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ARRÊT DU
29 Mars 2023
CV / NC
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N° RG 22/00800
N° Portalis DBVO-V-B7G DBIX
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[L] [W]
C/
[E] [B]
UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 2]
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GROSSES le
aux avocats
ARRÊT n° 127-2023
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
Monsieur [L] [W]
né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 8] (47)
de nationalité française, retraité
domicilié : [Adresse 5]
[Localité 4]
représenté par Me David LLAMAS, avocat postulant au barreau d’AGEN, et Me Elisabeth LEROUX, substituée à l’audience par Me Jean-Louis MACOUILLARD, avocate plaidante au barreau de PARIS
APPELANT d’un jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Agen en date du 23 septembre 2022, RG 21/00255
D’une part,
ET :
UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 2] Association déclarée représentée par sa directrice actuellement en exercice domiciliée en cette qualité au siège social
[Adresse 7]
[Localité 2]
représentée par Me Hélène GUILHOT, avocate associée de la SCP TANDONNET ET ASSOCIES, avocate au barreau d’AGEN
Maître [E] [B] en qualité de mandataire liquidateur de la société VERRERIE DE VIANNE
[Adresse 6]
[Localité 3]
représenté par Me Erwan VIMONT, membre de la SCP LEX ALLIANCE, substitué à l’audience par Me Maëlle BLAZEJCZYK, avocat au barreau d’AGEN
INTIMÉS
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 18 janvier 2023, sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Cyril VIDALIE, Conseiller
qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre lui-même de :
Valérie SCHMIDT et Jean-Yves SEGONNES, Conseillers
en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,
Greffière : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
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Faits et procédure :
Par jugement du 19 juin 1991, le tribunal de commerce d’Agen a ordonné l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de la SA Cristalleries et Verreries d’Art de Vianne. Un plan de cession est intervenu le 18 juillet 1997 au bénéfice de la SAS Verrerie de Vianne. Par jugement du 1er octobre 2003, cette société a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire, qui a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 2 février 2004. Maître [B] a été désigné en qualité de liquidateur.
À la suite d’un arrêté du 23 décembre 2011, la SA Cristalleries et Verreries d’Art de Vianne a été inscrite sur la liste des établissements ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) pour la période de 1928 à 1996.
Par acte du 18 juillet 2012, M. [W], à l’instar d’autres salariés, a saisi le conseil de prud’hommes d’Agen afin d’obtenir la réparation de son préjudice d’anxiété, pour avoir été exposé à l’amiante pendant l’exécution de son contrat de travail.
Son action a été rejetée par un jugement du 26 mars 2015, infirmé par un arrêt de la présente Cour du 6 septembre 2016 qui lui a alloué 8 000 euros en réparation du préjudice d’anxiété, a fixé sa créance au passif de la liquidation de la SAS Verrerie de Vianne, dit que le CGEA-AGS de [Localité 2] devrait procéder à l’avance de la créance des salariés, et déclaré la décision opposable au CGEA-AGS de [Localité 2].
La décision a été exécutée et les indemnités versées à Me [B] qui les a remises aux salariés.
Cette décision a toutefois fait l’objet d’un pourvoi.
Par un arrêt du 5 avril 2018, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel d’Agen, en ce qu’il a dit que l’Unedic Délégation, AGS-CGEA d’Ile de France doit sa garantie ; la Cour a dit n’y avoir lieu à renvoi, et débouté les salariés de leurs demandes dirigées à l’encontre de l’Unedic délégation AGS-CGEA d’Ile de France Ouest.
À la suite de cette décision, le CGEA-AGS de [Localité 2] a fait délivrer le 20 avril 2021 à M. [W], un commandement avant saisie, en vue d’obtenir le paiement de la somme de 8 171,18 euros.
Par acte du 10 juin 2021, M. [W] a assigné l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés – CGEA de [Localité 2] (l’AGS) devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Agen afin de voir suspendre les opérations de saisie, prononcer la nullité du commandement faute de justification d’un titre exécutoire, et obtenir paiement de sommes d’argent.
Par jugement du 23 septembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Agen a :
– déclaré recevable la note en délibéré de l’avocat de M. [W] reçue au greffe le 25 juillet 2022,
– débouté M. [W] de l’intégralité de ses demandes,
– rappelé qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes principales ou reconventionnelles qui ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile,
– condamné M. [W] aux dépens de l’instance.
Le juge de l’exécution a considéré que les arrêts de la cour d’appel du 6 septembre 2016 et de la Cour de cassation du 5 avril 2018 constituaient des titres exécutoires permettant à l’AGS de recouvrer directement les sommes indûment versées par elle par l’intermédiaire de Maître [B] en sa qualité de mandataire liquidateur de la SAS Verrerie de Vianne et de la Carpa de Paris.
En effet, ces décisions permettaient de déterminer une créance liquide et exigible dès le prononcé de l’arrêt du 5 avril 2018.
Les moyens de défense de M. [W] concernant la titularité de la créance, la poursuite des opérations de liquidation et l’absence de vérification de la suffisance des fonds disponibles sont apparus inopérants au juge de l’exécution.
M. [W] a formé appel le 4 octobre 2022, désignant en qualité d’intimés l’AGS et Maître [B], visant dans sa déclaration des chefs du jugement le déboutant de ses demandes et le condamnant aux dépens.
Prétentions :
Par uniques conclusions du 10 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, M. [W] demande à la Cour de :
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de ses demandes, et condamné aux dépens,
– statuant de nouveau,
– prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie-vente du 21 avril 2021,
– ordonner la mainlevée des opérations de saisie-vente,
– condamner l’AGS au paiement de la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,
– condamner l’AGS au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Il fait valoir que :
– n’ayant pas été condamné à verser des sommes à l’AGS, celle-ci ne détient un titre d’exécution qu’à l’encontre du mandataire liquidateur,
– le droit à restitution fondé sur un arrêt de cassation est subordonné à l’existence d’une condamnation du créancier par la décision censurée, or la cour d’appel d’Agen n’a pas condamné l’AGS à lui verser des sommes, une telle condamnation n’étant pas susceptible d’intervenir,
– M. [W] n’est pas le débiteur de l’AGS, et il avait le droit d’être indemnisé par le liquidateur, qui ne détient pas de créance à son encontre, ce qui fait obstacle à l’exercice de l’action oblique,
– l’AGS lui a causé un préjudice moral en persévérant volontairement dans une voie de droit vouée à l’échec alors qu’il lui était très difficile d’assurer sa défense.
Par uniques conclusions du 8 décembre 2022, l’AGS demande à la Cour de :
– débouter M. [W] de son appel et de l’intégralité de ses demandes,
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– condamner M. [W] aux dépens de l’appel.
L’AGS fait valoir que :
– l’arrêt de la Cour de cassation du 5 avril 2018 constitue un titre exécutoire pouvant fonder les opération d’exécution forcées destinées à obtenir le recouvrement de sa créance, ainsi que l’indique l’article L.111-3 du code des procédures civiles d’exécution,
– cette disposition n’exige pas que la décision prononce une condamnation expresse, l’obligation de restitution étant de droit,
– il est constant que la cassation d’un arrêt d’appel qui a été exécuté constitue le titre ouvrant droit à restitution,
– le créancier de l’AGS n’est pas l’employeur en procédure collective, mais le salarié, et il ne peut être opéré d’analogie avec le régime de l’assurance de responsabilité, compte tenu de la spécificité du régime de garantie de l’AGS, de son mode de financement par des fonds publics et de son mode d’administration par des organismes associatifs à but non lucratif,
– M. [W] n’est pas fondé à obtenir la réparation d’un préjudice en l’absence de faute de l’AGS et de préjudice, puisqu’aucune somme n’a été perçue.
Par uniques conclusions du 8 décembre 2022, Maître [B] demande à la Cour de :
– lui donner acte, es qualité de mandataire liquidateur de la SAS Verrerie de Vianne, que le règlement de la créance salariale de M. [W] provient de fonds de l’AGS.
Maître [B] fait valoir que :
– les salariés ont obtenu une indemnisation du préjudice d’anxiété à la suite de l’arrêt de la cour d’appel d’Agen, la créance de M. [W] a été déclarée, et l’AGS a effectué le virement des indemnités allouées aux salariés le 19 décembre 2016, à la suite duquel il a établi un chèque d’un montant de 1 607 398,12 euros au bénéfice de la Carpa de Paris, de sorte que l’indemnité a été versée.
Motifs :
Il résulte de l’article L.111-2 du code des procédures civiles d’exécution que le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.
L’article L.111-3 du même code place au premier rang des titres exécutoires les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire lorsqu’elles ont force exécutoire.
La cassation d’un arrêt d’appel qui a été exécuté constitue le titre ouvrant droit à restitution de la somme versée en exécution de ses dispositions, et constitue un titre exécutoire.
En l’espèce, l’arrêt de la cour d’appel du 6 septembre 2016 a reconnu l’existence d’une créance indemnitaire au titre du préjudice d’anxiété de M. [W], fixé son montant, et dit que l’AGS devrait procéder à l’avance de la créance des salariés en application de l’article L. 3253-6 à L.3253-8 du code du travail.
En ce qu’elle a reconnu au salarié le bénéfice de ces dispositions, cette décision a crée un lien d’obligation entre l’AGS, débiteur, et M. [W], créancier, en vertu duquel l’AGS a versé la somme de 8 000 euros à Maître [B] en vue de sa remise à M [W], titulaire de la créance indemnitaire.
La Cour de cassation, en son arrêt du 5 avril 2018, a retenu que la cour d’appel avait fixé la date de naissance du préjudice d’anxiété au 11 juin 2002 à tort, car elle devait être fixée au 23 décembre 2011, or la procédure de redressement judiciaire avait été ouverte le 1er octobre 2003, ce qui excluait la mise en oeuvre de la garantie de l’AGS, qui ne bénéficie qu’aux salariés dont la créance est antérieure au jugement d’ouverture de la procédure collective.
En ce qu’elle anéantit donc le lien d’obligation fondé sur la garantie de l’AGS, cette décision constitue un titre ouvrant droit à restitution de la somme versée en exécution de l’arrêt, ce qui suffit à justifier la voie d’exécution contestée par M. [W].
C’est donc à juste titre que le premier juge a validé la saisie.
Le jugement sera confirmé.
Le reversement de la somme de 8 000 euros par Maître [B] à M. [W] est constant. Sa demande de donné acte est dépourvue d’objet.
Les dépens d’appel seront supportés par M. [W], partie perdante.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition et en dernier ressort,
Confirme le jugement du 23 septembre 2022,
Condamne M. [W] aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Cyril VIDALIE, conseiller faisant fonction de président, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,