Le 23 janvier 2018, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a accordé à M. [C] une autorisation de découvert de 260 euros pour une durée de 35 jours. Le 13 février 2018, un prêt personnel de 14 000 euros a été consenti à M. [C], remboursable en 84 mensualités de 196 euros à un taux de 3,50 %. Le 14 septembre 2020, la banque a mis en demeure M. [C] de régler les sommes dues, menaçant d’appliquer la déchéance du terme. Le 23 février 2022, la banque a assigné M. [C] en justice pour obtenir le paiement de 11 851,40 euros pour le prêt et 809,54 euros pour le solde débiteur de son compte. Lors de l’audience du 28 mars 2022, le juge a soulevé des questions sur la forclusion du découvert. Le 9 septembre 2022, le tribunal a débouté la banque de sa demande concernant le prêt et a déclaré sa demande pour le solde débiteur irrecevable. Le 13 décembre 2022, la banque a fait appel de ce jugement. Dans ses conclusions du 28 février 2023, elle a demandé l’infirmation du jugement et le paiement des sommes dues. M. [C] n’a pas constitué avocat, et la clôture de la procédure a été ordonnée le 11 janvier 2024.
|
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
C/
[H] [C]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D’APPEL DE DIJON
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2024
N° RG 22/01532 – N° Portalis DBVF-V-B7G-GCP6
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 09 septembre 2022,
rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du Creusot
RG : 11-22/0083
APPELANTE :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST, prise en la personne de son Directeur général en exercice domicilié en cette qualité au siège :
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Frédérique FOVEAU, membre de la SELARL OPPIDUM CONSEILS, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
INTIMÉ :
Monsieur [H] [C]
né le [Date naissance 3] 1997 à [Localité 6] (71)
domicilié :
[Adresse 2]
[Localité 6]
non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 11 janvier 2024 en audience publique devant la cour composée de :
Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre,
Sophie BAILLY, Conseiller,
Bénédicte KUENTZ, Conseiller,
Après rapport fait à l’audience par l’un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG,
DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 21 Mars 2024 pour être prorogée au 23 Mai 2024, au 27 Juin 2024 puis au 19 Septembre 2024,
ARRÊT : rendu par défaut,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte sous seing privé signé électroniquement le 23 janvier 2018, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a consenti à M. [H] [C] une autorisation de découvert d’une durée supérieure à un mois et n’excédant pas trois mois, d’un montant de 260,00 euros, avec une durée de 35 jours pour chaque découvert, au taux d’intérêt variable proportionnel au taux débiteur jour.
Par contrat du 13 février 2018, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a accordé à M. [C] un prêt personnel n°3133425 d’un montant de 14 000 euros remboursable en 84 mensualités de 196,00 euros, moyennant un taux débiteur annuel de 3,50 %.
Par lettre recommandée du 14 septembre 2020, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a mis en demeure M. [C] de lui régler, dans un délai de 15 jours, les sommes correspondant au solde débiteur du compte et aux mensualités de l’emprunt demeurées impayées, sous peine d’application de la déchéance du terme.
Par acte d’huissier du 23 février 2022, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a fait assigner M. [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du Creusot, en sollicitant sur le fondement des articles 1103 et suivants du code civil, la condamnation de M. [C] à lui payer :
au titre du prêt 113133425, la somme de 11 851,40 euros en principal, outre les intérêts au taux conventionnel de 3,69 % à compter du 02 février 2022,
au titre du solde débiteur du compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX04], la somme de 809,54 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 04 janvier 2022,
la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
A l’audience du 28 mars 2022, le juge des contentieux de la protection a soulevé d’office les moyens suivants en application de l’article 16 du code de procédure civile, ainsi que de l’article R.632-1 du code de la consommation : offre préalable de crédit à l’issue du 3ème mois de dépassement et/ou du 1er mois en cas de dépassement significatif.
Par jugement avant dire-droit du 24 mai 2022, la réouverture des débats a été ordonnée afin de permettre à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est de répondre au moyen de la forclusion du découvert en compte.
Par jugement réputé contradictoire du 9 septembre 2022, le tribunal de proximité du Creusot a :
– débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est de sa demande au titre du contrat de crédit n°3133425,
– déclaré la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est irrecevable en sa demande en paiement du solde débiteur du compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX04] car forclose,
– condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est aux dépens,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Le 13 décembre 2022, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est a relevé appel de ce jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en paiement au titre du contrat de crédit n°3133425, l’a condamnée aux dépens, et a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Elle a fait signifier sa déclaration d’appel à M. [C] par acte de commissaire de justice du 30 janvier 2023.
Par conclusions notifiées le 28 février 2023, et signifiées à M. [C] le 13 mars 2023, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est demande à la cour de :
– infirmer le jugement du tribunal de proximité du Creusot du 9 septembre 2022 en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en paiement au titre du crédit n°3133425 souscrit par M. [C],
Statuant à nouveau,
– condamner M. [C] à lui payer les sommes de :
11 851,40 euros, outre intérêts au taux de 3,69 % à compter du 2 février 2022,
1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [C] aux dépens dont distraction au profit de la SELARL Oppidum Conseils.
Elle fait valoir que, le premier impayé non régularisé se situant le 8 mars 2020 et l’assignation ayant été délivrée le 23 février 2022, son action se trouve parfaitement recevable et bien fondée.
M. [C] n’a pas constitué avocat.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures susvisées de l’appelante pour un exposé complet de ses moyens.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 11 janvier 2024.
Il sera rappelé à titre liminaire que selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
En outre, la cour constate qu’elle n’est pas saisie du chef de jugement ayant déclaré irrecevable comme forclose la demande en paiement de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est au titre du solde débiteur du compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX04].
La banque limite en effet son appel à la critique des dispositions du jugement qui l’ont déboutée de sa demande en paiement au titre du contrat de crédit n°3133425, au motif que la juridiction n’était pas en mesure de vérifier si l’action en paiement avait été engagée avant l’expiration du délai de forclusion.
– Sur la forclusion
Aux termes de l’article R. 312-35 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au contrat, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Cet événement est caractérisé par :
– le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;
– ou le premier incident de paiement non régularisé ;
– ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;
– ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.
Les règlements qui sont effectués par l’emprunteur s’imputent sur les échéances les plus anciennes. Un prélèvement opéré sur un compte débiteur qui ne bénéficie pas d’une autorisation de découvert ou dont le plafond de l’autorisation de découvert est dépassé ne permet pas de repousser artificiellement le point de départ du délai de forclusion. Il en va toutefois différemment lorsque le titulaire du compte régularise ensuite son découvert et que son compte bancaire repasse en position créditrice.
En l’espèce, il ressort des pièces produites par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est que les échéances du prêt personnel consenti à M. [C] ont été prélevées sur son compte courant n°[XXXXXXXXXX04], le 8ème jour de chaque mois et pour la première fois le 8 avril 2018.
Ce compte présentait en dernier lieu un solde créditeur le 10 février 2020, de sorte qu’il est établi que l’échéance du prêt personnel prélevée le 8 février 2020 ainsi que les échéances antérieures ont bien été réglées par l’emprunteur.
Par la suite, le compte courant s’est maintenu en position débitrice, et ce pour un montant supérieur au découvert autorisé. En conséquence, le premier impayé non régularisé peut être fixé au 8 mars 2020.
L’assignation en paiement ayant été délivrée à M. [C] le 23 février 2022, soit moins de deux ans après cet événement, il en résulte que sa créance n’est pas forclose.
– Sur le montant de la créance
En vertu de l’article L. 312-39 alinéa 1er du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.
Les pièces produites par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est, notamment le décompte de sa créance, le tableau d’amortissement du prêt et la synthèse des règlements font apparaître que l’appelante est créancière des sommes suivantes :
– échéances échues impayés du 8 mars 2020 au 29 septembre 2020, date de la déchéance du terme : 1 372 euros, dont 1 117,40 euros en capital,
– capital restant dû à la date de déchéance du terme : 9 430,34 euros,
– assurance courue à la date de déchéance du terme : 49 euros,
Total dû par M. [C] : 10 851,34 euros.
Cette condamnation portera intérêt au taux contractuel de 3,50 % l’an sur la somme de 10 547,74 euros représentant le capital dû incluant celui contenu dans les échéances impayées, à compter du 23 février 2022.
– Sur les frais de procès
La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est prospérant en ses prétentions, les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge de M. [C], conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Eu égard aux faits de l’espèce, l’équité commande qu’il ne soit pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour,
Infirme le jugement du tribunal de proximité du Creusot du 9 septembre 2022 en ce qu’il a débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est de sa demande en paiement au titre du crédit n°3133425 souscrit par M. [C], et statué sur les dépens,
Statuant à nouveau de ces chefs et ajoutant,
Condamne M. [C] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est la somme de 10 851,34 euros au titre du solde du crédit n°3133425, assortie des intérêts au taux contractuel de 3,50 % à compter du 23 février 2022 sur la somme de 10 547,74 euros,
Condamne M. [C] aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés par la SELARL Oppidum Conseil conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Déboute la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Centre Est de sa demande au titre des frais irrépétibles.
Le Greffier, Le Président,