Exploiter la notoriété d’un salarié après son départ : illégal
Exploiter la notoriété d’un salarié après son départ : illégal
Ce point juridique est utile ?

Postérieurement au départ du salarié, il n’est plus légal de continuer à exploiter sa notoriété (prix, récompenses …).

En l’espèce, un pizzaiolo produit des prospectus publicitaires qui mentionnent « Cette pâte à pizza a fait ses preuves, elle est préparée chaque jour dans notre laboratoire par [R] réputé grâce à la Casa de sarah et qui a fini 2eme de la Coupe de France des Pizzaiolos 2016/2017 et 2018/2019 » ainsi qu’une photographie d’un panneau, qui indique « La Gioia, restaurant pizzeria vice-champion de France 2016/2017 et vice-champion de France 2018/2019 », ce qui démontre que la SARL Lumich a continué à faire référence au palmarès du salarié, même après le départ de l’entreprise du salarié.

Si la société Lumich rétorque qu’elle a cessé toute activité après la rupture des relations contractuelles, elle ne justifie pas de la réalité de ses allégations qui sont fermement contestées par le salarié. Il y a dès lors lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné à la SARL Lumich de retirer toute référence au palmarès du salarié de ses supports publicitaires, sans assortir d’ores et déjà ce retrait d’une astreinte.

 

 


 

22 mars 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/01909 Arrêt n° 23/00232 22 mars 2023 ——————— N° RG 21/01909 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FRV6 ————————- Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de FORBACH 05 juillet 2021 20/00078 ————————-

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1 ARRÊT DU Vingt deux mars deux mille vingt trois APPELANTE : S.A.R.L. LUMICH prise en la personne de son représentant légal [Adresse 3] [Localité 1] Représentée par Me Laura BUYNOWSKI, avocat au barreau de SARREGUEMINES INTIMÉ : M. [R] [B] [Adresse 2] [Localité 6] Représenté par Me Sarah SCHIFFERLING-ZINGRAFF, avocat au barreau de SARREGUEMINES COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, chargée d’instruire l’affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre Mme Anne FABERT, Conseillère M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX ARRÊT : Contradictoire Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile; Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. M. [R] [B] a été embauché par la SARL Lumich à compter du 2 novembre 2019 en qualité de chef pizzaïolo, en exécution d’un contrat de travail à durée indéterminée. Les parties ont signé une convention de rupture conventionnelle, qui a été homologuée le 7 mars 2020 par les services de l’inspection du travail. Estimant que la SARL Lumich ne lui avait pas payé des heures de travail et souhaitant annuler la rupture conventionnelle, M. [R] [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Forbach par requête introductive d’instance du 27 mai 2020. Par jugement de départage rendu contradictoirement le 5 juillet 2021, le conseil de prud’hommes de Forbach section commerce a statué comme suit : ”Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] la somme 3 748,47 euros brut au titre des rappels de salaires de février et mars 2020 et la somme de 374,84 euros au titre des congés payés y afférents ; Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] la somme de 33,58 euros brut au titre des heures supplémentaires du 1er novembre 2019 et 3,25 euros au titre des congés payés y afférents et déboute M. [B] du surplus de sa demande au titre des heures supplémentaires; Annule la convention de rupture signée entre les parties homologuée par la DIRECCTE le 7 mars 2020 ; Dit que la rupture du contrat de travail de M. [R] [B] produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes : – 4 586,94 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 458,69 euros brut au titre des congés payés y afférents ; – 3 057,96 euros net à titre de dommages et intérêts ; Dit que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du présent jugement ; Ordonne à la SARL Lumich de remettre à M. [R] [B] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi, des bulletins de paie rectifiés selon le présent jugement, mais sans assortir d’ores et déjà cette remise d’une astreinte ; Ordonne à la SARL Lumich de retirer toute référence au palmarès de M. [R] [B] de ses supports publicitaires et ce dans un délai de 15 jours à compter de la notification de cette décision, mais sans assortir d’ores et déjà ce retrait d’une astreinte ; Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] la somme de 100 euros à titre de dommages-intérêts pour non retrait du palmarès de M. [B] ; Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement ; Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] la somme de 250 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamne la SARL Lumich aux dépens”. Par déclaration transmise par voie électronique le 27 juillet 2021, la société Lumich a régulièrement interjeté appel du jugement qui lui a été notifié le 8 juillet 2021. Par ses conclusions datées du 12 août 2021, la société Lumich demande à la cour de statuer comme suit : ”Infirmer partiellement le jugement entrepris et le confirmant pour le surplus ; Débouter M. [B] de ses demandes, fins et prétentions ; Le condamner aux entiers frais et dépens, ainsi qu’au règlement d’une indemnité de 2 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.” A l’appui de son appel, la SARL Lumich soutient qu’il n’a jamais été convenu que la journée du 1er novembre 2019 serait rémunérée, et elle conteste l’ensemble des heures supplémentaires réclamées par M. [B]. En réplique aux réclamations de rappels de salaires, la société Lumich fait valoir que M. [B] a été absent de l’entreprise du 11 février au 7 mars 2020, période pendant laquelle il n’était pas à sa disposition puisqu’il travaillait pour le compte d’un autre employeur exploitant un restaurant à [Localité 6] sous l’enseigne La porte d’Italie.  Au titre de la validité de la convention de rupture conventionnelle, la société Lumich rappelle qu’aucune disposition légale n’impose de mentionner la date d’expiration du délai du rétractation dans la convention de rupture, que l’inexactitude affectant le montant de l’indemnité de rupture n’est pas de nature à remettre en cause la validité de la convention, que la date du 25 février 2020 ne constituait qu’une date « envisagée » et que l’absence de règlement de l’indemnité de rupture ne peut justifier la nullité de la convention. Elle considère que dans la mesure où selon les propres déclarations de M. [B] que la convention a été signée de la main de ce dernier, le salarié ne saurait prétendre que la date qu’il a apposée et, en tout état de cause, approuvée, n’est pas exacte. Elle conteste les allégations selon lesquelles elle aurait menacé le salarié de ne pas lui remettre son salaire s’il ne signait pas la convention. La société soutient que M. [B] n’exerçait aucune fonction commerciale à prédominance intellectuelle le mettant en relation directe avec la clientèle, puisqu’il était employé en qualité de pizzaiolo, de sorte qu’elle considère qu’il ne pouvait prétendre au statut de commis commercial pour bénéficier du préavis mentionné à l’article L. 1234-16 du code du travail. La société appelante indique qu’elle a cessé toute exploitation après le départ de M. [B], si bien qu’aucune faute ne peut lui être imputée concernant la référence au palmarès de son salarié. Par ses conclusions datées du 8 octobre 2021, M. [B] demande à la cour de statuer comme suit : ”Débouter l’employeur de l’intégralité de ses fins et prétentions ; Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Forbach en ce qu’il a : Annulé la convention de rupture conventionnelle ; Condamné la SARL Lumich à verser à M. [B] : – un rappel de salaire du 01/02/2020 au 07/03/2020 et les congés payés y afférent – une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférent – des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse Ordonné la rectification des documents de fin de contrat et des bulletins de paie ; Ordonner(é) à la SARL Lumich de retirer toute référence à son palmarès de ses supports publicitaires ; L’infirmer sur le surplus ; Et statuant à nouveau, Condamner à la SARL Lumich à verser à M. [B] : – 4 206,05 euros brut au titre du rappel de salaires de février et mars 2020 – 420,61 euros brut au titre des congés payés y afférent – 5 129,87 euros brut au titre des heures supplémentaires Condamner la SARL Lumich à remettre à M. [B] ses fiches de paie de décembre 2019 à mars 2020 et ses documents de rupture rectifiés, sous astreinte de 30 euros par jour de retard Ordonner à la SARL Lumich de retirer toute référence au palmarès de M. [B] de ses supports publicitaires, sous astreinte de 150 euros par jour de retard La condamner à verser à M. [B] une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts; Condamner la SARL Lumich à verser à M. [B] : – 5 115,47 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ; – 511,55 euros brut au titre des congés payés sur préavis ; – 10 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Condamner la SARL Lumich à verser à M. [B] une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile de première instance et 3 500 euros à hauteur de cour ; Fixer le salaire mensuel moyen à la somme de 3 410,31 euros brut Condamner l’appelante en tous les frais et dépens, d’instance et d’appel.” M. [B] fait valoir que si la rupture conventionnelle a pris effet au 7 mars 2020 il n’a obtenu ni salaire ni fiche de paie pour les mois de février et mars 2020. Concernant les heures supplémentaires dont il réclame le paiement, M. [B] soutient qu’il a travaillé dès le 1er novembre 2019 pour la mise en place du restaurant ; il précise qu’au moment où il envoyait le rapport du jour aux associés par mail ce n’était en aucun cas la fin de sa journée car il devait effectuer le nettoyage de la cuisine, la plonge, le nettoyage de la salle, redresser pour le lendemain et assurer la gestion des stocks. M. [B] invoque la nullité de la rupture conventionnelle aux motifs que la date de fin du délai de rétractation n’a pas été mentionnée, que le montant de l’indemnité est erroné et que celle-ci n’a pas été réglée, et que la date de rupture du contrat est intervenue avant l’homologation. De plus, M. [B] observe que la convention a manifestement été antidatée à la date du 21 janvier 2020 puisque l’employeur lui a proposé la signature d’une rupture conventionnelle dans un message téléphonique du 3 février 2020. Il ajoute que l’employeur l’a menacé de ne pas lui remettre son salaire du mois de janvier 2020 s’il ne signait pas la convention. M. [B] se prévaut des dispositions de l’article L.1234-16 du code du travail au soutien de son droit à six semaines de préavis. M. [B] observe que l’employeur n’a pas hésité à communiquer et à faire de la publicité mensongère au travers de ses succès professionnels, en refusant de retirer son palmarès après la rupture de son contrat de travail. Il conteste le fait que le restaurant ne fonctionnait plus après son départ ; il précise que l’établissement est resté ouvert jusqu’au confinement de mars 2020, et a ensuite proposé de la vente à emporter en avril. L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022. Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément à l’article 455 du Code de Procédure Civile. MOTIFS M. [B] a été embauché à compter du 2 novembre 2019 par la société Lumich en qualité de chef pizzaiolo avec une classification niveau 2, échelon 2 selon les dispositions de la convention collective cafés, hôtels et restaurants, et avec une rémunération mensuelle brute de 3 038,26 € pour un temps de travail de 169 heures. Son lieu de travail a été fixé à [M], et par avenant en date du 6 décembre 2019 à [Localité 6]. Sur les heures supplémentaires En vertu de l’article L. 3171-4 du code du travail la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, et le juge doit se déterminer au vu de ces éléments et de ceux produits par le salarié. Le salarié étant en demande, il lui appartient néanmoins de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer ses prétentions, tant sur l’existence des heures dont il revendique le paiement que sur leur quantum, à charge pour l’employeur de les contester ensuite en produisant ses propres éléments. Ces éléments doivent être suffisamment sérieux et précis quant aux heures effectivement réalisées pour permettre à l’employeur d’y répondre. En l’espèce, M. [B] produit un document manuscrit précisant les heures de travail qu’il a réalisées du 2 novembre 2019 au 2 février 2020, l’heure de prise de poste et l’heure de fin de poste jour par jour, ainsi qu’un tableau récapitulatif des heures supplémentaires dont le paiement est sollicité (ses pièces 3 et 9). Ces éléments sont suffisamment précis pour étayer la demande de M. [B] de rappel d’heures supplémentaires, et pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement, étant précisé que le fait que le salarié n’ait pas formé de réclamation durant l’exécution du contrat de travail n’est pas de nature à le priver de son droit au paiement des heures de travail accomplies, ni à exonérer l’employeur de son obligation de justifier ses horaires de travail.   La SARL Lumich produit, au soutien des heures de travail effectuées par le salarié et de ce qu’il « n’avait vocation qu’à travailler qu’en soirée puisque le service de midi était assuré par un autre cuisinier qui proposait un autre type de restauration » (sic), un article de presse relatif à l’ouverture du restaurant ”La Gioa” qui est illustré par la photographie de Mme [H] gérante et de M. [B] (sa pièce 1), article qui explique que ce dernier est le pizzaiolo des « soirées 100% pizzas » ; la teneur de cet article, qui souligne la participation de M. [B] à « cette nouvelle aventure », ne permet toutefois pas de retenir que ce dernier n’a pas réalisé de pizzas le midi, en complément du menu proposé par le cuisinier. La société produit également un message téléphonique envoyé le 24 janvier 2020 par M. [X] [C], gérant (destinataire non précisé ‘ sa pièce 2), qui indique notamment « hier c’était calme [U] a pu partir à 20h30 ». Le contenu de ce message ne vise toutefois pas directement M. [R] [B], qui n’est cité à aucun moment. La SARL Lumich assure que l’intimé ne pouvait pas travailler jusqu’à 23 heures 30 en raison des heures d’ouverture du restaurant ; elle produit des rapports de caisse de dix jours d’activité (sa pièce 4), pointant notamment ceux du 10 décembre 2019 et du 30 janvier 2020 qui indiquent que le restaurant a fermé vers 22 heures au soutien de la contestation des horaires invoqués par le salarié, ainsi que l’attestation de M. [T] qu’elle présente comme ayant les mêmes fonctions que M. [B] [G], qui affirme qu’il est « impossible de faire plus d’heures que dans le contrat sachant que le restaurant n’est ouvert que de 18 heures à 21 heures 30 ». Or, M. [B] explique, sans être efficacement démenti par la société appelante, qu’il devait se charger du nettoyage de la cuisine, de la plonge à finir, du nettoyage de la salle et de la gestion post service, à savoir faire l’inventaire des stocks afin de passer les commandes de marchandises, ce qui pouvait parfaitement intervenir en dehors des horaires d’ouverture du restaurant et par conséquent après 21 heures 30 ou 22 heures.   Si l’attestation de M. [T] mentionne que « la mise en place prend une heure avant le début du service », l’intimé explique qu’il assumait, outre la tâche de dresser les tables, un travail de découpe des toutes les charcuteries et fromages, de confection des sauces, ainsi que le transport entre le restaurant de [Localité 6] et celui de [M]. La SARL Lumich ne produit aucun détail quant à la composition du personnel et aux tâches accomplies par chacun (M. [S] [T] évoquant trois puis quatre personnes), quant aux modalités d’ouverture (M. [B] faisant état d’un travail six jours sur sept), ni aucun planning, alors que le message téléphonique dont elle se prévaut évoqué ci-avant aborde clairement des tensions entre les membres du personnel occasionnées par les absences et défaillance de certains d’entre eux. La SARL Lumich ne produit aucun document ou élément justifiant le suivi des heures de travail journalières effectuées par M. [B], alors qu’il ressort des dix rapports de caisse produits par l’appelante que ceux-ci sont parfois édités après 23h15. Ainsi, les pièces transmises par l’employeur ne peuvent être retenues comme de nature à démontrer la réalité des horaires de travail de M. [B]. Il y a lieu en conséquence de condamner la SARL Lumich à payer à M. [B] la somme qu’il réclame à hauteur de 5 129,87 euros brut à titre de rappel des supplémentaires non rémunérées, le salarié ne sollicitant pas de montant au titre des congés payés. Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens. Sur la demande de rappel de salaire pour la journée du 1er novembre 2019 La société Lumich sollicite l’infirmation du jugement querellé en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [B] la somme de 33,58 euros brut au titre d’heures supplémentaires effectuées le 1er novembre 2019, outre 3,35 euros de congés payés afférents. M. [B], qui réclamait paiement d’une journée de travail de 12h30, n’a pas formé appel incident sur ce point, et ne consacre aucun développement concernant cette prétention dans ses écritures d’appel. Les premiers juges ont alloué un montant à M. [B] au regard du témoignage d’une journaliste auprès de la télévision locale Mosaik Cristal qui a effectué un reportage dans les locaux du restaurant ”[Adresse 5] qui était en cours de rénovation, et qui relate : «Le 1er novembre 2019, dans le cadre de mon activité, j’ai tourné à la demande d’une collègue une séquence à [Localité 6] dans les locaux du restaurant La Gioia, alors en cours de rénovation. Par la présente j’atteste donc de la présence sur place au courant de l’après-midi de M. [R] [B] mais aussi de ses collègues et fabricants du four. J’étais sur place aux alentours de 14 heures et suis restée de mémoire une heure et demie ; pendant toute la durée M. [R] [B] a apporté son aide au fabricant pour l’installation du four». Or ce témoignage ne démontre pas que la présence de M. [B] au sein d’un restaurant en cours de rénovation durant le temps d’un reportage correspond à l’exécution d’une prestation de travail, l’employeur soulignant avec pertinence que le contrat a été signé par les parties le 2 novembre 2019 et prévoit une embauche à compter du même jour. De surcroît le lieu de travail de M. [B] a été fixé à [M] dans un premier temps, et ce n’est que par avenant en date du 6 décembre 2019 que les parties ont convenu que M. [B] exercerait ses fonctions au sein du restaurant situé à [Localité 6]. En conséquence les prétentions de M. [B] au titre de ce rappel de salaire seront rejetées. Le jugement déféré sera infirmé en ce sens. Sur la demande de rappels de salaire du mois de février 2020 au 7 mars 2020 M. [B] sollicite un rappel de salaire pour la période du 1er février 2020 au 7 mars 2020, date de la prise d’effet de la convention de rupture conventionnelle. La cour rappelle que le salarié qui se tient à la disposition de son employeur a droit à son salaire, peu important que l’employeur lui fournisse ou non du travail. Il est constant que la SARL Lumich, qui soutient que le salarié était absent pendant cette période, n’a versé aucune rémunération à M. [B] durant la période concernée. Elle indique que M. [B] n’était plus à sa disposition, et qu’il ne lui a plus fourni de travail. Elle produit en ce sens un certificat de travail établi par la société [Adresse 4] qui mentionne l’embauche de M. [B] du 20 février 2020 au 19 avril 2020 en qualité de pizzaiolo niveau II échelon 1. Or il ressort des documents dont se prévaut elle-même la société Lumich, soit la convention de rupture conventionnelle datée du 21 janvier 2020 et homologuée le 10 mars 2020 par le représentant de la Direccte, que le contrat de travail ne pouvait être rompu avant le 7 février 2020. En outre M. [B] produit des messages téléphoniques de M. [X] [C] qui l’ont informé le 3 février 2020 (pièce 4 de l’intimé) de l’intention manifestée par son employeur (”[N]”) de mettre fin son contrat de travail, tout d’abord par le biais d’un licenciement puis par le biais d’une rupture conventionnelle. M. [B] produit également un message électronique qui lui a été adressé par M. [I] [F] le 4 février 2020 en fin de journée (pièce 5 de l’intimé) et qui mentionne « je soussigné [F] [I], gérant de la Sarl Lumich donne autorisation à M. [B] [R] de ne plus se présenter sur son lieu de travail à compter du mardi 4 février ». La société Lumich, qui s’est dispensée de fournir un travail à M. [B] à compter du 4 février 2020, ne peut donc se valablement se prévaloir de l’absence de M. [B] à son poste, cet état de fait résultant de la volonté de l’employeur. En outre, si la validité de la convention de rupture conventionnelle est contestée, les relations contractuelles ont pris fin le 6 mars 2020, date à laquelle la société Lumich a établi le solde de tout compte. Jusqu’à cette date l’employeur devait assumer son obligation de paiement du salaire. Il convient donc d’allouer à M. [B] la somme de 3 410,31 euros brut à titre de rappel de salaire pour le mois de février 2020 outre 341,03 euros brut de congés payés, ainsi que la somme de 770,07 euros brut à titre de rappel de salaire pour le 1er au 7 mars 2020 ( 3 410,31 / 31 x 7) outre 77 euros brut de congés payés, étant considéré que l’employeur ne conteste pas que le salaire moyen de référence à prendre en compte est de 3 410,31 euros brut par mois comme indiqué sur le formulaire de rupture conventionnelle. Il sera donc fait droit aux prétentions de M. [B] au titre du rappel de salaire à hauteur du montant total de 4 180,38 euros brut outre 418,03 euros brut de congés payés afférents. Le jugement entrepris sera infirmé s’agissant du montant alloué à M. [B] au titre du rappel de salaire et des congés payés y afférent. Sur les prétentions de M. [B] au titre de la rupture du contrat de travail Sur la nullité de la convention de rupture conventionnelle Aux termes de l’article L. 1237-11 du code du travail « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties. Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. ». L’article L. 1237-12 du même code stipule que les parties conviennent du principe d’une rupture conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens. En vertu de l’article L.1237-13 du code du travail « La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9. Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation. A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie. ». Au soutien de la nullité de la convention de rupture conventionnelle, M. [B] se prévaut de ce que son exemplaire ne mentionne pas la fin du délai de rétractation, de ce qu’il n’a pas pu bénéficier de manière effective du délai de rétractation de 15 jours, et par là-même du défaut de son consentement libre et éclairé. Il soutient que le montant de l’indemnité est erroné, et que celle-ci n’a pas été versée. Comme l’ont relevé avec pertinence les premiers juges, le formulaire de rupture conventionnelle produit par M. [B] (l’employeur ne produit pas son exemplaire) fait état d’un entretien et d’une signature le 21 janvier 2020, alors que les pièces produites par M. [B] démontrent que la rupture conventionnelle n’a été envisagée par l’employeur que le 3 février 2020. En effet, comme évoqué ci-avant, M. [X] [C] a envoyé un premier SMS à M. [B] le lundi 3 février 2020 à 11 heures 05 qui énonce « Oh purée, je viens de m’entretenir avec [N]. Ils ne veulent plus de pizzas du tout. Ils vont te convoquer pour un entretien de licenciement m’a-t-il dit. Ils veulent te stopper maintenant » et un second SMS le même jour à 12 heures 27 qui stipule « [L] Je viens de ravoir [N] au tel. Il me dit demande à [R] s’il veut faire une rupture conventionnelle ou un licenciement. Il me demande quels sont les motifs des retraits en espèces. Peux-tu me dire stp ‘ » (pièce 4 de l’intimé). De surcroît, M. [B] produit un constat d’huissier, qui a retranscrit un message audio enregistré le 6 février 2020 sous le contact [X] [C] comme suit : « ouais [R] c’est Paco, écoute c’est simplement pour te dire que j’ai fait faire, j’ai fait préparer comme on était tombé d’accord hier, la rupture conventionnelle. Donc je vais signer ma partie, je vais la déposer demain ou alors tu peux venir, moi je serai à la GIOIA demain vers 10 heures et demi si tu as un créneau n’hésites pas à passer et comme ça je te remets ton chèque (‘) » (pièce 16 de l’intimé). Il ressort de ces données produites par M. [B] que celui-ci a signé une convention de rupture conventionnelle non pas le 21 janvier 2020 comme mentionné sur le document qui lui a été remis, mais au plus tôt le 7 février 2020. Il en résulte que le formulaire de rupture conventionnelle, prétendument signé le 21 janvier 2020, a été antidaté afin de rompre le contrat de travail le plus rapidement que possible, ce qui n’a pas permis à M. [B] de bénéficier ni d’un entretien ni du délai de rétractation de 15 jours. Or, les bénéfices d’un entretien avec la possibilité d’être assisté et d’un délai de rétractation constituent une garantie de liberté du consentement, et il importe peu que le salarié ait apposé sa signature sur la convention de rupture antidatée. M. [B] n’a donc pu consentir à la rupture conventionnelle de manière libre et éclairée, de sorte que la convention de rupture doit être annulée. La rupture produit dès lors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a statué en ce sens. Sur les conséquences financières Sur l’indemnité compensatrice de préavis L’article L.1234-16 du code du travail, applicables au département de la Moselle, prévoit un préavis de six semaines, uniquement pour les professeurs et personnes employés chez des particuliers, les commis commerciaux mentionnés à l’article L. 1226-24 du même code, ainsi que pour les salariés dont la rémunération est fixe et qui sont chargés de manière permanente de la direction ou de la surveillance d’une activité ou d’une partie de celle-ci, ou ceux à qui sont confiés des services techniques nécessitant une certaine qualification. En l’espèce, M. [B] a été embauché aux termes de son contrat de travail en qualité de chef pizzaiolo. Il ne développe aucune démonstration au soutien de l’exercice de fonctions commerciales auprès de la clientèle du restaurant dans lequel il était embauché en qualité de chef pizzaïolo, et n’établit pas qu’il exerçait des fonctions autres que celles de la confection de pizzas, outre des tâches qu’il évoque au soutien de son temps de travail, qui relèvent de la tenue du restaurant. Dans ces conditions, la qualité de commis commercial ne peut lui être reconnue et M. [B], qui a moins de six mois d’ancienneté, doit être débouté de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce chef. Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse L’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable à compter du 1er avril 2018, dispose que si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, en cas de refus de la réintégration du salarié dans l’entreprise, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par cet article, en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise et du nombre de salariés employés habituellement dans cette entreprise. M. [B] conteste l’application de ce barème en vertu du droit à une indemnité adéquate garantie au salarié licencié sans motif valable et l’inapplicabilité du plafond prévu à l’article L.1235-3 du Code du travail en raison de son inconventionnalité mais la cour relève que : – ce barème est compatible avec les dispositions des articles 4 et 10 de la convention n° 158 de l’OIT, lesquels n’interdisent aucunement le plafonnement de l’indemnisation, reconnaissant aux États une marge d’appréciation, – la charte sociale européenne n’a pas d’effet direct en droit interne et ne peut donc être invoquée dans un litige entre particuliers, la charte ne liant que les États, – ce barème n’a pas pour effet de violer les dispositions consacrant un droit à l’accès au juge et au procès équitable puisque précisément il appartient au juge saisi au fond de statuer. Le moyen tiré de l’absence de conventionnalité de l’article L.1235-3 du code du travail doit donc être écarté et il sera fait application du barème prévu. En l’occurrence, M. [B] comptait lors de son licenciement quatre mois d’ancienneté dans une entreprise qui employait habituellement moins de 11 salariés, de sorte que le salarié relève du régime d’indemnisation de l’article L.1235-3 alinéa 3 du code du travail dans sa rédaction applicable à la cause, qui ne prévoit pas d’indemnité minimale. Aussi, compte tenu de l’âge du salarié lors de la rupture de son contrat de travail (35 ans), de son ancienneté (4 mois), du montant de son salaire mensuel moyen (3 410,31 euros bruts), et alors qu’il ne justifie pas de sa situation personnelle et professionnelle après la rupture, il convient de condamner la SARL Lumich à payer à M. [B] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera infirmé s’agissant du montant alloué à ce titre. Sur les demandes de M. [B] au titre de la publicité mensongère La réparation d’un préjudice résultant d’un manquement de l’employeur suppose que le salarié qui prétend être victime produise en justice les éléments de nature à établir d’une part la réalité de ce manquement, et d’autre part l’existence et l’étendue du préjudice qui en résulte. En l’espèce, M. [B] produit des prospectus publicitaires qui mentionnent « Cette pâte à pizza a fait ses preuves, elle est préparée chaque jour dans notre laboratoire par [R] réputé grâce à la Casa de sarah et qui a fini 2eme de la Coupe de France des Pizzaiolos 2016/2017 et 2018/2019 » ainsi qu’une photographie d’un panneau, que le salarié date du 27 mai 2020, qui indique « La Gioia, restaurant pizzeria vice-champion de France 2016/2017 et vice-champion de France 2018/2019 », ce qui démontre que la SARL Lumich a continué à faire référence au palmarès du salarié, même après le départ de l’entreprise de M. [B]. Si la société Lumich rétorque qu’elle a cessé toute activité après la rupture des relations contractuelles, elle ne justifie pas de la réalité de ses allégations qui sont fermement contestées par M. [B]. Il y a dès lors lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné à la SARL Lumich de retirer toute référence au palmarès de M. [B] de ses supports publicitaires, sans assortir d’ores et déjà ce retrait d’une astreinte. Si M. [B] réclame dans le cadre d’un appel incident l’octroi de dommages-intérêts nettement plus élevés que le montant alloué par les premiers juges qui ont retenu un préjudice moral, l’intimé ne justifie par aucun élément de la pertinence de son chiffrage. Le jugement déféré sera donc également confirmé sur ce point. Sur la remise des documents administratifs Il sera ordonné à la SARL Lumich de remettre à M. [B] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire rectifiés conformes aux dispositions du présent arrêt, sans que les circonstances de la cause exigent d’y adjoindre une astreinte. Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens Le jugement entrepris sera confirmé dans ses dispositions relatives aux dépens et relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile. La SARL Lumich qui succombe doit être condamnée aux entiers dépens d’appel, et assumera ses frais irrépétibles. Conformément aux prescriptions de l’article 700 du code de procédure civile, la société Lumich sera condamnée à verser à M. [R] [B] la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par ce dernier. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi, Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a alloué à M. [R] [B] une indemnité compensatrice de préavis ainsi que des congés payés afférents, sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf en ce qui concerne le montant du rappel de salaire ainsi que des congés payés afférents, et sauf en ce qu’il a rejeté les prétentions de M. [B] au titre des heures supplémentaires ; Statuant à nouveau dans cette limite ; Condamne la SARL Lumich à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes : – 4 180,38 euros brut à titre de rappel de salaire pour le mois de février 2020 et du 1er au 7 mars 2020, – 418,03 euros brut au titre des congés payés afférents, – 5 129,87 euros brut à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, – 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, – 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel ; Déboute M. [R] [B] de sa demande de rappel de salaire pour la journée du 1er novembre 2019, de sa demande d’indemnité compensatrice de préavis ainsi que des congés payés afférents; Rejette la demande de la SARL Lumich au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Ordonne à la SARL Lumich de remettre à M. [B] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire rectifiés conformes aux dispositions du présent arrêt, et ce sans astreinte ; Condamne la SARL Lumich aux dépens d’appel. Le Greffier La Présidente  


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