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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/02063 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FSCX
Minute n° 22/00369
[Z]
C/
S.C.P. PIERRE BRUART
Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de METZ, décision attaquée en date du 16 Juillet 2021, enregistrée sous le n° 20/001272
COUR D’APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE – TI
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2022
APPELANT :
Monsieur [C] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me David ZACHAYUS, avocat au barreau de METZ
INTIMÉE :
S.C.P. PIERRE BRUART, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL FINANCIERE [Z]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ
DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 8 septembre 2022 tenue par Monsieur MICHEL, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 10 novembre 2022.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Monsieur MICHEL, Président de Chambre
Madame MIZRAHI, Conseiller
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme GUIMARAES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Par jugements du 16 avril et 14 mai 2019, confirmés par deux arrêts du 17 juin 2020, le tribunal de commerce de Nancy a prononcé le redressement judiciaire puis la conversion en liquidation judiciaire de la SARL Société Financière [Z] (ci-après «’la SARL Sofiba’») dont le co-gérant était M. [C] [Z]. La SCP Pierre Bruart a été désignée ès qualités de mandataire judiciaire de la société.
En août 2020, M. [Z] a écrit au mandataire judiciaire pour connaître les modalités de paiement du loyer de la résidence de [Localité 4]. Par courrier du 28 août 2020 puis par sommation interpellative du 25 novembre 2020, le mandataire a demandé à M. [Z] de lui communiquer le bail d’habitation et les justificatifs de règlement des loyers.
Par acte d’huissier du 22 décembre 2020, la SCP Pierre Bruart agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Sofiba, a fait assigner M. [Z] devant le juge des contentieux de la protection de Metz et au dernier état de la procédure, elle a demandé au juge de’:
– à titre principal juger que M. [Z] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un titre d’occupation
– à titre subsidiaire annuler le bail du 1er octobre 2018 conclu entre la SARL Sofiba et M. [Z]
– ordonner l’expulsion de M. [Z] et de tous occupants de son fait, du bien immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 4], cadastré section [Cadastre 5] et [Cadastre 6], avec l’assistance de la force publique au besoin
– condamner M. [Z] à lui verser les sommes de 17.760 euros à titre d’indemnité d’occupation sans droit ni titre du bien depuis le 14 mai 2019 et de 740 euros par mois à titre d’indemnité d’occupation à compter du 14 mai 2021 et jusqu’à la libération effective des lieux
– à titre infiniment subsidiaire, condamner M. [Z] à lui verser les sommes de’22.940 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant de l’occupation des lieux entre le 1er octobre 2018 et le 1er mai 2021 au titre de la convention réglementée non approuvée et 740 euros par mois pour la période postérieure au 1er mai 2021 à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant de l’occupation des lieux jusqu’à la libération effective des lieux
– débouter M. [Z] de l’intégralité de ses demandes,
– le condamner à lui verser une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [Z] s’est opposé aux demandes et a sollicité à titre subsidiaire la réduction de l’indemnité d’occupation à un montant mensuel n’excédant pas 150 euros, à titre infiniment subsidiaire la réduction des dommages et intérêts à un montant mensuel n’excédant pas 150 euros, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 16 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection de Metz a’:
– constaté l’occupation sans droit ni titre par M. [Z] du bien immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 4], cadastré section [Cadastre 5] et [Cadastre 6]
– dit qu’à défaut par M. [Z] d’avoir volontairement quitté le logement deux mois après la signification du commandement d’avoir à libérer les lieux, la SCP Pierre Bruart pourra faire procéder à son expulsion et à celle de tous occupants de son fait, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier
– condamné M. [Z] à payer à la SCP Pierre Bruart une indemnité d’occupation de 17.760 euros pour la période allant du 14 mai 2019 au 14 mai 2021 inclus, avec intérêts légaux à compter du jugement et une indemnité d’occupation mensuelle de 740 euros à compter du 15 mai 2021 jusqu’à parfaite libération des lieux, avec intérêts légaux à compter du jugement pour les indemnités échues et à compter de chaque indemnité pour les indemnités à échoir,
– condamné M. [Z] à verser à la SCP Pierre Bruart la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Le premier juge a relevé que le contrat de location du 1er octobre 2018 produit par M. [Z] a été complété par lui-même, qu’aucun élément ne permet de déterminer l’identité du signataire pour le compte de la société bailleresse, que ce contrat ne figurait pas dans les pièces administratives et économiques remises au mandataire judiciaire dans le cadre de la procédure collective, qu’il n’est pas démontré qu’il a été réalisé en double exemplaire, qu’aucun élément justifie du paiement du loyer et que ce contrat n’a pas été soumis à l’approbation des associés, de sorte que M. [Z] est occupant sans droit ni titre et doit être expulsé.
Sur l’indemnité d’occupation, il a relevé que le défendeur a occupé les lieux sans droit ni titre depuis au moins le 14 mai 2019 ce qui a causé un préjudice à la SARL Sofiba et que son mandataire liquidateur justifie d’un coût locatif pour l’habitation entre 700 et 780 euros. En l’absence de pièces contraires, il a fixé l’indemnité d’occupation mensuelle à 740 euros et a condamné M. [Z] aux sommes indiquées au jugement.
Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour le 16 août 2021, M. [Z] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses dernières conclusions du 16 novembre 2021, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement et de :
– avant dire droit ordonner le sursis à statuer dans l’attente de l’issue des pourvois en cassation concernant les arrêts rendus par la cour d’appel de Nancy RG 19/01317 et 19/01504
– déclarer la SCP Pierre Bruart irrecevable et subsidiairement non fondée en ses demandes et l’en débouter
– à titre subsidiaire réduire à de plus justes proportions l’indemnité d’occupation due sans que le montant mensuel n’excède 150 euros
– condamner la SCP Pierre Bruart au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.
Sur le sursis à statuer, il expose que des pourvois en cassation ont été déposés à l’encontre des arrêts de la cour d’appel de Nancy du 17 juin 2020.
Sur l’existence d’un bail, il soutient qu’il n’est pas occupant sans droit ni titre alors que la SARL Sofiba lui a donné à bail le logement par contrat de location du 1er octobre 2018 pour une durée de 25 ans et un loyer d’un euro, que le contrat de bail est opposable au liquidateur judiciaire, que celui-ci ne démontre pas que le bail aurait été conclu postérieurement, que le nombre de contrats est sans emport, qu’un acte même non ratifié par une assemblée générale reste valable, que le montant du loyer a été fixé en contrepartie du gardiennage et de l’entretien de l’immeuble et que l’intimée doit être déboutée de ses demandes. Enfin il conteste le montant de l’indemnité d’occupation.
Aux termes de ses dernières conclusions du 16 février 2022, la SCP Pierre Bruart demande à la cour de confirmer le jugement, à défaut prononcer la nullité du contrat de bail, débouter M. [Z] de ses demandes et le condamner à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux frais et dépens d’appel.
Sur le sursis à statuer, elle expose que par arrêts du 2 février 2022, la cour de cassation a rejeté les pourvois formés à l’encontre des arrêts de la cour d’appel de Nancy.
Sur le fond, elle soutient que le contrat de bail ne se trouvait pas parmi les pièces administratives et économiques à l’ouverture de la procédure collective, que la preuve de son établissement en double exemplaire n’est pas rapportée en violation de l’article 1375 du code civil, que les mentions manuscrites du contrat ont été complétées par M. [Z], que l’identité du signataire pour le compte de la société Sofiba n’est pas mentionnée, qu’aucune approbation du bail par les associés n’est justifiée en violation de l’article L.223-19 du code de commerce, qu’il a été conclu pour une durée de 25 ans dérogatoire aux dispositions de la loi de 1989, que M. [Z] n’a jamais justifié du paiement du loyer, de sorte que le contrat de bail est dépourvu de force probante et qu’il est occupant sans droit ni titre. Subsidiairement, elle expose au visa de l’article 1709 du code civil que la nullité du contrat est encourue pour défaut de contrepartie, le loyer fixé à un euro par mois étant dérisoire, que la contrepartie ne peut être l’obligation de surveillance et d’entretien des lieux alors que cette obligation pèse sur tout locataire, qu’aucune facture de gardiennage des locaux n’a été retrouvée dans la comptabilité de la Sofiba et que le contrat de bail est un faux. Elle précise que M. [Z] a été mis en examen et qu’une mesure d’interdiction d’occupation du logement a été ordonnée. Elle sollicite donc la confirmation du jugement en ce qu’il a ordonné l’expulsion de M. [Z].
