Augmentation de capital : décision du 15 novembre 2022 Cour d’appel d’Angers RG n° 21/02639
Augmentation de capital : décision du 15 novembre 2022 Cour d’appel d’Angers RG n° 21/02639
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COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – COMMERCIALE

NR/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 21/02639 – N° Portalis DBVP-V-B7F-E5YZ

Arrêt du 04 Novembre 2021 Cour de Cassation de PARIS N° M19-23.960

Arrêt du 23 Avril 2019 Cour d’Appel de RENNES RG N°16/4722

Jugement du 22 Avril 2016 TC de QUIMPER RG N°14/2403

ARRET DU 15 NOVEMBRE 2022

APPELANTE :

Madame [B] [W] épouse [J]

née le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 9]

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Inès RUBINEL, avocat postulant au barreau d’ANGERS et

par Me Christa NAOUR-LE DU, avocat plaidant au barreau de SAINT-BRIEUC

INTIMES :

Monsieur [C] [W]

né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Inès RUBINEL, avocat au barreau d’ANGERS

LA CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DU FINISTÈRE, CRCAM DU FINISTERE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Sophie DUFOURGBURG, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 22007 et par Me Stéphanie PRENEUX, substitué par Me LE LEYOUR, avocats plaidant au barreau de RENNES

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 13 Septembre 2022 à 14H00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre et devant Mme ROBVEILLE, Conseillère qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CORBEL, Présidente de chambre

Mme ROBVEILLE, Conseillère

M. BENMIMOUNE, Conseiller

Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 15 novembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine CORBEL, Présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

La société (SARL) Bowgali exploitait un fonds de commerce de bar, restaurant et bowling à [Localité 8].

Par acte sous seings privés des 18 et 22 août 2005, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel (CRCAM) du Finistère a consenti à la SARL Bowgali un prêt d’un montant de 590.000 euros, remboursable en 120 mensualités, au taux fixe de 3,75%, destiné à l’achat de matériel professionnel.

Ce prêt était garanti par les cautionnements solidaires de M. [C] [W], engagé dans la limite de 590.000 euros et de Mme [B] [W] engagée dans la limite de 147.500 euros.

Par jugement du 12 juin 2012, la SARL Bowgali a été placée en redressement judiciaire.

Par lettre du 4 juillet 2012, la CRCAM du Finistère a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire.

Par jugement du 13 novembre 2012, la SARL Bowgali a été mise en liquidation judiciaire.

La CRCAM du Finistère a réitéré sa déclaration de créance entre les mains du liquidateur judiciaire.

Par acte d’huissier du 28 mars 2014, la CRCAM du Finistère a fait assigner M. [C] [W] et Mme [B] [W], en leur qualité de cautions, devant le tribunal de commerce de Quimper, aux fins de :

– voir condamner M. [C] [W] à lui payer la somme de 229.178,45 euros arrêtée au 1er juillet 2013, outre intérêts postérieurs au taux contractuel de retard de 5,75%, solidairement avec Mme [B] [W], dans la limite de son engagement de caution, soit 147.500 euros,

– voir ordonner la capitalisation des intérêts,

– voir ordonner l’exécution provisoire, nonobstant appel et sans caution, de la décision à intervenir,

– voir condamner M. [C] [W] et Mme [B] [W] à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– voir condamner M. [C] [W] et Mme [B] [W] aux entiers dépens.

Par jugement du 22 avril 2016, le tribunal de commerce de Quimper a :

– condamné M. [C] [W] à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 229.178,45 euros, compte arrêté au 1er juillet 2013, outre les intérêts au taux contractuel et de retard de 5,75% depuis le 1er juillet 2013 et jusqu’à parfait paiement, solidairement avec Mme [B] [W], dans la limite de son engagement de caution, soit 147.500 euros, que cette dernière sera condamnée à payer à la CRCAM du Finistère, sans que ces condamnations ne puissent excéder la créance de cette dernière,

– constaté que la CRCAM du Finistère n’a pas respecté son obligation d’information annuelle à l’égard de M. [C] [W] et de Mme [B] [W] pour la période allant du 31 mars 2006 au 31 mars 2011,

en conséquence,

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels à compter du 31 mars 2006 jusqu’au 31 mars 2011,

– enjoint à la CRCAM du Finistère de produire un décompte actualisé de sa créance,

– ordonné la capitalisation des intérêts,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

– condamné M. [C] [W] et Mme [B] [W] à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 1.000 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires,

– condamné M. [C] [W] et Mme [B] [W] en tous les dépens de l’instance.

Par arrêt du 23 avril 2019, la cour d’appel de Rennes a:

– confirmé ledit jugement, sauf en ce qu’il a condamné M. [C] [W] à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 229.178,45 euros, compte arrêté au 1er juillet 2013, outre les intérêts au taux contractuel et de retard de 5,75% qui continuent à courir depuis le 1er juillet 2013 et jusqu’à parfait paiement, solidairement avec Mme [B] [W] dans la limite de son engagement de caution, soit 147.500 euros, que cette dernière sera condamnée à payer à la CRCAM du Finistère, sans que ces condamnations ne puissent excéder la créance de cette dernière ; en ce qu’il a limité la déchéance du droit aux intérêts contractuels à la période comprise entre le 31 mars 2006 et le 31 mars 2011 et enjoint à la CRCAM du Finistère de produire un décompte actualisé de sa créance ;

statuant à nouveau et y ajoutant,

– dit que la CRCAM du Finistère est déchue du droit aux intérêts contractuels depuis le 31 mars 2006, dit n’y avoir lieu d’enjoindre à la CRCAM du Finistère de produire un nouveau décompte devant la cour d’appel, a condamné M. [W] à payer à la CRCAM du Finistère la somme calculée en soustrayant de la somme de 216.446,008 euros, indiquée comme étant le principal dû au 1er juillet 2013, tous les paiements effectués par le débiteur principal, au titre des intérêts, entre le 31 mars 2006 et le 1er juillet 2013 ; a dit que cette condamnation ne pourra pas excéder la somme de 590.000 euros et qu’elle est prononcée solidairement avec Mme [W] dans la limite de son engagement de caution, soit 147.500 euros, que cette dernière est condamnée à payer au Crédit Agricole ; a dit que les intérêts seront capitalisés ; a rejeté les autres demandes des parties ; a condamné le Crédit Agricole aux dépens d’appel.

Par arrêt du 4 novembre 2021, sur le pourvoi formé par Mme [B] [W], la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il dit que Mme [W] est solidairement condamnée avec M. [W], dans la limite de son engagement, à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 147.500 euros, l’arrêt rendu le 23 avril 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; a remis, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appel d’Angers ; a condamné la CRCAM du Finistère aux dépens ; en application de l’article 700 du code de procédure civile, a rejeté la demande formée par la CRCAM du Finistère et l’a condamnée à payer à Mme [W] la somme de 3.000 euros.

La cour de cassation a jugé qu’en retenant, pour condamner Mme [W], solidairement avec M. [C] [W] et dans la limite de son engagement, à payer la somme de 147.500 euros, après avoir relevé qu’il résultait d’un procès-verbal de l’assemblée générale de la société Bowgali que Mme [W] avait apporté à cette dernière, lors d’une augmentation de capital, 175 parts de la société Cargali pour un montant de 84.000 euros, que la caution n’établissait pas l’existence d’une disproportion manifeste au motif qu’elle ne s’expliquait pas sur les parts de la société Cargali qu’elle aurait détenues lors de son engagement, d’une part et qu’elle ne produisait pas d’éléments permettant d’apprécier la valeur des parts de la société Bowgali qu’elle possédait au moment de son cautionnement, d’autre part, cependant que la valeur des parts d’une société peut être inférieure ou supérieure au montant de son capital social, alors que Mme [W] faisait valoir dans ses conclusions que la valeur réelle des parts qu’elle détenait dans le capital de la société Bowgali était inférieure à leur valeur comptable fixée à 16 euros compte tenu des résultats financiers de cette société et que la valeur comptable des 5.500 parts de cette société était, en tout état de cause, inférieure au montant de son engagement, ce que la banque, qui ne prétendait pas que la caution détenait des parts de la société Cargali, ne discutait pas, la cour d’appel, qui a relevé d’office ce moyen sans inviter préalablement les parties à s’en expliquer et, ainsi, méconnu l’objet du litige, a violé les articles 4 et 16 du code de procédure civile.

Par déclaration du 22 décembre 2021, Mme [B] [W] a saisi la cour d’appel d’Angers en suite du renvoi opéré par la chambre commerciale de la Cour de cassation en son arrêt du 4 novembre 2021 ; intimant la CRCAM du Finistère et M. [C] [W].

Mme [W] et la CRCAM du Finistère ont conclu.

M. [C] [W] a constitué avocat mais n’a pas conclu.

Une ordonnance du 20 juin 2022 a clôturé l’instruction de l’affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

– le 4 mars 2022 pour Mme [B] [W],

– le 8 avril 2022 pour la CRCAM du Finistère,

Mme [B] [W] demande à la cour de :

– la recevoir en sa saisine et l’en déclarer bien fondée,

– infirmer le jugement rendu le 22 avril 2016 par le tribunal de commerce de Quimper sur tous les chefs de la décision de première instance encore en cause en suite de la cassation intervenue et lui portant grief ainsi que ceux qui en dépendent et particulièrement en ce que ladite décision condamne solidairement M. [C] [W] avec Mme [B] [W] dans la limite de son engagement de caution, soit 147.500 euros, que cette dernière sera condamnée à payer à la CRCAM du Finistère, sans que ces condamnations ne puissent excéder la créance de cette dernière,

statuant à nouveau,

– dire la CRCAM du Finistère mal fondée à se prévaloir de l’engagement de caution de Mme [W] compte tenu de la disproportion manifeste de cet engagement au regard de ses revenus et biens à la date de la conclusion du cautionnement et en conséquence,

– débouter purement et simplement la CRCAM du Finistère de sa demande en paiement à l’encontre de Mme [B] [W],

et rejetant toute demande contraire comme irrecevable et en toute hypothèse infondée,

– condamner la CRCAM du Finistère à payer à Mme [B] [W] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la CRCAM du Finistère aux dépens d’appel avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit.

La CRCAM du Finistère sollicite de la cour qu’elle :

– rejette l’ensemble des demandes, fins et conclusions de Mme [B] [W],

– confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Quimper du 22 avril 2016,

en conséquence,

– condamne Mme [B] [W] solidairement avec M. [C] [W] dans la limite de son engagement de caution, à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 147.500 euros,

en tout état de cause,

conformément aux articles 699 et 700 du code de procédure civile,

– condamne Mme [B] [W] aux entiers dépens de l’instance conformément à l’article 696 du code de procédure civile,

– dise que les dépens seront recouvrés directement par Maître Stéphanie Preneux conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

– condamne Mme [B] [W] à la somme de 2.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION:

– Sur la prétendue disproportion du cautionnement consenti par Mme [B] [W] en garantie du prêt consenti à la société Bowgali par la CRCAM du Finistère par acte sous seings privés des 18 et 22 août 2005:

Mme [B] [W] expose qu’à la date de la souscription de son engagement de caution, elle était célibataire, sans emploi pour avoir été licenciée de son poste d’employée libre-service en décembre 2004, qu’elle percevait des indemnités Assedic d’un montant mensuel moyen de 851,14 euros , qu’elle disposait d’une épargne globale de 9 125 euros et n’était propriétaire d’aucun bien immobilier.

Elle soutient qu’elle détenait des parts dans la société cautionnée Bowgali, dont la valeur réelle à la date de son engagement de caution était très inférieure à la valeur comptable de celles-ci (16 euros la part), en faisant valoir que la valeur des parts sociales dépend notamment des résultats financiers de la société et que la société Bowgali après plusieurs années déficitaires, a fait l’objet de l’ouverture d’une procédure collective en 2012.

Elle ajoute que la valeur comptable des 5 500 parts qu’elle détenait dans la société Bowgali était inférieure au montant de son engagement de caution.

Elle précise que lors de l’augmentation du capital de la société Bowgali opéré le 27 août 2004, elle a apporté à ladite société la pleine propriété des 175 actions qui lui appartenait dans la société Cargali, de sorte qu’à la date de la souscription de son engagement de caution, en août 2005, elle ne possédait plus aucune part dans la société Cargali.

Elle conclut qu’à la date de sa souscription, elle était dans l’impossibilité manifeste de faire face à son engagement de caution au regard de ses biens et revenus.

Elle soutient par ailleurs que la CRCAM du Finistère qui entend néanmoins se prévaloir de ce cautionnement dont il est établi qu’il était manifestement disproportionné lors de sa souscription, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, qu’à la date à laquelle elle l’a assignée, soit le 28 mars 2014, le patrimoine de la caution lui permettait de faire face à ses obligations.

