation mensuelle de 988 € à compter du 26 mai 2021par mois charges justifiées en sus à compter du 9 mars 2019 et jusqu’à libération complète et effective des lieux,

‘ condamné in solidum madame [B] [T] épouse [Z] [J] det monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] la somme de 400 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ dit n’y avoir lieu à référé pour le surplus,

‘ condamné madame [B] [T] épouse [Z] [J] et madame [D] [C] épouse [N] aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer et de l’assignation.

Selon déclaration reçue au greffe le 12 janvier 2022, madame [B] [T] épouse [Z] [J] a interjeté appel de cette décision, l’appel portant sur toutes les dispositions de l’ordonnance déférée dûment reprises.

Par dernières conclusions transmises le 23 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, madame [B] [T] épouse [Z] [J] demande à la cour de :

rejeter toutes demandes contraires,

réformer l’ordonnance en toutes ses dispositions,

fixer au 14 février 2021 la date de résiliation du bail conclu entre les époux [N] et elle,

condamner solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer en derniers et quittances à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] la somme de 1 348,43 € au titre des loyers courus jusqu’au 14 février 2021,

débouter les époux [N] du surplus de leurs demandes en paiement des loyers dirigées contre elle,

fixer la date de résolution judiciaire du bail au 26 mars 2021,

débouter monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] de leur demande d’expulsion contre elle,

débouter monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] de leur demande de paiement d’une indemnité d’occupation contre elle,

débouter monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] de leur demande en paiement d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de la mise à sa charge des dépens,

confirmer l’ordonnance pour le surplus,

débouter les époux [N] de leurs prétentions tendant :

– à la confirmation de la décision,

– à ce qu’il soit ordonné que la solidarité du bail au titre des indemnités d’occupation à échoir cesse à compter du 17 septembre 2021, date de l’ordonnance fixant les mesures provisoires dans le cadre de l’instance en divorce entre les époux [Z] [J], et dit qu’elle ne sera redevable d’aucune somme échue à compter du 1er octobre 2021,

– à la condamnation de monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– à la condamnation de madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] au paiement des dépens avec distraction en appel.

Par dernières conclusions transmises le 20 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] sollicitent de la cour qu’elle :

déboute madame [B] [T] épouse [Z] [J] de toutes ses demandes,

confirme l’ordonnance en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

ordonne que la solidarité à laquelle est légalement tenue madame [B] [T] épouse [Z] [J] au titre des indemnités d’occupation à échoir cesse à compter du 17 septembre 2021, date de l’ordonnance fixant les mesures provisoires dans le cadre de l’instance en divorce entre les époux [Z] [J], et dise qu’elle ne sera redevable d’aucune somme échue à compter du 1er octobre 2021, octobre inclus,

condamne monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamne madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] au paiement des dépens avec distraction en appel.

Monsieur [P] [Z] [J], régulièrement intimé par acte signifié à étude le 2 février 2022, n’a pas constitué avocat et n’a pas conclu.

L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 23 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin du bail

Sur le congé délivré par madame [B] [T] épouse [Z] [J]

En vertu de l’article 12 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire peut résilier le contrat de location à tout moment, dans les conditions de forme et de délai prévues à l’article 15.

Il résulte des articles 15 I de la loi du 6 juillet 1989 et 669 alinéa 3 du code de procédure civile que le délai de préavis applicable au congé court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée, de la signification de l’acte d’huissier de justice ou de la remise en main propre et que la date de réception d’une notification faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception est celle qui est apposée par l’administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire.

En l’occurrence, les époux [N] ont donné à bail d’habitation aux époux [Z] [J] un logement situé à [Localité 9] le 25 janvier 2017.

Il résulte des pièces produites, et non contestées sur ce point, que le 14 janvier 2021, madame [B] [T] épouse [Z] [J] a remis en mains propres contre récépissé au mandataire des époux [N], à qui ils avaient délégué la gestion de l’appartement en cause, un courrier portant congé du bien concerné. Ni la réalité ni la validité de ce congé ne sont contestées par les bailleurs qui indiquent en avoir ignoré l’existence lors de la procédure devant le premier juge, mais lui reconnaître toute sa valeur désormais.

Dans la mesure où la commune de [Localité 9], où se situe le bien en cause, ainsi que le reconnaissent les parties, se situe dans une zone de tension locative au sens du décret n°2013-392 du 10 mai 2013, le préavis de madame [B] [T] épouse [Z] [J] est réduit à un mois, de sorte que le bail prend fin à son égard à compter du 14 février 2021.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire envers monsieur [P] [Z] [J]

En application des articles 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

En application des articles 1728, 1741 du code civil et 15 I de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a pour obligation principale le paiement du loyer. Un manquement grave et répété à cette obligation justifie la résiliation du contrat ou la délivrance d’un congé pour ce motif à l’initiative du bailleur.

L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à l’espèce, tendant à améliorer les rapports locatifs dispose : I.-Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.(…)

III.-A peine d’irrecevabilité de la demande, l’assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence de l’huissier de justice au représentant de l’Etat dans le département au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévue à l’article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du système d’information prévu au dernier alinéa de l’article 7-2 de la même loi. La saisine de l’organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s’effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L’organisme saisi réalise un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l’audience, ainsi qu’à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic.

En l’occurrence, il résulte des pièces communiquées que les parties sont liées par un bail écrit en date du 25 janvier 2017 dans lequel est insérée une clause résolutoire applicable de plein droit en cas de non-paiement des loyers et charges dans le délai de deux mois à compter de la délivrance d’un commandement de payer.

Par acte délivré le 26 mars 2021, monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] ont fait commandement à monsieur [P] [Z] [J], et à madame [B] [T] épouse [Z] [J], ignorant alors le congé par elle délivrée, de payer la somme de 2 439,87 € et ont manifesté son intention de se prévaloir de la clause résolutoire précitée.

En l’espèce, le commandement de payer est resté infructueux en ce que la somme commandée n’a pas été acquittée dans le délai de deux mois susvisé, seul un paiement à hauteur de 100,02 € ayant été effectué sur la période.

En conséquence, le contrat de bail se trouve résilié depuis le 26 mai 2021.

Il est dès lors acquis qu’au plus tard à cette date, tant monsieur [P] [Z] [J] que madame [B] [T] épouse [Z] [J] se trouvent occupants sans droit ni titre depuis lors. Or, seul monsieur [P] [Z] [J] se trouve encore dans les lieux, madame [B] [T] épouse [Z] [J] étant partie depuis février 2021 ainsi qu’elle en justifie par la production d’un nouveau bail, à la suite de son congé, et ainsi que les intimés en conviennent.

Aussi, l’ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a constaté la résiliation du bail par l’effet de la clause résolutoire au 26 mai 2021, ainsi qu’en ce qu’elle a ordonné l’expulsion de monsieur [P] [Z] [J] et de tous occupants de son chef. En revanche, l’expulsion de madame [B] [T] épouse [Z] [J] n’a pas de fondement puisqu’aucun trouble manifestement illicite n’était constitué lors de la décision du 1er juge, l’appelante ayant d’ores et déjà quitté les lieux. Sur ce point, l’ordonnance sera infirmée.

Sur la provision pour dette locative et indemnité d’occupation

Par application de l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’occurrence, la dette de loyer court depuis novembre 2020 sans que cela ne fasse l’objet d’aucune contestation. Le bail est résilié à la date du 26 mai 2021.

Sur la solidarité invoquée contre madame [K] [G]

Par l’effet de l’article 1751 du code civil, le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l’habitation de deux époux, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire et même si le bail a été conclu avant le mariage, ou de deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, dès lors que les partenaires en font la demande conjointement, est réputé appartenir à l’un et à l’autre des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l’un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l’autre époux.

En vertu de l’article 220 du code civil, chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l’un oblige l’autre solidairement.

En l’occurrence, le bail du 25 janvier 2017 a été signé par monsieur [P] [Z] [J] étant expressément précisé qu’il était marié à madame [B] [T] épouse [Z] [J]. Une clause de solidarité est incluse dans le bail.

Dans ces conditions, le bail signé par l’un des époux est réputé bénéficier et appartenir à l’un et l’autre des époux, de sorte que madame [B] [T] épouse [Z] [J] ne peut dénier l’existence d’une cotitularité du bail.

Par ailleurs, l’article 1310 du code civil dispose que la solidarité est légale ou conventionnelle ; elle ne se présume pas.

Par application de l’article 8-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, I. – La colocation est définie comme la location d’un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale, et formalisée par la conclusion d’un contrat unique ou de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur, à l’exception de la location consentie exclusivement à des époux ou à des partenaires liés par un pacte civil de solidarité au moment de la conclusion initiale du contrat.

VI. – La solidarité d’un des colocataires et celle de la personne qui s’est portée caution pour lui prennent fin à la date d’effet du congé régulièrement délivré et lorsqu’un nouveau colocataire figure au bail. A défaut, elles s’éteignent au plus tard à l’expiration d’un délai de six mois après la date d’effet du congé.

En vertu de l’article 8-2 de cette même loi, lorsque le conjoint du locataire, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin notoire quitte le logement en raison de violences exercées au sein du couple ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui, il en informe le bailleur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, accompagnée de la copie de l’ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales dont il bénéficie et préalablement notifiée à l’autre membre du couple ou de la copie d’une condamnation pénale de ce dernier pour des faits de violences commis à son encontre ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui et rendue depuis moins de six mois. La solidarité du locataire victime des violences et celle de la personne qui s’est portée caution pour lui prennent fin le lendemain du jour de la première présentation du courrier mentionné au premier alinéa au domicile du bailleur, pour les dettes nées à compter de cette date.

En l’espèce, madame [B] [T] épouse [Z] [J] assure avoir résilié le bail et quitté le logement concerné à raison de violences conjugales dont elle a été victime. Si effectivement, l’appelante produit un jugement du tribunal correctionnel de Toulon du 6 janvier 2022 ayant condamné monsieur [P] [Z] [J] pour des faits de menace de mort réitérée envers madame [B] [T] épouse [Z] [J], il convient de relever que ces faits datent des 13 et 14 juin 2021, soit postérieurement au congé délivré et à la résiliation même du bail. Madame [B] [T] épouse [Z] [J] justifie d’une main courante du 1er février 2021 dans laquelle elle fait part de son intention de quitter le logement familial avec ses enfants. Elle ne fait alors aucunement état de violences conjugales. Elle ne produit pas davantage d’ordonnance de protection du juge aux affaires familiales, seule la décision fixant les mesures provisoires jusqu’au divorce étant versée, en date du 17 septembre 2021, et ce, dehors de tout contexte de violence.

Les conditions d’application de l’article 8-2 de la loi du 6 juillet 1989 ne sont donc pas réunies et ne peuvent bénéficier à madame [B] [T] épouse [Z] [J].

Il est en revanche, par application de l’article 8-1 susvisé, de jurisprudence constante que les époux demeurent cotitulaires du bail jusqu’à la transcription du jugement de divorce en marge des registres de l’état civil et sont dès lors tenus solidairement au paiement des loyers, ce quand bien même l’un d’eux a donné congé préalablement à la résolution du bail. En revanche, en cas de résiliation du bail, la solidarité entre époux ne s’étend pas, en principe, à la dette née postérieurement, l’indemnité d’occupation qui se substitue au loyer revêtant alors un caractère quasi-délictuel et n’incombant qu’au seul occupant effectif des lieux.

En conséquence, madame [B] [T] épouse [Z] [J] est, sans contestation sérieuse caractérisée, solidairement tenue au paiement de la dette locative avec monsieur [P] [Z] [J] jusqu’à la résiliation du bail, qui est ici intervenue moins de 6 mois après le congé délivré, soit jusqu’au 26 mai 2021. A cette date, la dette locative, au vu des décomptes produits, s’élevait à l’évidence à la somme de 4 415,87 €. C’est à cette somme que madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] devront être tenus à paiement solidaire, l’ordonnance entreprise étant réformée en ce sens.

Sur le montant de la dette locative et de l’indemnité d’occupation provisionnelle envers monsieur [P] [Z] [J]

Les époux ne sont pas tenus au paiement solidaire de l’indemnité d’occupation, si cette dernière ne présente pas le caractère d’une dette ménagère.

Or, pour réclamer l’application de la solidarité entre époux jusqu’au 17 septembre 2021, date du jugement fixant les mesures provisoires entre les époux [Z] [J], les intimés soutiennent que le logement constituait le domicile conjugal, de sorte qu’il s’agirait d’une dette ménagère. Pourtant, il est acquis que madame [B] [T] épouse [Z] [J] a quitté le domicile en février 2021 avec les enfants du couple, et, le seul fait que le logement en cause ait constitué, avant, le logement du couple ne suffit pas à caractériser les raisons pour lesquelles l’indemnité d’occupation présenterait un caractère ménager en ce que cette dette contribuerait à l’entretien du ménage et des enfants.

Aussi, il convient de considérer que la solidarité a cessé entre madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J], sans contestation sérieuse, à compter de la résiliation du bail, de sorte qu’aucune condamnation de l’appelante au paiement d’une indemnité d’occupation provisionnelle ne peut être prononcée.

En revanche, le dernier décompte produit établit que la dette de monsieur [P] [Z] [J] ne cesse de croître, aucun paiement n’étant intervenu depuis juin 2021.

En l’état de la seule demande de confirmation sur ce point de l’ordonnance par les époux [N], il conviendra donc de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a condamné monsieur [P] [Z] [J] au paiement de la somme de 8 067,85 € au titre de sa dette provisionnelle à raison des loyers, charges et indemnités d’occupation arrêtés au 1er septembre 2021, échéance de septembre 2021 incluse. Aussi, en sus de la dette locative à hauteur de 4 115,85 €, c’est au paiement provisionnel d’une somme de 3 951,98 € que monsieur [P] [Z] [J] devra être également condamné au titre des indemnités d’occupation échues entre mai et septembre 2021.

Au titre des indemnités d’occupation ultérieures, seul monsieur [P] [Z] [J] pourra être condamné à leur paiement provisionnel.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens

L’ordonnance entreprise, confirmée en ses dispositions principales, le sera également au titre de la charge des dépens et des condamnations prononcées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, en appel, ce sont monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] qui supporteront la charge des dépens. L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :

– condamné solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer en deniers et quittances à monsieur [L] [N] et monsieur [P] [Z] [J] la somme de 8 067,85 € à titre de provision représentant les loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au 1er septembre 2021, échéance du mois de septembre incluse, assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification de l’ordonnance,

-ordonné, à défaut de départ volontaire, l’expulsion de madame [B] [T] épouse [Z] [J], et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique,

– condamné solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer en derniers et quittances à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] à titre provisionnel une indemnité d’occupation mensuelle de 988 € à compter du 26 mai 2021par mois charges justifiées en sus à compter du 9 mars 2019 et jusqu’à libération complète et effective des lieux,

Confirme l’ordonnance entreprise en ses autres dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit que le bail a pris fin dans les rapports entre les époux [N] et madame [B] [T] épouse [Z] [J] le 14 février 2021,

Condamne solidairement madame [B] [T] épouse [Z] [J] et monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et monsieur [P] [Z] [J] la somme de 4 415,87 € à titre de provision représentant les loyers et charges impayés au 26 mai 2021,

Condamne monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] la somme provisionnelle de 3 951,98 € au titre des indemnités d’occupation selon décompte arrêté au 1er septembre 2021, échéance de septembre 2021 incluse,

Déboute monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] de leur demande d’expulsion de madame [B] [T] épouse [Z] [J],

Dit que madame [B] [T] épouse [Z] [J] ne peut pas être tenue au paiement d’une indemnité d’occupation postérieurement au 26 mai 2021,

Condamne monsieur [P] [Z] [J] à payer à monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] une indemnité d’occupation mensuelle et provisionnelle de 988 € à compter du 1er septembre 2021 et jusqu’à libération complète et effective des lieux,

Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] de leur demande à ce titre,

Condamne solidairement monsieur [L] [N] et madame [D] [C] épouse [N] au paiement des dépens d’appel qui seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle et conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

 


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