Sur l’indemnité d’occupation, elle expose avoir mandaté un professionnel afin d’évaluer la valeur locative du bien, que M. [Z] qui a refusé de laisser l’expert entrer dans les lieux ne peut se plaindre d’un défaut de contradiction lors de l’évaluation, que la valeur locative de l’immeuble a été évaluée entre 700 à 780 euros par mois, qu’il n’est démontré aucune erreur dans l’appréciation et conclut à la confirmation du jugement.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la demande de sursis à statuer
Il résulte des pièces produites par l’intimé que les pourvois formés par M. [Z] à l’encontre des arrêts de la cour d’appel de Nancy du 17 juin 2020 ont été rejetés par la Cour de cassation par deux arrêts du 2 février 2022. En conséquence, la demande de sursis à statuer est rejetée.
Sur l’existence d’un contrat de bail
En application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
En l’espèce, le premier juge a justement relevé que le contrat de location du 1er octobre 2018 produit par M. [Z] a été complété par lui-même, l’écriture manuscrite sur le contrat étant identique à celle du courrier qu’il a adressé au mandataire judiciaire en août 2020, que l’identité du signataire pour le compte de la société bailleresse n’est pas établie, que le contrat n’a pas été réalisé en double exemplaire en violation de l’article 1375 du code civil et que M. [Z] ne justifie par aucune pièce du paiement effectif du loyer. Eu égard à ces éléments, le contrat de bail produit par l’appelant est dépourvu de force probante et c’est à juste titre que le premier juge a retenu qu’il ne justifie pas d’un titre d’occupation des lieux.
Si M. [Z] soutient que les actes sous seing privé faits par le débiteur mis en redressement ou liquidation judiciaire font foi de leur date par eux-mêmes, ce moyen est inopérant puisque le mandataire judiciaire remet au cause l’existence même d’un contrat de bail en contestant la validité du document produit par l’appelant, et non pas la date à laquelle celui-ci a été conclu, peu importe que cette date soit antérieure ou postérieure à la date d’ouverture de la procédure collective. La question de la validité d’une convention non ratifiée par une assemblée générale est également sans emport sur le sort du litige eu égard à ce qui précède sur l’absence de contrat de bail.
Sur les lieux occupés, M. [Z] ne démontre par aucun élément probant que son occupation se limitait à la parcelle [Cadastre 5], alors que dans le courrier qu’il a adressé au mandataire judiciaire en août 2020, il fait mention de la résidence de [Localité 4] [Adresse 8] sans précision complémentaire. C’est donc à juste titre, que le premier juge a retenu les parcelles [Cadastre 5] et [Cadastre 6] ainsi qu’il résulte de l’acte notarié du 5 juillet 2018.
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il a dit que M. [Z] était occupant sans droit ni titre et a ordonné son expulsion.
Sur l’indemnité d’occupation
En l’espèce, le premier juge a retenu que M. [Z] occupait les lieux continuellement sans droit ni titre depuis au moins le 14 mai 2019 et a fixé l’indemnité d’occupation mensuelle à 740 euros en se fondant sur l’avis de valeur locative du 21 janvier 2021 établi par la Sarl Grevot Conseil.
Si l’appelant conteste la valeur locative retenue, il est observé qu’il ne produit aucune pièce objective de nature à la remettre en cause. Il ne justifie pas plus l’existence d’une contrepartie en nature liée à des travaux de gardiennage ou entretien des locaux. En conséquence, le jugement est confirmé.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.
M. [Z], partie perdante, devra supporter les dépens d’appel et il est équitable qu’elle soit condamné à verser à la SCP Pierre Bruart la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DEBOUTE M. [C] [Z] de sa demande de sursis à statuer ;
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions’;
Y ajoutant,
DEBOUTE M. [C] [Z] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [C] [Z] à verser à la SCP Pierre Bruart ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Financière [Z] a somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [C] [Z] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT