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ARRET N°548
FV/KP
N° RG 21/02667 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GLPF
[Adresse 7]
C/
S.A. FACTOFRANCE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 13 DECEMBRE 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02667 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GLPF
Décision déférée à la Cour : jugement du 03 août 2021 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de LA ROCHE SUR YON.
APPELANT :
Monsieur [R] [P]
né le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 12] DES HERBIERS (85)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS.
Ayant pour avocat plaidant Me Alexandre CORNET, avocat au barreau de NANTES.
INTIMEE :
S.A. FACTOFRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 13]
[Localité 11]
Ayant pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON – YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant SELARL ROULOT, DROUOT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 03 Octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE:
Monsieur [R] [P] a été le représentant légal et associé majoritaire de la société holding Fleur de Sel Participations détenant l’intégralité du capital social des sociétés filles, à savoir :
-la société JOYAUX PERLES GEMMES, ayant pour activité la création et la réalisation d’articles de prêt à porter féminin commercialisé sous la marque Diplodocus,
-la société [I] [W]
-la société MH Distribution.
Compte tenu de difficultés financières, les sociétés du groupe ont sollicité et obtenu, par ordonnance du président du tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon en date du 20 janvier 2015, la désignation d’un mandataire ad hoc, en la personne de Maître [O] [U], de la SCP de mandataires judiciaires [B].
Ce dernier a ensuite été désigné en qualité de conciliateur par ordonnance du président du tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon en date du 21 juillet 2015.
Un protocole de conciliation est intervenu le 10 septembre 2015 entre les sociétés du Groupe et ses partenaires bancaires (HSBC, la Banque Palatine, la caisse d’épargne, le Crédit Agricole) prévoyant une restructuration de la dette et une consolidation des concours à court terme, avec maintien et prises de garanties par les établissements concernés.
Ce protocole a été homologué par jugement du tribunal de commerce de la Roche sur Yon en date du 07 octobre 2015.
Le 21 octobre 2015, M. [P] s’est porté caution solidaire, au profit de la SA FACTOFRANCE des sommes dues par les sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES dans le cadre de deux contrats d’affacturage régularisés le même jour comme suit :
*pour la société [I] [W] contrat d’affacturage n° 026565 dans la limite de la somme de 300.000 € ;
*pour la société JOYAUX PERLES GEMMES dans le cadre du contrat d’affacturage n°026568 dans la même limite ;
Par jugement en date du 13 juillet 2016, le tribunal de commerce de La Roche Sur Yon a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société JOYAUX PERLES GEMMES, en fixant la date de cessation des paiements au 31 mai 2016.
Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon en date du 07 septembre 2016 et Me [V] a été désigné en qualité de liquidateur.
À la suite de la liquidation judiciaire des sociétés du Groupe, les comptes d’affacturage ont été clôturés et la société FACTOFRANCE a adressé à M. [P] , le 16 avril 2019, une mise en demeure d’avoir à s’acquitter du paiement des sommes dues au titre de ses engagements de caution.
Suivant exploit en date du 19 juillet 2019, la SA FACTOFRANCE a assigné M. [P] devant le tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon en vue d’obtenir sa condamnation au règlement d’une somme totale de près de 95.000 €, outre intérêts, en sa qualité de caution solidaire des sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES.
Par jugement daté du 03 août 2021, le tribunal de commerce de La Roche Sur Yon a condamné M.[P] en sa qualité de caution solidaire à payer les sommes de 15.894.25 € et de 78.871.48€ ainsi qu’à la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamné aux dépens.
Par déclaration en date du 03 septembre 2021, M.[P] a fait appel du jugement en ses chefs expressément critiqués.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 31 août 2022, M. [P] demande à la cour :
au visa des articles L. 332-1 du Code de la consommation,l’article 1343-5 du Code civil et l’article L611-2 du Code de commerce
d’infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de La Roche sur Yon en ce qu’il a :
‘ Jugé que les cautionnements souscrits par M. [P] en date du 21 octobre 2015 à hauteur de 300.000 € chacun au bénéfice de la société FACTOFRANCE ne sont pas caducs,
‘ Jugé que ces mêmes cautionnements n’étaient pas manifestement disproportionnés aux revenus et aux biens de M. [P] en date du 21 octobre 2015,
‘ Débouté M. [P] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en ce compris sa sommation de communiquer,
‘ Condamné M. [P] à payer à la société FACTOFRANCE la somme de 15.894,25 € outre intérêts au titre du contrat d’affacturage N°026565 ainsi que la somme de 78.871,48 €, outre intérêts au titre du contrat d’affacturage N°026568,
‘ Condamné M. [P] à payer la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens de l’instance,
Statuant de nouveau :
A titre principal :
de constater que le protocole de conciliation homologué en date du 22 octobre 2015 est devenu caduc du fait de l’ouverture de la procédure collective à l’égard des sociétés du Groupe FLEUR DE SEL,
de juger que la caducité du protocole de conciliation a entraîné la caducité de l’ensemble des engagements de caution souscrits par M.[P] dans le cadre de ce protocole,
de débouter la société FACTOFRANCE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire :
de juger que les engagements de caution souscrits par M. [P] en date du 21 octobre 2015, à hauteur de 600.000 € au total, sont manifestement disproportionnés à ses biens et revenus,
de débouter la société FACTOFRANCE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
d’ordonner le report sur deux années de l’exigibilité de la totalité des sommes dues à la société société FACTOFRANCE par M.[P]
En tout état de cause
de condamner la société FACTOFRANCE à payer à M. [P] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
de la condamner aux entiers dépens et ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 17 janvier 2022, le FACTOFRANCE demande à la cour, en formant appel incident :
– De déclarer M.[P] mal fondé dans son appel et l’en débouter
– De débouter l’ensemble de ses conclusions, fins et prétentions, en ce compris sa sommation de communiquer.
– De confirmer le jugement du tribunal de commerce de La Roche Sur Yon du 3 aout 2021 en ce qu’il a notamment condamné M [P] à payer à la société FACTOFRANCE les sommes de :
* 15.894,25 €, au titre du contrat d’affacturage n° 026565, outre intérêts au taux conventionnel (cf. articles 6-3 et 10-2 des conditions générales et 20.2 des conditions particulières du contrat d’affacturage n°26565), à compter du 16 avril 2019, date de la mise en demeure et ce jusqu’à complet paiement ;
* 78.871,48 € au titre du contrat d’affacturage n° 026568, outre intérêts au taux conventionnel (cf. article 6-3 et 10-2 des conditions générales et 20.2 des conditions particulières du contrat d’affacturage n° 26568), à compter du 16 avril 2019, date de la mise en demeure et ce, jusqu’à complet paiement, u titre du contrat d’affacturage n° 26568 ;
– De condamner M.[P] à payer à la société FACTOFRANCE la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en sus de l’indemnité allouée à ce titre par le tribunal dont il est sollicité la confirmation,
– De condamner M.[P] aux entiers dépens.
La clôture de l’affaire a été prononcée à l’audience de plaidoirie du 03 octobre 2022, date à laquelle elle a été mise en délibéré au 06 décembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précités pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
Sur la caducité des cautionnements du fait de la signature du protocole de conciliation
1. L’article L. 611-12 du Code de commerce dispose que ‘l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin de plein droit à l’accord constaté ou homologué en application de l’article L. 611-8. En ce cas, les créanciers recouvrent l’intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, sans préjudice des dispositions prévues à l’article L. 611-11″.
En vertu de l’article L. 611-11 du même code, dans sa version applicable à l’espèce, en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, les personnes qui avaient consenti, dans le cadre d’une procédure de conciliation ayant donné lieu à l’accord homologué mentionné au II de l’article L. 611-8, un nouvel apport en trésorerie au débiteur en vue d’assurer la poursuite d’activité de l’entreprise et sa pérennité, sont payées, pour le montant de cet apport, par privilège avant toutes les autres créances, selon le rang prévu au II de l’article L. 622-17 et au II de l’article L. 641-13. Les personnes qui fournissent, dans le même cadre, un nouveau bien ou service en vue d’assurer la poursuite d’activité de l’entreprise et sa pérennité bénéficient du même privilège pour le prix de ce bien ou de ce service.
2. Cette disposition ne s’applique pas aux apports consentis par les actionnaires et associés du débiteur dans le cadre d’une augmentation de capital.
Les créanciers signataires de l’accord ne peuvent bénéficier directement ou indirectement de cette disposition au titre de leurs concours antérieurs à l’ouverture de la conciliation.
3. M. [P] fait valoir qu’il s’est porté caution solidaire par acte daté du 21 octobre 2015, au profit de la société FACTOFRANCE, de sommes dues par les sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES, dans le cadre du protocole de conciliation homologué par le président du tribunal de commerce de la Roche-Sur-Yon par ordonnance datée du 22 octobre 2015.
A la suite, il soutient qu’en application de l’article L.611-12 du code de commerce, le jugement en date du 13 juillet 2016, prononçant l’ouverture du redressement judiciaire de la société JOYAUX PERLES GEMMES et des sociétés [I] [W] et FLEURS DE SEL participations a mis fin de plein droit à l’accord de conciliation homologué, de sorte que l’ensemble des sûretés consenties par ses soins dans le cadre de ce protocole sont également devenues caduques, en ce compris les actes de cautionnement des contrats d’affacturage n° 026565 et n° 026568, dans les limites chacun de 300.000 €, dès lors que le recueil de ces garanties constituait une opération économique unique, liée de manière indivisible à l’accord de conciliation.
4. L’appelant dénonce en outre la confusion opérée par la société FACTOFRANCE et le tribunal de commerce entre le mandat ad hoc et la conciliation. Selon lui, en effet, un ‘mandat ad hoc validé’ n’existe pas juridiquement et ne constitue, en réalité, rien d’autre que le protocole de conciliation lui-même. Dès lors, selon la, juridiction de première instance ne pouvait donc pas considérer que les deux actes de cautionnement souscrits par M. [P] au profit de la société FACTOFRANCE sont étrangers à l’accord de conciliation.
5. La SA FACTOFRANCE réplique que la caducité des sûretés et garanties se limite, de manière exclusive, à celles qui ont été prises « en contrepartie des abandons de créance » ou « des délais ou des remises de dettes » et qui ont été prévues par l’accord de conciliation et que les cautionnements recueillis en garantie des deux contrats d’affacturage n’en font pas partie.
6. L’intimée indique à cet égard, d’une part, que les sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES ont conclu leur contrat d’affacturage avec elle ultérieurement alors qu’auparavant il n’existait entre elles aucune relation commerciale, d’autre part et surtout que les actes de cautionnement ne trouvent pas « leur cause dans la régularisation du protocole de conciliation » (sic) en date du 10 septembre 2015 mais uniquement dans la conclusion du contrat d’affacturage du 21 octobre 2015 ainsi que le stipule l’article 22.1 des dits contrats.
7. Il ressort de l’article 20 du protocole de conciliation homologué le 22 octobre 2015 par le président du tribunal de commerce de la Roche-Sur-Yon, dénommé ‘Bénéfice du protocole de conciliation’ que ledit ‘protocole, les accords qu’il comporte et ses annexes lieront les Parties ainsi que leurs successeurs, ayants droits ou ayant cause, et bénéficieront à chacun de ceux-ci’.
8. Les pages 2 et 3 de ce protocole, désignant les banques collectivement comme les Parties mais sans solidarité entre elles, mentionnent comme telles, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE PAYS DE [Localité 8], la CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL, le CRÉDIT MARITIME ATLANTIQUE, la BANQUE CIC OUEST, la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL, Atlantique Vendée, la BPIFRANCE FINANCEMENT, la BANQUE PALATINE, HSBC FRANCE.
9. Le point 5-2 de l’accord de conciliation stipule que les banques, et ainsi ces ‘Parties’, ont accepté d’accompagner les sociétés du Groupe Fleur de sel sous deux formes différentes :
-une consolidation des concours courts termes (à savoir un prêt n°4585398 de 100 000 euros, qui avait donné lieu à nantissement de la marque Diplodocus),
-des prêts de consolidation (à savoir, pour la caisse d’Epargne, un prêt sur 48 mois au taux de 3,5 % l’an).
10. La cour observe que la SA FACTOFRANCE est totalement étrangère au protocole de conciliation en date du 10 septembre 2015 dès lors qu’elle n’en est pas désignée comme ‘Partie’ et qu’aucune des dispositions de ce protocole ne subordonne sa signature ou son homologation à la signature des deux contrats d’affacturage précités et de leurs annexes, à savoir, les actes de cautionnement solidaire respectifs, toutes intervenues le 21 octobre 2015.
11. Il résulte des constatations qui précèdent que le concours financier consenti sous forme des deux contrats d’affacturage n° 026565 et n° 026568, ayant donné lieu à deux engagements de caution de M. [P] d’un montant de 300.000 € chacun ne constitue pas l’exécution de l’accord de conciliation homologué par le président du tribunal de commerce par ordonnance du 22 octobre 2015.
12. Ainsi, les dispositions de l’article L. 611-12 du code de commerce ne peuvent trouver application en l’espèce et les actes de cautionnement solidaire en date du 21 octobre 2015, annexés aux contrats d’affacturage n°026565 et n°026568, n’ont pas été rendus caducs par l’effet du jugement d’ouverture du redressement judiciaire par jugement du 13 juillet 2016.
13. La décision sera confirmée de ce chef.
Sur le caractère disproportionné des cautionnements
14. L’article L.341-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, devenu articles L.332-1 et L.343-4 du même code, dispose qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Au sens de ces dispositions, la disproportion s’apprécie, lors de la conclusion du contrat de cautionnement, au regard du montant de l’engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global dont le créancier avait ou pouvait avoir connaissance, y compris l’endettement résultant d’autres engagements de caution.
15. En application des précisions apportées par la jurisprudence quant aux conditions de mise en oeuvre de l’article susvisé, il appartient à la caution de démontrer la disproportion alléguée au jour de la conclusion de son engagement.
Cependant, il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, soit au jour où la caution est assignée, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.
16. La disproportion du cautionnement aux biens et revenus de la caution suppose que cette dernière se trouve, lorsqu’elle s’engage, dans l’impossibilité manifeste de faire face à son obligation avec ses biens et revenus, la jurisprudence considère qu’il y a disproportion manifeste dès lors que l’engagement de la caution, même modeste, est de nature à la priver du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux des personnes qui sont à sa charge.
17. La disproportion doit s’apprécier en fonction de tous les éléments du patrimoine de la caution, actifs comme passifs, tant en ce qui concerne les biens propres que les biens communs, en prenant en considération l’endettement global de la caution y compris celui résultant d’engagements de caution, et l’actif constitué par les parts sociales et la créance inscrite en compte courant d’associé dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée.
– Sur la proportionnalité de l’engagement à la date de la souscription
18. S’agissant de son engagement à la date de souscription, M. [P] indique qu’au moment de la conclusion de l’engagement de caution, le créancier professionnel a l’obligation de se renseigner sur les biens et revenus de la caution afin de ne pas lui faire souscrire un engagement disproportionné par rapport à sa capacité contributive. A défaut de s’être renseigné, il engage sa responsabilité et ne peut se prévaloir de l’engagement de caution qu’il a fait souscrire.
M. [P] fait valoir encore que s’il est vrai que la banque n’est pas tenue d’un pouvoir d’investigation des éléments financiers fournis par la caution, il en va autrement dès lors que la banque avait pleinement connaissance de ces engagements non mentionnés sur ladite fiche.
19. La SA FACTOFRANCE objecte que M. [P] n’est pas fondé, au regard de la jurisprudence constante en la matière, à tenter de renverser la charge de la preuve de la prétendue disproportion manifeste qu’il invoque, d’autant moins d’ailleurs en considération de l’importance de la situation financière et patrimoniale dont il a fait état dans les fiches de renseignement qu’il a complétées lors de la souscription de ses engagements de caution.
20. La cour indique à titre liminaire qu’il est de principe que le créancier peut apprécier la proportionnalité de l’engagement par rapport aux biens et revenus, tels que déclarés par la caution lors de la souscription de l’engagement, sans qu’il ait à vérifier l’exactitude de ces déclarations.
21. A cet égard, il est produit aux débats deux fiches identiques de renseignement ‘confidentiels’ (pièces 15 et 16 de l’intimée) relatives aux contrats d’affacturage ‘cv : 026565 et cv : 026568″ faisant état pour la caution, M. [P], en garantie des concours consentis à la société [I] [W] et la société JOYAUX PERLES GEMMES :
– de revenus annuels nets d’un montant de 50.000 € (4.166,67 € par mois) ;
– d’un appartement estimé à 620.000 €, en bien propre, grevé d’une hypothèque à hauteur de 600.000 €, représentant ainsi un actif net de 20.000 € ;
-600.000 € correspondant à des titres lui appartenant dans la société ACE, dont 150.000 € sont grevés par une garantie, laissant subsister un actif net de 450.000 € ;
– 4.000.000 € au titre de sa participation dans les sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES.
22. Il ressort ainsi de ces deux fiches, un total de revenus et patrimoine invoqué par la caution au moment de la souscription des deux actes de cautionnement solidaire de 4.474.166,67 € pour deux engagements de caution d’un montant total de 600.000 €.
23. Mais, rappelle la cour, si la possibilité de se fier à une fiche de renseignement reste le principe, il existe trois exceptions. Il en est ainsi :
– en cas d’anomalies apparentes affectant la déclaration ;
– lorsque le créancier professionnel avait connaissance (ou ne pouvait pas ignorer) de l’existence d’autres charges pesant sur la caution non déclarées sur la fiche de renseignement (Com., 27 mai 2014, pourvoi n °13-17.287, 13-17.288) ;
– lorsque la déclaration effectuée par la caution est trop ancienne ;
24. Dans ces hypothèses, il est établi que le prêteur ne peut plus se fier aux seules déclarations de la caution quant à son patrimoine.
25. Or, relève la cour et ainsi que le soutient l’appelant, l’intimée avait une connaissance des autres garanties grevant l’actif et les revenus de M. [P] dès lors que par message électronique du 07 juillet 2015 (pièce n°26 de l’appelant), la SA FACTOFRANCE a confirmé la validation, par son comité de crédit puis, conditionné la mise en place du contrat d’affacturage, aux points suivants :
Audit GE FACTOFRANCE avant démarrage du contrat
transmission du protocole du mandat ad hoc avant démarrage
Les comptes ABN AMRO doivent être soldés avant démarrage
L’entreprise doit enregistrer comptablement les encaissements au fils de l’eau et en être en mesure de produire un fichier de lettrage conformément au cahier des charges informatiques GE FACTOFRANCE
Les chèques devront désormais être libellés à l’ordre de GE FACTOFRANCE
financement d’une nouvelle collection lié au débouclage de la précédente
26. Le contenu du protocole de conciliation, dont la SA FACTOFRANCE ne conteste pas en avoir reçu communication, indique en ses pages 9 et 10, relatives à l’engagement des banques (article 5), que la restructuration de la dette senior contractée par la SAS FLEUR DE SEL PARTICIPATIONS sera garantie (point 5.1) :
par le maintien des garanties existantes au profit de chaque établissement et particulièrement concernant le CRÉDIT MARITIME ATLANTIQUE, la contre garantie BPIFRANCE FINANCEMENTà hauteur de 33%,
ainsi que par le nantissement pari passu entre toutes les banques concernées des titres des sociétés JOYAUX PELES GEMMES et [I] [W],
Et, le nantissement des marques FLEUR DE SEL et DIPLODOCUS également en pari passu entre toutes les banques.
27. S’agissant de la consolidation des concours court terme consentis aux sociétés FLEUR DE SEL PARTICIPATIONS, JOYAUX PERLES GEMMES et [I] [W] (point 5.2), il est noté au titre des garanties (maintien et ajout) :
Maintien des garanties existantes pour chaque établissement bancaire,
Nantissement sur les marques FLEUR DE SEL et DIPLODOCUS pari passu entre toutes les banques concernées (nantissement et caution gagiste croisés des société JOYAUX PERLES GEMMES et [I] [W] sur les marques FLEUR DE SEL et DIPLODOCUS). Le nantissement des marques sera formalisé et recueilli par Maître [G], Avocat, pour compte commmun des banques, les frais y afférents étant à la charge du groupe FLEUR DE SEL,
garantie BPI FRANCE FINANCEMENT à hauteur de 70%, co-garantie par le Fonds Régional abondé par la Région Pays de la [Localité 8].
Chaque Partie concernée s’engage à régulariser tout contrat de prêt avant consolidation et plus généralement toute documentation bancaire qui s’avérera nécessaire, ce avant le 30 octobre 2015 et, au plus tard dans les 60 jours suivant le jugement d’homologation, étant précisé que les garanties pré existantes des concours consolidés devront être maintenues ou réitérées, à savoir notamment en ce qui concerne :
La Caisse d’Epargne, la caution personnelle et solidaire de Monsieur [R] [P],
Le CRÉDIT ATLANTIQUE VENDÉE : la caution solidaire de Monsieur [R] [P] et la garantie hypothécaire sur bien immobilier sis [Adresse 1] cadastré section [Cadastre 6], [Cadastre 5], [Cadastre 10] et [Cadastre 9], avec maintien du rang actuel.
28. La preuve de la connaissance par la SA FACTOFRANCE de l’ensemble des engagements de M. [P] mais également de l’ensemble des garanties concédées à huit autres établissements bancaires et organismes de crédits étant rapportée et la SA FACTOFRANCE n’ayant jamais demandé à sa caution de s’exprimer sur ce point dans les fiches de renseignement fournies, elle ne pouvait se fier aux seules déclarations de la caution quant à son patrimoine.
29. Il s’ensuit que M. [P] est désormais libre de démontrer quelle était sa situation financière réelle lors de son engagement afin d’opposer à la SA FACTOFRANCE l’existence d’une telle situation de disproportion manifeste, avec cette seule réserve que seront intégrées dans l’évaluation de son patrimoine les garanties et engagements souscrits antérieurement au 21 octobre 2015, date de l’engagement et date d’appréciation de l’éventuelle disproportion de celui-ci.
30. A cet égard, les éléments versés aux débats laissent apparaître qu’au moment de la signature de ses deux engagements de caution, le 21 octobre 2015, M. [P] :
– Etait avaliste d’un billet financier Caisse d’Epargne de 200.000 € antérieur au 10 septembre 2015 déjà prévu dans le protocole (2 fois 100.000 € au titre de billets de trésorerie consentis aux sociétés [I] [W] et Joyaux perles gemmes) ;
– Avait une charge d’emprunt vis-à-vis du CRÉDIT MUTUEL de 5.144,14 € par mois en raison d’un prêt immobilier accepté le 10 septembre 2014 à hauteur de 300.000 €, pour lequel il était caution à hauteur du même montant et pour les besoins duquel il avait consenti une Hypothèque immobilière conventionnelle à hauteur de 300.000 € (charge d’emprunt annuel de 61.729,68 €);
– Etait engagé en qualité de caution vis-à-vis du CRÉDIT MUTUEL de Mortagne-sur-Sèvre à hauteur de 285.000 €, en vertu d’un prêt n°15519 39008 000209697 02 d’un même montant prévu par le protocole, accordé le 19 novembre 2015, par reprise d’un prêt mis en place en février 2013 (pièce n°27 de l’appelant), remboursable après une période de différé d’amortissement de 12 mois (échéances de 1.000,83 € d’intérêts et assurances), en 48 échéances de 6.428,66 € pour une durée de 284 mois ;
– Etait caution personnelle et solidaire à hauteur de 196.950 € au titre d’un prêt de 303.000 € consenti par la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL ATLANTIQUE VENDÉE dans le cadre du protocole, (credocs de 207.000 € et billet de trésorerie 96.000 € pour la société JOYAUX PERLES GEMMES) pour lequel une hypothèque conventionnelle pour garantie d’un montant de 300.000 € a été recueillie ;
– Que l’ensemble des parts sociales des sociétés JOYAUX PERLES GEMMES et [I] [W] qu’elle finançait, et leurs marques, étaient nanties au profit des autres membres du pool et qu’ainsi, ces parts, ne pouvaient être vendues à hauteur de leur valeur déclarée dans l’hypothèse où l’engagement de caution qu’elle avait fait souscrire à M. [P] devait être mobilisé. Les éléments produits aux débats, que la SA FACTOFRANCE ne pouvait ignorer, démontrent que les marques [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES étaient a minima grevées de nantissement à hauteur de 2.850.000 € (285.000€ x 10) et que les comptes titres financiers de FLEUR DE SEL PARTICIPATIONS étaient nantis pari passu à hauteur de 570.000 € (pièce n°27 de l’appelant), soit un total de 3.420.000 € de sûretés.
31. M. [P], en ce qui concerne ses revenus et patrimoine, apporte la preuve :
‘ De revenus annuels de 50.000 € au total, ce qui est conforme à sa déclaration ;
‘ De titres de foncières et fonds de participation ACE pour une somme de 600.000 € dont 150.000€ grevés par une garantie, également conforme à sa déclaration ;
‘ De la propriété d’un bien immobilier acquis en janvier 2014 d’une valeur estimative de 620.000€ avec un passif résiduel de 600.000 €. Cependant, les éléments versés aux débats mettent en évidence que le passif résiduel à cette date était de l’ordre 292.000 € et que l’inscription hypothécaire était bien de 600.000 €.
‘ Des titres de participation des sociétés [I] [W] et JOYAUX PERLES GEMMES dont la valeur mobilisable connue de la SA FACTOFRANCE était de 580.000 € (4.000.000 € moins 3.420.000 €)
32. Au vu des ces éléments, la situation patrimoniale de M. [P] lors de la souscription du cautionnement peut être évaluée comme suit :
– revenus annuels de 50.000 €, et charges annuelles d’emprunts de 61.729,68 € , soit un déficit net de 11.729,68 € ;
– actif patrimonial de 1.650.000 € et prêts en cours à titre personnel pour 303.502,48 €, soit un patrimoine net de prêts de 1.346.497,52 €,
– engagements de caution et aval pour 1.125.000 € (soit 300.000 € au CRÉDIT AGRICOLE – qui ne peut être cumulé avec l’hypothèque conventionnelle stipulée dans le même acte pour un même montant), 255.000 € auprès du CRÉDIT MUTUEL Océan mentionnés dans la fiche patrimoniale, 200.000 € d’engagements auprès de la Caisse d’Epargne, 350.000 € d’engagements auprès de la Banque palatine et 195.950 € pour le CRCAM Vendée), soit en incluant le cautionnement litigieux pour 600.000 €, un total de 1.871.950 €, qui doit être retenu intégralement sans qu’il y ait lieu de rechercher s’ils ont été effectivement mobilisés.
33. Dès lors, à la date de l’engagement, ni le patrimoine net, ni les ressources nettes, ne permettaient à M. [P] de faire face à l’ensemble des engagements sans le priver du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux des personnes qui sont à sa charge.
34. Il appartient ainsi désormais à la SA FACTOFRANCE, qui entend se prévaloir de cet engagement, de démontrer qu’à la date de l’assignation du 19 juillet 2019, le patrimoine de la caution, net des dettes existantes et y compris postérieures au cautionnement, permettait de faire face à cette obligation.
– Sur la capacité de la caution à faire face à son engagement à la date où elle a été appelée
35. M. [P] fait valoir que ses revenus annuels s’élèvent à la somme de 49.000 € (4.000 € de retraite mensuelle) et qu’en raison du placement en liquidation judiciaire des sociétés du Groupe FLEUR DE SEL au mois de septembre 2016, il ne perçoit plus aucun revenu d’activité.
S’agissant de la société ACE dont les titres ont été évalués lors de la conclusion du cautionnement litigieux, à 560.000 €, il rappelle que le 14 avril 2017, l’immeuble appartenant à cette société a été vendu à une société dénommée THIM IMMO moyennant un prix de 400.000€.
Selon lui, le prix a été notamment utilisé pour rembourser un certain nombre d’emprunts contractés de sorte que le solde disponible au moment de l’appel en garantie s’élevait à la somme de 136.000 €. Il indique, au total être en possession d’un actif de 826.000 €, en ce compris son appartement parisien.
36. S’agissant de son passif, il explique avoir payé jusqu’au mois de septembre 2020, des échéances mensuelles de prêt d’un montant de 5.144,14 € et il a été enjoint de payer à la suite de la liquidation judiciaire de son groupe une somme de 26.400€ à la Caisse d’Epargne mais également la société HSBC, pour un montant de 82.830,55 €, la BANQUE PALATINE pour une somme de 70.400 €.
L’appelant soutient encore être redevable à la Caisse d’Epargne d’une somme de 71.168 € au titre d’un prêt daté du 23 octobre 2014 de 150.000 € à l’origine en vue de procéder à un apport en compte-courant, lequel est toujours en cours mais a fait l’objet d’une déclaration de créance à la liquidation judiciaire de la société FLEUR DE SEL.
37. Enfin M. [P] expose qu’il convient de rajouter à ces sommes
‘ L’aval donné auprès de la CAISSE D’EPARGNE pour un montant de 200.000 € (Cf. Pièces N°11 et 6) ;
‘ L’engagement de caution personnelle et solidaire, à hauteur de 285.000 € souscrit auprès du CRÉDIT MUTUEL en date du 19 novembre 2015 (Cf. Pièce N°27) ;
‘ L’engagement de caution personnelle et solidaire au profit du CRÉDIT AGRICOLE à hauteur de 340.000 €.
38. La SA FACTOFRANCE réplique que les revenus annuels du couple [P] s’élevaient à 107.124 € pour l’année 2018 et que si l’on soustrait de cette somme le montant des revenus déclarés par l’épouse de M. [P], soit 14.781 €, l’appelant a en réalité perçu la somme cumulée de 92.343 € (107.124 ‘ 14.781), des revenus fonciers ayant été perçus par le couple.
39. S’agissant de la société ACE, l’intimée indique que M. [P] n’indique pas le montant de la rémunération qu’il perçoit dans le cadre de cette société qui existe toujours au regard de son Kbis récent et ne prend pas, non plus, en considération la valeur des actions qu’il détient dans cette société, dans l’évaluation de ses capacités actuelles de remboursement.
Au regard de la vente du bien immobilier appartenant à cette société pour 400.000 €, la SA FACTOFRANCE indique que le patrimoine actuel de Monsieur [P] intègre donc, a minima, une somme de 136.000 €, laquelle excède à elle seule le montant cumulé des demandes qu’elle formule aujourd’hui.
40. Elle formule en outre les objections qui suivent :
– Concernant les prêts de la Caisse d’Epargne, la société FACTOFRANCE fait valoir que ces deux emprunts ont été intégralement remboursés dans le courant de l’année 2020, portant ses facultés contributives aux sommes supplémentaires de 7.955 € (2.811 + 5.144) ;
– S’agissant du bien immobilier détenu à [Localité 11], sa valeur aurait augmenté du fait des remboursements mensuels opérés par M. [P] ;
– Concernant la somme sollicitée de 26.400 € en exécution d’un engagement d’aval, une décision est toujours pendante en ce qui concerne son exécution ;
– Sur la somme de 70.400 € sollicitée par la BANQUE PALATINE, que l’arrêt en date du 15 juin 2021 de la Cour d’appel de Poitiers aux termes duquel ce prêteur a été débouté de ses demandes a fait l’objet d’un pourvoi ;
– s’agissant de l’engagement de caution au profit du CRÉDIT MUTUEL à hauteur de 285.000 €, M. [P] ne démontre pas qu’il a été appelé en garantie et qu’en outre, en tant qu’engagement compris dans le protocole de conciliation précité, cet engagement est devenu caduc ;
– Concernant l’acte de caution solidaire au profit du Crédit Agricole à concurrence de 340.000 €, M. [P] ne verse pas l’acte dont s’agit et rappelle que dès lors qu’il est lui aussi compris dans le périmètre du protocole de conciliation, il est devenu caduc du fait de la liquidation judiciaire des sociétés de son groupe.
41. La cour rappelle à titre liminaire que la charge de la preuve qui pèse sur la banque lui impose de démontrer ses allégations quant à l’existence de ressources et d’un patrimoine financier dont serait titulaire la caution susceptible de lui permettre de payer les sommes réclamées en exécution de son engagement de caution.
42. Il s’ensuit que la SA FACTOFRANCE ne peut reprocher à la caution de ne pas prouver l’absence d’autres revenus susceptibles d’être perçus par M. [P] en sa qualité de président de la SAS ACE ou d’avoir inclus des prêts qui n’étaient pas remboursés au moment de l’assignation, quand bien même l’ont-ils été quelque mois après.
43. Il ressort du document fiscal versé au débat que M. [P], retraité, marié sous le régime de la séparation de biens, a perçu pour l’année 2018 un revenu total de 48.961 € au titre des pensions et retraites outre 43.738 € pour le couple au titre des revenus des capitaux mobiliers déclarés.
44. Au-delà du fait que la cour observe que les revenus de référence qui auraient du être versés aux débats sont ceux de l’année 2019, date de l’assignation, et non de l’année 2018 comme en l’espèce, il y a lieu de retenir la méthode de calcul opéré par la SA FACTOFRANCE pour déterminer les revenus de M. [P] dès lors que ce dernier ne donne pas le détail des revenus fonciers revenant à son épouse. Il y a donc lieu de retenir des revenus pour M. [P] d’un montant de 92.343 €.
45. La valeur correspondant aux parts sociales de la société ACE sera évaluée, (comme le retient d’ailleurs l’intimé en page 25 de ses conclusions), à la valeur de 136.000 €, après vente par acte du 14 avril 2017 à la société Thim Immo des bâtiments industriels et de la parcelle de lotissement dont elle était propriétaire.
46. Il n’est en outre pas contesté que M. [P] est propriétaire d’un bien immobilier d’une valeur de 620.000 €, soit un patrimoine hors endettement de 756.000€.
47. La cour relève que la banque soutient à tort que les sommes dues à la Banque Palatine au titre de l’aval consenti à la Banque Palatine ne seraient pas exigibles du fait de la suspension des poursuites inhérente à l’ouverture d’une procédure collective, dès lors, qu’au contraire, M. [P] démontre avoir été assigné par la Banque Palatine le 22 août 2016 en paiement de la somme de 70.400 € au titre de l’aval d’un billet à ordre et condamné au paiement de cette somme outre 2.500 € d’article 700 du code de procédure civile par jugement du 28 mai 2019, soit une somme totale de 72.900 € qui était déjà exigible à la date de l’assignation introductive d’instance et sera intégrée au passif.
48. Il en est de même pour la somme de 82.830,55 € due à la société HSBC réclamée à M. [P] dans le cadre de son engagement de caution en date du 14 mai 2016 à hauteur de 96.400€ dont il appartient à la SA FACTOFRANCE de désormais démontrer qu’elle ne serait pas due, somme qui était donc entrée au passif de son patrimoine à la date de l’assignation.
49. La cour note également que la Caisse d’Epargne a enjoint et obtenu, suivant injonction en date du 12 juin 2019 de M. [P] la somme de 26.400 € outre intérêts de sorte que là encore, cette somme était entrée au passif du patrimoine de ce dernier à la date de l’assignation.
50. Enfin, il est également établi que par acte d’huissier en date du 09 mai 2019, la CRCAM ATLANTIQUE VENDEE a fait signifier à M. [P] un commandement aux fins de saisie-vente pour avoir paiement de la somme principale de 302’238,17 € au titre du prêt devenu exigible, outre la somme de 22’406,62 € au titre des intérêts acquis au 8 mars 2019 au taux de 3,50 % par an, en vertu du prêt à l’origine de 340.000 €. Lors de l’évocation de cette affaire, la caution de M. [P] était recherchée pour une somme de 196.950 €, laquelle doit être retenue pour mesurer le passif de la caution.
51. M. [P] démontre en outre être engagé au titre des cautionnements suivants qui ne peuvent cependant être pris en compte dès lors qu’il n’est pas établi que celui de 285.000€ auprès du Crédit mutuel et celui de 200.000 € auprès de la Caisse d’épargne aient effectivement été appelés.
52. Il résulte de ce qui précède que l’actif net de 376.919,45 € (différence entre l’actif de 756.000€ et le passif appelé ou certain de 379.080,55 €), est nettement supérieur à l’obligation à paiement de la somme de 94.765,73 € (15.894,25 € à laquelle s’ajoute celle de 78.871,48 €), de sorte que M. [P], qui dispose de ressources personnelles à hauteur de 92.343 € lui permettant de faire face aux charges courantes, était en mesure, selon appréciation de sa situation à la date du 19 juillet 2019, de régler les sommes dues sans être privé du nécessaire vital.
53. Dès lors, la SA FACTOFRANCE est fondée à se prévaloir du cautionnement souscrit le 21 octobre 2015, de sorte que le jugement de première instance sera confirmé sur ce point et la caution devra paiement des sommes réclamées, lesquelles ne sont pas au demeurant contestées dans leur quantum.
Sur la demande de délais de paiement
54. En vertu de l’article 1343-5 du Code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
55. La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite. […]
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment.
56. Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour apprécier si des délais de grâce peuvent être accordés au débiteur sans que cela ne soit nécessairement subordonné à l’existence d’une capacité de remboursement de ses dettes par le débiteur. Lorsque ce dernier ne dispose d’aucune capacité de remboursement, le juge peut lui accorder un report de paiement en lieu et place d’un rééchelonnement de sa dette.
57. M. [P], se fondant sur sa situation financière actuelle, indique qu’il ne dispose d’aucune autre source de revenu que sa retraite de sorte qu’il ne pourra pas rembourser la banque à brève échéance en cas de condamnation.
58. La SA FACTOFRANCE objecte que M. [P] a, de fait, d’ores et déjà bénéficié de plusieurs mois de report, étant rappelé qu’elle lui a adressé une mise en demeure le 16 avril 2019 et qu’aucun paiement, même partiel, n’est intervenu depuis lors en dépit de l’introduction de la présente instance.
59. La cour observe, au regard des revenus de M. [P], qui ne se limitent pas à sa pension de retraite à l’inverse de ce qu’il affirme et que les pièces produites aux débats démontrent qu’il est tout à fait à même de faire face à ses obligations en la matière, aucun justificatif d’une situation particulière au sens du texte susmentionné n’étant alléguée.
60. La décision déférée sera également confirmée sur ce point.
Sur les demandes accessoires
61. Il apparaît équitable de condamner M. [P] à payer à la SA FACTOFRANCE une somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
62. M. [P] supportera les dépens générés par la procédure d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme dans ses dispositions contestées le jugement du tribunal de commerce de la Roche-Sur-Yon en date du 03 août 2021,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [R] [P] à payer à la SA FACTOFRANCE une indemnité de 3.000€ en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne Monsieur [R] [P] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,