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Conformément aux articles 30 à 32 du code de procédure civile, l’action, qui est le droit pour l’auteur d’une prétention d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée et pour son adversaire celui de discuter son bien-fondé, est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir étant irrecevable.
Il en résulte que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention et que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action (en ce sens 1re Civ., 2 novembre 2005, pourvoi n° 02-17.697, Bull. 2005, I, n° 394 ; Com., 8 février 2017, pourvoi n° 15-23.513). Aussi, l’action fondée sur les dispositions de l’article 1240 du code civil n’est pas attitrée mais est ouverte à toute personne ayant un intérêt à agir, c’est à dire un intérêt direct à la satisfaction par le juge de la prétention formulée, la démonstration de l’existence d’un préjudice n’étant pas une condition de recevabilité d’une telle action mais de son succès. De même, la situation de concurrence directe ou effective entre les sociétés, laquelle n’est pas une condition du bien-fondé de l’action qui exige seulement l’existence de faits fautifs générateurs de préjudice (Com., 12 février 2008, n° 06-17.501), n’est pas non plus une condition de recevabilité de l’action en concurrence déloyale. La délimitation du marché pertinent étant une étape spécifique au seul droit des pratiques anticoncurrentielles, il n’est pas nécessaire d’identifier au préalable un marché de référence sur lequel les produits ou services sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux. En application des dispositions de l’article 1240 du code civil, le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice. |
Résumé de l’affaire : La société Viacab, active dans la réservation de taxis et de VTC entre 2011 et 2017, a assigné la société Coup France, qui proposait un service de location de scooters électriques, pour concurrence déloyale. Le tribunal de commerce de Paris a jugé en faveur de Coup France, déclarant Viacab irrecevable pour défaut d’intérêt à agir et condamnant Viacab à verser des frais à Coup France. Viacab a interjeté appel, mais l’affaire a été radiée. En 2022, Viacab a demandé le rétablissement de l’affaire. Dans ses conclusions, Viacab conteste le jugement initial et demande réparation pour divers préjudices liés à l’occupation illégale du domaine public par Coup France. La société Robert Bosch, héritière de Coup France, demande la confirmation du jugement initial et le déboutement de Viacab. La Cour a clos l’instance le 21 mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 4
ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2024
(n° , 13 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 22/16546 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGOCI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2019 – Tribunal de Commerce de Paris, 15ème chambre – RG n° 2018001103
APPELANTE
S.A.R.L. VIACAB agissant poursuites et diligences de ses représentant légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 533 248 266
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Edmond Fromantin, avocat au barreau de Paris, toque : J151
INTIMEE
SAS ROBERT BOSCH, venant aux droits de la société COUP FRANCE SAS, [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 572 067 684
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Florence Guerre de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de Paris, toque : L0018
Assistée de Me Aurélien Zilberman de ASHURST LLP et Me Jacques Dabreteau de ADDLESHAW GODDARD (Europe) LLP, avocats au barreau de Paris, toque : J034
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 03 Juillet 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Brigitte Brun-Lallemand, première présidente de chambre
Mme Sophie Depelley, conseillère
M. Julien Richaud, conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Sophie Depelley dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : M. Maxime Martinez
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Brigitte Brun-Lallemand, première présidente de chambre et par M. Maxime Martinez, greffier, présent lors de la mise à disposition.
La société Viacab, créée en juin 2011, a proposé sur la région parisienne via internet un service de réservation de taxis exploité sous l’enseigne SOS Taxi, et de VTC exploité sous l’enseigne Viacab entre juin 2011 et juillet 2017, ainsi qu’un service de location de véhicules 4 roues sous les enseignes Super Cab et Black Cab et de 2 roues sous l’enseigne Bike Booking.
La société Coup France, aux droits de laquelle vient la société Robert Bosch, avait pour activité la prestation de services de location de courte durée et en libre-service de deux-roues ou scooters à motorisation électrique, à titre occasionnel ou par abonnement, via une application mobile internet. Lancée en août 2017, la société Coup France a finalement été radiée du RCS de Bobigny le 5 août 2021, suite à sa dissolution sans liquidation avec transmission à titre universel du patrimoine social.
Par acte du 5 janvier 2018, la société Viacab a assigné la société Coup France devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir des dommages-intérêts en réparation d’actes de concurrence déloyale que Coup France aurait commis en ne respectant pas la réglementation applicable à son activité.
Par jugement du 17 juin 2019, le tribunal de commerce de Paris a :
– Dit la société Coup France recevable et bien fondée dans sa demande d’irrecevabilité ;
– Dit la société Viacab irrecevable dans son action à l’encontre de la société Coup France pour défaut d’intérêt à agir ;
– Condamné la société Viacab à payer à la société Coup France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Ordonné l’exécution provisoire nonobstant appel, sans caution, de la somme due au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné la société Viacab aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 euros dont 12,85 euros de TVA.
La société Viacab a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 18 juillet 2019.
Par ordonnance du 1er septembre 2020, l’affaire a été radiée du rôle de l’appel, sur demande de la société Coup France. La société Viacab a sollicité le rétablissement de cette affaire au rôle de la cour d’appel, par saisine du 25 août 2022.
Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 3 mai 2024, la société Viacab demande à la Cour de :
Vu les articles L2122-1, L2125-1, L2125-3, L2122-1-1, L. 2122-1 à L. 2122-3 du code général de la propriété des personnes publiques,
Vu les articles L. 2213-1 et L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales,
Vu l’arrêté préfectoral N° 95-11067 du 10 juillet 1995 complétant l’ordonnance N° 71-16757 du 15 septembre 1971 réglementant l’usage des voies ouvertes à la circulation publique à [Localité 8] applicable à l’époque des faits,
Vu l’arrêté municipal du 21 mai 2012 de la ville de [Localité 8] fixant les modalités régissant les activités commerciales sur le domaine public municipal applicable à l’époque des faits,
Vu l’article L. 442-8 du code de commerce applicable à l’époque des faits,
Vu les articles R311-1, R417-10, R417-12 et L325-1 du code de la route,
Vu la délibération N°2019 DVD 50 de la mairie de [Localité 8] du 4 avril 2019,
Vu le règlement de la mairie de [Localité 8] relatif à la mise en oeuvre du paiement de la redevance applicable aux véhicules en libre-service sans stations d’attache en date du 24 juillet 2019,
Vu les articles L.581-2, L.581-4, L.581-8 et L581-15 du code de l’environnement,
Vu les articles L.446-1 et R. 644-2 du code pénal,
Vu les articles L121-1 et L121-4 du code de la consommation,
Vu l’article L131-1 du code des procédures civiles d’exécution,
Vu les articles 9, 10, 11, 15, 30, 31,32, 122, 132, 133, 134 et 146 du code de procédure civile,
Vu les articles 10 et 1240 (anciennement 1382) et suivants du code civil,
– Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 17 juin 2019 (RG 2018001103) en ce qu’il a :
* Dit la société Coup France recevable et bien fondée dans sa demande d’irrecevabilité ;
* Dit la société Viacab irrecevable dans son action à l’encontre de la société Coup France pour défaut d’intérêt à agir ;
* Condamné la société Viacab à payer à la société Coup France la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* Ordonné l’exécution provisoire nonobstant appel, sans caution, de la somme due au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* Condamné la société Viacab aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 € dont 12,85 € de TVA.
Statuant à nouveau de :
Sur l’intérêt à agir de Viacab en date du 5 janvier 2018,
– Prononcer que Viacab justifie sur [Localité 8] et région parisienne d’une activité régulière et effective de centrale de réservations de taxis et de VTC depuis 2011 à aujourd’hui et d’exploitant VTC de juin 2011 jusqu’au 17 juillet 2017 (date de fin de son certificat d’immatriculation) en fournissant directement ou indirectement une prestation de transport passif de personnes.
– Prononcer que Viacab justifie également sur [Localité 8] et région parisienne d’une activité régulière et effective de location de véhicules à 4 roues et de véhicules à 2 roues à titre principal ou d’une activité régulière et effective de location de véhicules à 4 roues à titre subsidiaire uniquement en fournissant depuis juin 2011 à aujourd’hui directement ou indirectement une prestation de transport actif de personnes.
– Prononcer que le marché de Viacab et de Robert Bosch (France) SAS est celui de la mobilité urbaine à [Localité 8] exploitée par l’ensemble des opérateurs de taxis, VTC, centrales de réservation pour un transport passif et les loueurs de tous types de véhicules pour un transport actif sans que le marché ni le litige ne soient limités à la seule offre de location de cyclomoteurs.
– Rappeler de toute manière selon une jurisprudence constante, qu’un rapport de concurrence effectif entre des sociétés n’est pas une condition de l’action en concurrence déloyale qui exige seulement l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice.
– Prononcer que la société Viacab a par conséquent qualité et intérêt à agir contre Robert Bosch (France) SAS au jour de sa demande introductive d’instance et la déclarer recevable en sa demande de réparation d’actes de concurrence déloyale ayant affecté le marché de la mobilité urbaine sur [Localité 8].
