Augmentation de capital : décision du 30 juin 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/03393
Augmentation de capital : décision du 30 juin 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/03393
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N° RG 21/03393 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I3VV

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 30 JUIN 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

X 19-14.83

COUR DE CASSATION DE PARIS 01 du 31 Mars 2021

APPELANTE :

Madame [R] [L] veuve [X]

née le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 13]

[Adresse 4]

[Localité 8] (ITALIE)

représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN

INTIMES :

Monsieur [G] [M]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 14]

[Adresse 10]

[Localité 11]

représenté par Me Yannick ENAULT de la SELARL YANNICK ENAULT-CHRISTIAN HENRY, avocat au barreau de ROUEN et assisté par Me Olivier PUECH de la SAS BREDIN PRAT, avocat au barreau de PARIS, plaidant

S.A. [Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 6]

représentée par Me Yannick ENAULT de la SELARL YANNICK ENAULT-CHRISTIAN HENRY, avocat au barreau de ROUEN et assistée par Me Olivier PUECH de la SAS BREDIN PRAT, avocat au barreau de PARIS, plaidant

S.A. [Adresse 12] prise en la personne de Me [J] [V] ès qualités d’administrateur judiciaire

[Adresse 7]

[Localité 9]

représentée et assistée par Me Camille PERCHERON de la SCP STREAM, avocat au barreau du HAVRE

SELARL Bernard BEUZEBOC ès qualités de mandataire judiciaire de la société [Adresse 12]

[Adresse 3]

[Localité 5]

non constitué bien que régulièrement assigné par acte d’huissier de justice le 10 septembre 2021 à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR  :

Lors des débats et du délibéré :

Madame FOUCHER-GROS, Présidente

M. MANHES, Conseiller

M. URBANO, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme DEVELET, Greffier

MINISTERE PUBLIC : en présence de M. PUCHEUS, avocat général

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

DEBATS :

A l’audience publique du 28 Avril 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 16 Juin 2022, prorogé au 30 juin 2022

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Rendu publiquement le 30 Juin 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame FOUCHER-GROS, Présidente et par Mme DEVELET, Greffier.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :

La SA [Adresse 12], haras dont le siège social est situé [Adresse 12], exerce une activité d’élevage de chevaux de courses hippiques

Sur assignation de la Mutualité Sociale Agricole, le tribunal de commerce de Lisieux a, par jugement du 17 décembre 2014,ouvert à son encontre une procédure de redressement judiciaire, désignant la SELARL FHB, prise en la personne de Me [J] [V], en qualité d’administrateur judiciaire et la SELARL Bernard Beuzeboc en qualité de mandataire judiciaire.

Lors de l’ouverture de la procédure, la SA [Adresse 12] était dirigée par [H] [X], président du conseil d’administration-admnistrateur, et ce depuis le décès de son père, M. [C] [X] en 2005. Les administrateurs en étaient M. [U], Mme [L] veuve [X], M. [Z].

Son capital social de 37 500 € divisé en 2460 actions était réparti de la manière suivante :

– La société Hyppokrene Aktiengesellschaft : 90,2% (2219 actions)

– La société SER-FID Italiana Fiduciaria Edi Revision Spa : 9,6% (236 actions)

– M. [I] [U] : 0,04% (1 action)

– M. [F] [Z] : 0,04% (1 action)

– M. [E] [A]: 0,04% (1 action)

-M. [H] [X] : 0,04% (1 action)

-Mme [O] [B] : 0,04% (1 action)

Le 26 avril 2016, le liquidateur de la société Hyppokrene (société Hyppokrene Aktiengesellschaft, société de droit liechtensteinois) a vendu aux enchères la participation détenue par celle-ci au capital de la société [Adresse 12] et la société Laris Fiduciara a acquis 2219 actions de la société [Adresse 12].

A l’audience du 7 décembre 2016, le tribunal de commerce de Lisieux a :

-procédé à l’examen du projet de plan de cession déposé par M. [P] [T] (RG16.4874),

-procédé à l’examen du projet de plan de redressement par voie d’apurement du passif de la SA [Adresse 12] élaboré par M. [P] [T] (RG 16.4899),

-procédé à l’examen du projet de plan de redressement par voie d’apurement du passif élaboré par la SA [Adresse 12] (RG 16.4898),

-procédé à l’examen du projet de plan de redressement de la SA [Adresse 12] élaboré par M. [G] [M] (RG 16.4900)

Par deux jugements distincts du 21 décembre 2016, le tribunal a

-(RG 16.4898) : rejeté le projet de plan de redressement par voie d’apurement du passif élaboré par la SA [Adresse 12] et la demande de désintéressement des créanciers,

-(RG 16.4900) :donné acte à Monsieur [G] [M] des engagements qu’il a souscrits et dont il sera garant de la bonne exécution,

-adopté par conséquent le plan de redressement de la SA [Adresse 12] dans les termes de la proposition élaborée par Monsieur [G] [M] déposée au greffe sous le n° D/216/4623,

-dit que la reconstitution des capitaux propres sera réalisée en deux temps, le capital social devant être réduit à zéro afin d’apurer une partie des pertes avant d’être augmenté en vue d’apporter de nouveaux fonds propres à la société [Adresse 12], cette augmentation de capital d’un montant de 1.200.000 € sera réservée et suivie d’une nouvelle réduction du capital social à hauteur de 1.163.000 € afin de ramener les capitaux propres au niveau imposé par les textes, étant précisé qu’à l’issue le capital social sera de 37.000 €, le report à nouveau négatif de 5.713 € et les capitaux propres de 31.287 €,

-donné acte à Monsieur [G] [M] de ce qu’il prend l’engagement de maintenir en compte courant la somme de 2.000.000 € apportée sur les quatre années à venir et à ne s’en faire rembourser que par conversion en capital,

-donné également acte à Monsieur [G] [M] de ce qu’il s’engage à ne procéder à aucune cession d’actif immobilier appartenant à la SA [Adresse 12] dans les cinq années,

-maintenu la SELARL FHB, prise en la personne de Me [J] [V], en qualité d’administrateur judiciaire avec pour mission d’effectuer tous les actes permettant la mise en place du plan, à savoir la reconstitution des capitaux propres de la société [Adresse 12] en convoquant les assemblées générales appelées à reconstituer les capitaux propres en application de l’article L 626-16 et R 631-34 du code de commerce, via une augmentation de capital réservée à Monsieur [G] [M], en demandant également la nomination d’un mandataire chargé de voter, en lieu et place des actionnaires, la reconstitution des capitaux propres en application de l’article L 631-9-1 du code de commerce,

-modifié la mission de l’administrateur en lui conférant une mission d’administration jusqu’au prochain jugement constatant la réalisation du plan,

-dit que les créanciers seront réglés dans les 30 jours, et afin de rémunérer l’immobilisation des créances pendant la période d’observation, le remboursement sera majoré d’une somme égale à 4 % du montant des créances,

-maintenu la SELARL Bernard Beuzeboc en qualité de mandataire judiciaire jusqu’au terme de la procédure de vérification des créances,

-ordonné les mesures de publicités légales prévues par les dispositions des articles R 626-20 et R 621-8 du code de commerce,

-dit que le présent jugement sera notifié aux créanciers admis au passif.

La SA [Adresse 12] a interjeté appel de ces deux jugements par deux déclarations distinctes (RG 16/04823 et RG 16/04824) du 30 décembre 2016.

Par deux autres jugements du même jour dont il n’a pas été interjeté appel ,le tribunal a:

-rejeté le plan de cession déposé par M. [P] [T],

-rejeté le plan de redressement par apurement du passif présenté par M. [P] [T].

Le 12 janvier 2017, la société Cambon Exécutive, holding personnelle de M. [M], a acquis les 2219 actions de la société [Adresse 12], et lui a fait signifier cette cession le 13 janvier 2017. La société Cambon Exécutive est devenue actionnaire à 90.20% de la société [Adresse 12].

Par arrêt du 30 novembre 2017, la cour d’appel de Caen a :

-ordonné la jonction des procédures enrôlées sous le numéro RG 16/04823 et RG 16/04824,

-débouté la SA [Adresse 12] de sa demande de sursis à statuer,

-confirmé dans toutes leurs dispositions le jugement du tribunal de commerce de Lisieux du 21 décembre 2016, objet de l’appel enrôlé sous le n° RG 16/0482 et le jugement du tribunal de commerce de Lisieux du 21 décembre 2016, objet de l’appel enrôlé sous le n° RG 16/4828,

-condamné la SA [Adresse 12] aux dépens de la procédure d’appel qui seront employés en frais privilégiés de procédure collective,

-débouté la SA [Adresse 12] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Mme [R] [L] veuve [X] a formé une tierce opposition à l’encontre de cet arrêt le 11 décembre 2017.

Par arrêt du 20 septembre 2018, la cour d’appel de Caen a :

-déclaré irrecevable la tierce-opposition formée par Mme [L] veuve [X] contre l’arrêt de la cour d’appel de Caen du 30 novembre 2017, confirmant le jugement du tribunal de commerce de Lisieux du 21 décembre 2016 arrêtant le plan de redressement de la SA [Adresse 12] présenté par M. [M],

-débouté M. [M] de sa demande en paiement par Mme [L] veuve [X] de la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts,

-condamné Mme [L] veuve [X] aux dépens de la présente instance,

-condamné Mme [L] veuve [X] à payer la somme de 15.000 € à la SELARL FHB ès qualités d’administrateur judiciaire de la SA [Adresse 12] et la somme de 20.000 € à M. [M] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-débouté Mme [L] veuve [X] de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Mme [L] veuve [X] a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt du 31 mars 2021, la Cour de cassation a :

-cassé et annulé sauf en ce qu’il déboute M. [M] de sa demande en paiement par Mme [L] veuve [X] de la somme de 300.000 € à titre de dommages-intérêts, l’arrêt rendu le 20 septembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Caen,

-remis, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la cour d’appel de Rouen.

