La société Cofidis a accordé un prêt personnel de 35 300 euros à M. [R] le 23 août 2018, remboursable en 119 mensualités. Suite à des échéances non réglées, Cofidis a demandé la déchéance du terme du contrat. Le 15 novembre 2022, le juge a déclaré l’action recevable, prononcé la déchéance des intérêts, résolu le contrat et condamné M. [R] à rembourser 25 840,21 euros. Le juge a estimé que Cofidis n’avait pas suffisamment vérifié la solvabilité de M. [R] et n’avait pas prouvé la remise d’un bordereau de rétractation. Cofidis a fait appel le 14 février 2023, demandant l’infirmation du jugement et le paiement de 33 712,93 euros avec intérêts. Elle a soutenu avoir respecté les exigences de vérification de solvabilité et contesté le rejet de ses demandes. L’affaire a été mise en délibéré après une audience le 19 juin 2024, où la cour a relevé l’absence de signature sur un document clé. Cofidis a ensuite produit des éléments pour prouver la remise de la documentation contractuelle à M. [R].
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2024
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/03510 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHE6Y
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 novembre 2022 – Juge des contentieux de la protection de NOGENT SUR MARNE – RG n° 11-22-000702
APPELANTE
La société COFIDIS, société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 325 307 106 00097
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l’ESSONNE
INTIMÉ
Monsieur [G] [R]
né le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 6] (MAROC)
[Adresse 2]
[Localité 5]
DÉFAILLANT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– DÉFAUT
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant offre préalable acceptée le 23 août 2018, la société Cofidis a consenti à M. [G] [R] un prêt personnel dans le cadre d’un regroupement de crédits d’un montant de 35 300 euros remboursable en 119 mensualités de 388,54 euros chacune et une dernière mensualité de 388,13 euros au taux d’intérêts de 5,81 % l’an.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Cofidis a entendu se prévaloir de la déchéance du terme du contrat.
Saisi le 25 août 2022 par la société Cofidis d’une demande tendant principalement à la condamnation de l’emprunteur au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Nogent-sur-Marne, par un jugement réputé contradictoire rendu le 15 novembre 2022 auquel il convient de se reporter, a :
– déclaré la société Cofidis recevable en son action,
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis,
– prononcé la résolution du contrat,
– condamné M. [R] à payer à la société Cofidis la somme de 25 840,21 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision,
– débouté la société Cofidis de sa demande de capitalisation des intérêts et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [R] aux dépens.
Après avoir contrôlé la recevabilité de l’action sur le fondement de l’article R. 312-35 du code de la consommation et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, le juge a considéré que le prêteur ne justifiait pas avoir vérifié de manière suffisante la solvabilité de l’emprunteur sur le fondement de l’article L. 312-16 du code de la consommation en ce qu’il s’était contenté de se fier aux déclarations de l’emprunteur. Il a également considéré que la société Cofidis ne démontrait pas avoir remis à l’emprunteur un bordereau de rétractation sans que la clause par laquelle l’emprunteur reconnaissait avoir eu en sa possession un exemplaire du contrat doté d’un formulaire de rétractation ne soit suffisante à prouver cette remise.
Il a considéré que la déchéance du terme n’avait pas été mise en ‘uvre de manière régulière dans la mesure où la banque ne produisait pas les modalités de la distribution du courrier de mise en demeure préalable adressé le 30 novembre 2021. Il a fait droit à la demande de résolution du contrat au regard de l’arrêt du paiement des échéances depuis octobre 2020.
Pour calculer le montant de la créance, il a déduit du capital emprunté l’intégralité des sommes versées par l’emprunteur et a relevé que la demande de capitalisation des intérêts ne pouvait prospérer.
Par une déclaration électronique enregistrée le 14 février 2023, la société Cofidis a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions remises le 27 mars 2023, l’appelante demande à la cour :
– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel,
– d’y faire droit et d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a rejeté partiellement ses demandes qui tendaient à voir condamner M. [R] à lui payer la somme de 33 712,93 euros, avec intérêts au taux contractuel de 5,81% l’an à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2021 et subsidiairement de l’assignation, avec capitalisation des intérêts, outre 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– statuant à nouveau, de condamner M. [R] à lui payer la somme 33 712,93 euros avec intérêts au taux contractuel de 5,81 % l’an à compter du jour de la mise en demeure du 20 décembre 2021,
– à titre subsidiaire, si la cour devait estimer que la déchéance du terme ne lui était pas acquise, de constater les manquements graves et réitérés de M. [R] à son obligation contractuelle de remboursement du prêt et de prononcer la résolution judiciaire du contrat sur le fondement des articles 1224 à 1229 du code civil et de condamner en conséquence M. [R] au paiement de la somme de 33 712,93 euros, avec intérêts taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,
– en tout état de cause, de le condamner à la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
L’appelante soutient que le juge est allé au-delà des exigences posées à l’article L. 312-16 du code de la consommation et que conformément à l’article D. 312-8 du code de la consommation, elle a produit aux débats une copie de la carte d’identité de M. [R], son avis d’impôts sur les revenus de 2017 et ses bulletins de paie des mois décembre 2017, avril et juillet 2018 démontrant qu’elle a bien vérifié sa solvabilité. Elle ajoute que M. [R] a rempli une fiche de dialogue faisant figurer les informations sur sa situation personnelle et financière, corroborée par les pièces produites et qu’elle a bien consulté le FICP. Elle conteste donc ce motif de privation de son droit à intérêts.
Concernant le bordereau de rétractation, elle rappelle que si l’exemplaire détachable n’est à joindre qu’à l’exemplaire du contrat de prêt de l’emprunteur, c’est qu’il n’a pas à figurer sur l’exemplaire du prêteur et que la cour d’appel de Paris a eu l’occasion de confirmer, dans un arrêt récent du 19 janvier 2023, que la production de l’exemplaire emprunteur de l’offre de prêt dans lequel figure le bordereau de rétractation permettait de corroborer la clause de reconnaissance. Elle indique que M. [R] a bien reconnu rester en possession d’un exemplaire du contrat doté d’un formulaire détachable de rétractation, que la reconnaissance, par cette clause, ne constitue ainsi, en effet, qu’un indice pouvant être corroboré par tout moyen et qu’elle communique l’exemplaire emprunteur de l’offre de prêt dont M. [R] a été destinataire et est resté en possession. Elle note que la cour pourra constater que le bordereau de rétractation figure bien sur l’exemplaire emprunteur « à conserver » en page 20.23 et qu’il est parfaitement régulier en ce qu’il respecte les dispositions du code de la consommation.
Elle fait état d’une déchéance du terme mise en ‘uvre régulièrement après mise en demeure de payer infructueuse et invoque l’exigibilité de sa créance. Elle précise que la mise en demeure préalable a été adressée par courrier recommandé avec accusé de réception et soutient que si l’accusé de réception n’a pas été expressément signé par M. [R] compte tenu du contexte sanitaire lié au Covid-19, il n’en demeure pas moins que l’accusé de réception a été retourné à la société Cofidis et que si le courrier recommandé n’avait pas été délivré, le pli serait revenu « avisé mais non réclamé », ou « destinataire inconnu à l’adresse indiquée » et que c’est la raison pour laquelle, en l’absence de règlement de la dette, elle a prononcé la déchéance du terme et l’exigibilité immédiate de l’intégralité des sommes dues selon mise en demeure du 20 décembre 2021.
A défaut, elle indique que l’emprunteur a cessé de régler le crédit, ce qui est une cause de résiliation du contrat.
Suivant acte du 29 mars 2023 délivré selon les formes de l’article 659 du code de procédure civile, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante ont été signifiées à M. [R] qui n’a pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 19 juin 2024 pour être mise en délibéré au 19 septembre 2024.
A l’audience la cour ayant examiné les pièces, a relevé que la FIPEN produite n’était pas signée. Elle a fait parvenir le 19 juin 2024 au conseil de la banque par RPVA, un avis rappelant que dans un arrêt du 7 juin 2023 (pourvoi 22-15.552) la première chambre de la cour de cassation avait considéré que la preuve de la remise de la FIPEN ne pouvait se déduire de la clause de reconnaissance et de la seule production de la FIPEN non signée, ce document émanant de la seule banque, souligné que l’intimé ne comparaissait pas et a invité la banque à produire tout justificatif de la remise de cette FIPEN et le cas échéant à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts encourue à défaut de preuve de remise, et ce au plus tard le 5 juillet 2024.
La banque a fait parvenir une note en délibéré aux termes de laquelle elle relève qu’il ne résulte pas de cet arrêt que la signature de la FIPEN soit érigée en obligation mais qu’il en résulte qu’en l’absence de signature, elle doit corroborer la mention et la production de la FIPEN par un ou plusieurs éléments complémentaires.
Elle indique qu’elle verse aux débats une correspondance transmise à l’emprunteur le 21 août 2018 par laquelle elle lui a transmis la liasse contractuelle complète comportant le contrat ainsi que tous les éléments exigés par le code de la consommation, notamment un bordereau de rétractation, et surtout une FIPEN, que cette liasse contractuelle personnalisée comprend, d’une part, des documents « à conserver » et, d’autre part, des documents « à renvoyer » et que les documents qui sont conservés par l’emprunteur n’ont pas à être signés, que l’emprunteur lui a renvoyé l’exemplaire prêteur « à renvoyer » signé ainsi que la fiche de dialogue également signée et qu’il en résulte qu’en date du 21 août 2018, elle a transmis, et donc remis, à l’emprunteur un document complet, comportant notamment un bordereau de rétractation et une FIPEN remplie et que si elle a reçu en retour l’exemplaire « à renvoyer » signé, cela signifie que l’emprunteur a bel et bien reçu l’intégralité du document, comprenant la FIPEN. Elle déduit du fait que l’emprunteur lui ait retourné l’exemplaire prêteur montre que ce document n’émane pas uniquement de la banque mais aussi de l’emprunteur. Elle conclut donc à l’absence de déchéance du droit aux intérêts contractuels.
En application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien-fondée.
Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Au regard de la date du contrat, il convient d’appliquer les dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.
Sur la forclusion
Conformément à l’article R. 312-35 du code de la consommation, dans sa version alors applicable en la cause, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
En l’espèce, la recevabilité de l’action vérifiée par le premier juge, n’est pas discutée à hauteur d’appel. Le jugement doit donc être confirmé sur ce point.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
Sur la vérification de solvabilité
Selon les dispositions de l’article L. 312-16 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L. 751-1 dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 751-6.
L’article L. 312-17 du même code prévoit que lorsque les opérations de crédit sont conclues sur le lieu de vente ou au moyen d’une technique de communication à distance, une fiche d’informations distincte de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12 est remise par le prêteur ou par l’intermédiaire de crédit à l’emprunteur. Cette fiche, établie par écrit ou sur un autre support durable, comporte notamment les éléments relatifs aux ressources et charges de l’emprunteur ainsi que, le cas échéant, aux prêts en cours contractés par ce dernier. Ladite fiche est signée ou son contenu confirmé par voie électronique par l’emprunteur et contribue à l’évaluation de sa solvabilité par le prêteur. Les informations figurant dans la fiche doivent faire l’objet d’une déclaration certifiant sur l’honneur leur exactitude. Si le montant du crédit accordé est supérieur à 3 000 euros, la fiche doit être corroborée par des pièces justificatives dont la liste est définie par décret à savoir tout justificatif du domicile de l’emprunteur, tout justificatif du revenu de l’emprunteur et tout justificatif de l’identité de l’emprunteur.
Le non-respect de ces dispositions est sanctionné par la déchéance du droit à percevoir les intérêts aux termes des articles L. 341-2 et L. 341-2 du même code.
En l’espèce, la société Cofidis produit le courrier adressé à M. [R] le 21 août 2018 contenant la liasse contractuelle qu’elle lui demande de compléter et de signer et de retourner accompagnée des pièces nécessaires. Il est donc patent que le contrat n’a pas été validé en agence mais à distance rendant applicables les dispositions de l’article L. 312-17 susvisée puisque le crédit est d’un montant supérieur à 3 000 euros.
La société Cofidis verse aux débats la fiche de dialogue remplie et signée par l’emprunteur le 23 août 2018 mentionnant que M. [R] dispose d’un revenu mensuel de 3 300 euros exerçant en contrat à durée indéterminée depuis le 1er octobre 2015 et qu’il supporte des charges mensuelles de loyer de 1 100 euros outre 798 euros de remboursement des crédits faisant l’objet d’un regroupement soit une charge d’emprunt de 388,54 euros après regroupement. L’identité et le domicile de M. [R] sont corroborés par la copie de la carte nationale d’identité de M. [R] et son avis de situation déclarative à l’impôt sur le revenu 2017 sur les revenus de l’année 2016. Le montant de ses revenus est accrédité par la copie de ses bulletins de paie de décembre 2017 ainsi que ceux d’avril 2018 à juillet 2018.
Ces éléments satisfont les prescriptions de l’article précité étant observé que le prêteur justifie par ailleurs de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers avant octroi du crédit, le résultat ne faisant pas apparaître de mention particulière.
En privant ainsi le prêteur de son droit à percevoir les intérêts contractuels prévus au contrat, le premier juge est allé au-delà des exigences textuelles. Le jugement doit être infirmé sur ce point.
Sur la remise d’une offre dotée d’un bordereau de rétractation et la remise de la FIPEN
Il résulte de l’article L. 312-21 du code de la consommation qu’afin de faciliter l’exercice par l’emprunteur de son droit de rétractation, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit lequel doit, aux termes de l’article R. 312-9 du même code, être établi conformément à un modèle type et ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.
Il résulte de l’article L. 341-4 du code de la consommation que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées à l’article L. 312-21, il est déchu du droit aux intérêts.
Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations précontractuelles et la signature par l’emprunteur de l’offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires
Il résulte de l’article L. 312-12 du code de la consommation applicable au cas d’espèce que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.
Cette fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts par l’article L. 341-1 du même code, étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information.
A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle les emprunteurs reconnaissent avoir pris connaissance de la fiche d’informations précontractuelles normalisées européennes, n’est qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.
Il a toutefois été jugé qu’un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l’offre de prêt pour apporter la preuve de l’effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).
La société Cofidis produit non pas une liasse vierge mais la liasse qu’elle a envoyée à M. [R] le 21 août 2018 qui comprend 23 pages qui se suivent, portent toutes la référence du contrat qui est celui qui a été signé par M. [R], comporte en page 1 un courrier spécialement adressé à l’emprunteur, en page 2 le « mode d’emploi » du dossier de crédit qui indique ce qui doit être renvoyé, et comprend notamment :
– en pages 3 et 4, la FIPEN remplie,
– en pages 5 et 6, la fiche d’information spécifique au regroupement de crédits remplie avec les éléments concernant l’emprunteur,
– en pages 7, la fiche de conseil en assurance signée,
– en pages 8 et 9, la fiche de dialogue signée,
– en pages 11 à 14, le contrat signé avec la mention « à renvoyer »,
– en page 15, un mandat de prélèvement rempli avec les éléments fournis par M. [R] signé,
– en pages 17 à 21, le contrat avec la mention « à conserver » qui comprend un bordereau de rétractation,
– en pages 22 et 23 la notice d’assurance.
M. [R] a notamment renvoyé et signé la fiche de dialogue qui comporte le numéro de contrat et la numérotation 9 à 10/23, le mandat de prélèvement qui comporte ce numéro de contrat et la numérotation 15/23 et l’exemplaire du contrat « à renvoyer » qui figure dans cette liasse personnalisée qui comporte le numéro de contrat et la numérotation 11 à 14/23.
Dès lors il doit être admis que la société Cofidis a bien remis à l’emprunteur un exemplaire du contrat pourvu d’un bordereau de rétractation, la FIPEN qu’elle produit et comporte le numéro de contrat et la numérotation 5 à 6/23 et la notice d’assurance qui porte le numéro 22 à 23/23.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments le respect par le prêteur de ses obligations dans le cadre du présent litige et que c’est à tort que le premier juge a retenu une déchéance du droit aux intérêts. Le jugement doit donc être infirmé sur ce point.
Sur le montant des sommes dues
L’appelante justifie de l’envoi à l’emprunteur le 30 novembre 2021 d’un courrier recommandé avec avis de réception de mise en demeure exigeant le règlement sous 8 jours de la somme de 2 061,70 euros au titre des impayés sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du contrat. Elle justifie également de l’envoi d’un courrier recommandé avec avis de réception le 20 décembre 2021 prenant acte de la déchéance du terme du contrat et sollicitant le règlement de la somme de 33 712,93 euros. Il est justifié d’envois en lettres recommandés avec avis de réception sans que la réception par leur destinataire ne soit une condition de mise en oeuvre régulière de la déchéance du terme du contrat.
C’est donc de manière légitime que la société Cofidis se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues, le jugement étant infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande et prononcé la résolution du contrat.
En application de l’article L. 312-39 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.
Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l’appelante s’établit de la façon suivante :
– échéances impayées : 2 326,32 euros
– capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 28 867,87 euros
-intérêts arrêtés au 20 décembre 2021 (date de déchéance du terme) : 91,90 euros,
soit une somme totale de 31 194,19 euros.
M. [R] est en conséquence condamné au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,81 % l’an à compter du 21 décembre 2021 sur la somme de 31 102,29 euros.
L’appelante sollicite en outre la somme de 2 426,84 euros au titre de l’indemnité de résiliation.
Selon l’article D. 312-16 du code de la consommation, lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.
La somme demandée excède 8 % de 28 867,87 euros et apparaît excessive et vient s’ajouter aux sommes de même nature d’ores et déjà perçues par le prêteur s’agissant d’un regroupement de crédits antérieurs de sorte qu’il convient de la réduire à 100 euros, somme à laquelle est condamné M. [R] augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2021.
La société Cofidis a été déboutée de sa demande de capitalisation des intérêts et ne poursuit plus cette demande à hauteur d’appel de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les autres demandes
Le jugement qui a condamné M. [R] aux dépens est confirmé comme le rejet de la demande de la société Cofidis au titre de ses frais irrépétibles. En revanche rien ne justifie de le condamner aux dépens d’appel, alors que n’ayant jamais été représenté ni en première instance, ni en appel, il n’a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l’a fait. La société Cofidis conservera donc la charge des dépens d’appel ainsi que de ses frais irrépétibles.
Le surplus des demandes est rejeté.
LA COUR,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement sauf en ce qu’il a reçu la société Cofidis en son action, en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts et sur la condamnation aux dépens et quant aux frais irrépétibles ;
Statuant de nouveau et y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts des contrats ;
Constate que la déchéance du terme du contrat a été mise en ‘uvre de manière régulière ;
Condamne M. [G] [R] à payer à la société Cofidis une somme de 31 194,19 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,81 % l’an à compter du 21 décembre 2021 sur la somme de de 31 102,29 euros outre la somme de 100 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de cette même date ;
Dit que la société Cofidis conserve la charge des dépens d’appel et de ses frais irrépétibles ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La greffière La présidente