La SA FRANFINANCE a accordé un crédit de 13 850 euros à Monsieur [O] [Y] pour financer des travaux de menuiserie, remboursable en 120 mensualités. Après la signature d’une attestation de livraison des travaux, des impayés ont conduit la SA FRANFINANCE à assigner Monsieur [O] [Y] devant le tribunal pour obtenir la déchéance du terme du contrat de prêt, la résiliation judiciaire, et le paiement des sommes dues. La créance a été jugée exigible après une mise en demeure restée sans effet. Lors de l’audience, Monsieur [O] [Y] ne s’est pas présenté, et le tribunal a décidé de statuer par jugement contradictoire. La décision sera rendue le 17 septembre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Minute : 24/ JCP
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Maître Patricia BUFFON de la SELARL JOLY & BUFFON, avocats au barreau de CHARTRES, vestiaire : T 25
Copie certifiée conforme
délivrée le :
à :
[O] [Y]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE CHARTRES
Juge des Contentieux de la Protection
JUGEMENT Réputé contradictoire
DU 17 Septembre 2024
DEMANDEUR :
S.A. FRANFINANCE,
dont le siège social est sis 59, Avenue de Chatou – 92500 RUEIL MALMAISON
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par la SELARL JOLY & BUFFON, demeurant 6 Rue Denis Poisson – 28000 CHARTRES, avocats au barreau de CHARTRES, vestiaire : T 25
D’une part,
DÉFENDEUR :
Monsieur [O] [Y]
né le 06 Juillet 1960 à MONTAINVILLE (28150),
demeurant 30 grande rue – Le grand Chavernay Montainville – 28150 LES VILLAGES VOVEENS
non comparant, ni représenté
D’autre part,
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Juge des contentieux de la protection : François RABY
Greffier: Séverine FONTAINE
DÉBATS :
L’affaire a été plaidée à l’audience publique du 11 Juin 2024 et mise en délibéré au 17 Septembre 2024 date à laquelle la présente décision est rendue par mise à disposition au greffe.
EXPOSE DU LITIGE
Selon offre préalable acceptée le 02 juin 2022, la SA FRANFINANCE a consenti à Monsieur [O] [Y] un crédit affecté, pour financement de travaux de menuiserie, d’un montant en capital de 13 850 euros remboursable au taux nominal de 4,39% (soit un TAEG de 4,48%) en 120 mensualités de 165,51 euros avec assurance.
Le 30 septembre 2022, Monsieur [O] [Y] a signé l’attestation de livraison et de conformité des travaux financés par l’emprunt.
Des échéances étant demeurées impayées, la SA FRANFINANCE a fait assigner Monsieur [O] [Y] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres, par acte d’huissier en date du 22 mars 2024, aux fins de voir :
A titre principal,
Juger que la déchéance du terme s’est trouvée régulièrement acquise au jour de l’expiration du délai de 15 jours suite à la délivrance de la mise en demeure préalable du 25 avril 2023,
A titre subsidiaire,
Juger que la déchéance du terme s’est trouvée acquise soit par la lettre recommandée avec AR en date du 13 juillet 2023 soit par la signification de la présente assignation,
A titre infiniment subsidiaire,
Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de prêt pour manquement grave de l’emprunteur à ses obligations contractuelles,
En tout état de cause,
Condamner Monsieur [O] [Y] au paiement des sommes suivantes :
13 434,45 euros au titre du principal, à parfaire des intérêts au taux contractuel de 4,39% à compter du 18 juillet 2023 jusqu’à complet paiement
1 063,34 euros au titre de l’indemnité contractuel à parfaire des intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2023 jusqu’à complet paiement,
600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.
Au soutien de sa demande, la SA FRANFINANCE fait valoir que les mensualités d’emprunt n’ont pas été régulièrement payées, ce qui l’a contraint à prononcer la déchéance du terme 15 jours après la mise en demeure du 25 avril 2023 demeurée infructueuse et rendant ainsi la totalité de la dette exigible. Elle précise que le premier incident de paiement non régularisé se situe au 30 avril 2023 et que sa créance n’est ainsi pas forclose.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 11 juin 2024.
A l’audience du 11 juin 2024, la SA FRANFINANCE, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d’instance. La forclusion, la nullité, la déchéance du droit aux intérêts contractuels et légaux ont été mis dans le débat d’office, sans que la demanderesse ne présente d’observations supplémentaires sur ces points.
Bien que régulièrement assigné à étude, Monsieur [O] [Y] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter. Conformément à l’article 473 du code de procédure civile, il sera statué par jugement réputé contradictoire.
La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 17 septembre 2024.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de la SA FRANFINANCE, il est fait référence aux termes de son assignation, associée aux notes d’audience.
Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande en paiement
Le présent litige est relatif à un crédit soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
L’article R. 632-1 du code de la consommation permet au juge de relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l’audience du 11 juin 2024.
L’article L. 312-39 du code de la consommation prévoit qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret. L’article D. 312-16 du même code précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
Ce texte n’a toutefois vocation à être appliqué au titre du calcul des sommes dues qu’après vérification de l’absence de forclusion de la créance, de l’absence de cause de nullité du contrat, de ce que le terme du contrat est bien échu et de l’absence de déchéance du droit aux intérêts conventionnels.
Sur la forclusion
L’article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal d’instance dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
En l’espèce, au regard de l’historique du compte produit, il apparaît que le premier incident de paiement non régularisé est intervenu pour l’échéance d’avril 2023 de sorte que la demande effectuée le 22 mars 2024 n’est pas atteinte par la forclusion.
Sur la nullité du contrat
Aux termes de l’article L.312-25 du code de la consommation, pendant un délai de sept jours à compter de l’acceptation du contrat par l’emprunteur, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l’emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l’emprunteur au prêteur.
La méconnaissance de ce texte est sanctionnée par la nullité du contrat sur le fondement de l’article 6 du code civil, laquelle entraîne le remboursement par l’emprunteur du capital prêté.
En l’espèce, il ressort de l’historique de compte versé aux débats que le déblocage des fonds a eu lieu le 04 octobre 2022, soit postérieurement au délai de sept jours précité courant à compter du 02 juin 2022, de sorte qu’aucune nullité n’est encourue.
Sur la déchéance du terme
Aux termes de l’article 1315 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Par ailleurs, selon l’article 1103 du code civil, les conventions légalement formées engagent leurs signataires et en application de l’article 1224 du même code, lorsque l’emprunteur cesse de verser les mensualités stipulées, le prêteur est en droit de se prévaloir de la déchéance du terme et de demander le remboursement des fonds avancés soit en raison de l’existence d’une clause résolutoire soit en cas d’inexécution suffisamment grave. L’article 1225 précise qu’en présence d’une clause résolutoire, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution.
En matière de crédit à la consommation en particulier, la jurisprudence est venue rappeler qu’il résulte des dispositions de l’article L.312-39 du code de la consommation, que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
Il appartient au prêteur de se ménager la preuve de l’envoi d’une telle mise en demeure et de s’assurer que la mise en demeure a bien été portée à la connaissance du débiteur.
En l’espèce, le contrat de prêt contient une clause d’exigibilité anticipée en cas de défaut de paiement (article 5) et une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme de payer la somme de 179,25 euros précisant le délai de régularisation de 15 jours a bien été envoyée le 25 avril 2023, l’avis de réception ayant été par ailleurs signé le 05 mai 2023, de sorte qu’en l’absence de régularisation dans le délai, ainsi qu’il en ressort de l’historique de compte, la SA FRANFINANCE a pu régulièrement prononcer la déchéance du terme le 21 mai 2023.
Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels
A peine de déchéance du droit aux intérêts, il appartient au créancier qui réclame des sommes au titre d’un crédit à la consommation de justifier du strict respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, en produisant des documents contractuels conformes, ainsi que la copie des pièces nécessaires, et notamment :
la fiche d’information précontractuelle -FIPEN- (article L.312-12 du code de la consommation),
la notice d’assurance comportant les conditions générales (article L.312-29),
la justification de la consultation du fichier des incidents de paiements -FICP- (article L.312-16),
la justification, quel que soit le montant du crédit, de la vérification de la solvabilité de l’emprunteur au moyen nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur (article L.312-16),
En l’espèce, il n’est justifié au titre de la vérification de solvabilité de l’emprunteur que de la fiche dialogue remplie eu égard aux informations fournies par le défendeur. Le dossier ne comporte en effet aucun élément permettant d’établir que la demanderesse a effectivement vérifié, au moyen de pièces justificatives corroborant les informations fournies (fiches de paye, avis d’imposition etc.), que ces dernières correspondaient bien à la situation financière déclarée par l’emprunteur.
Dans ces conditions, le prêteur sera déchu en totalité de son droit aux intérêts contractuels.
Sur le montant de la créance
Aux termes de l’article L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
En l’espèce, le prêteur a été déchu du droit aux intérêts de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande formulée au titre des intérêts échus ; les sommes versées au titre des intérêts seront imputées sur le capital restant dû.
Au regard de l’historique du prêt, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement de la SA FRANFINANCE à hauteur de la somme de 12 793,25 euros au titre du capital restant dû (13 850,00 euros – 1 056,75 euros au titre des règlements déjà effectués).
Il sera par ailleurs rappelé qu’en application de l’article 1152 devenu 1231-5 du code civil, le juge peut réduire d’office le montant de la clause pénale si elle est manifestement excessive.
En l’espèce, la limitation légale de la créance du prêteur déchu du droit aux intérêts rend manifestement excessive la clause pénale de 8 % du capital dû à la date de la défaillance contenue au contrat de prêt, laquelle sera réduite à un euro.
Monsieur [O] [Y] est ainsi tenu au paiement de la somme totale de 12 794,25 euros correspondant au capital restant dû et à la clause pénale.
En outre, le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.
Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité.
En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêt annuel fixe de 4,39 %. Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points ne seraient pas significativement inférieurs à ce taux conventionnel. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil dans son intégralité et de dire que la somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme sans majoration de retard.
Faute d’envoi d’une nouvelle mise en demeure concomitamment ou après le prononcé de la déchéance du terme, les intérêts au taux légal courront à compter de la demande en justice.
Sur les demandes accessoires
Le défendeur, qui succombe, supportera les dépens, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
La situation économique respective des parties commande de ne pas faire droit à la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe réputé contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE que les conditions de prononcé régulier de la déchéance du terme du prêt personnel du 02 juin 2022 de 13 850,00 euros accordé par la SA FRANFINANCE à Monsieur [O] [Y] sont réunies ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA FRANFINANCE au titre du prêt souscrit par Monsieur [O] [Y] le 02 juin 2022, à compter de cette date ;
RÉDUIT l’indemnité sollicitée par la SA FRANFINANCE au titre de la clause pénale à un euro ;
CONDAMNE en conséquence Monsieur [O] [Y] à verser à la SA FRANFINANCE la somme de 12 794,25 euros (douze mille sept cent quatre-vingt-quatorze euros et vingt-cinq cents) au titre du capital restant dû et de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2024, sans application de la majoration légale de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ;
REJETTE la demande de la SA FRANFINANCE au titre de l’article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Monsieur [O] [Y] aux dépens ;
REJETTE le surplus des demandes ;
RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de plein droit à titre provisoire.
Ainsi jugé et prononcé.
LE GREFFIER LE JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Séverine FONTAINE François RABY