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Questions |
Avis et Réponses |
CEPC 10021801 Livraison-limitation : Est-il légal pour un fournisseur de contingenter (limiter les livraisons), unilatéralement ses livraisons, notamment sur des produits incontournables et ce malgré les termes de la commande ? |
Le fait de ne pas honorer une commande passée conforme au contrat engage la responsabilité contractuelle du vendeur sauf s’il est en droit d’invoquer un cas d’inexécution justifiée ou un cas de force majeure. Un fournisseur peut toujours introduire dans ses CGV une disposition se réservant la possibilité de contingenter ses livraisons (par exemple au regard de sa capacité de production). Par contre, dans le cas où la vente peut être qualifiée de parfaite (acceptation par le fournisseur de la livraison de 100 au moyen, par exemple, d’un accusé de réception), le fait de ne livrer qu’une quantité de 80 constitue clairement un manquement à ses obligations contractuelles. Avant de saisir le juge pour obtenir du fournisseur la bonne exécution du contrat ou une réparation du préjudice éventuellement subi, encore conviendrait-il d’interroger ce dernier sur les raisons de son manquement à ses obligations, surtout dans le cas où celui-ci revêt un caractère exceptionnel. Il ne serait pas illégitime que le fournisseur en cause gère cette pénurie momentanée en appliquant, par exemple, des quotas de livraisons proportionnels aux volumes commandés par ses clients. En cas d’incidents répétés de cette nature, il n’est alors pas impossible qu’ils découlent d’une stratégie délibérée de la part du fournisseur visant à privilégier sans raisons objectives certains distributeurs ou circuits de distribution. Dans une telle situation, cette stratégie pourrait relever du droit des pratiques anticoncurrentielles. |
CEPC 10021802 Négo préavis : Dans le cas où un accord sur le nouveau tarif proposé par le fournisseur ne pourrait être trouvé avec le distributeur, le fournisseur peut-il rompre les relations commerciales sans respecter les dispositions en matière de préavis applicables à la rupture des relations commerciales ? |
Au cours de la période de renégociation du contrat annuel, engage la responsabilité de son auteur le fait de rompre brutalement une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de cette relation. Les dispositions de cet article ne s’appliquent tout d’abord que pour autant que soit démontré le caractère établi de la relation. Le fait que les négociations entre les parties s’établissent selon un rythme annuel ne fait pas obstacle à la démonstration de cette caractéristique. Dans le cas d’espèce, il s’avère que les parties n’ont pas réussi à s’accorder sur le prix, élément essentiel de la négociation commerciale. Le fait que le fournisseur interrompe ses ventes auprès du distributeur en cause n’implique pas pour autant que cette décision puisse être automatiquement qualifiée de rupture brutale d’une relation commerciale établie. Il conviendrait, pour le moins que soient connues les raisons pour lesquelles aucun accord n’a pu être trouvé sur le nouveau tarif figurant dans les CGV du fournisseur. Muni de ces informations et compte tenu des circonstances de l’espèce, il appartiendra au juge saisi d’un éventuel contentieux de déterminer laquelle des deux parties est réellement à l’origine de la cessation de la relation commerciale. NB : « la réponse serait identique si la rupture était le fait du distributeur ». |
CEPC 10021803 Négo préavis : Au même titre que le refus en bloc des CGV d’un fournisseur, par un distributeur, avant l’ouverture de la négociation, « revient à ne pas vouloir traiter avec ce fournisseur », le fait pour un fournisseur de refuser catégoriquement toute négociation de ses CGV avec un distributeur ne revient-il pas à ne pas vouloir traiter avec ce distributeur, justifiant ainsi l’interruption des relations commerciales ? |
L’hypothèse envisagée est celle d’une relation commerciale établie, au sens de l’article L 442-6-I, 5° du code de commerce, et de la négociation annuelle du plan d’affaires entre la grande distribution et ses fournisseurs. En disposant que les CGV du fournisseur constituent le socle de la négociation commerciale, l’article L 441-6 reconnaît l’existence d’une possibilité de négocier ces CGV. Cette possibilité s’est trouvée consacrée par la LME, notamment en ce qu’elle a supprimé l’interdiction des pratiques discriminatoires. Les CGV négociables sont, selon cet article, les conditions de vente ; le barème des prix unitaires ; les réductions de prix ; les conditions de règlement. Deux cas sont à envisager : – les accords arrivés à leur terme prévoyaient le principe d’une négociation pour la période suivante. Négocier constitue alors une obligation contractuelle. La liberté de ne pas conclure ne supprime pas le devoir de chercher à le faire. Cette obligation de négocier doit être exécutée de bonne foi (article 1134 alinéa 3 du code civil). Celui qui refuserait de négocier ou ne le ferait pas de bonne foi engagerait sa responsabilité contractuelle. Il engagerait également sa responsabilité délictuelle à l’égard des tiers, car il serait considéré comme l’auteur de la rupture brutale de la relation commerciale. – les accords arrivés à leur terme ne prévoyaient pas le principe d’une négociation pour la période suivante. Si l’une des parties demande à poursuivre la relation commerciale, le refus opposé par l’autre partie d’ouvrir des négociations pourrait être appréhendé par le juge comme une volonté de rupture, considérant les circonstances de fait, notamment l’existence d’une négociation lors de chaque nouvelle période contractuelle antérieure. Ainsi, dans un domaine qui n’est pas celui de la grande distribution, la Cour d’appel de Paris a estimé que lorsqu’une entreprise n’a aucunement accepté de négocier, la rupture est de son fait (CA Paris, 3 juillet 2008). Il en serait de même en cas de simulacre de négociation de la part d’une partie : si une négociation s’ouvre, elle doit se dérouler dans le respect du devoir de loyauté de chacun des partenaires envers l’autre. Enfin, quel que soit le contenu des accords précédents, le refus de négocier pourrait être analysé comme la tentative de soumettre un partenaire commercial à des obligations – celles résultant de nouvelles CGV – créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Si les parties au contrat ne sont pas dans une relation commerciale établie et en l’absence de clause contractuelle stipulant une obligation de négocier, chaque partie est libre de ne pas négocier sous réserve que ce refus ne procède pas d’une entente anticoncurrentielle ou d’un abus de domination. |
CEPC 10021804 Pénalités : Peut-il être considéré comme abusif le fait de déduire une pénalité sur facture alors que sa justification a été présentée, * une première fois au fournisseur puis ultérieurement par deux relances* et que celui-ci, invité à accepter ou refuser la déduction, a systématiquement fait « le mort », car il refuse toute reconnaissance écrite ? |
L’article L 442-6-I, 8° du code de commerce n’interdit pas la déduction des pénalités sous réserve que la dette soit certaine, liquide et exigible et que le fournisseur ait été en mesure de contrôler la matérialité du grief dans un délai et selon des modalités conformes aux bonnes pratiques professionnelles. |
CEPC 10021805 Refus de livraison de laboratoires : Est-ce légal : des laboratoires et des industries pharmaceutiques refusent de livrer à des coopératives de pharmaciens pour continuer de maitriser leur réseau de distribution ? |
Après avoir vu le jour en 1940 et connu différents avatars, l’interdiction du refus de vente entre professionnels a été « dépénalisée » en 1986 et définitivement supprimée par la « loi Galland » sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales du 1er juillet 1996. Considéré comme une forme extrême de discrimination, le refus de vente a pu connaître une forme résiduelle de prohibition à laquelle la LME a mis fin en abrogeant l’interdiction des pratiques discriminatoires. Actuellement, un refus de vente peut toutefois tomber sous le coup de la loi : – s’il procède d’une entente anticoncurrentielle ou est l’expression d’un abus de domination (article 101 s du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ; article L 420-1 s. du code de commerce) ; – s’il constitue la rupture brutale d’une relation commerciale déjà établie (article L 442-6-I, 5° du code de commerce), – s’il traduit la soumission d’un partenaire commercial à une obligation, celle de ne pas acheter ou de ne pas vendre, qui crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties (article L 442-6-I, 2° du code de commerce) ; – s’il constitue une faute entraînant la responsabilité civile de son auteur, faute que la suppression de l’interdiction spécifique rend plus difficile à démontrer (article 1382 du code civil). C’est au regard de ces textes que devraient être analysés des refus de vente opposés par des laboratoires pharmaceutiques à des coopératives de pharmaciens. |
Délibéré et adopté par la Commission d’examen des pratiques commerciales en sa séance plénière du 18 février 2010, présidée par Madame Catherine VAUTRIN.
Fait à Paris, le 18 février 2010
La présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales,
Catherine VAUTRIN