Sur l’utilisation irrégulière du domaine public sans autorisation ni paiement de redevance,
– Prononcer que l’occupation et l’utilisation du domaine public par l’installation de plusieurs milliers de véhicules de Robert Bosch (France) SAS en vue d’une exploitation économique de location en libre-service de ses véhicules sur le domaine public utilisé à des fins privatives excèdent le droit d’usage qui appartient à tous ;
– Prononcer que l’occupation et l’utilisation du domaine public par l’installation de plusieurs milliers de véhicules de Robert Bosch (France) SAS en vue d’une exploitation économique de maintenance mécanique de ses véhicules sur le domaine public utilisé à des fins privatives excèdent le droit d’usage qui appartient à tous ;
– Prononcer que Robert Bosch (France) SAS a occupé sans titre le domaine public de [Localité 8] avec ses scooters entre le mois de juin 2017 et le 27 octobre 2019.
A titre principal,
– Prononcer que l’utilisation, sans autorisation d’occupation du domaine public de [Localité 8], entre le mois de juin 2017 et le 27 octobre 2019 du domaine public pour remiser, louer et entretenir mécaniquement les véhicules (cyclomoteurs) du service Coup France constitue une faute de Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
– Prononcer que l’irrespect de l’arrêté municipal du 21 mai 2012 de la ville de [Localité 8] fixant les modalités régissant les activités commerciales sur le domaine public municipal par la société Robert Bosch (France) SAS entre le mois de juin 2017 et le 27 octobre 2019 constitue une faute de la société Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
A titre subsidiaire,
– Prononcer que la société Robert Bosch (France) SAS a bénéficié d’un avantage indu en ne s’étant pas acquittée corrélativement, aux mêmes dates (dès le 5 avril 2019 au 27 octobre 2019), malgré son occupation du domaine public avec ses scooters, de la moindre redevance fixée par la délibération tarifaire du 4 avril 2019 de la ville de [Localité 8] et le règlement relatif à la mise en oeuvre du paiement de la redevance applicable aux véhicules et aux engins mobiles en libre-service sans station d’attache du 24 juillet 2019.
Sur le remisage de véhicules de Coup France en attente de location,
– Prononcer que le remisage des véhicules de location de Robert Bosch (France) SAS sur le domaine public de [Localité 8] en attente d’affectation à un client, faisant en réalité du domaine public une annexe du siège social de l’entreprise par appropriation privée de la voie publique à des fins commerciales a excédé l’usage normal des droits de stationnement entre juin 2017 et le 22 juillet 2018.
– Prononcer que l’irrespect de l’arrêté préfectoral N° 95-11067 interdisant le remisage des véhicules de location de Robert Bosch (France) SAS en attente d’affectation à un client sur le domaine public depuis juin 2017 jusqu’au 22 juillet 2018 constitue une faute de la société Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
Sur le stationnement des scooters de Coup France sur les trottoirs,
– Prononcer que l’irrespect du code de la route en stationnant (ou en laissant stationner) ses cyclomoteurs sur les trottoirs du domaine public entre juin 2017 et le 30 novembre 2019 constitue une faute de la société Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
Sur la publicité des scooters de Coup France dans des lieux protégés,
– Prononcer que l’irrespect du code de l’environnement en faisant stationner ses cyclomoteurs sur des zones historiques protégées entre juin 2017 et le 30 novembre 2019 constitue une faute de la société Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
Sur la pratique commerciale trompeuse,
– Prononcer que la pratique commerciale trompeuse mise en place par Robert Bosch (France) SAS en présentant comme licite (en l’absence de titre d’occupation du domaine public) le service Coup France avant le 28 octobre 2019 constitue une faute de la société Robert Bosch (France) SAS sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8].
En tout état de cause,
– Prononcer que la société Robert Bosch (France) SAS, en ne respectant pas la réglementation d’occupation et d’utilisation du domaine public sur la ville de [Localité 8] a bénéficié de manière déloyale d’une capacité d’exploitation indue pour soit entretenir mécaniquement soit louer commercialement ses véhicules au détriment des autres opérateurs de mobilité urbaine.
– Prononcer que la société Robert Bosch (France) SAS a rompu l’égalité entre les acteurs du marché de la mobilité urbaine et a ainsi commis des actes de concurrences déloyale à l’encontre de la société Viacab.
– Débouter la société Robert Bosch (France) SAS de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
– Condamner la société Robert Bosch (France) SAS à verser à la société Viacab les sommes de :
* 116740 euros au titre de la perte de chance sur son activité de transport en taxi, de transport en VTC et de loueur de véhicules,
* 112038 euros au titre du trouble commercial d’économie indue pour ne pas s’être acquittée d’une redevance d’occupation du domaine public entre le 1er juillet 2017 et le 4 avril 2019,
* 28000 € au titre du préjudice moral,
* 20000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– Ordonner la publication de l’arrêt à intervenir sur le site internet www.bosch.fr pendant une durée d’un mois, ainsi que dans les journaux Le Figaro, Les Echos et Le Parisien sous astreinte de 5000 € par jour de retard pour chaque publication à compter de l5 jours après la signification de l’arrêt ; aux frais de Robert Bosch (France) SAS et ce, au besoin, à titre de dommages-intérêts complémentaires.
– Condamner la société Robert Bosch (France) SAS aux entiers dépens de l’instance.
Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées le 16 mai 2024, la société Robert Bosch, venant aux droits de la société Coup France, demande à la Cour de :
Vu les articles 31, 32 et 122 du code de procédure civile,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
A titre principal
– Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 17 juin 2019, en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action de la société Viacab pour défaut d’intérêt à agir,
A titre subsidiaire
Si par extraordinaire la cour d’appel de Paris venait à infirmer le jugement et à déclarer recevable l’action intentée par la société Viacab à l’encontre de la société Coup France,
– Débouter la société Viacab de toutes ses demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause
– Condamner la société Viacab à payer à la société Coup France la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la société Viacab aux entiers dépens,
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024.
La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
1. Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir de la société Viacab
Exposé des moyens,
Au soutien de son appel, la société Viacab expose que le litige entre les parties est circonscrit à la période comprise entre le mois de juin 2017 et le 30 novembre 2019, date d’arrêt de l’activité Coup France, et que sur cette période elle avait une activité commerciale effective sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8] et sur lequel opérait également la société Coup France, aux droits de laquelle vient la société Robert Bosch. Rappelant que l’existence d’une situation de concurrence n’est pas une condition préalable à la recevabilité de l’action en concurrence déloyale de même que l’existence d’un préjudice, la société Viacab soutient avoir un intérêt à agir à l’encontre de la société Robert Bosch venant aux droits de la société Coup France pour des faits de concurrence déloyale par non-respect de la réglementation relative à son activité.
En réponse, la société Robert Bosch venant aux droits de la société Coup France fait valoir que l’existence d’un préjudice causé par un acte de concurrence déloyale implique nécessairement un rapport de concurrence et donc la démonstration de l’exercice d’une activité commerciale effective, ce que la société Viacab est dans l’incapacité de justifier au regard des pièces versées aux débats. Elle conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré l’action intentée par la société Viacab à l’encontre de la société Coup France irrecevable pour défaut d’intérêt à agir.
Réponse de la Cour,
Conformément aux articles 30 à 32 du code de procédure civile, l’action, qui est le droit pour l’auteur d’une prétention d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée et pour son adversaire celui de discuter son bien-fondé, est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir étant irrecevable.
Il en résulte que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention et que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action (en ce sens 1re Civ., 2 novembre 2005, pourvoi n° 02-17.697, Bull. 2005, I, n° 394 ; Com., 8 février 2017, pourvoi n° 15-23.513).
Aussi, l’action fondée sur les dispositions de l’article 1240 du code civil n’est pas attitrée mais est ouverte à toute personne ayant un intérêt à agir, c’est à dire un intérêt direct à la satisfaction par le juge de la prétention formulée, la démonstration de l’existence d’un préjudice n’étant pas une condition de recevabilité d’une telle action mais de son succès.
De même, la situation de concurrence directe ou effective entre les sociétés, laquelle n’est pas une condition du bien-fondé de l’action qui exige seulement l’existence de faits fautifs générateurs de préjudice (Com., 12 février 2008, n° 06-17.501), n’est pas non plus une condition de recevabilité de l’action en concurrence déloyale.
La délimitation du marché pertinent étant une étape spécifique au seul droit des pratiques anticoncurrentielles, il n’est pas nécessaire d’identifier au préalable un marché de référence sur lequel les produits ou services sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux.
Il ressort des pièces versées aux débats (pièces n°3 à 5) que la marque Bike Booking a été déposée par le gérant de Viacab en 2008 dans la classe 39 correspondant au transport et à la location de véhicule à 2 roues, puis a été acquise par Viacab en 2011 et renouvelée en 2018. Le nom de domaine bikebooking.fr a été réservé le 18 décembre 2017.
La société Vicab produit également (pièces n°2 et 2bis) les comptes sociaux des exercices 2016 et 2017 (projet) et une déclaration de TVA 2017 (pièce n°143) et des démarches de déclarations d’activité auprès de la préfecture en 2019 et 2020. Elle justifie par ailleurs (pièces n°148 à 149) de factures d’entretien d’un véhicule de février et juin 2016 émanant d’une société anglaise ainsi que des pages publicitaires sur internet pour ses différentes enseignes (constat du 29 mars 2019 pièce n°133). La société Vicab verse en outre (pièces n° 151 et 152) quelques messages de demande de réservation adressées à l’adresse [Courriel 10] (respectivement du 5 décembre, 14 décembre et 21 décembre 2017 et des 14 et 12 février 2018), à l’adresse [Courriel 7] (du 28 avril 2016, du 16 mai 2017, du 22 octobre 2017 et du 16 février 2018) et deux messages, du même expéditeur, à [Courriel 6] des 26 et 28 février 2018.
Il s’ensuit que la société Viacab, qui justifie d’une activité commerciale effective au moment de l’introduction de l’instance le 5 janvier 2018, disposait d’un intérêt actuel et légitime à agir à l’encontre de la société Coup France aux fins de cessation d’actes de concurrence déloyales et en paiement de diverses indemnités à ce titre.
Dès lors le jugement sera infirmé, et la société Viacab sera déclarée recevable en son action à l’encontre de la société Coup de France, aux droits de laquelle vient la société Bosch France.
2. Sur le fond
En application des dispositions de l’article 1240 du code civil, le bien-fondé d’une action en concurrence déloyale est subordonné à l’existence de faits fautifs générateurs d’un préjudice.
La société Viacab reproche à la société Coup France tout à la fois une utilisation irrégulière du domaine public (prohibée par les articles L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, L.446-1 du code pénal et l’arrêté municipal du 21 mai 2012 de la ville de [Localité 8]), un remisage illicite de véhicules de location en attente de clientèle sur la voie publique (interdit par l’arrêté préfectoral n°95-11067) un stationnement illicite sur les trottoirs (prévu à l’article R.417-10 du code de la route), une publicité illicite sur des zones historiques protégées et une pratique commerciale trompeuse.
Sur le grief d’occupation illicite du domaine public
Exposé des moyens,
La société Viacab fait valoir en substance que la société Coup France a utilisé depuis août 2017 jusqu’au 27 octobre 2019 le domaine public sans détenir une autorisation d’occupation du domaine public pour stationner, louer et entretenir mécaniquement les 2200 véhicules (cyclomoteurs) de sa flotte en infraction à la réglementation des articles L.2122-1, L.2125-1 et L.2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques, L.442-8 alinéa 1er du code de commerce, L.446-1 du code pénale, et à l’arrêté municipal du 21 mai 2012. Elle prétend également que la société Coup a depuis juin 2017 réparti « notoirement » dans les rues de [Localité 8] un nombre très important de véhicules de location directement sur la voie publique et fait stationner ses véhicules en attente d’affectation à la clientèle en fraude de l’arrêté préfectoral n°95-11067, qui interdit un tel remisage constituant un stationnement abusif, jusqu’à son abrogation le 23 juillet 2018. La société Viacab reproche encore le non-respect de l’article R417-10 du code de la route en stationnant (ou en laissant stationner) ses cyclomoteurs sur le trottoir en attente de client depuis juin 2017 jusqu’au 30 novembre 2019.
Cette utilisation du domaine public sans autorisation d’occupation pour remiser, commercialiser et entretenir les véhicules de la société Coup France, constitue selon la société Vicab une utilisation effectuée dans les limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous et ce faisant caractériserait une faute de la société Coup France sur le marché de la mobilité urbaine à [Localité 8]. Elle aurait acquis un avantage déloyal de capacité massive de stationnement et de surface commerciale obtenues indûment nonobstant la gêne des piétons, notamment des personnes à mobilité réduite qui seraient contraintes de se frayer un passage. Elle relève en outre que pour la période comprise entre 5 avril et 27 octobre 2019, la société Coup France n’a pas acquitté de redevance, mais a payé a posteriori une indemnité d’occupation. Elle a donc bénéficié d’une avance de trésorerie, qui constitue un avantage indu.
La société Robert Bosch, répond en premier lieu qu’au cours de l’activité commerciale de Coup France, le statut juridique du « free-floating » n’était pas fixé et que les éléments produits par la société Vicab ne sont pas de nature à caractériser un usage anormal du domaine public. Elle relève que ce n’est qu’à la suite du vote de l’article 41 de la loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités que le législateur a décidé d’encadrer cette activité et fixé les conditions d’utilisation sur la voie publique à l’article L.1231-17 du code des transports en vigueur depuis le 27 décembre 2019. Elle souligne que pour autant, la Ville de [Localité 8] avait anticipé l’entrée en vigueur de cette loi en organisant l’occupation du domaine public par les véhicules ou engins à deux ou trois roues en libre-service sans stations d’attache en attente de location, d’une part, en approuvant par délibération 2019 DVD 50 du 5 avril 2019, et pour la première fois, les niveaux des redevances correspondant et, d’autre part, en adoptant le règlement du 24 juillet 2019 relatif à la mise en oeuvre du paiement de la redevance applicable aux véhicules et aux engins mobiles en libre-service sans stations d’attache. Elle précise que dans le cadre de cette nouvelle règlementation, par un arrêté intitulé “Autorisation d’occupation du domaine public pour le remisage d’engins mobiles en libre-service sans station d’attache” du 28 octobre 2019 , la ville de [Localité 8] a autorisé Coup France à remiser ses 1774 scooters sur le domaine public routier et que cette autorisation était accordée pour la période du 28 octobre 2019 au 31 décembre 2019, soit pour une période couvrant la fin de l’activité de Coup France (jusqu’au 30 novembre 2019). En contrepartie de cette autorisation, la société intimée prétend s’être acquitté d’une redevance de 21 145,48 euros et d’une indemnité d’occupation de 67 014,90 euros pour la période du 5 avril 2019 au 27 octobre 2019.
Elle observe par ailleurs que l’arrêté préfectoral n°95-11067 a été abrogé par l’arrêté préfectoral n° 2018 P L12217 du 23 juillet 2018 à la suite de l’annulation de l’article 2 de l’arrêté par le juge administratif en 2002. Selon elle, l’activité de la société Coup France ne pouvait manifestement pas relever de son champ d’application.
Enfin, elle soutient que seuls les utilisateurs des scooters sont responsables des éventuelles infractions aux règles de stationnement prévues par le code de la route et renvoie à cet égard à ses conditions générales, justifiant qu’elle n’a nullement autorisé ni même encouragé le stationnement gênant de certains cyclomoteurs.
Réponse de la Cour,
La Cour rappelle que la concurrence déloyale, appréciée à l’aune du principe de la liberté du commerce, consiste en des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires. La violation par un opérateur économique des obligations légales et réglementaires auxquelles il est normalement soumis a pour effet de lui procurer indûment un avantage, résultant notamment des économies de temps et d’argent ainsi réalisées, en créant une rupture d’égalité dans la compétition au détriment de concurrents exerçant une activité dans le respect des règles.
Il n’est pas sérieusement contesté que le cadre juridique réglementant le développement de nouvelles mobilités (telles que l’activité de location de scooters ou de trottinettes électriques en libre-service sans station d’attache) n’a été, du point de vue de l’occupation du domaine public, véritablement stabilisé qu’à compter de 2019 par les interventions successives du décret n°2019-1082 du 23 octobre 2019 relatif à la réglementation des engins de déplacement personnel et de la loi d’orientation des mobilités n°2019-1428 du 23 décembre 2019. Anticipant l’entrée en vigueur de cette loi, la Ville de [Localité 8] avait pris une délibération du 5 avril 2019 fixant (pour la première fois) le tarif des redevances pour les engins à deux ou trois roues en libre-service sans station d’attache, puis un règlement du 24 juillet 2019 définissant les modalités d’occupation du domaine public des opérateurs intéressés.
C’est dans ce cadre, que par arrêté du 28 octobre 2019 (pièce n°27 Bosch), elle a autorisé la société Coup France pour la période du 28 octobre 2019 au 31 décembre 2019 à remiser 1774 véhicules motorisés électriques à 2/3 roues en libre-service sans station d’attache sur le domaine public routiers sur des emplacements particuliers moyennant le paiement d’une redevance de 21 145,48 euros que la société Coup France justifie avoir acquitté (pièce n°30). La société Robert Bosch justifie s’être également acquittée d’une indemnité d’occupation de 67 014,90 euros pour la période du 5 avril 2019 au 27 octobre 2019 (pièces n° 28 et 30).
Dès lors pour la période du 5 avril 2019 au 30 novembre 2019 (date de fin d’activité), la société Coup France s’est acquittée des redevances et indemnités d’occupation le 20 décembre 2019 à l’émission des titres de perception, en sorte que la société Viacab ne peut sérieusement soutenir l’existence d’actes de concurrence déloyale par « une avance de trésorerie » concernant l’utilisation du domaine publique.
Pour la période d’activité de juin 2017 à avril 2019, seules les dispositions suivantes étaient applicables :
« Il est interdit à toute personne d’offrir à la vente des produits ou de proposer des services en utilisant, dans des conditions irrégulières, le domaine public de l’Etat, des collectivités locales et de leur établissements publics » (article L. 442-8 du code de commerce).
« Nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d’une personne publique (‘) ou l’utiliser dans des limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous » (article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques).
« La vente à la sauvette est le fait, sans autorisation ou déclaration régulière, d’offrir, de mettre en vente ou d’exposer en vue de la vente des biens ou d’exercer toute autre profession dans les lieux publics en violation des dispositions réglementaires sur la police de ces lieux » (article L.446-1 du code pénal)
« Tant que l’autorisation délivrée par le Maire de [Localité 8] n’a pas été reçue par le demandeur, il lui est interdit d’occuper le domaine public municipal » (arrêté municipal du 21 mai 2012 de la ville de [Localité 8])
« Le remisage des véhicules de location sur la voie publique en attente d’affectation à un client excède l’usage normal des droits de stationnement, faisant en réalité de la voie publique une annexe du siège social de l’entreprise, ce qui constitue une appropriation privée de la voie publique à des fins commerciales, et donc une utilisation du domaine public non conforme à sa destination.
Article 1er : le remisage des véhicules de location en attente d’affectation à un client sur la voie publique ou ses dépendances et interdit et constitue un stationnement abusif » (arrêté préfectoral n°95-11067 complétant l’ordonnance n°71-16757 du 15 septembre 1971 réglementant l’usage des voies ouvertes à la circulation publique à [Localité 8], en vigueur jusqu’à son abrogation par l’arrêté préfectoral n° 2018 P L12217 du 23 juillet 2018)
« I.-Tout véhicule à l’arrêt ou en stationnement doit être placé de manière à gêner le moins possible la circulation.
II.-Est considéré comme gênant la circulation publique l’arrêt ou le stationnement d’un véhicule : 1° Sur les trottoirs lorsqu’il s’agit d’une motocyclette, d’un tricycle à moteur ou d’un cyclomoteur » (article R.417-10 du code de la route)
La Cour retient qu’il résulte de l’application combinée de ces dispositions que dès lors qu’elle n’occupe pas une dépendance du domaine public, laquelle implique une implantation sur la voie publique sur des emplacements permanents, la location de véhicules n’est pas prohibée en tant que telle, le domaine public pouvant être utilisé librement dès lors que les limites du droit d’usage qui appartient à tous ne sont pas dépassées.
Il apparaît en revanche qu’est fautive l’entreprise qui prévoit le remisage -soit le stationnement ininterrompu- sur la voie publique des véhicules de location, en attente d’affectation à un client ou d’opérations de maintenance, sans respecter ni les autres usages (en particulier de la circulation des piétons), ni les règles relatives aux places de stationnement, lesquelles sont communes à l’ensemble des usagers de la voie publique.
La Cour retient en outre que le stationnement illicite de véhicules sur les trottoirs procédant de l’utilisation irrégulière du domaine public, il n’y a pas lieu de retenir deux manquements distincts.
Enfin, le remisage illicite de véhicules de location en attente de clientèle sur la voie publique ayant fait l’objet d’une abrogation le 23 juillet 2018, aucune faute ne peut être caractérisée, sur ce fondement spécifique, après cette date.
La Cour constate que Viacab, au soutien de sa démonstration selon laquelle Coup France a, depuis juin 2017, violé ses obligations légales et réglementaires sus évoqués, se borne à produire les éléments factuels suivants :
– Une copie d’écran « qu’est-ce que Coup ‘ » non datée (pièce n°8)
– Les conditions générales du service Coup France 2017 et 2018 (pièces n°9 et 10)
– Deux articles de presse publiés les 19 juin et 18 août 2017 sur le lancement du nouveau service de scooter électriques en libre-service Coup, destiné à concurrencer Cityscoot (pièces n°11 et 12)
– Des photos (non datées) de scooters sur la voie publique ou trottoir (pièce n°13)
– Un constat d’huissier du 1er octobre 2018, faisant le constat à [Localité 8] de 4 scooters de la société Coup France stationnés (directement sur le point Alexandre III, ou sur le trottoir en dehors des emplacements réservés aux véhicules à 2 roues motorisés [Adresse 11] et [Adresse 9]) (pièce n°84 et 87)
– Une annonce de recrutement pour la maintenance de ses 600 scooters en libre- service (pièce n°13bis)
– Une charte scooters free floating signée le 27 juin 2018 (pièce n° 46 ter)
Ces pièces sont manifestement insuffisantes pour démontrer un usage anormal de la voie publique ayant perduré de juin 2017 à avril 2019.
