Analyse des obligations contractuelles et des conséquences de la non-conformité aux exigences réglementaires dans le cadre d’un crédit renouvelable

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Analyse des obligations contractuelles et des conséquences de la non-conformité aux exigences réglementaires dans le cadre d’un crédit renouvelable

M. [G] [C] a ouvert un compte de dépôt auprès de la SA CIC-Lyonnaise de Banque le 28 février 2013, date à laquelle il a également souscrit un crédit renouvelable d’un montant maximum de 35 000 euros. Il a effectué plusieurs retraits de ce crédit entre 2016 et 2018. En raison d’impayés et d’un manque d’alimentation de son compte, la banque a mis en demeure M. [C] en octobre 2021, puis a dénoncé la convention de compte et a assigné M. [C] en paiement en juillet 2022. Le jugement du 12 octobre 2022 a partiellement donné raison à M. [C], en déclarant irrecevable la demande de la banque concernant le crédit renouvelable et en condamnant M. [C] à payer un solde de 1 290,14 euros. La banque a interjeté appel, demandant la réformation du jugement et le paiement de diverses sommes liées aux utilisations du crédit. M. [C] a contesté l’appel, demandant la confirmation du jugement initial et soulevant plusieurs demandes subsidiaires. L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 mars 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Chambéry
RG
22/01892
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 26 Septembre 2024

N° RG 22/01892 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HD2C

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 12 Octobre 2022, RG 22/01318

Appelante

S.A. CIC-LYONNAISE DE BANQUE, dont le siège social est sis [Adresse 4] -[Localité 2]N – prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SELAS AGIS, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

Intimé

M. [G] [C]

né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 6] (KENYA), demeurant [Adresse 5] – [Localité 3]

Représenté par la SELARL CABINET PASCAL SOUDAN CONSEIL, avocat au barreau de CHAMBERY

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COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue en rapporteur, sans opposition des avocats, le 28 mai 2024 par Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière présente à l’appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,

Et lors du délibéré, par :

– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, qui a rendu compte des plaidoiries,

– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

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EXPOSÉ DU LITIGE

Selon convention en date du 28 février 2013, M. [G] [C] a ouvert auprès de la SA CIC-Lyonnaise de Banque un compte de dépôt référencé n°00052155801.

Selon offre acceptée le même jour, la SA CIC-Lyonnaise de Banque lui a consenti un crédit renouvelable par fractions dit ‘crédit en réserve’ d’un montant maximum de 35 000 euros.

Dans le cadre de l’utilisation de ce crédit, M. [C] a fait débloquer diverses sommes soit :

– 10 000 euros le 27 janvier 2016 (utilisation n°8),

– 6 000 euros le 3 janvier 2017 (utilisation n°11),

– 4 000 euros le 26 avril 2017 (utilisation n°12),

– 7 200 euros le 2 octobre 2017 (utilisation n°15),

– 11 000 euros le 23 juillet 2018 (utilisation n°16).

Se prévalant d’impayés liés à ces utilisations et d’une absence l’alimentation du compte courant, la SA CIC-Lyonnaise de Banque a mis en demeure M. [C] de régulariser sa situation par courrier du 12 octobre 2021.

Faute d’exécution spontanée, la SA CIC-Lyonnaise de Banque a, par courrier du 9 décembre 2021, dénoncé la convention de compte courant et prononcé la déchéance du terme du concours consenti à M. [C] puis l’a mis en demeure de lui payer les sommes revendiquées par elle.

Aucun paiement n’étant intervenu, la SA CIC-Lyonnaise de Banque a, par acte du 18 juillet 2022, fait assigner M. [C] en paiement devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville.

Par jugement réputé contradictoire du 12 octobre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :

– dit que la SA CIC-Lyonnaise de Banque est déchue de son droit aux intérêts et frais depuis le 19 février 2021 concernant le compte de dépôt n°00052155801 de M. [C],

– condamné M. [C] à payer à la SA CIC-Lyonnaise de Banque la somme de 1 290,14 euros outre intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2021, au titre du solde de ce compte,

– exclu l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L.313-3 du code monétaire et financier,

– déclaré irrecevable l’action en paiement de la SA CIC-Lyonnaise de Banque au titre du crédit renouvelable n°000521558 02 (incluant les utilisations n°8, 11, 12, 15 et 16) consenti le 28 février 2013 à M. [C],

– débouté la SA CIC-Lyonnaise de Banque de ses autres prétentions,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [C] aux dépens de l’instance.

Par acte du 7 novembre 2022, la SA CIC-Lyonnaise de Banque a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 3 juillet 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SA CIC-Lyonnaise de Banque demande à la cour de :

– réformer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré irrecevable sa demande au titre du ‘crédit réserve’,

– débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes,

Et statuant à nouveau,

– condamner M. [C] à lui payer les sommes suivantes :

1 991,14 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,75% et cotisations d’assurance de 0,50% l’an à compter du 3 mai 2022, au titre de l’utilisation n°8 du ‘crédit réserve’,

2 635,65 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,90% et cotisations d’assurance de 0,50 % l’an à compter du 3 mai 2022, au titre de l’utilisation n°11 du crédit renouvelable ‘crédit réserve’ suivant décompte arrêté au 2 mai 2022,

1 234,02 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,50% et cotisations d’assurance de 0,50% l’an à compter du 3 mai 2022, au titre de l’utilisation n°12 du ‘crédit réserve’,

4 211,04 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,50% et cotisations d’assurance de 0,50% l’an à compter du 3 mai 2022, au titre de l’utilisation n°15 du ‘crédit réserve’,

8 713,62 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,50% et cotisations d’assurance de 0,50 % l’an à compter du 3 mai 2022, au titre de l’utilisation n°16 du ‘crédit réserve’,

Subsidiairement,

– condamner M. [C] à lui payer la somme de 22 527,80 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 octobre 2021,

En toutes hypothèses,

– condamner le même à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner le même aux entiers dépens.

En réplique, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 mai 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [C] demande à la cour de :

– dire et juger irrecevable et dans tous les cas mal fondé l’appel interjeté par la SA CIC-Lyonnaise de Banque à l’encontre du jugement déféré,

– déclarer la SA CIC-Lyonnaise de Banque irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l’en débouter,

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il l’a condamné aux dépens de l’instance,

A titre principal,

– dire que la SA CIC-Lyonnaise de Banque est déchue de son droit aux intérêts et frais depuis le 19 février 2021 concernant son compte de dépôt n°00052155801,

– le condamner à payer à la SA CIC-Lyonnaise de Banque la somme de 1290,14 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2021, au titre du solde de ce compte,

– exclure l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L.313-3 du code monétaire et financier,

– déclarer la SA CIC-Lyonnaise de Banque irrecevable à agir en paiement au titre du crédit renouvelable n°000521558 02 (incluant les utilisations n° 8, 11, 12, 15 et 16), qui lui a été consenti le 28 février 2013,

A titre subsidiaire, s’agissant du crédit renouvelable’crédit réserve’ du 28 février 2013,

– juger nulle et de nul effet l’offre de crédit renouvelable ‘crédit en réserve’ du 28 février 2013, avec toutes conséquences de droit,

A titre infiniment subsidiaire, s’agissant du crédit renouvelable ‘crédit en réserve’ du 28 février 2013,

– prononcer à l’encontre de la SA CIC-Lyonnaise de Banque la déchéance totale du droit aux intérêts, frais, pénalités, commissions et autres accessoires, fixer le montant total en capital qu’il doit encore à la somme de 15 805,63 euros,

– exclure l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L.313-3 du code monétaire et financier,

Dans tous les cas,

– condamner la SA CIC-Lyonnaise de Banque à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la SA CIC-Lyonnaise de Banque aux entiers dépens de première instance et d’appel.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il échet de constater, à titre liminaire, que les dispositions du jugement relatives à la déchéance du droit aux intérêts et aux frais concernant le compte de dépôt n°00052155801 puis à la condamnation de M. [C] à payer à la banque la somme de 1 290,14 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2021, sans application du taux d’intérêt légal majoré, ne sont pas remises en cause par les parties.

Le jugement déféré ne pourra donc, en conséquence, qu’être confirmé de ces chefs.

Concernant le crédit renouvelable n°000521558 02 et les utilisations référencées n°8, 11, 12, 15 et 16, il résulte de l’examen des listes des mouvements avec soldes progressifs, pour chacune des utilisations (n°8, 11, 12, 15 et 16), que ces dernières n’ont connu aucun impayé non-régularisé avant avril 2020, date à laquelle M. [C] était à jour de l’intégralité des paiements quoique différents incidents aient pu intervenir antérieurement.

À compter de cette date et avant la déchéance du terme du concours, la SA CIC-Lyonnaise de Banque soutient avoir accordé à M. [C] un report de 6 mois pour le paiement du principal et produit pour en justifier la demande formulée en ce sens par l’intimé laquelle concorde factuellement avec les mouvements recensés par la cour dans les cinq listes précitées.

Il en résulte que le premier incident de payer non-régularisé n’a pu intervenir avant l’expiration du délai de report, soit en octobre 2020, de sorte que la demande en paiement introduite le 18 juillet 2022 s’avère recevable comme non-forclose. Le jugement déféré sera donc réformé sur ce point.

Au fond, la cour observe que le contrat de crédit renouvelable a été conclu entre les parties le 28 février 2013 et que les différents déblocages pour lesquels un remboursement est revendiqué par la banque sont intervenus les 27 janvier 2016 (10 000 euros), 3 janvier 2017 (6 000 euros), 26 avril 2017 (4 000 euros), 2 octobre 2017 (7 200 euros), 23 juillet 2018 (11 000 euros).

Sur le fondement de l’article 2224 du code civil, la SA CIC-Lyonnaise de Banque relève à raison que la demande de M. [C] relative à la nullité du contrat de crédit renouvelable, pour cause de libération anticipée des fonds, est prescrite faute d’avoir été présentée dans le délai de quinquennal suivant chacun des déblocages et du fait de l’exécution volontaire du contrat durant plusieurs années.

Toutefois, la cour retient que les dispositions de l’article L.311-16 du code de la consommation, pris en ses alinéas 3 et 4, dans sa rédaction en vigueur au jour de la signature du contrat puis du premier déblocage, n’ont pas été respectées par la SACIC-Lyonnaise de Banque en ce qu’elle ne justifie nullement du respect des vérifications impératives mises à sa charge (vérification annuelle du FICP et vérification triennale de la solvabilité de l’emprunteur).

Aussi, il y a lieu de faire droit à la demande de déchéance relative aux intérêts et de limiter la condamnation de M. [C] à la somme de 16 275,60 euros (1 711,15 + 2 288,34 + 1 076,39 + 3 687,51 + 7 512,21), conformément aux décomptes de créance adressés par la banque à son client au jour du prononcé de la déchéance du terme du concours.

La cour dit en conséquence que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2021 et exclut l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L.313-3 du code monétaire et financier.

M. [C], qui succombe en principal, est condamné aux dépens d’appel. Il est en outre condamné à payer la somme de 1 000 euros à la SA CIC-Lyonnaise de Banque au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Réforme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action en paiement de la SA CIC-Lyonnaise de Banque au titre du crédit renouvelable n°000521558 02 (incluant les utilisations n°8, 11, 12, 15 et 16) consenti le 28 février 2013 à M. [G] [C],

Statuant à nouveau de ce chef,

Constate que la demande en paiement de la SA CIC-Lyonnaise de Banque au titre du crédit renouvelable n°000521558 02 (incluant les utilisations n°8, 11, 12, 15 et 16) n’est pas forclose et déclare recevable cette demande,

Prononce, à l’encontre la SA CIC-Lyonnaise de Banque, la déchéance du droit aux intérêts et frais concernant le crédit renouvelable n°000521558 02 (incluant les utilisations n°8, 11, 12, 15 et 16),

Condamne M. [G] [C] à payer à la SA CIC-Lyonnaise de Banque la somme de 16 275,60 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2021,

Exclut l’application du taux d’intérêt légal majoré prévu à l’article L.313-3 du code monétaire et financier,

Y ajoutant

Condamne M. [G] [C] aux dépens d’appel,

Condamne M. [G] [C] à payer à la SA CIC-Lyonnaise de Banque la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi prononcé publiquement le 26 septembre 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente


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