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La Commission d’examen des pratiques commerciales,
Vu la lettre enregistrée le 10 décembre 2013 sous le numéro 13-137, par laquelle un avocat interroge la Commission sur le champ d’application territorial des règles du code de commerce relatives aux délais de paiement.
Vu les articles L440-1 et D440-1 à D440-13 du code de commerce ;
Le rapporteur entendu lors de ses séances plénières des 21 mai 2015 et 14 janvier 2016 ;
En l’état du droit positif, on peut penser que les sanctions administratives qui viennent assortir le dépassement des délais impératifs de paiement pourront être mises en œuvre dans les rapports entre un vendeur français et un acheteur étranger malgré la soumission du contrat à la loi interne d’un Etat étranger, notamment lorsque l’ensemble de la relation commerciale se déroule en France.
En revanche, en présence d’une clause attributive de juridiction désignant une juridiction étrangère et d’une clause d’electio juris désignant une loi étrangère, le juge étranger saisi d’une action de nature civile garde les mains très libres pour refuser de tirer les conséquences civiles de la violation du droit français.
Il ne pourrait en aller différemment que si – en dépit de l’établissement à l’étranger de l’acheteur – l’ensemble de la relation commerciale se déroulait en France.
La Commission d’examen des pratiques commerciales a été saisie par un avocat afin de recueillir son avis sur le champ d’application dans l’espace des règles du code de commerce relatives aux délais de paiement. Plus précisément, la question est de savoir s’il est possible d’écarter l’application des dispositions de l’article L441-6 plafonnant les délais de paiement à un contrat international de vente de marchandises conclu entre un fournisseur français et un client étranger (établi dans un Etat membre de l’Union européenne) lorsque ce contrat est soumis à la compétence du juge et de la loi de l’Etat étranger dans lequel le client est établi. Dans une telle occurrence, l’auteur de la saisine interroge la Commission sur le point de savoir s’il serait toujours possible pour l’Administration française de poursuivre les parties au contrat de vente devant le juge français sur le fondement des dispositions du code de commerce.
La loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation ayant en partie modifié les sanctions applicables en cas de violation des règles de l’article L441-6 du code de commerce plafonnant les délais de paiement, il convient de s’interroger au préalable sur l’application des nouvelles dispositions dans le temps (1) avant de répondre à la question principale relative à leur application dans l’espace (2).
En vertu de l’article L.441-6 I alinéa 9 du code de commerce (issu de la loi de modernisation de l’économie (LME) n°2008-776 du 4 août 2008 et modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques) : « Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser soixante jours à compter de la date d’émission de la facture. Par dérogation, un délai maximal de quarante-cinq jours fin de mois à compter de la date d’émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu’il ne constitue pas un abus manifeste à l’égard du créancier ».
Afin de renforcer l’effectivité de la lutte contre les retards de paiement, la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a en partie modifié la nature des sanctions spéciales prévues par le code de commerce, singulièrement en cas de dépassement du délai impératif (désormais exposé à des sanctions administratives). Auparavant, le fait de soumettre un partenaire à des conditions de règlement qui ne respectaient pas ce plafond engageait la responsabilité de son auteur (l’acheteur) et l’exposait au prononcé de sanctions – et notamment d’une amende – civiles dans les termes de l’article L. 442-6 III du Code de commerce (art. L.442-6 I 7° anc. C. com.). La loi relative à la consommation a abrogé l’article L. 442-6 I 7° du Code de commerce pour substituer à ces sanctions civiles le prononcé d’amendes administratives (Loi relative à la consommation, art. 123 I, II, III, V).
Avec la loi n°2014-628 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux TPE, c’est tout le dispositif relatif aux délais de paiement qui a été dépénalisé. Ainsi, aux termes de l’article L. 441-6 VI du code commerce : « Sont passibles d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale le fait de ne pas respecter les délais de paiement mentionnés aux huitième, neuvième et onzième alinéas du I du présent article (…) ».
Ce nouveau dispositif étant d’application immédiate, il s’applique à tous les faits postérieurs à son entrée en vigueur.
La question est ici de savoir si le plafonnement des délais de paiement s’impose dans les rapports entre un vendeur établi en France et un acheteur établi dans un autre Etat membre de l’Union européenne lorsque le contrat donne compétence au juge et à la loi de l’Etat étranger de l’acheteur. Cette question délicate n’a pas été tranchée à ce jour par la jurisprudence.
A titre liminaire, on peut se demander si l’application dans l’espace d’un texte assorti de sanctions administratives dépend ou non des instruments de droit international privé.
Relevant du droit public et du juge administratif, le jeu des sanctions administratives ne devrait souffrir a priori aucun conflit de lois ou de juridictions. Les règlements européens applicables à ces questions excluent d’ailleurs fermement « la matière administrative » (article 1er §1er des règlements (CE) n° 1215/2012 du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, n°593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles et n° 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles, dits « Bruxelles I bis», « Rome I » et «Rome II»).
L’application dans l’espace des dispositions assorties de sanctions administratives serait alors déterminée de la même façon que pour celles qui sont exposées à des sanctions pénales (v. en ce sens J. Cl. Droit international, Fasc. 571-20 par C. Kessedjian et S. Cohen Elbaz, Contrats de distribution – Introduction générale – Droit international privé, n°11 et s ; CEPC Avis 14-05 et 13-07).
Cette analyse peut s’appuyer sur une doctrine autorisée qui a admis l’absence de conflits de lois en droit public aux motifs que chaque Etat souverain dispose en la matière d’une compétence matérielle exclusive qu’elle tient du droit international public et qui n’entre pas à proprement parler en conflit avec celle des autres Etats (P. Mayer, « Droit international privé et droit international public sous l’angle de la notion de compétence », RCDIP 1979 I n°16 p.19 ; D. Chilstein, Droit pénal international et lois de police. Essai sur l’application dans l’espace du droit pénal accessoire, Dalloz, nouv. Bibl. th. 2003, n°469 p.258).
Au demeurant, le jeu des sanctions administrées par l’Autorité de la concurrence ne dépend d’aucune façon des règlements européens régissant les conflits de lois et de juridictions.
Dans le même temps, il est permis de considérer que les sanctions administratives n’ont vocation à s’appliquer que si l’obligation litigieuse est soumise au droit français.
Si elle est de nature contractuelle, c’est le règlement Rome « I » (préc.) qui s’applique à la détermination du droit applicable, sauf pour les ventes qui relèvent encore en France de la convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d’objets mobiliers corporels. A l’inverse, si elle est de nature extra-contractuelle, il convient de se référer au règlement « Rome II » (préc.).
La qualification contractuelle ou extra-contractuelle dépend de l’objet de l’action (TC Paris 7 mai 2015, Expedia, RG n°2015000040 relevant que l’article L.442-6 du commerce entend réprimer aussi bien des comportements délictuels de marché que des clauses contraires à l’ordre public, ce qui relève de la matière extra-contractuelle dans le premier cas, de la matière contractuelle dans le second).
Pour la mise en œuvre des règles de conflit de lois d’origine interne (droit commun antérieur à l’entrée en vigueur du règlement « Rome II »), la qualification extra-contractuelle a été retenue en cas d’action en responsabilité fondée sur l’article L. 442-6 I 5° du Code de commerce interdisant toute rupture brutale d’une relation commerciale établie (Cass. com. 21 octobre 2008, n°07-12336 ; Cass. com. 25 mars 2014, n°12-29534 ; Cass. com. 20 mai 2014, n° A12-26705, P 12-26.970 et A 12-29281 ; comp. pour la détermination de la juridiction compétente, Cass. com. 15 septembre 2009, n°07-10493 et Cass. com. 18 janvier 2011, n°10-11885). Plus généralement, la jurisprudence a eu l’occasion d’analyser comme une faute de nature extra-contractuelle la violation d’une obligation de police administrative (Civ. 3e 16 mars 2005, n°03-17875).
Pour la mise en œuvre des règlements relatifs aux conflits de lois, il convient toutefois de privilégier une interprétation autonome (non dépendante de conceptions nationales) fondée sur le système et les objectifs des règlements et en vertu desquels la qualification contractuelle pourrait l’emporter (v. CJCE 8 mars 1988, aff. 9/87, Arcado, à propos de la rupture d’un contrat d’agence commerciale ; v. également CJUE 13 mars 2014, Brogsitter, aff. C-548/12 « des actions en responsabilité civile telles que celles en cause au principal, de nature délictuelle en droit national, doivent, néanmoins, être considérées comme relevant de la «matière contractuelle» (…) si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles, telles qu’elles peuvent être déterminées compte tenu de l’objet du contrat » ; v. également TC Paris 7 mai 2015, Expedia préc.).
S’agissant des délais de paiement, le fait d’imposer de façon illicite des délais dépassant le plafond légal a vocation à être accepté dans le contrat. Pour ne rien négliger, les deux qualifications seront donc envisagées (comp. CEPC avis n°1310).
La possibilité pour les parties de choisir la loi applicable au contrat est admise tant par l’article 3 du règlement « Rome I » que par l’article 2 de la convention de La Haye du 15 juin 1955 (préc.).
Dans le cas soumis à l’examen de la Commission, le choix d’une loi étrangère dans le contrat est donc pleinement efficace. Il ne pourrait en aller différemment, en vertu de l’article 3§3 du règlement « Rome I » (préc.), que si l’ensemble de la relation commerciale se déroulait matériellement en France (DGCCRF Avis n°09-06 ; Rapport annuel CEPC 2009-2010 p.57).
L’article L.441-6 pourrait toutefois s’imposer à titre de loi de police (article 9 du règlement « Rome 1 » préc.; comp. article 6 de la convention de La Haye préc. évoquant plus largement la possibilité d’écarter l’application de la loi désignée « pour un motif d’ordre public »).
S’il est pleinement admis que les dispositions françaises qui appréhendent les pratiques anticoncurrentielles s’imposent à titre de lois de police en présence de pratiques affectant le marché français, le droit français des pratiques restrictives de concurrence suscite davantage de débats (v. retenant la qualification de loi de police, Lyon 9 septembre 2004, RG n°2004/00108 et Paris 4 octobre 2012, à propos de la rupture brutale d’une relation commerciale établie ; v. également TC Paris 7 mai 2015, Expedia, préc. retenant la qualification de loi de police à propos de l’article L. 442-6 I 2° du code de commerce ; comp. Civ. 1e 3 mars 2009 n°07-16527 : « les dispositions de la loi du 15 mai 2001 modifiant l’article L.441-6 du Code de commerce répondent à des considérations d’ordre public particulièrement impérieuses » pour l’application de la loi dans le temps).
Sous l’empire du règlement « Rome I » (préc.), cette qualification est désormais soumise à la vérification de « l’intérêt public » promu par la loi de police, ce qui devrait pouvoir se déduire chaque fois que des sanctions punitives (amende) sont encourues.
Au lendemain de la LME, la DGCCRF a indiqué qu’elle veillerait « à ce que les débiteurs établis en France règlent leurs créanciers résidant à l’étranger sans entraîner de distorsion de concurrence vis-à-vis d’opérateurs résidant en France » et « à ce que des créanciers français ne se voient pas imposer des délais de paiement anormalement longs par leurs débiteurs, en particulier ceux qui utiliseraient des centrales de paiement à l’étranger dans le seul but d’échapper aux dispositions nationales » (avis n°09-06).
On a pu en déduire que le plafonnement des délais de paiement avait vocation à s’appliquer lorsque les produits contractuels sont destinés au marché français. Cette application territoriale permet d’assurer un meilleur équilibre des relations commerciales dans les filières (alimentaires et non alimentaires) et par là-même une meilleure égalité des conditions de concurrence entre opérateurs français et étrangers sur le marché français. Elle ne devrait pas souffrir de l’établissement à l’étranger de l’acheteur lorsque les produits sont destinés au marché français. Quel que soit le lieu d’établissement de l’acheteur, c’est toujours le marché français qui est concerné. On songe ici aux hypothèses de délocalisation abusives ou frauduleuses des commandes, les produits étant en réalité destinés au marché français (v. Rapport annuel CEPC 2009-2010 p.57).
Lorsque les marchandises sont destinées au marché étranger, une atteinte aux intérêts économiques français n’est pourtant pas exclue si les pratiques de « crédit inter entreprises » imposées par des acheteurs étrangers produisent des effets en chaîne ou systémiques sur « l’amont » de la filière qui se trouve localisé en France. L’application du dispositif français dans ce cas est également de nature à assurer une égalité entre exportateurs français.
Dans les rapports entre Etats membres de l’Union européenne, cette analyse est compatible avec la directive n°2000/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 juin 2000 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales (refondue par la directive 2011/7/UE du 16 février 2011) qui est d’harmonisation minimale. Elle paraît également encouragée, dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire du moins, par la communication de la Commission du 15 juillet 2014 (COM 2014, 472 final) qui – même si elle n’envisage pas la question des délais de paiement – propose au point 5-3 aux Etats d’ « appliquer les mêmes critères et méthodes d’application aux opérateurs de marché locaux et étrangers ».
A supposer que le plafonnement des délais de paiement puisse s’analyser comme une loi de police applicable dans les rapports entre un vendeur français et un acheteur étranger, deux circonstances sont toutefois de nature à en compromettre l’application en présence d’un contrat soumis à la loi et aux juridictions du pays (membre de l’UE) de l’acheteur.
Une première difficulté provient de l’applicabilité de la convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises. En réponse à deux questions parlementaires relatives à l’applicabilité du plafond légal au ventes à l’exportation, le ministre du commerce extérieur a estimé en effet que chaque fois que l’application de la convention n’était pas écartée par les parties (ce qui ne peut en principe se déduire du simple choix d’une loi étrangère si c’est celle d’un pays ayant ratifié la convention), les délais de paiement pouvaient être fixés librement en vertu de son article 59 sans souffrir aucun plafond tiré du droit national (Rep. Min. à QE n°22748, JO 30 juillet 2013, p.8237 ; Rep. Min. à QE n°22749, JO 1er juillet 2014, p.5509) autre que celui s’infère de la transposition dans le droit des Etats membres de la directive 2011/7/UE aux termes de laquelle les délais de paiement convenus entre les parties ne doivent pas être manifestement abusifs à l’égard du créancier (préc.). Il ne pourrait en aller différemment que si le dépassement du plafond légal était sanctionné par la nullité (v. article 4 de la convention et les obs. de Cl. Witz, D. 23 avril 2015 p. 890). Or si une clause contraire à l’article L.441-6 du code de commerce peut certainement encourir la nullité dans les termes du droit commun, le dépassement du plafond légal ne fait pas partie des causes spéciales de nullité énoncées par l’article L.442-6 II du code de commerce.
Une autre difficulté provient de la circonstance qu’en plafonnant les délais de paiement, le législateur français est allé au-delà des prescriptions de la directive 2011/7/UE (préc.), ce qui n’est pas en soi discutable s’agissant d’une directive d’harmonisation minimale. Il n’en demeure pas moins qu’en l’espèce, le contrat a été soumis à la loi d’un autre Etat membre de l’UE qui, on peut le supposer, a transposé la directive. Dans ce contexte, l’applicabilité en tant que loi de police de la loi française, qui va au-delà des exigences de la directive d’harmonisation minimale, suppose de démontrer que la loi française poursuit des objectifs propres par rapport à ceux poursuivis par la directive (v. CJUE 17 octobre 2013, aff. C-184/12). On peut considérer que tel est le cas dans la mesure où la loi française ne vise pas seulement à limiter les abus inter partes mais aussi à éviter la répercussion des délais de paiement excessifs sur l’amont de la filière.
L’applicabilité du droit français dépend alors du règlement « Rome II » (préc.).
S’agissant de la responsabilité encourue pour avoir imposé à un contractant des délais de paiement dépassant le plafond légal, on peut se demander si l’article 6 relatif à la concurrence déloyale et aux actes restreignant la libre concurrence pourrait trouver à s’appliquer dans les rapports entre un vendeur français et un acheteur étranger (v. CEPC avis n°1508).
L’article 6§1 énonce que « la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’un acte de concurrence déloyale est celle du pays sur le territoire duquel les relations de concurrence ou les intérêts collectifs des consommateurs sont affectés ou susceptibles de l’être ». Il a vocation en cela à s’appliquer à des comportements délictuels de marché.
Interprété strictement, ce texte ne permet guère d’appliquer la loi française aux délais de paiement pratiqués par l’acheteur étranger de produits ou services destinés au marché étranger.
Si l’on en retient une interprétation large, on peut toutefois considérer que ce texte s’applique à l’ensemble des pratiques commerciales déloyales qui ont des répercussions sur l’amont de la filière et désigne comme loi applicable celle du pays sur le territoire duquel les relations commerciales sont affectées ou susceptibles d’être le long de la chaîne économique. En présence d’une pratique commerciale déloyale envers un vendeur établi en France qui a des répercussions sur l’amont de la filière en France, la loi française pourrait donc être désignée.
Dans tous les autres cas (article 6§2 renvoyant à l’article 4), le choix par les parties d’une loi étrangère (article 14 du règlement) devrait produire tous ses effets, sauf dans l’hypothèse où l’ensemble de la relation commerciale se déroule en France (article 14 §2) et sous réserve de l’intervention des lois de police du for (article 16).
Quelle que soit la matière du litige, on ajoutera pour finir que dans les rapports entre les parties contractantes, la stipulation d’une clause attributive de juridiction doit produire tous ses effets en dépit de l’applicabilité d’une loi de police française (v. Cass. Civ. 1e 22 octobre 2008, n°07-15823 ; Cass. Com. 24 novembre 2015, n°14-14924 ; v. toutefois pour la mise en œuvre de l’article 101 TFUE dans une action civile consécutive à une décision de condamnation, CJUE 21 mai 2015 aff.C-352/13 ; comp. Cass. com. 7 octobre 2015 n°14-16898) et neutralise ainsi, chaque fois qu’elle n’est pas désignée par la règle de conflit l’application de la loi française, alors qualifiable au mieux de loi de police étrangère. Pour autant, la clause attributive de juridiction n’a aucune incidence sur la possibilité pour l’administration française de sanctionner une pratique contraire au droit français qui entre dans son champ d’application (comp. à propos de la possibilité pour le ministre de l’économie de saisir les juridictions françaises sur le fondement de l’article L.442-6 III du code de commerce, TC Paris 7 mai 2015, Expedia préc.).
En l’état du droit positif, on peut penser que les sanctions administratives qui viennent assortir le dépassement des délais impératifs de paiement pourront être mises en œuvre dans les rapports entre un vendeur français et un acheteur étranger malgré la soumission du contrat à la loi interne d’un Etat étranger, notamment lorsque l’ensemble de la relation commerciale se déroule en France.
En revanche, en présence d’une clause attributive de juridiction désignant une juridiction étrangère et d’une clause d’electio juris désignant une loi étrangère, le juge étranger saisi d’une action de nature civile garde les mains très libres pour refuser de tirer les conséquences civiles de la violation du droit français.
Il ne pourrait en aller différemment que si – en dépit de l’établissement à l’étranger de l’acheteur – l’ensemble de la relation commerciale se déroulait en France.
Délibéré et adopté par la Commission d’examen des pratiques commerciales en sa séance plénière du 14 janvier 2016, présidée par Madame Annick LE LOCH
Fait à Paris, le 14 janvier 2016
La présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales