Analyse des obligations contractuelles et des droits en matière de crédit à la consommation

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Analyse des obligations contractuelles et des droits en matière de crédit à la consommation
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La société Volkswagen Bank a consenti à M. [G] une location avec option d’achat d’un véhicule Audi A1, avec un premier loyer de 1 500 euros et 36 loyers de 571,56 euros. En raison de loyers impayés, Volkswagen Bank a demandé la résiliation du contrat. Le tribunal a jugé que l’action était recevable, a constaté la déchéance du terme, a condamné M. [G] à payer 7 453,73 euros, et a statué sur la vente du véhicule. Volkswagen Bank a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et le paiement d’une somme plus élevée, tout en contestant la déchéance de son droit aux intérêts, arguant qu’elle avait produit l’original du contrat. M. [G] n’a pas constitué avocat et a été signifié des conclusions de l’appelante. L’affaire a été appelée à l’audience du 26 juin 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/04386
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/04386 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHHQ6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 septembre 2022 – Juge des contentieux de la protection de MELUN – RG n° 22/02738

APPELANTE

La société de droit étranger VOKSWAGEN BANK GESELLSCHAFT MIT BESCHERAENKTER HAF TNUNG, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Karine ALTMANN de la SELEURL AL-TITUDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

INTIMÉ

Monsieur [L] [G]

né le [Date naissance 2] 1993 à [Localité 6] (77)

[Adresse 3]

[Localité 4]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Marylène BOGAERS

, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 29 novembre 2019, la société Volkswagen Bank Gesellschaft mit Beschraenkter Haftung ci-après la société Volkswagen Bank, a consenti à M. [L] [G] une location avec option d’achat portant sur un véhicule de marque Audi A1 au prix de 34 229,94 euros TTC remboursable avec un premier loyer de 1 500 euros puis 36 loyers de 571,56 euros chacun du 15 janvier 2020 au 15 décembre 2022. L’option d’achat au terme de la location était fixée à 47,126 % du prix d’achat TTC du bien loué soit la somme de 16 131,25 euros TTC.

Plusieurs loyers n’ayant pas été honorés, la société Volkswagen Bank a entendu résilier le contrat.

Saisi le 17 mai 2022 par la société Volkswagen Bank d’une demande tendant au paiement du solde dû au titre du contrat, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Melun a, par un jugement réputé contradictoire en date du 13 septembre 2022 auquel il convient de se reporter :

– déclaré l’action recevable,

– constaté la déchéance du terme du contrat,

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

– condamné M. [G] à payer à la société Volkswagen Bank la somme de 7 453,73 euros au titre du capital restant dû outre la somme de 1 euro à titre de clause pénale sans intérêt ni contractuel ni légal,

– dit que si le produit de la vente du véhicule est supérieur à la valeur résiduelle retenue du véhicule, soit 16 131,25 euros, la différence sera déduite des sommes dues par M. [G],

– débouté la société Volkswagen Bank de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [G] aux dépens.

Après avoir vérifié la recevabilité de l’action en paiement au regard de la forclusion, le juge a relevé qu’une mise en demeure de payer les loyers échus précisant le délai de régularisation avait bien été envoyée à M. [G] avant déchéance du terme, de sorte que celle-ci avait valablement été prononcée.

Pour déchoir la société poursuivante de son droit à intérêts, il a relevé que le contrat en original n’était pas produit ce qui constituait une violation de l’article L. 312-18 du code de la consommation.

Pour calculer la créance, il a déduit du prix d’achat du véhicule de 34 229,94 euros, les règlements effectués pour 10 644,96 euros ainsi que la valeur résiduelle, fixant le solde à la somme de 7 453,73 euros. Afin de rendre effective la sanction, il a rejeté l’application de tout intérêt.

Suivant déclaration enregistrée électroniquement le 27 février 2023, la société Volkswagen Bank a interjeté appel du jugement.

Aux termes de son unique jeu de conclusions, déposé par RPVA le 22 mai 2023, elle demande à la cour de :

– la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

– d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

– à titre principal, de condamner M. [G] à lui payer la somme de 27 176,75 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2021,

– à titre subsidiaire, de le condamner à lui payer la somme de 23 584,98 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2021 outre 1 euro au titre de la clause pénale,

– en tout état de cause, de le condamner au paiement de la somme de 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle demande l’infirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, car elle indique produire à hauteur d’appel l’original du contrat signé par les parties.

Elle soutient qu’il est constant en jurisprudence qu’en matière de location financière, la créance du loueur s’élève au prix d’achat du véhicule diminué des versements effectués et du prix de revente et que le premier juge a déduit à tort de la différence entre le prix du véhicule et le prix de sa revente alors pourtant que M. [G] a remis le véhicule à un tiers et que le prêteur n’en a strictement rien obtenu . Elle estime sa créance fondée pour 23 584,98 euros, soulignant qu’elle n’a ni pris possession du véhicule pour le revendre, ni été destinataire d’un quelconque produit de cette vente.

La déclaration d’appel a été signifiée à M. [G] par acte délivré le 27 avril 2023 à domicile. Il n’a pas constitué avocat. Les conclusions de l’appelante lui ont été signifiées par acte remis à personne présente au domicile le 31 mai 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 26 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Au regard de sa date de conclusion, c’est à juste titre que le premier juge a fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

Le contrat de location avec option d’achat d’un véhicule automobile est assimilé à une opération de crédit en application des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation.

La recevabilité de l’action n’est pas discutée à hauteur d’appel de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point. Même si l’appelante demande l’infirmation totale du jugement, elle ne conteste en réalité pas la régularité de la déchéance du terme du contrat et ne développe aucun moyen à ce titre de sorte que le jugement doit également être confirmé sur ce point.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Le premier juge a privé la société Volkswagen Bank de son droit à intérêts pour ne pas avoir communiqué l’original du contrat.

Selon l’article L. 312-18 du code de la consommation, l’offre de contrat de crédit est établie sur support papier ou sur un autre support durable. Elle est fournie en autant d’exemplaires que de parties et, le cas échéant, à chacune des cautions.

Aux termes de l’article L. 341-4 du même code, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 312-18, L. 312-21, L. 312-28, L. 312-29, L. 312-43 ainsi que, pour les opérations de découvert en compte, par les articles L. 312-85 à L. 312-87 et L. 312-92, est déchu du droit aux intérêts.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations.

Ces dispositions imposent au prêteur de fournir à son cocontractant un exemplaire de l’offre de contrat, soit sur support papier, soit sur support durable. Pas plus en première instance qu’en appel, et contrairement à ce qu’elle affirme, la société Volkswagen Bank ne produit aux débats un original du contrat mais bien une copie en noir et blanc de l’offre validée manuscritement par M. [G], ce qui correspond néanmoins au support exigé par le texte de sorte qu’aucune déchéance du droit aux intérêts n’est encourue à ce titre.

À l’appui de sa demande, l’appelante produit aux débats l’offre de contrat dotée d’un bordereau de rétractation, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées signée, la notice d’information relative à l’assurance, la fiche d’information sur les prestations d’assistance, la fiche de dialogue signée, la copie de la pièce d’identité de M. [G], la copie d’une facture EDF, la copie de ses bulletins de salaire des mois d’août à octobre 2019, le plan de financement, le justificatif de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

Le prêteur justifie ainsi du respect des obligations contractuelles et précontractuelles d’informations. Partant le jugement doit être infirmé sur ce point.

Sur les sommes dues

L’appelante produit également la facture d’achat du véhicule loué, le procès-verbal de réception du véhicule du 20 décembre 2019, le certificat provisoire d’immatriculation du véhicule, l’historique de compte, la mise en demeure préalable du 15 septembre 2021 par pli recommandé réclamant le paiement d’une somme de 2 580,39 euros sous 48 heures à hauteur de 1 800 euros, sous peine de voir le contrat résilié et un courrier recommandé du 27 septembre 2021 de notification de la résiliation du contrat et d’exigibilité du solde restant dû avec rappel de l’obligation de restitution du véhicule.

Comme indiqué, l’appelante est donc bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité de sommes dues.

Selon l’article L. 312-40 du code de la consommation, en cas de défaillance dans l’exécution, par l’emprunteur, d’un contrat de location assorti d’une promesse de vente ou d’un contrat de location-vente, le prêteur est en droit d’exiger, outre la restitution du bien et le paiement des loyers échus et non réglés, une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 (anciennement 1152) du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

Cette indemnité est définie par l’article D. 312-18 comme la différence entre, d’une part, la valeur résiduelle hors taxes du bien stipulée au contrat augmentée de la valeur actualisée, à la date de la résiliation du contrat, de la somme hors taxes des loyers non encore échus et, d’autre part, la valeur vénale hors taxes du bien restitué.

Le décret précise que la valeur actualisée des loyers non encore échus est calculée selon la méthode des intérêts composés en prenant comme taux annuel de référence le taux moyen de rendement des obligations émises au cours du semestre civil précédant la date de conclusion du contrat majoré de la moitié.

Il ressort explicitement de l’article L. 312-40 précité que l’indemnité litigieuse est une pénalité susceptible de réduction par le juge si elle présente un caractère manifestement excessif.

En l’espèce, et en l’absence de déchéance du droit aux intérêts, l’appelante demande la somme de 27 176,75 euros correspondant à la somme de 3 446,07 euros au titre des loyers impayés du 15 avril 2021 au 15 octobre 2021, outre celle de 7 599,43 euros TTC au titre des loyers restant dus à la date de résiliation et la valeur résiduelle du véhicule non restitué pour 16 131,25 euros.

Les loyers échus impayés sont justifiés pour 3 446,07 euros.

L’indemnité de résiliation peut en effet être fixée à la somme de 23 730,68 euros (7 599,43 + 16 131,25 euros).

M. [G] est redevable d’une somme de 27 176,75 euros assortie des intérêts calculés au taux légal à compter du 2 novembre 2021.

Le jugement a précisé que si le produit de la vente du véhicule était supérieur à la valeur résiduelle retenue du véhicule, soit 16 131,25 euros, la différence sera déduite des sommes dues par M. [G], ce qui est conforme au contrat de sorte que le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées.

En revanche rien ne justifie que l’intimé soit condamné aux dépens d’appel, alors que n’ayant jamais été représenté ni en première instance, ni en appel, il n’a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l’a fait. La société Volkswagen Bank conservera donc la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts et condamné M. [L] [G] à payer à la société Volkswagen Bank la somme de 7 453,73 euros au titre du capital restant dû outre la somme de 1 euro à titre de clause pénale sans intérêts ni contractuel ni légal ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts ;

Condamne M. [L] [G] à payer à la société Volkswagen Bank Gesellschaft mit Beschraenkter Haftung une somme de 27 176,75 euros assortie des intérêts calculés au taux légal à compter du 2 novembre 2021 ;

Rejette le surplus des demandes ;

Laisse les dépens de l’appel à la charge de la société Volkswagen Bank Gesellschaft mit Beschraenkter Haftung ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


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