La cour de cassation a retenu qu’il résulte des dispositions de l’article 583 du code civil que « si l’associé est, en principe, représenté dans les litiges opposant la société à des tiers par le représentant légal de la société, il est néanmoins recevable à former tierce-opposition contre un jugement auquel celle-ci a été partie s’il invoque une fraude à ses droits ou un moyen qui lui est propre.

Pour déclarer irrecevable la tierce-opposition formée par Mme [X], l’arrêt retient que les moyens qu’elle invoque ont tous été soulevés par la société [Adresse 12] dans le cadre de l’instance ayant abouti à l’arrêt du 30 novembre 2017 et que, s’ils concernent uniquement les actionnaires, ce sont des moyens qui leur sont communs à tous et qui ont été soutenus et défendus en tant que tels par la société [Adresse 12], qui les représentait. Il en déduit que, Mme [X] n’étant pas seule à pouvoir les invoquer, il ne s’agit pas de moyens propres au sens des dispositions de l’article 583 du code de procédure civile.

En statuant ainsi, alors que Mme [X] prétendait que le plan de redressement adopté par l’arrêt du 30 novembre 2017 portait atteinte à sa qualité d’associée et à son droit préférentiel de souscription, de sorte qu’elle invoquait un moyen qui lui était propre, peu important que chacun des autres associés ait disposé d’un droit préférentiel de souscription, la cour d’appel a violé le texte susvisé »

Mme [L] veuve [X] a saisi la cour d’appel de Rouen par déclaration du 19 août 2021 enregistrée sous le numéro RG 21/03370, puis de nouveau par déclaration du 20 août 2021 à 15h44, enregistrée RG 21/03393.

Les affaires ont été jointes par ordonnance du 1er septembre 2021.

La SARL Bernard Beuzeboc, à qui la déclaration de saisine a été faite à personne morale, n’a pas constitué avocat.

Par arrêt du 17 mars 2022, la cour a rouvert les débats pour recueillir l’avis du ministère public.

M. [W], en qualité de représentant des salariés a été convoquée à sa dernière adresse connue.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 avril 2022.

EXPOSE DES PRETENTIONS :

Vu les conclusions du 20 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de Mme [L] veuve [X] qui demande à la cour de:

A titre principal,

-juger Mme [L] veuve [X] recevable et bien fondée en sa tierce-opposition,

-rétracter l’arrêt rendu par la cour d’appel de Caen le 30 novembre 2017 en ce qu’il a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lisieux du 21 décembre 2016 ayant arrêté le plan de redressement présenté par M. [M],

-débouté M. [M] et l’administrateur judiciaire de toutes leurs demandes, moyens, fins et prétentions,

Statuant à nouveau :

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement n°16.4900 rendu par le tribunal de commerce de Lisieux le 21 décembre 2016 ayant arrêté le plan de redressement présenté par M. [M],

-déclaré irrecevable le projet de plan de redressement présenté par M. [M],

-rejeté le projet de plan de redressement présenté par M. [M],

-par conséquent, prononcer la résolution du plan de redressement avec toutes conséquences de droit,

-débouter M. [M] et l’administrateur judiciaire de toutes leurs demandes, moyens, fins et prétentions,

-condamner M. [M] à payer Mme [L] veuve [X] une indemnité de 60.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de la présente procédure en tierce-opposition.

Vu les conclusions du 5 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de la SELARL FHBès qualités d’administrateur judiciaire de la société [Adresse 12] qui demande à la cour de :

-déclarer la tierce opposition formée par Mme [L] veuve [X] à l’encontre de l’arrêt ayant confirmé le rejet du plan d’apurement du passif présenté par la société [Adresse 12] irrecevable puisqu’expressément fermée par l’article L661-3 du code de commerce,

-déclarer la tierce opposition formée par Mme [L] veuve [X] à l’encontre de l’arrêt ayant confirmé l’arrêt du plan de redressement selon la proposition de M. [M] irrecevable comme tardive et comme contraire aux dispositions de l’article L 631-1 du code de commerce,

-condamner Mme [L] veuve [X] à payer à Me [V] ès qualités la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

-la condamner aux entiers frais et dépens de la présente instance,

Subsidiairement,

-débouter Mme [L] veuve [X] de l’intégralité de ses demandes fin et conclusions,

-condamner Mme [L] veuve [X] à payer à Me [V] ès qualités la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

-la condamner aux entiers frais et dépens de la présente instance.

Vu les conclusions du 20 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de M. [M], en présence de la société [Adresse 12] qui demande à la cour de :

A titre principal,

-déclarer la tierce opposition de Mme [L] veuve [X] irrecevable comme ne respectant pas les conditions de fond relatives à la recevabilité d’une tierce opposition,

A titre subsidiaire,

-déclarer Mme [L] veuve [X] mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter purement et simplement,

-rejeter la tierce-opposition de Mme [L] veuve [X] formée contre l’arrêt de la cour d’appel de Caen en date du 30 novembre 2017,

A titre infiniment subsidiaire,

-constater que M. [M] fournit l’ensemble des éléments de nature à attester que la société [Adresse 12] n’est pas en état de cessation des paiements et que l’activité de cette dernière est pérenne,

-constater l’absence de cessation des paiements et la parfaite exécution du plan de redressement de la société [Adresse 12], tel que d’ores et déjà constatée par le tribunal de commerce de Lisieux par les jugements en date du 16 mai et du 11 juillet 2018,

-dire n’y avoir lieu à redressement judiciaire au profit de la société [Adresse 12],

-clôturer en conséquence la procédure de redressement judiciaire de la société [Adresse 12],

En tout état de cause,

-condamner Mme [L] veuve [X] au paiement à M. [M] de la somme de 70.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les conclusions du 26 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments du Ministère public qui :

-requiert d’une part, de déclarer irrecevable au visa de l’article R661-2 du code de commerce, la tierce-opposition de Mme [L] veuve [X] formée le 11 décembre 2017 contre l’arrêt de la Cour d’appel de Caen du 30 novembre 2017, à titre subsidiaire, déclarer recevable la tierce-opposition au visa des article L661-3 du code de commerce et 583 alinéa 2 du code de procédure civile.

-requiert au fond le rejet des demandes de Mme [X] .

MOTIVATION DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la tierce opposition à l’arrêt du 30 novembre 2017

Sur la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la tierce opposition:

La SELARL FHB, ès-qualités d’administrateur judiciaire de la société [Adresse 12], expose que :

*L’article R 661-2 du code de commerce prévoit que l’opposition ou la tierce-opposition sont formées par déclaration au greffe dans le délai de 10 jours à compter du prononcé de la décision. Le jugement du 21 décembre 2016, qui a adopté le plan de redressement sur la proposition de M. [M] a été publié au BODACC le 27 décembre 2016, à compter de cette date, Mme [X] est irréfragablement présumée en avoir eu connaissance.

*Mme [X] n’a pas, pour faire valoir ses « moyens propres », formé tierce-opposition contre le jugement ayant adopté le plan de reprise interne présenté par M. [M] dans le délai de 10 jours, ni dans le délai de 10 jours de sa parution au Bodacc intervenue le 27 décembre 2016, et n’est pas davantage intervenue devant la cour d’appel de Caen aux côtés de la société [Adresse 12] qui en avait interjeté appel ; La tierce-opposition n’a été portée in fine que contre l’arrêt de la cour d’appel de Caen du 30 novembre 2017, soit quasiment deux ans après la publication au Bodacc du jugement qui faisait grief à Mme [X].

*la société [Adresse 12] a régulièrement interjeté appel du jugement du 21 décembre 2016 adoptant le plan de reprise, ce qui, en raison de l’effet dévolutif de l’appel, n’ouvrait aux tiers-opposants que la voie de l’intervention pour faire valoir leurs droits ; Cette intervention est notamment régie par l’article R 661-6 5° du code de commerce qui dispose : « Aucune intervention n’est recevable dans les 10 jours qui précèdent la date de l’audience ».

*Mme [X] a eu dûment connaissance des jugements du 21 décembre 2016, pour être présente tout au long de la procédure et également pour les avoir communiqués à l’appui d’une assignation à comparaître devant le tribunal de commerce de Lisieux qu’elle a fait délivrer le 27 février 2017, révélant que, au moins à compter de cette date, un accès effectif au juge d’appel lui était alors ouvert ; Aussi le caractère occulte d’une décision, qui peut justifier la méconnaissance d’un tiers et le maintien pendant 30 ans de son droit à agir, disparaît dès lors qu’il est établi une connaissance du tiers « au moins équivalente à celle de la publication », faisant courir le délai de la tierce-opposition.

*connaissant les jugements du 21 décembre 2016 depuis au moins le 27 février 2017, Mme [X] disposait d’un accès au juge par la voie de l’intervention et, faute de l’avoir utilisé avant les 10 jours qui ont précédé l’audience d’appel, conformément à l’article R 661-6-5° du code de commerce, elle se trouve irrecevable dans sa tierce-opposition.

Monsieur [M] reprend les moyens développés par l’administrateur judiciaire.

Le ministère public soutient que la tierce-opposition de Mme [X] est tardive en ce qu’elle a été formée plus de 10 jours après la publication au Bodacc de la décision entreprise, le 27 décembre 2016.

Madame [X] répond qu’elle est recevable en son action à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Caen, aux motifs qu’elle n’était ni partie ni représentée dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l’arrêt entrepris.

Réponse de la cour :

Aux termes de l’article R 661-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable du 2 juillet 2014 au 12 février 2020 :

« Sauf dispositions contraires, l’opposition et la tierce-opposition sont formés contre les décisions rendues en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire, de responsabilité pour insuffisance d’actif, de faillite personnelle ou d’interdiction prévue à l’article L 653-8, par déclaration au greffe dans le délai de dix jours à compter du prononcé de la décision.

Toutefois, pour les décisions soumises aux formalités d’insertion dans un journal d’annonces légales et au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, le délai ne court que du jour de la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales. Pour les décisions soumises à la formalité d’insertion dans un journal d’annonces légales, le délai ne court que du jour de la publication de l’insertion. »

L’article R 661-6 5° du code de commerce prévoit, concernant la procédure d’appel en matière de procédures collectives : « Aucune intervention n’est recevable dans les 10 jours qui précèdent la date de l’audience »

Les jugements du 21 décembre 2016 n’ont pas eu de caractère occulte du fait de la publication au Bodacc.

Mais il ne ressort d’aucune des dispositions précitées, ni d’aucune autre, qu’une personne qui n’a pas exercé son droit de tierce-opposition à un jugement ou d’intervention en cause d’appel est de ce fait forclose à une tierce opposition contre l’arrêt d’appel rendu en son absence.

En l’espèce, le délai pour former tierce-opposition contre l’arrêt du 30 novembre 2017 expirant le 10 décembre 2017, qui était un dimanche, s’est trouvé prorogé par application des dispositions de l’article 642 du code de procédure civile au 11 décembre 2017, date de la déclaration de tierce-opposition faite par Mme [X] au greffe de la cour d’appel, soit dans le délai prévu à l’article R 661-2 du code de commerce.

La fin de non recevoir tirée de la tardiveté sera écartée.

Sur la fin de non recevoir tirée de l’indivisibilité des intérêts en présence

La SELARL FHB expose que:

*le jugement RG 16/04823 rejetant le plan de redressement proposé par la société [Adresse 12] est insusceptible de tierce-opposition en application des dispositions de l’article L 661-3 du code de commerce ; les deux autres jugements rejetant les plans proposés par M. [P] [T] sont irrévocables. Par voie de conséquence, la tierce-opposition formée à l’encontre du jugement adoptant le plan de redressement de M. [M] aurait pour effet de laisser la débitrice sans solution.

*du fait de l’effet dévolutif limité attaché à la tierce opposition, la cour ne pourrait opter d’office pour une solution dont le tribunal n’était pas saisi, mais ne pourrait pas davantage renvoyer l’affaire devant le tribunal de commerce. On ne sait comment le tribunal pourrait statuer dès lors que les voies d’apurement du passif ; d’une clôture L631-16 ou d’un plan de cession sont aujourd’hui définitivement fermées.

Monsieur [M] reprend les moyens développés par l’administrateur judiciaire.

Le ministère public expose que :

* la tierce-opposition est recevable contre l’arrêt confirmant le jugement qui a arrêté le plan de redressement ; Mme [X] dispose d’un droit propre à former tierce-opposition.

Madame [X] répond que :

*sa tierce-opposition est recevable puisqu’elle porte sur une décision arrêtant un plan de redressement;

*faute d’adoption du plan de redressement présenté par M. [M], la procédure se poursuivra devant le tribunal de commerce qui décidera des suites à donner.

Réponse de la cour :

Aux termes de l’article 582 du code de procédure civile : « La tierce-opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l’attaque. Elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu’elle critique, pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit ».

Aux termes de l’article 583 du même code : « Est recevable à former tierce-opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu’elle n’ait été ni partie ni représentée au jugement qu’elle attaque. Les créanciers et autres ayants cause d’une partie peuvent toutefois former tierce-opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s’ils invoquent des moyens qui leur sont propres (…) ».

Aux termes de l’article 584 de ce code : « En cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties au jugement attaqué, la tierce-opposition n’est recevable que si toutes ces parties sont appelées à l’instance ».

Aux termes de l’article 585 de ce code : «tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n’en dispose autrement »

Aux termes de l’article L661-3 du code de commerce : « Les décisions arrêtant ou modifiant le plan de sauvegarde ou de redressement ou rejetant la résolution de ce plan sont susceptibles de tierce opposition. Le jugement statuant sur la tierce opposition est susceptible d’appel et de pourvoi en cassation de la part du tiers opposant.

Il ne peut être exercé de tierce opposition contre les décisions rejetant l’arrêté ou la modification du plan de sauvegarde ou de redressement ou prononçant la résolution de ce plan »

Dans l’hypothèse où la cour infirmerait la décision qui a adopté le plan de redressement proposé par M. [M], elle pourrait statuer sans remettre en cause l’autorité de la chose jugée attachée aux décisions définitives de rejet du plan de redressement de la société Haras [Adresse 12] par voie d’apurement du passif et de rejet des plans de cession et de redressement présentés par M. [T]. Il en résulte que ces décisions ne sont pas indivisibles, et ceci même si les dispositions de l’article L631-1 du code de commerce dans leurs rédaction applicable du 15 février 2009 au 1er octobre 2021 prévoient que « la procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l’issue d’une période d’observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L626-29 et L626-30 ».

Par ailleurs, toutes les parties au jugement du 21 décembre 2016 qui a adopté le plan de redressement présenté par M. [M] et à l’arrêt du 30 novembre 2017 de la cour d’appel de Caen ont été appelées à l’instance en tierce opposition.

La fin de non recevoir tirée de l’indivisibilité des intérêts en présence sera rejetée.

Sur la fin de non recevoir tirée de l’absence d’un intérêt personnel :

Monsieur [M] soutient que, indépendamment des termes de l’arrêt de cassation, Mme [X] ne présente pas de moyen propre par rapport à ceux soumis par la société [Adresse 12] à la Cour d’appel de Caen et tranchés dans l’arrêt du 30 novembre 2017.

Réponse de la cour :

Dans son arrêt du 30 novembre 2017, la cour d’appel a répondu aux moyens soulevés par la société [Adresse 12] tirés d’une part, de la violation des articles L631-9-1 du code de commerce et d’une mauvaise application de ces dispositions en rendant une décision aboutissant à l’éviction des actionnaires au travers du « coup d’accordéon », et d’autre part de l’irrégularité des cessions des actions intervenues les 26 avril 2016 et 12 janvier 2017 et par voie de conséquence de la qualité d’associé de la société Cambon Exécutive.

Mais quels que soient les moyens soutenus par la société [Adresse 12], Mme [X] qui, à titre personnel, a perdu sa qualité d’associé et son droit préférentiel de souscription, dispose d’un droit propre à soutenir que l’arrêt entrepris a violé les dispositions de l’article L631-9-1 du code de commerce, que l’adoption du plan de redressement prévoyant un « coup d’accordéon » a porté atteinte à son droit de propriété, et à contester la qualité d’associé de la société Cambon Exécutive.

Par voie de conséquence la tierce-opposition de Mme [X] est recevable.

Sur le fond :

Me [X] soutient que :

*les conditions d’application de l’article L631-9-1 n’étaient pas réunies, le tribunal n’ayant pas constaté une opposition des actionnaires en place à la reconstitution des capitaux propres.

*le tribunal ne pouvait sans porter atteinte à son droit de propriété adopter un plan de redressement qui prévoyait un « coup d’accordéon » qui avait pour effet de l’évincer, sans contrepartie, avec suppression de son droit préférentiel de souscription.

*c’est en fraude de ses droits que M. [M] a acquis 90% du capital social de la société [Adresse 12] le 12 janvier 2017.

Monsieur [M] répond que :

*l’article L623-2 du code de commerce prévoient expressément la faculté pour le plan de redressement de mettre en ‘uvre les opérations caractéristiques d’un « coup d’accordéon » réservé à un tiers.

*c’est sans avoir recours aux dispositions de l’article L631-9-1 que le « coup d’accordéon » a été réalisé. L’assemblée générale des actionnaires a, le 5 mars 2018, adopté à la majorité l’ensemble des résolutions qui lui ont été soumises en vue de la mise en ‘uvre du plan conformément à l’article L626-3 du code de commerce.

*à titre surabondant, la désignation d’un mandataire ad hoc est prévu par les dispositions de l’article L631-9-1

*les cessions critiquées ne présentent aucun caractère frauduleux.

La société FHB soutient que :

*Madame [X] n’a jamais justifié et ne justifie toujours pas de ce sa solvabilité pour participer à l’augmentation du capital social.

Réponse de la cour :

Aux termes de l’article L626-3 du code de commerce, dans sa version applicable au procédures en cours antérieurement au 20 novembre 2016

« Lorsque le projet de plan prévoit une modification du capital, l’assemblée générale extraordinaire ou l’assemblée des associés ainsi que, lorsque leur approbation est nécessaire, les assemblées spéciales mentionnées aux articles L. 225-99 et L. 228-35-6 ou les assemblées générales des masses visées à l’article L. 228-103 sont convoquées dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat.

Si, du fait des pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social, l’assemblée est d’abord appelée à reconstituer ces capitaux à concurrence du montant proposé par l’administrateur et qui ne peut être inférieur à la moitié du capital social. Elle peut également être appelée à décider la réduction et l’augmentation du capital en faveur d’une ou plusieurs personnes qui s’engagent à exécuter le plan.

Les engagements pris par les actionnaires ou associés ou par de nouveaux souscripteurs sont subordonnés dans leur exécution à l’acceptation du plan par le tribunal.

En cas d’augmentation du capital social prévu par le projet de plan, les associés ou actionnaires peuvent bénéficier de la compensation à concurrence du montant de leurs créances admises et dans la limite de la réduction dont elles sont l’objet dans le projet de plan. »

Aux termes de l’article L631-19-1 du même code  dans sa version applicable au procédures en cours antérieurement au 20 novembre 2016: « Si les capitaux propres n’ont pas été reconstitués dans les conditions prévues par l’article L626-3, l’administrateur a qualité pour demander la désignation d’un mandataure en justice chargé de convoquer l’assemblée compétente e de voter sur la reconstitution du capital, à hauteur du minimum prévu au même article, à la place du ou des associés ou actionnaires opposants lorsque le projet de plan prévoit une modification du capital en faveur d’une ou plusieurs personnes qui s’engagent à respecter le plan’

Dans son rapport de présentation du projet de plan de redressement suite à l’offre de M. [M], la Selarl FHB précise que si le plan proposé recueille l’approbation du tribunal, il conviendra, dans le cadre du jugement de :

*dire que l’administrateur judiciaire sera chargé d’effectuer tous les actes permettant la mise en place du plan, à savoir la reconstitution des capitaux propres de la société [Adresse 12], notamment :

-convoquant les assemblées générales appelées à reconstituer les capitaux propres en application de l’article L262-16 et R. 631-34 du code de commerce, via une augmentation de capital réservée à M. [M]

-demandant la nomination d’un mandataire chargé de voter, en lieu et place des actionnaires éventuellement opposants la reconstitution des capitaux propres en application de l’article L631-9-1 du même code.

Il ressort de ce rapport que l’application des dispositions de l’article L631-9-1 du code de commerce a été envisagé comme une éventualité dans l’hypothèse d’un échec de la reconstitution du capital social selon les modalités de l’article L626-3.

C’est en ce sens que le jugement du 21 décembre 2016 confirmé par l’arrêt du 30 novembre 2017 a  maintenu la Selarl FHB en qualité d’administrateur judiciaire « avec pour mission d’effectuer tous les actes permettant la mise en place du plan, à savoir la reconstitution des capitaux propres de la société [Adresse 12] en convoquant les assemblées générales appelées à reconstituer les capitaux propres en application de l’article L626-16 et R631-34 du code de commerce, via une augmentation de capital réservée à M. [G] [M] en demandant également la nomination d’un mandataire chargé de voter, en lieu et place des actionnaires la reconstitution des capitaux propres en application de l’article L631-9-1 du code de commerce ».

Ainsi, le tribunal a permis l’opération de « coup d’accordéon » au profit d’un tiers, conformément aux dispositions de l’article L626-3 qui prévoient expressément la possibilité d’y recourir dans le cadre d’un plan, et dans l’hypothèse d’une opposition de certains actionnaires, en donnant à l’administrateur la mission de demander la nomination d’un mandataire. Il en résulte que le moyen tiré de ce que le tribunal a directement ordonné la reconstitution du capital selon les dispositions de l’article L631-9-1 alors que les conditions d’application de cet article n’étaient pas réunies est inopérant.

La cession du 12 janvier 2017, qui a permis l’acquisition par la société Cambon Exécutive, holding personnelle de M. [M] des 2219 actions de la société [Adresse 12], devenant ainsi actionnaire majoritaire , est intervenue après le jugement du 21 décembre 2016 dont Mme [X] demande l’infirmation et avant l’arrêt qui a confirmé ce jugement. Par arrêt du 21 octobre 2021, la cour d’appel de Caen a confirmé le jugement du 7 décembre 2018 du tribunal de commerce de Lisieux qui a rejeté le recours de Mme [X] en annulation de la cession. L’arrêt fait l’objet d’un pourvoi pendant devant la cour de cassation. Outre qu’ à ce jour, la cession du 12 janvier 2017 n’a pas été annulée, M. [M] ne détient pas personnellement les 2219 actions. La procédure collective ne concerne que la société [Adresse 12], personne morale disposant d’un patrimoine et d’intérêts distincts de ceux de ses actionnaires. Les décisions en matière de procédure collective étant prise dans l’intérêt de la personne morale, Mme [X] ne peut utilement allégué de l’irrégularité de la qualité d’associé de la société Cambon Exécutive pour s’opposer au plan de redressement proposé par M. [M].

Lors de son audience du 7 décembre 2016, le tribunal de commerce de Lisieux a examiné la proposition d’apurement du passif présenté par la société [Adresse 12] et le plan de redressement présenté par M. [M]. Le mandataire judiciaire avait indiqué qu’aucun des créanciers n’avait refusé les propositions, du plan de la société [Adresse 12] mais réservé son avis en fonction des informations communiquées à l’audience.

Le rapport de l’administrateur judiciaire pour chacun de ces plans fait état du redressement de la société [Adresse 12] au cours de la période d’observation, mais en conclusion de son rapport sur le plan présenté par la SA [Adresse 12], l’administrateur judiciaire écrit que le redressement réalisé depuis l’ouverture de la procédure collective aurait dû l’amener a émettre un avis favorable sur le projet de plan mais que les difficultés rencontrées depuis des mois pour recouvrer les sommes dues par M. [H] [X] et sa société Edy, ainsi que par Mme [X] l’amenaient à considérer que les créanciers n’ont pas à supporter seuls les efforts pour permettre le redressement de la société [Adresse 12], et que de tels comportements ne lui permettaient pas d’être convaincu de la pérennité de l’activité. Par un jugement du 21 décembre 2016 aujourd’hui définitif, le tribunal de commerce a rejeté la proposition de la SA [Adresse 12] nonobstant la proposition à l’audience de l’apport d’un associé bénéficiant d’un concours bancaire provenant d’une banque suisse. Le tribunal a retenu qu’il n’était pas établi que ces fonds soient de nature à permettre non seulement un apurement du passif, mais également la pérennité de l’entreprise, à défaut de projet économique pertinent.

La procédure de redressement judiciaire étant destinée à permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, la capacité de ses dirigeants à en assurer la pérennité est un élément essentiel à la solution adoptée. Il ressort des rapports de la Selarl FHB que, sur les comptes arrêtés au 31 décembre 2015, le compte courant de Mme [X] était débiteur de 361 401,91 €, celui de M. [H] [X], administrateur président, était débiteur de 29 292,08 €. Les 361 401,19 € dus par Mme [X] comprenaient 71 461,92 € de gains de courses qu’elle avait encaissés directement, 6 800 € correspondant à un avantage en nature de l’année 2015 pour l’occupation du manoir appartenant à la société [Adresse 12], 2281 139,99 € au titre d’une cession de créance de 749 341 € conclue le 24 novembre 2014 concernant une créance de la société Edy. L’administrateur explique qu’après signature d’un mandat de courses et ulimatum fixé au 13 juin 2016, Mme [X] a reversé plus de 371 000 € ; mais que dès la fin du mois de juin 2016 Mme [X] n’avait pas reversé les sommes dues au titre du mandat de courses et que la société Edy, appartenant à M. [H] [X] avait recommencé à ne pas régler les pensions de ses chevaux.

Madame [X] n’apporte aujourd’hui aucun élément de nature contredire le rapport de administrateur judiciaire et à démontrer la capacité des anciens actionnaires dirigeants à assurer la pérennité de l’entreprise.

Le plan de redressement proposé par M. [M] qui prévoit une annulation des actions détenues par les anciens actionnaires, limite leur risque de contribution aux pertes sociales au montant de leurs apports. Dans son rapport, après avoir exposé que le plan proposé par M. [M] permettait l’apurement immédiat des créances déclarées, une activité allant croissant permettant à la société de recouvrer rapidement sa stabilité financière, un investissement de 2 000 000 € sur les exercices 2017-2020 visant principalement à la modernisation des installations, et exposé les garanties offertes à l’appui de l’engagement de M. [M]; la Selarl FHB a émis un avis favorable au regard de l’activité maîtrisée et de la gestion qui « ne devrait pas être sujette à discussion comme cela l’est actuellement pour cette société viable mais non utilisée comme elle le devrait »

Il ressort de ces éléments que l’opération de réduction de capital à zéro et son augmentation au profit d’un tiers n’a été adoptée que pour assurer la pérennité de l’entreprise, mise en péril par le comportement des anciens actionnaires dirigeants. Cette opération qui n’a fait que sanctionner l’obligation de Mme [X] de contribuer aux pertes sociales dans les limites de son apport n’a pas constitué une atteinte à son droit de propriété .

En conséquence, Mme [X] sera déboutée de sa demande de rétractation de l’arrêt du 30 novembre 2017 de la cour d’appel de Caen qui a confirmé le jugement du 21 décembre 2016 ayant adopté le plan de redressement proposé par M. [M]. Par voie de conséquence, Mme [X] sera déboutée du surplus de ses demandes.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire ;

Déclare recevable la tierce-opposition de Mme [L] , veuve [X] à l’arrêt du 20 septembre 2018 de la cour d’appel de Caen ;

Dit la tierce opposition mal fondée et déboute Mme [L] veuve [X] de sa demande de rétractation de l’arrêt du 30 novembre 2017 de la cour d’appel de Caen;

Déboute Mme [L] veuve [X] du surplus de ses demandes ;

Condamne Mme [L] veuve [X] aux dépens ;

Condamne Mme [L] veuve [X] à payer à la Selarl FHB, es qualité d’administrateur judiciaire de la société [Adresse 12], la somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles d’instance de tierce opposition ;

Condamne Mme [L] veuve [X] à payer à M. [M] la somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles d’instance de tierce opposition.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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