Elle fait observer à ce titre que si elle a fait en 2007 l’acquisition d’une maison d’habitation, celle-ci a été financée au moyen de prêts d’un montant total de 121 000 euros, sur lesquels il restait encore dû en mars 2014 la somme de 95 659,44 euros, de sorte que son patrimoine immobilier ne pouvait lui permettre de faire face à son engagement de caution.

Elle conclut que la banque n’est pas fondée à se prévaloir de son engagement de caution et qu’elle devra en conséquence être déboutée de sa demande en paiement formée à son encontre.

La CRCAM du Finistère fait valoir qu’au moment de son engagement de caution, Mme [W] détenait des parts de la société Cagali valorisées à 84 000 euros et que son apport de celles-ci lui a permis de détenir 250 parts de la société cautionnée Bowgali dont le capital social s’élevait à 358 720 euros.

Elle rappelle que la charge de la preuve du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de caution, à la date de celui-ci, incombe à Mme [W] et fait observer que celle-ci ne saurait se contenter d’affirmer que ses parts dans la société Bowgali n’avaient aucune valeur.

Elle relève ainsi qu’aucun élément probant ne vient démontrer l’affirmation de Mme [W] selon laquelle si , sur le plan comptable, la valeur de ses parts dans la société Bowgali était de 16 euros la part , la valeur réelle de celles-ci était très inférieure, en soulignant que le simple fait que la société Bowgali ait fait l’objet de l’ouverture d’une procédure collective sept ans plus tard, ne saurait valoir preuve de cette affirmation.

Elle conclut que Mme [W] ne démontre pas que son engagement de caution était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Elle soutient par ailleurs que le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation au moment où elle est appelée, en faisant valoir que Mme [W] est propriétaire d’un bien immobilier estimé à 102 910 euros au moment de son acquisition en 2007, mais qui a dû prendre de la valeur depuis et que si celle-ci est grevée d’un emprunt, le solde restant dû a largement diminué compte tenu des remboursements intervenus depuis 2007.

Elle conclut en conséquence au rejet de la demande de Mme [W] fondée sur les dispositions de l’article L341-4 du code de la consommation, tendant à voir déclarer son engagement de caution inopposable et à voir en conséquence rejeter la demande en paiement formée à son encontre en sa qualité de caution.

Sur ce :

Aux termes de l’article L 341-4 du code de la consommation, dans sa version applicable à la date de signature des engagements de caution litigieux, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Ces dispositions s’appliquent à l’égard de toute caution, qu’elle soit avertie ou profane.

Il appartient à la caution qui se prévaut des dispositions susvisées, de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement pour en invoquer l’inopposabilité.

La disproportion alléguée s’apprécie à la date de formation de l’acte de cautionnement, au regard du montant de l’engagement ainsi souscrit, des biens et revenus de la caution et en considération de son endettement global, y compris celui résultant d’autres engagements de caution.

En l’espèce, le montant du cautionnement litigieux consenti en août 2005 par Mme [B] [W] est plafonné à 147 000 euros.

Mme [B] [W] justifie par les pièces versées aux débats qu’à la date de la souscription de son engagement de caution, elle était célibataire, sans emploi pour avoir été licenciée en décembre 2004, qu’elle percevait des indemnités Assedic d’un montant mensuel moyen sur les quatre derniers mois de 907 euros et qu’elle disposait d’une épargne globale de 9 125 euros.

Ses affirmations selon lesquelles elle n’était propriétaire d’aucun bien immobilier ne font pas l’objet de contestation de la CRCAM du Finistère.

Ses affirmations selon lesquelles après l’opération d’augmentation du capital de la société Bowgali , le 27 août 2004, dans le cadre de laquelle elle a apporté à ladite société la pleine propriété des 175 actions qui lui appartenait dans la société Cargali, elle ne possédait plus aucune part dans cette dernière, ne sont pas non plus contestées par la CRCAM du Finistère.

Il ressort des pièces versées aux débats, en particulier du procès verbal d’assemblée extraordinaire du 27 août 2004 de la société Bowgali, qu’à l’issue de l’augmentation du capital décidée lors de cette assemblée, Mme [B] [W] possédait 5 500 parts sur les 22 240 parts (751 à 1000 et 17171 à 22 240) évaluées à 16 euros chacune, soit au total à 88 000 euros.

La valeur des parts sociales détenues par la caution , même au sein de la société cautionnée, fait partie du patrimoine devant être pris en considération pour l’appréciation du caractère proportionné de l’engagement de caution à la date de sa souscription.

C’est justement que la banque souligne que Mme [W], sur laquelle pèse la charge de la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement, ne saurait se contenter d’affirmer, sans le démontrer par la production de pièces, que ses parts dans la société Bowgali n’avaient aucune valeur à la date de son engagement de caution ou à tout le moindre une valeur nettement moindre à celle de son engagement de caution.

Il ressort du procès verbal de l’assemblée extraordinaire du 27 août 20024 versé aux débats par la CRCAM du Finistère, que la valeur nominale de la part sociale de la société Bowgali à sa création a été fixée à 16 euros et que suite à l’augmentation du capital décidée lors de cette assemblée, elle a été maintenue à 16 euros.

Cependant, la valeur nominale de la part sociale d’une SARL ne représente pas sa valeur réelle à une date autre que celle à laquelle sa valeur nominale a été fixée par les associés, la part sociale pouvant avoir une valeur réelle supérieure ou inférieure à cette valeur nominale qui est fonction de la valeur de la société.

Il convient de constater que Mme [W] ne produit aucun élément pour établir la valeur réelle de ses parts dans la société Bowgali en août 2005.

Ainsi, les statuts de la société Bowgali susceptibles de contenir le mode de calcul de la valeur des parts, ne sont pas produits.

Et, alors qu’à défaut de modalités particulières, l’évaluation des parts sociales se base sur des éléments qui permettent de définir la valeur de la société, Mme [W] ne verse aux débats aucun bilan et aucun compte de résultat du dernier exercice clos avant la souscription de son engagement de caution, de nature à fournir des éléments notamment quant à la rentabilité de la société Bowgali, son développement, sa valeur patrimoniale, utiles à la détermination de la valeur réelle des parts sociales en août 2005.

Ses dires selon lesquels la société Bowgali se trouvait endettée pour avoir contracté en 2005 un prêt d’un montant de 1 300 000 euros , ne sont corroborés par aucune pièce, étant précisé que le prêt garanti par le cautionnement de Mme [W] est d’un montant de 590 000 euros.

Le simple fait que la société Bowgali ait fait l’objet de l’ouverture d’une procédure collective en 2012, ne saurait valoir preuve de ce que, tel qu’affirmé par Mme [W], la valeur de la part sociale de la société Bowgli était en août 2005 inférieure ou au plus égale à 16 euros.

Ainsi en définitive, au vu des seules pièces versées aux débats, c’est à juste titre que le tribunal de commerce d’Angers a considéré que Mme [B] [W] ne rapportait pas la preuve de l’existence de la disproportion manifeste alléguée de son engagement de caution.

La décision critiquée sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a déboutée Mme [B] [W] de sa demande tendant à voir juger que la CRCAM du Finistère ne peut se prévaloir de son acte de cautionnement du fait de son caractère manifestement disproportionné.

Par ailleurs, Mme [B] [W] ne développant au soutien de son appel aucun autre moyen pour s’opposer à la demande de la CRCAM du Finistère tendant à sa condamnation, solidairement avec M. [C] [W], dans la limite de son engagement de caution, à lui payer la somme de 147.500 euros, la cour ne peut que confirmer la décision critiquée, en ce qu’elle a dit que Mme [B] [W] est condamnée solidairement avec M. [C] [W], dans la limite de son engagement de caution, à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 147.500 euros.

– Sur les dépens et frais irrépétibles :

La décision critiquée sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

La CRCAM du Finistère sera condamnée aux dépens d’appel de l’arrêt cassé.

Partie perdante, Mme [B] [W] sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, sera condamnée aux dépens de l’instance d’appel sur renvoi après cassation et à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles exposés pour l’instance d’appel sur renvoi après cassation.

PAR CES MOTIFS,

La cour d’appel statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Quimper du 22 avril 2016 en ce qu’il a dit que Mme [B] [W] est condamnée solidairement avec M. [C] [W], dans la limite de son engagement de caution, à payer à la CRCAM du Finistère la somme de 147.500 euros ;

y ajoutant,

CONDAMNE la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Finistère aux dépens d’appel de l’arrêt cassé de la cour d’appel de Rennes du 23 avril 2019 ;

CONDAMNE Mme [B] [W] aux dépens de l’instance d’appel sur renvoi après cassation et à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Finistère la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles exposés pour l’instance d’appel sur renvoi après cassation ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

S. TAILLEBOIS C. CORBEL

 


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