Il s’en déduit qu’il n’est pas établi par les pièces produites que la société Coup France a déployé, depuis juin 2017, un service de location de scooters électriques en libre-service dans des conditions non respectueuses des autres usages de la voie publique.
Dès lors, la société Vicab échoue à démontrer des actes de concurrence déloyale concernant l’utilisation du domaine public par la société Coup France dans le développement de son activité.
Sur le grief de publicité illicite
Exposé des moyens,
La société Vicab fait encore valoir que la société Coup France a tiré un avantage publicitaire au détriment de ses concurrents en faisant stationner durablement ses cyclomoteurs avec des flocages publicitaires sur des zones historiques protégées en contravention aux dispositions des articles L.581-2, L.581-15 et L.581-8 du code de l’environnement.
La société Robert Bosch répond qu’il résulte des dispositions précitées du code de l’environnement que la simple publicité relative à l’activité exercée par le propriétaire du véhicule est exclue du champ d’application de la réglementation. Elle précise que les véhicules Coup France portaient seulement l’inscription latérale « eScouter à partager » et le logo Coup France sur le flanc du véhicule, en sorte que le stationnement même durable de ces véhicules avec ces simples marquages n’était pas essentiellement publicitaire.
Réponse de la Cour,
La publicité sur les véhicules est interdite, en agglomération, dans certaines zones protégées prévues à l’article L. 581-8 du code de l’environnement (monuments historiques classés notamment) mais en application de l’article L. 581-15 du code de l’environnement, ces dispositions ne sont pas applicables à la publicité relative à l’activité exercée par le propriétaire ou l’usager de ces véhicules dès lors que ces derniers « ne sont pas utilisés ou équipés à des fins essentiellement publicitaires ».
La Cour constate d’une part que la simple marque commerciale « COOP eScooter à partager » apposée sur les scooters Coup France (pièces Bosch n°16 et 18) ne constitue pas un détournement de l’usage du véhicule, lequel stationne dans l’attente d’une nouvelle location, et non dans le but d’assurer essentiellement la publicité de l’entreprise. D’autre part, pour établir un stationnement massif de véhicule dans les zones historiques de [Localité 8], la société Viacab se borne à produire des photos non datées (pièce n°13) de quelques scooters COUP stationnés en des lieux non identifiés et le constat d’huissier du 1er octobre 2018, faisant le constat de stationnement de 4 scooters Coup (pièce n°87).
Il s’ensuit que la publicité illicite n’est pas caractérisée et ne peut être retenue comme constitutive de concurrence déloyale
Sur le grief de publicité trompeuse
Exposé des moyens,
La société Viacab fait valoir que la zone d’activité de Coup « accessible au public » de stationnement et de location des véhicules ne pouvait se situer sur le domaine public sans détenir d’autorisation d’occupation du domaine public, en sorte que la présentation du service Coup comme étant « licite et accessible sur le domaine public » était trompeuse au sens des dispositions des articles L.121-1 et L.121-4 du code de la consommation.
La société Robert Bosch répond d’une part que les pratiques commerciales trompeuses prévues par le droit de la consommation ne sont pas invocables entre professionnels et d’autre part qu’il n’est pas démontré que Coup France avait abusivement ou irrégulièrement utilisé le domaine public.
Réponse de la Cour,
Au regard des motifs qui précèdent, il n’est pas établi par la société Viacab que la société Coup France ait utilisé de manière irrégulière ou abusive le domaine public pour le développement de son activité de juin 2017 à novembre 2019. Aussi, aucune publicité trompeuse n’est sérieusement caractérisée pour constituer un acte de concurrence déloyale.
*
Aucun des agissements fautifs allégués par la société Vicab n’étant caractérisés, celle-ci sera déboutée de l’ensemble de ses demandes indemnitaires en réparation de préjudices pour concurrence déloyale formulées à l’encontre de la société Robert Bosch venant aux droits de la société Coup France, ainsi que de ses demandes de publication.
3. Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Viacab aux dépens de première instance et à payer à la société Coup France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Viacab, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, la société Viacab sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société Robert Bosch la somme de 15 000 euros.
La Cour,
Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la Cour, sauf en ce qu’il a condamné la société Viacab aux dépens et à payer à la société Coup France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Rejette la fin de non-recevoir tendant à déclarer la société Viacab irrecevable en son action pour défaut d’intérêt à agir ;
Déboute la société Viacab de l’ensemble de ses prétentions formulées à l’encontre de la société Robert Bosch venant aux droits de la société Coup France ;
Condamne la société Viacab aux dépens d’appel ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, déboute la société Viacab de sa demande et la condamne à payer à la société Robert Bosch la somme de 15 000 euros ;
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE