Sommaire Contexte de l’affairePar courrier recommandé daté du 21 octobre 2020, [U] [F] a saisi le tribunal judiciaire de Marseille pour contester une mise en demeure émise par l’URSSAF le 3 février 2020, réclamant un montant de 15 634 € pour des cotisations dues pour le 4ème trimestre 2019. Déroulement de la procédureL’affaire a été mise en état et a été appelée à l’audience du 8 octobre 2024. [U] [F] ne s’est pas présenté ni n’a été représenté à cette audience, sans avoir demandé de dispense de comparution. L’URSSAF a alors demandé au tribunal de rendre un jugement sur le fond. Demandes de l’URSSAFL’URSSAF Ile de France a demandé au tribunal de confirmer l’affiliation obligatoire de [U] [F] au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants, de valider la mise en demeure du 14 février 2020, de débouter [U] [F] de ses prétentions et de le condamner à verser 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Affiliation au régime de sécurité socialeLe tribunal a rappelé que la Caisse nationale du régime social des indépendants, ainsi que l’URSSAF, sont des organismes de droit privé de sécurité sociale, obligatoirement affiliés aux travailleurs indépendants. L’URSSAF a hérité des missions de recouvrement des cotisations sociales depuis 2018. Validité de la mise en demeureConcernant la mise en demeure du 3 février 2020, le tribunal a constaté qu’elle respectait les exigences légales en précisant la nature des cotisations réclamées et la période concernée. Par conséquent, la demande d’annulation de [U] [F] a été jugée mal fondée. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré mal fondé le recours de [U] [F], a confirmé son affiliation obligatoire au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants, et l’a condamné aux dépens. De plus, [U] [F] a été condamné à verser 500 € à l’URSSAF en application de l’article 700 du Code de procédure civile. Appel de la décisionLe tribunal a précisé que tout appel de cette décision doit être formé dans un délai d’un mois à compter de sa notification, conformément aux dispositions du Code de procédure civile. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelle est la procédure à suivre en cas de non-comparution du demandeur ?Selon l’article 468 alinéa 1 du Code de procédure civile, si le demandeur ne comparaît pas sans motif légitime, le défendeur peut demander un jugement sur le fond. Ce jugement sera contradictoire, sauf si le juge décide de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure. Dans le cas présent, l’URSSAF Ile de France, en tant que défenderesse, a demandé le prononcé d’un jugement sur le fond. Ainsi, le tribunal a pu rendre une décision contradictoire, même en l’absence de [U] [F]. Cette règle vise à garantir l’efficacité des procédures judiciaires tout en respectant les droits des parties. Il est donc essentiel pour le demandeur de se présenter ou de justifier son absence pour éviter un jugement par défaut. Quelles sont les obligations d’affiliation au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants ?L’affiliation au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants est régie par les articles L.611-1 et suivants du Code de la sécurité sociale. Ces articles stipulent que les travailleurs indépendants doivent obligatoirement s’affilier à un régime de sécurité sociale. La Caisse nationale du régime social des indépendants, qui a été remplacée par l’URSSAF depuis le 1er janvier 2018, était chargée de cette mission. L’article L.213-1 du Code de la sécurité sociale précise que les unions de recouvrement, comme l’URSSAF, assurent le recouvrement des cotisations dues par les travailleurs indépendants. Ainsi, [U] [F], en tant qu’entrepreneur individuel, est obligatoirement affilié à ce régime, ce qui implique qu’il doit s’acquitter des cotisations sociales correspondantes. Le principe de solidarité nationale, énoncé à l’article L.111-1, garantit la couverture des risques sociaux pour toutes les personnes travaillant ou résidant en France. Quelles sont les conditions de validité d’une mise en demeure par l’URSSAF ?La mise en demeure délivrée par l’URSSAF doit respecter certaines conditions de validité, conformément à l’article L.244-2 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule qu’une action ou poursuite doit être précédée d’un avertissement par lettre recommandée, invitant le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans un délai d’un mois. De plus, l’article R.244-1 précise que la mise en demeure doit indiquer la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, ainsi que les majorations et pénalités applicables. Dans le cas de [U] [F], la mise en demeure du 03 février 2020 a clairement indiqué la nature des cotisations réclamées, la cause de l’obligation et l’étendue de l’obligation de paiement. Ainsi, la mise en demeure est considérée comme valide, et la demande d’annulation de [U] [F] a été jugée mal fondée. Quelles sont les conséquences d’un jugement contradictoire sur les demandes accessoires ?En vertu de l’article 696 du Code de procédure civile, les dépens sont généralement laissés à la charge de la partie perdante. Dans cette affaire, le tribunal a condamné [U] [F] aux dépens de l’instance, ce qui signifie qu’il devra supporter les frais liés à la procédure. De plus, l’article 700 du même code permet au tribunal d’accorder une somme à la partie qui a gagné le procès pour couvrir ses frais d’avocat. Le tribunal a donc condamné [U] [F] à verser 500 € à l’URSSAF Ile de France sur ce fondement. Ces dispositions visent à garantir que la partie qui a raison dans le litige ne soit pas pénalisée financièrement par les frais de justice. Ainsi, les conséquences d’un jugement contradictoire peuvent avoir un impact significatif sur les finances de la partie perdante. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
JUGEMENT N° 24/05020 du 12 Décembre 2024
Numéro de recours: N° RG 20/02646 – N° Portalis DBW3-W-B7E-YA4F
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [U] [F]
né le 19 Novembre 1976 à [Localité 6] (PAS-DE-CALAIS)
[Adresse 1]
[Localité 2]
non comparant, ni représenté
c/ DEFENDERESSE
Organisme URSSAF-DRRTI ILE DE FRANCE
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par Maître Clémence AUBRUN de la SELARL BREU-AUBRUN- GOMBERT ET ASSOCIES, avocats au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
DÉBATS : À l’audience publique du 08 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : PAWLOWSKI Anne-Sophie, Vice-Présidente
Assesseurs : PAULHIAC Olivier
DURAND Patrick
Lors des débats : ELGUER Christine, Greffier
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 12 Décembre 2024
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
Par courrier recommandé avec accusé de réception expédié le 21 octobre 2020, [U] [F] a, par l’intermédiaire de son avocat, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’une demande tendant à l’annulation de la mise en demeure émise le 03 février 2020 à son encontre par l’URSSAF d’un montant de 15 634 € au titre des cotisations et majorations dues pour le 4ème trimestre 2019.
Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée à l’audience du 08 octobre 2024.
[U] [F] régulièrement convoqué par voie de citation n’est ni présent, ni représenté et n’a sollicité aucune dispense de comparution.
Par voie de conclusions déposées par son avocate, l’URSSAF Ile de France demande au tribunal de rendre un jugement sur le fond et de :
– Confirmer l’affiliation obligatoire de [U] [F] au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants ;
– Confirmer la mise en demeure du 14 février 2020 pour un montant de 15 634 € ;
– Débouter [U] [F] de ses prétentions, fins et conclusions ;
– Le condamner, à titre reconventionnel, au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La présente affaire a été mise en délibéré au 12 décembre 2024.
Sur la qualification du jugement
Aux termes des dispositions de l’article 468 alinéa 1 du Code de procédure civile, si, sans motif légitime, le demandeur ne comparaît pas, le défendeur peut requérir un jugement sur le fond qui sera contradictoire, sauf la faculté du juge de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure.
En l’espèce, l’URSSAF Ile de France défenderesse a sollicité le prononcé d’un jugement sur le fond.
Celui-ci sera par conséquent contradictoire.
Sur l’affiliation obligatoire au régime de sécurité sociale des indépendants
La Caisse nationale du régime social des indépendants était régie par les dispositions des articles L.111-1, R.111-1, L.621-1 à L.621-3 du Code de la sécurité sociale et tirait par conséquent son existence juridique de dispositions législatives, stipulant qu’elle est un organisme de droit privé de sécurité sociale, auxquels sont obligatoirement affiliés les travailleurs indépendants et disposant que le régime social des indépendants comprend une caisse nationale et des caisses de base, dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière.
Ces caisses tenaient donc de ces dispositions légales leur capacité juridique et leur qualité à agir dans l’exécution des missions qui leur étaient confiées par les articles L.611-4 et L.611-8 et suivants du Code de la sécurité sociale, parmi lesquelles le recouvrement des cotisations et contributions sociales ainsi que le contrôle et le contentieux du recouvrement des travailleurs indépendants en relevant.
Par suite de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2018 des dispositions de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 et du décret n°2018-174 du 9 mars 2018, les missions antérieurement dévolues aux caisses du régime social des indépendants ont été transférées à l’URSSAF, laquelle tire de l’article L.213-1 dans sa rédaction issue de la loi précitée n°2017-1836 du 30 décembre 2017, une mission générale pour le recouvrement des cotisations sociales et d’allocations familiales et notamment des travailleurs indépendants.
L’URSSAF n’est pas une mutuelle (dont le rôle défini par l’article L.111-1 du Code de la mutualité est complémentaire du régime légal d’assurance maladie et maternité auquel les mutuelles peuvent participer).
Aucune disposition du Traité de Rome ou des Traités modificatifs ne prévoit le transfert de compétence en matière de protection sociale des Etats au profit des institutions européennes et il est de jurisprudence communautaire constante que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des Etats membres pour aménager leur système de sécurité sociale.
Au contraire, l’article 153.4 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne mentionne expressément que les dispositions pouvant être prises par le Parlement européen et le Conseil pour favoriser l’harmonisation des systèmes sociaux ‘ne portent pas atteinte à la faculté reconnue aux Etats membres de définir les principes fondamentaux de leur système de sécurité sociale et ne doivent pas en affecter sensiblement l’équilibre financier’ et ‘ne peuvent empêcher un Etat membre de maintenir ou d’établir des mesures de protection plus strictes compatibles avec les traités’.
La caisse du régime social des indépendants, comme l’URSSAF ne sont pas des mutuelles.
Elles ne sont, ni l’une, ni l’autre, une entreprise au sens du droit de l’Union.
Il s’ensuit que les règles régissant les marchés publics ne lui sont pas applicables.
De même, les règles de concurrence figurant dans le corps du traité et les dispositions des directives relatives aux assurances de personnes (directives n°92-49 CEE du 18 juin 1992, n°92/96 CEE du 10 novembre 1992) sont inapplicables aux organismes de sécurité sociale qui n’exercent pas une activité économique et ne constituent pas une entreprise, l’appelant procédant par confusion en assimilant les organismes de sécurité sociale avec des entreprises d’assurances ou des mutuelles.
La distinction opérée par la jurisprudence communautaire entre le régime professionnel et le régime légal est basée sur la prépondérance dans le premier cas des considérations liées au travailleur et aux circonstances propres à son emploi sur des considérations liées à la politique sociale menée par l’Etat.
La circonstance que le droit français de la sécurité sociale comporte une distinction entre le régime général et des régimes spécifiques à certains secteurs d’activités, ou reconnaissent à certaines caisses une compétence spécifique, en ne leur confiant qu’une partie de la gestion des risques sociaux de sécurité sociale, ne peut être analysée comme instaurant des régimes professionnels de sécurité sociale au sens du droit communautaire, dès lors que le principe est celui de l’affiliation obligatoire dans tous ces régimes pour un même socle de risques.
Ainsi, le fait que la caisse du régime social des indépendants (qui n’existe plus en tant que telle depuis le 1er janvier 2018) ne compte parmi ses adhérents que des travailleurs non salariés exerçant leur activité à titre indépendant, n’implique pas pour autant que le régime de sécurité sociale des professions libérales soit un régime professionnel au sens du droit communautaire.
Il résulte de l’article L.213-1 du Code de la sécurité sociale que les unions de recouvrement assurent le recouvrement des cotisations et des contributions de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants au même titre que celles dues, notamment, par les salariés ou assimilés relevant du régime général et par leurs employeurs, ainsi que par les salariés ou assimilés volontaires des professions libérales.
L’article L.311-2 du même code dispose que sont affiliés obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat.
Le socle de garanties, commun à tous les régimes de sécurité sociale français, repose sur le principe de solidarité nationale posé par l’article L.111-1 du Code de la sécurité sociale qui dispose que la sécurité sociale assure pour toute personne travaillant ou résidant en France de façon stable et régulière, la couverture des charges de maladie, de maternité et de paternité ainsi que les charges de famille et garantit les travailleurs contre les risques de toute nature susceptible de réduire ou de supprimer leurs revenus par l’affiliation des intéressés à un ou plusieurs régimes obligatoires.
Il s’ensuit que la Caisse nationale du régime social des indépendants, comme ses caisses de base, et comme les unions de recouvrement, ne sont pas des entreprises, et que les règles régissant les marchés publics ne leur sont pas davantage applicables.
[U] [F] qui exerce depuis le 27 octobre 2015 une activité d’entrepreneur individuel est effectivement obligatoirement affilié au régime social des indépendants en application des articles L.611-1 et suivants du Code de la sécurité sociale et l’URSSAF est désormais en charge du recouvrement des cotisations dues à ce titre.
Sur la validité de la mise en demeure délivrée le 03 février 2020 par l’URSSAF
L’article L 244-2 du Code de la sécurité sociale dispose que : « Toute action ou poursuite effectuée en application de l’article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d’un avertissement par lettre recommandée de l’autorité compétente de l’Etat invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois ».
L’article R 244-1 du même code précise en son alinéa 1er que « L’avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ».
En l’espèce, il est manifeste à l’examen de la mise en demeure délivrée le 03 février 2020 que celle-ci indique la nature des cotisations réclamées (maladie, IJ, vieillesse, CSG-CRDS-formation professionnelle), la cause de l’obligation (cotisations et contributions obligatoires et l’étendue de l’obligation de l’assuré, à savoir le paiement des cotisations et contributions obligatoires dont il est personnellement redevable envers la sécurité sociale des indépendants au titre des cotisations du 4ème trimestre 2019.
Il y a donc lieu de débouter [U] [F] de sa demande tendant à l’annulation de la mise en demeure délivrée le 03 février 2020 et de déclarer mal-fondé le recours introduit par lui.
Sur les demandes accessoires
En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, les dépens seront laissés à la charge de [U] [F].
L’issue du litige justifie de condamner [U] [F] au paiement d’une somme de 500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,
DÉCLARE mal fondé le recours introduit par [U] [F] ;
CONFIRME l’affiliation obligatoire de [U] [F] au régime de sécurité sociale des travailleurs indépendants ;
CONDAMNE [U] [F] aux dépens de l’instance ;
CONDAMNE [U] [F] à verser à l’URSSAF Ile de France une somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
DIT que tout appel de la présente décision doit être formé, sous peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification, conformément aux dispositions de l’article 538 du Code de procédure civile.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024.
Notifié le :
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE