Le 9 août 2016, la Société Marseillaise de Crédit a accordé un prêt personnel de 35.000 euros aux époux [J] [N] et [F] [X], remboursable en 60 mensualités à un taux de 5,50 %. Le 16 octobre 2019, la banque a mis les emprunteurs en demeure de régulariser des échéances impayées, menaçant de déchéance du terme. Cette déchéance a été prononcée le 18 février 2020. Les époux ont divorcé le 13 mars 2020. Le 26 avril 2020, la banque a assigné les deux époux devant le tribunal judiciaire de Marseille pour obtenir le paiement de 13.932,41 euros. Les défendeurs ont contesté la validité des assignations et la régularité de la déchéance. Le tribunal a rejeté l’exception de nullité mais a débouté la banque, constatant l’absence de preuve des impayés. La banque a été condamnée aux dépens et à verser 400 euros à chaque défendeur. Le 29 décembre 2022, SOGEFINANCEMENT, ayant acquis les droits de la banque, a interjeté appel, se désistant de l’instance contre Monsieur [J] [N] en raison d’une décision de surendettement. Elle maintient ses demandes contre Madame [F] [X], affirmant que le premier incident de paiement date du 10 septembre 2019. Les deux défendeurs ont demandé la confirmation du jugement initial et des indemnités pour frais irrépétibles. L’instruction a été clôturée le 4 juin 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 18 SEPTEMBRE 2024
N° 2024/ 352
N° RG 22/17352
N° Portalis DBVB-V-B7G-BKRPW
S.A.S. SOGEFINANCEMENT
C/
[J] [N]
[F] [X]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Caroline GIRAUD
Me Christine D’ARRIGO
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire (Pôle de proximité) de Marseille en date du 18 Novembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/02527.
APPELANTE
S.A.S. SOGEFINANCEMENT
Venant aux droits de la SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT selon acte de cession de créance, prise en la personne de son représentant légal domicilié es-qualité au siège sis [Adresse 4]
représentée par Me Caroline GIRAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉS
Monsieur [J] [N]
né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 6] (13), demeurant [Adresse 1]
Madame [F] [X]
née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 6] (13), demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Christine D’ARRIGO, membre de la SELARL CHRISTINE D’ARRIGO, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2024.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2024, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant contrat conclu le 9 août 2016, la Société Marseillaise de Crédit a consenti aux époux [J] [N] et [F] [X] un prêt personnel de 35.000 euros remboursable en 60 mensualités au taux nominal annuel de 5,50 %.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 16 octobre 2019, la banque a mis les emprunteurs en demeure de régulariser les échéances impayées dans un délai de quinze jours, sous peine de déchéance du terme du prêt.
Cette sanction a été prononcée par courriers adressés le 18 février 2020 dans les mêmes formes à chacun des époux par l’intermédiaire de son huissier de justice.
Les débiteurs ont divorcé suivant convention reçue devant notaire le 13 mars 2020.
Par actes signifiés le 26 avril 2020, la Société Marseillaise de Crédit a assigné Monsieur [J] [N] et Madame [F] [X] à comparaître devant le tribunal judiciaire de Marseille pour les entendre condamner solidairement à lui payer la somme de 13.932,41 euros, outre intérêts au taux conventionnel à compter du 18 février 2020.
Les défendeurs ont invoqué la nullité des assignations, et subsidiairement l’irrégularité du prononcé de la déchéance du terme.
Par jugement rendu le 18 novembre 2022, le tribunal a rejeté l’exception de procédure tirée de la nullité des actes introductifs d’instance mais débouté la banque de ses demandes, en retenant que les pièces produites aux débats ne permettaient pas de déterminer la date du premier incident de paiement non régularisé et que ‘les impayés n’étaient nullement démontrés’. La SMC a été condamnée aux dépens, ainsi qu’à payer à chacun des défendeurs la somme de 400 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Suivant déclaration enregistrée au greffe le 29 décembre 2022, la société SOGEFINANCEMENT, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit par l’effet d’un acte de cession de créances du 2 novembre précédent, a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 20 septembre 2023, elle entend en premier lieu se désister de l’instance introduite à l’égard de Monsieur [J] [N], en raison de la décision prise le 10 janvier 2023 par la commission de surendettement imposant un rétablissement personnel du débiteur sans liquidation judiciaire.
Elle maintient en revanche l’intégralité de ses demandes à l’encontre de Madame [F] [X], faisant valoir que le premier incident de paiement non régularisé remonte au 10 septembre 2019 et que la déchéance du terme du prêt est intervenue dans des conditions parfaitement régulières.
Elle demande en conséquence à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de condamner l’intimée à lui payer la somme de 13.932,41 euros avec intérêts au taux de 5,50 % l’an à compter du 18 février 2020, outre celle de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et ses entiers dépens.
Par conclusions du 27 juin 2023, Monsieur [J] [N] demande à la cour :
– de prendre acte du désistement d’instance intervenu à son égard,
– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la banque aux dépens et au paiement d’une indemnité de 400 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en première instance,
– de condamner en outre l’appelante à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel.
Par conclusions notifiées le même jour, Madame [F] [X] fait successivement valoir :
– qu’elle n’a jamais eu connaissance de la mise en demeure du 16 octobre 2019, dont l’accusé de réception comporte une signature qui n’est ni la sienne, ni celle de son ex-époux, ni encore celle d’un mandataire ayant reçu procuration à cet effet,
– que par suite la déchéance du terme a été irrégulièrement prononcée, d’autant que l’accusé de réception de la lettre de l’huissier ne permet pas d’identifier les nom et adresse de son destinataire, la date, ni les références du dossier concerné,
– et que le premier juge a justement retenu que les décomptes produits étaient incohérents et ne permettaient pas d’identifier la date du premier incident de paiement non régularisé.
Elle demande à la cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, de condamner l’appelante à lui verser 2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel, outre ses dépens.
L’ordonnance de clôture de l’instruction a été prononcée le 4 juin 2024.
Sur la recevabilité de l’appel :
Suivant l’article 546 du code de procédure civile, le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n’y a pas renoncé.
En l’espèce, la société SOGEFINANCEMENT, ayant acquis ses droits de la Société Marseillaise de Crédit postérieurement à la clôture des débats devant le premier juge, ce qui l’a empêchée d’intervenir à l’instance, est recevable à interjeter appel du jugement ayant débouté son auteur de l’action ayant pour objet la créance cédée.
Sur le désistement partiel :
En application des articles 400 et suivants du code de procédure civile, le désistement de l’appel à l’égard de Monsieur [J] [N] doit être déclaré parfait.
En revanche, l’équité ne commande pas d’allouer à l’intimé une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur la demande en paiement :
Les conditions générales du contrat, conformes aux dispositions de l’article L 312-39 du code de la consommation, stipulent qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.
La déchéance du terme du prêt ne peut, sauf stipulation expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans une mise en demeure préalable précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l’espèce, il résulte du décompte du prêteur (pièce n° 12 du dossier de l’appelante) que les échéances du prêt étaient impayées depuis le 10 septembre 2019. Contrairement à l’opinion du premier juge, il ne pouvait être exigé la production d’un historique complet dès lors que les débiteurs n’invoquaient pas la forclusion de l’action et n’alléguaient pas davantage avoir réglé lesdites échéances.
Par lettre recommandée datée du 16 octobre 2019, dont l’accusé de réception est revenu signé le 21 octobre, la SMC a informé les emprunteurs que, faute de régulariser leur situation dans un délai de quinze jours, elle entendait se prévaloir de la clause de déchéance du terme.
Madame [F] [X] soutient qu’elle n’a jamais eu connaissance de ce courrier, dont l’accusé de réception comporte une signature qui ne serait ni la sienne, ni celle de son ex-époux, ni encore celle d’un mandataire ayant reçu procuration à cet effet. Toutefois, la mise en demeure incombant au créancier ne constituant pas une formalité de nature contentieuse, les dispositions des articles 665 et suivants du code de procédure civile relatives à la forme des notifications ne lui sont pas applicables et le défaut de réception effective de la lettre recommandée par son destinataire n’affecte pas sa validité.
La déchéance du terme a ensuite été prononcée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée le 18 février 2020 par une étude d’huissier mandatée par le créancier, revenue non distribuée avec la mention ‘pli avisé et non réclamé’. Contrairement à ce que soutient l’intimée, la production aux débats de l’original de ce courrier permet de vérifier que celui-ci a bien expédié à la date susdite, au nom de [F] [X] et à l’adresse déclarée au contrat, à savoir [Adresse 5]. D’autre part, le défaut d’indication du numéro de contrat n’était pas de nature à porter grief.
Il convient en conséquence de considérer que la déchéance du terme a été régulièrement prononcée et, infirmant le jugement déféré, de condamner l’intimée à payer :
– 3.816,98 euros au titre des mensualités échues entre le 10 septembre 2019 et le 10 janvier 2020,
– 10.115,43 euros au titre du capital restant dû à la date de la déchéance du terme,
– les intérêts moratoires au taux conventionnel de 5,50 % l’an à compter du 18 février 2020.
Madame [F] [X] devra également supporter les entiers dépens de première instance et d’appel, et verser à l’appelante une somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déclare l’appel recevable,
Déclare parfait le désistement de l’appel à l’égard de Monsieur [J] [N], et rejette la demande formée par ce dernier au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau :
Condamne Madame [F] [X] à payer à la société SOGEFINANCEMENT, venant aux droits de la Société Marseillaise de Crédit, la somme principale de 13.932,41 euros, majorée des intérêts au taux de 5,50 % l’an à compter du 18 février 2020,
Condamne en outre Madame [F] [X] aux entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser à l’appelante une somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT