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16 mai 2023
Cour d’appel d’Angers
RG n°
19/00716
COUR D’APPEL
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
LE/IM
ARRET N°
AFFAIRE N° RG 19/00716 – N° Portalis DBVP-V-B7D-EPQ5
Jugement du 11 Septembre 2018
Tribunal de Grande Instance du mans
n° d’inscription au RG de première instance : 17/00327
ARRET DU 16 MAI 2023
APPELANT :
Monsieur [V] [R]
né le 27 Avril 1937 à LE BAILLEUL (72)
[Adresse 7]
[Localité 6]
Représenté par Me Jean-yves BENOIST de la SCP HAUTEMAINE AVOCATS, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 20161831
INTIMEE :
SAS CADRES BLANCS AFFICHEURS (CBA) venant aux droits de la SOCIÉTÉ ORNAISE DE PUBLICITÉ ET D’AFFICHAGE (SOPA) prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Inès RUBINEL, en qualité d’administratrice provisoire de Me Benoît GEORGE, associé de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau d’ANGERS
INTIMEE SUR REPORT D’APPEL
SARL OXIAL prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Anne sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Antoine CARPENTIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue publiquement, à l’audience du 31 Janvier 2023 à 14 H 00, Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Mme GANDAIS, conseillère
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 16 mai 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseiller faisant fonction de présidente et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
~~~~
FAITS ET PROCÉDURE
M. [R] est propriétaire d’une parcelle située [Adresse 1].
Par acte sous seing privé (contrat n°73239918116A) du 11 février 1997, il a consenti à la société Lecomte Publicité la location de son terrain pour une durée de 6 années à compter du 15 février 1997 afin d’y installer un panneau publicitaire d’une face de 3×4 mètres, moyennant une redevance annuelle de 2.500 francs.
Aux termes d’un acte sous seing privé (contrat n°73239918116B) du même jour, il a consenti à la même société la location de son terrain pour une durée de 6 années à compter du 12 septembre 1997 afin d’y installer un panneau publicitaire d’une face de 3×4 mètres, moyennant une redevance annuelle de 2.700 francs.
Ces deux contrats ont été remplacés par deux nouveaux contrats portant les mêmes numéros signés le 26 novembre 2002, pour une durée de 6 ans, prévoyant chacun une redevance annuelle de 488 euros.
Le contrat n°73239918116A a été remplacé par une nouvelle convention signée le 28 juillet 2003, portant sur l’installation d’un panneau publicitaire ‘Trivision’, pour une durée de 6 ans, moyennant une redevance annuelle de 1.000 euros.
Ce contrat a été remplacé à son tour par un contrat signé le 5 décembre 2006, pour une durée de 6 ans, portant la redevance à 2.000 euros par an.
La société Lecomte Publicité est devenue la Société Ornaise de Publicité et d’Affichage (SOPA).
Par acte sous seing privé du 3 octobre 2013, M. [R] a consenti à la SOPA la location de son terrain pour une durée de 6 années à compter du 15 mai 2013 pour y installer un panneau publicitaire trivision de 3×4 mètres, moyennant une redevance annuelle de 2.787,83 euros, en remplacement du contrat consenti le 5 décembre 2006.
Suivant acte sous seing privé du 3 octobre 2013, il a consenti à la même société la location de son terrain pour une durée de 6 années à compter du 1er septembre 2013 pour y installer un panneau publicitaire d’une face de 3×4 mètres, moyennant une redevance annuelle de 668,92 euros, en remplacement du contrat consenti le 26 novembre 2002.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 20 mai 2015, M. [R] a notifié à la société Cadres Blancs Afficheurs (CBA) venant aux droits de la SOPA, la résiliation des contrats à effet trois mois après la réception de la lettre et a invité cette société à libérer les lieux à l’échéance.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 2 juillet 2015, M. [R] a mis la société CBA en demeure de régler dans les meilleurs délais les sommes dues.
Suivant courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 3 novembre 2015, il a mis la société CBA en demeure de lui restituer les lieux dans leur état initial, en rappelant la résiliation des baux intervenue à l’issue du délai de préavis de 3 mois, dénoncée par lettre du 20 mai 2015.
Faisant valoir que son cocontractant ne pouvait valablement résilier les contrats avant le terme contractuellement prévu et qu’elle avait constaté la présence en novembre 2015, sur le terrain de M. [R], d’un panneau publicitaire d’un concurrent installé devant son panneau trivision, la société CBA a, par exploits des 10 et 15 novembre 2016, fait assigner M. [R] et la société Oxial, devant le tribunal de grande instance du Mans, aux fins de les voir condamnés sur le fondement des articles 1134 et 1382 du Code civil à l’indemniser des préjudices subis pour non exécution de bonne foi des conventions et pratiques déloyales.
Suivant jugement du 11 septembre 2018, le tribunal de grande instance du Mans a :
– rejeté la demande de nullité des conventions signées le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la SOPA aux droits de laquelle vient la société CBA,
– dit que l’article 3.4 des contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la société CBA ne constitue pas une clause abusive,
– rejeté la demande tendant à voir constater la résiliation de plein droit des contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la société CBA,
– débouté la demande tenant à voir prononcer la résiliation des contrats signés le 3 octobre 2013 aux torts de la société CBA,
– dit que les contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la société CBA sont résiliés aux torts exclusifs de M. [R] au 15 novembre 2015,
– rejeté la demande de condamnation de la société CBA à remettre les emplacements loués dans leur état antérieur et dit que les frais de cette remise en état resteront à la charge de M. [R],
– dit que l’article 4.5 des contrats signés le 3 octobre 2013 ne constitue pas une clause abusive,
– condamné M. [R] à payer à la société CBA la somme de 15.000 euros en application de l’article 4.5 des contrats signés le 3 octobre 2013,
– débouté la société CBA du surplus de ses demandes indemnitaires formées à l’encontre de M. [R],
– rejeté l’exception d’irrecevabilité des demandes formées par la société CBA à l’encontre de la société Oxial, tiré du défaut d’intérêt à agir de la société CBA,
– débouté la société CBA de ses demandes indemnitaires formées à l’encontre de la société Oxial,
– rejeté la demande d’exécution provisoire,
– débouté M. [R] et la société Oxial de leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamné M. [R] à payer à la société CBA la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamné M. [R] aux dépens, dont distraction au profit de Me Forget,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration reçue au greffe le 12 avril 2019, M. [R] a relevé appel à l’égard de la SAS CBA du jugement rendu le 11 septembre 2018 par le tribunal du Mans, en toutes ses dispositions à l’exception de celles portant sur les prétentions formées par la société CBA à l’encontre de la SARL Oxial ainsi que celle relative à l’exécution provisoire.
Par conclusions déposées le 8 octobre 2019 et exploit du 9 octobre 2019, la SAS CBA a fait assigner, en appel provoqué, la société Oxial et a formé appel incident.
Suivant conclusions déposées le 8 janvier 2020, SARL Oxial a formé appel incident.
Une ordonnance du 19 octobre 2022 a clôturé l’instruction de l’affaire qui a finalement été retenue à l’audience du 31 janvier 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 6 janvier 2020, M. [R] demande au visa des articles L.121-21 à L.121-26 ainsi que L.121-16 et suivants du Code de la consommation, dans leur version applicable au 3 octobre 2013, de l’article L.581-25 du Code de l’environnement, de l’article 1371 du Code civil, applicable aux contrats conclus antérieurement au 1er octobre 2016 et de l’article 700 du Code de procédure civile, à la présente juridiction de :
– le dire et juger recevable et bien fondé en son appel et y faire droit,
– infirmer le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 11 septembre 2018 rejetant la demande de nullité des conventions signées le 3 octobre 2013 entre lui et la société SOPA, devenue la société CBA,
– statuant à nouveau de ce chef, prononcer la nullité des contrats n°19728 et n°19729 conclus le 3 octobre 2013 entre lui et la société SOPA, devenue la société CBA, aux torts de ladite société,
A titre subsidiaire :
– infirmer le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 11 septembre 2018 en ce qu’il :
* a dit et jugé que les articles 3.4 et 4.5 des conventions signées le 3 octobre 2013 entre lui et la société SOPA ne constituaient pas des clauses abusives,
* l’a débouté de sa demande tendant à voir constater la résiliation de plein droit des contrats signés le 3 octobre 2013 aux torts de la société CBA,
* a considéré que la résiliation desdits contrats le devait être à ses torts exclusifs au 15 novembre 2015,
* l’a condamné à verser à la société CBA la somme de 15.000 euros en application de l’article 4.5 desdites conventions,
Statuant à nouveau de ces chefs :
– dire et juger réputées non-écrites comme abusives les clauses contenue dans les articles 3.4 et 4.5 desdits contrats,
– constater la résiliation de plein droit des contrats n°19728 et n°19729 conclus le 3 octobre 2013 aux torts de la société CBA,
– rejeter la demande d’indemnité sollicitée par la société CBA sur le fondement contractuel, très subsidiairement la réduire dans les plus larges proportions,
En tout état de cause :
– infirmer le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 11 septembre 2018 rejetant sa demande visant à la condamnation de la société CBA à remettre les emplacements loués dans leur état antérieur, considérant que les frais de cette remise en état resteront à sa charge et le déboutant de ses autres demandes,
– statuant à nouveau de ce chef, condamner la société CBA à reprendre le matériel d’affichage publicitaire se trouvant sur son terrain et à remettre les lieux en état sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du présent arrêt, ainsi qu’à la dépose du panneau publicitaire sous astreinte de 50 euros par jour de retard commençant à courir à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter du présent arrêt,
– dire et juger en toute hypothèse qu’il n’y a pas lieu de le condamner à la restitution des loyers perçus, et rejeter en conséquence toutes prétentions de la SAS CBA de ce chef,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté sa demande à hauteur de 1.000 euros formée à l’encontre de la SAS CBA sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,
– condamner la société CBA à lui verser une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 pour les frais irrépétibles de première instance, et pour les frais irrépétibles en cause d’appel la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la société CBA aux entiers dépens de première instance et d’appel,
Vu la régularisation de la procédure par la société CBA à l’encontre d’Oxial et la constitution d’un avocat régularisée par Oxial :
– lui donner acte de la signification de ses conclusions au conseil d’Oxial,
– déclarer ses conclusions opposables à la société Oxial.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 10 avril 2020, la SAS Cadres Blancs Afficheurs demande à la présente juridiction, au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil en leurs versions applicables aux contrats conclus antérieurement au 1er octobre 2016, de l’article 1382 du Code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016, des dispositions des articles L.121-1, L.121-23, L.111-1, L.121-22- 4° du Code de la consommation, des articles 56 et 31 du Code de procédure civile, de :
– déclarer l’appel principal mal fondé et le rejeter,
– déclarer l’appel incident de la société Oxial non fondé et le rejeter,
– confirmer le jugement du 11 septembre 2018 en ce qu’il a :
* rejeté la demande de nullité des conventions signées le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la société SOPA aux droits de laquelle elle vient,
* dit que l’article 3.4 des contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et elle ne constitue pas une clause abusive,
* rejeté la demande tendant à voir constater la résiliation de plein droit des contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et elle,
* débouté la demande tenant à voir prononcer la résiliation des contrats signés le 3 octobre 2013 à ses torts,
* dit que les contrats signés le 3 octobre 2013 entre M. [R] et elle sont résiliés aux torts exclusifs de M. [R] au 15 novembre 2015,
* rejeté la demande tendant à sa condamnation à remettre les emplacements loués dans leur état antérieur et dit que les frais de cette remise en état resteront à la charge de M. [R],
* dit que l’article 4.5 des contrats signés le 3 octobre 2013 ne constitue pas une clause abusive,
* condamné M. [R] à lui payer une indemnité en application de l’article 4.5 des contrats signés le 3 octobre 2013,
* rejeté l’exception d’irrecevabilité de ses demandes formées à l’encontre de la société Oxial, tiré de son défaut d’intérêt à agir,
* débouté M. [R] et la société Oxial de leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
* condamné M. [R] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
* condamné M. [R] aux dépens, dont distraction au profit de Me Forget,
Sur ses appels incident et provoqué :
– réformer le jugement entrepris qui :
* a condamné M. [R] à lui payer à titre d’indemnité en application de l’article 4.5 des contrats signés le 3 octobre 2013 la somme de 15.000 euros au lieu des 28.923,73 euros demandés,
* l’a déboutée du surplus de ses demandes indemnitaires formées à l’encontre de M. [R] et déboutée de ses demandes indemnitaires formées à l’encontre de la société Oxial,
Statuant à nouveau :
– constater que M. [R] n’a pas respecté ses obligations contractuelles nées des contrats du 3 octobre 2013,
– dire et juger que la résiliation unilatérale des contrats de location du 3 octobre 2013 est abusive
– dire et juger que la société Oxial a détourné les contrats de location consentis par M. [R],
– dire et juger que la société Oxial a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme économique à son préjudice,
En conséquence :
– rejeter l’exception de nullité des contrats du 3 octobre 2013 irrecevable, injustifiée et mal fondée,
– rejeter l’exception d’irrecevabilité pour défaut d’intérêt pour agir présentée par la société Oxial, irrecevable, injustifiée et mal fondée,
– débouter M. [R] et la société Oxial de leurs demandes, fins et conclusions reconventionnelles à son encontre,
– condamner M. [R] à lui payer la somme de 28.923,73 euros à titre d’indemnité contractuelle par application de la clause indemnitaire figurant à l’article 5.5 des contrats du 3 octobre 2013,
– condamner in solidum M. [R] et la société Oxial à lui régler la somme de 23.796,50 euros au titre de la perte financière consécutive au comportement dolosif dont elle a été victime,
– condamner la société Oxial à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de réparation du préjudice moral consécutif à la voie de fait et de nuisance délibérée d’une particulière violence dont elle a été victime,
– condamner in solidum les succombants à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, pour les frais irrépétibles de 1ère instance et 3.000 euros pour les frais irrépétibles d’appel,
– condamner in solidum les succombants aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel, ceux d’appel avec distraction au profit de Me George qui y a pourvu.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 2 janvier 2020, la SARL Oxial demande à la cour, au visa des articles 31 et 122 du Code de procédure civile, L.581-24 et L.581-25 du Code de l’environnement et L.121-21 et suivants du Code de la consommation, de :
– juger que le contrat de bail conclu le 3 octobre 2013 entre M. [R] et la société CBA est nul,
– dans l’hypothèse où ce contrat ne serait pas nul, juger que ce contrat a été résilié de plein droit,
– infirmer le jugement entrepris en conséquence et déclarer la société CBA irrecevable dans son action,
A titre subsidiaire :
– confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a considéré que la société CBA n’apportait pas la preuve d’agissements fautifs de sa part en lien avec les préjudices financier et moral allégués et ainsi débouté la société CBA de ses demandes indemnitaires formées à son encontre,
– constater, en toute hypothèse, que la société CBA n’établit pas la preuve d’un quelconque préjudice,
– débouter, en conséquence, la société CBA de toutes ses fins et demandes comme étant irrecevables et mal fondées,
– condamner la société CBA à lui verser une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la société CBA aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus mentionnées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la validité des contrats conclus le 3 octobre 2013
En droit, l’article L 121-21 du Code de la consommation en son premier alinéa et en sa version antérieure à l’année 2014, dispose que : ‘Est soumis aux dispositions de la présente section quiconque pratique ou fait pratiquer le démarchage, au domicile d’une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l’achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d’achat de biens ou la fourniture de services’.
Par ailleurs, l’article L 121-18 de ce même code en sa version applicable avant juin 2014, prévoit notamment que : ‘Sans préjudice des informations prévues par les articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 113-3 ainsi que de celles prévues pour l’application de l’article L. 214-1, l’offre de contrat doit comporter les informations suivantes :
(…)
3° Les modalités de paiement, de livraison ou d’exécution’.
Le premier juge a souligné qu’il n’était pas établi par le demandeur qu’il avait été démarché à son domicile aux fins d’implantation des panneaux publicitaires, alors même qu’il avait déjà conclu plusieurs contrats avec la SOPA portant sur la location du fonds lui appartenant et ayant la même finalité. De plus il a été souligné que l’examen des correspondances produites aux débats, établissait que la conclusion des contrats était intervenue après discussions notamment sur le montant du loyer et non à l’occasion du déplacement d’un représentant de la SOPA. Dans ces conditions, il a été considéré que le demandeur n’était pas fondé à invoquer les dispositions du Code de la consommation s’agissant du démarchage à domicile. Par ailleurs, il a été constaté que si les dispositions de l’article L 581-25 du Code de l’environnement étaient invoquées, il n’était cependant pas soutenu que les contrats litigieux ne respecteraient pas les exigences de ce texte. Dans ces conditions, la demande d’annulation a été rejetée.
Aux termes de ses dernières écritures l’appelant indique que les premiers contrats régularisés entre lui et la société devenue CBA courant 1997, l’ont été en suite d’un démarchage de cette entreprise. Dans ces conditions, il soutient que ces conventions étaient soumises aux dispositions des articles L 121-21 à -23 du Code de la consommation, quand bien même ce démarchage n’ait pas eu lieu à son domicile. A défaut, il sollicite l’application des dispositions des articles L 121-16 et suivants de ce même code relatifs aux contrats conclus à distance. Sur le premier fondement, il affirme ‘que la relation contractuelle établie en 1997 entre [lui] et la société [devenue CBA], a ensuite été maintenue grâce au renouvellement de leurs engagements quant à la location d’emplacement publicitaire sur [son] terrain. Les contrats du 3 octobre 2013 s’inscrivent dans la continuité des relations contractuelles établies depuis 1997. Ainsi, [il] a continué de bénéficier des dispositions protectrices du Code de la consommation, les parties et l’objet des contrats étant identiques depuis 1997 et la même relation contractuelle ayant été reconduite jusqu’à aujourd’hui’. Au surplus, il indique que les parties ont conventionnellement soumis ces contrats au Code de la consommation, dès lors qu’il y est prévu une possibilité de rétractation par formulaire conformément aux dispositions de ce code. Sur le fond de ses demandes, l’appelant soutient qu’en contradiction avec les dispositions de l’article L 121-23 du Code de la consommation, les contrats du mois d’octobre 2013 ne présentent pas le texte des articles L 121-23 à -26 de ce même code et ne l’informent pas sur les modalités d’exercice de son droit de rétractation. Subsidiairement si ces dispositions du Code de la consommation ne devaient pas être considérées comme applicables, l’appelant affirme que ces contrats ne respectent pas les dispositions de l’article L 121-18 du Code de la consommation en ce qu’ils ne prévoient pas leurs conditions d’exécution (délai, marque du matériel, modalités de changement des affiches).
Aux termes de ses dernières écritures, l’intimée locataire initiale indique que ses contradicteurs qui affirment que les contrats de 2013 auraient été conclus dans le cadre d’un démarchage à domicile ne le démontrent aucunement. En tout état de cause, elle rappelle que le seul déplacement d’un professionnel au domicile du consommateur aux fins de prise de mesures nécessaires à l’établissement d’un devis postérieurement adressé par voie postale ne constitue pas un démarchage, faute de souscription d’un engagement contractuel lors de ce déplacement. Or, elle souligne que son courrier du 3 octobre 2013, démontre que les contrats n’ont pas été régularisés lors d’un démarchage voire même lors d’un déplacement quelconque d’un professionnel. Par ailleurs, elle souligne que les dispositions du Code de la consommation relatives à la vente à distance et notamment l’article L 121-16 ont été abrogées par la loi dite Hamon. De plus, elle précise qu’elle n’a pas proposé cette ‘vente’, dès lors qu’elle pouvait bénéficier de la tacite reconduction visée aux stipulations contractuelles en cours, son cocontractant ayant pris l’initiative de cette négociation qui a aboutit à une modification du prix passant à 2.787,83 euros et payable non plus à terme échu mais à échoir. Par ailleurs, elle précise que la modification du Code de la consommation et notamment de l’article L 221-1 de ce code, est venue préciser ce qui était entendu par le législateur par ‘contrat à distance’, soit une convention régularisée ‘dans le cadre d’un système organisé de ventes ou de prestations de services à distance’. S’agissant de l’argumentaire tiré de la succession des conventions, l’intimée souligne qu’il n’est pas établi que les contrats de 1997 aient été régularisés dans le cadre d’un démarchage et en tout état de cause, elle souligne que les conventions litigieuses ne constituent pas des avenants mais précisent expressément annuler les précédentes. Subsidiairement, l’intimée indique que le consommateur légalement protégé est celui qui achète un bien ou une prestation, or en l’espèce, l’appelant est celui qui a vendu un usage de son terrain. Enfin, elle observe que le fonds litigieux n’est pas le domicile de l’appelant qui, de ce fait, ne démontre pas sa qualité de consommateur, dès lors qu’il ‘fait profession au sens de l’article L 212-22 de cette location de biens immobiliers puisqu’il en tire des revenus’.
Aux termes de ses dernières écritures, la société nouvellement locataire soutient qu”il est aujourd’hui de jurisprudence parfaitement établie que le démarchage d’une entreprise de publicité extérieure au domicile d’un propriétaire aux fins de lui proposer de donner à bail un emplacement afin d’y apposer un panneau publicitaire constitue un démarchage en vue de la location d’un bien visé par l’article L 121-21 du Code de la consommation’. L’intimée sur appel provoqué indique donc que les conventions de 2013, qui ne reprennent pas les termes des articles L 121-23 à -26 du Code de la consommation, encourent la nullité par application des dispositions du premier article visé.
Sur ce :
Il est constant que pour se voir appliquer les prévisions du Code de la consommation relatives au démarchage ci-dessus partiellement reprises, la convention, dont il est soutenu qu’elle est soumise à ces dispositions consuméristes, doit avoir été acceptée au domicile (résidence, lieu de travail…) du consommateur et en présence du professionnel.
Or en l’espèce, l’appelant communique aux débats un courrier qui lui a été adressé par la société devenue CBA, le 3 octobre 2013, précisant : ‘nous accusons réception de votre courrier du 02/08/2013 et regrettons vivement votre refus à notre proposition de baisse de loyer.
De ce qui précède, nous maintenons donc les conditions actuelles de nos contrats.
De ce fait, nous vous remercions de bien vouloir nous retourner les deux premiers exemplaires de chaque contrat, datés et signés au dos pour accord, dans l’enveloppe préaffranchie prévue à cet effet et de conserver le troisième exemplaire (…)’.
Il résulte de ces termes que les conventions de 2013 n’ont pas été régularisées en présence du professionnel.
Par ailleurs, s’agissant de la régularisation des conventions initiales (1997) dans le cadre d’un démarchage au sens consumériste impliquant, des conventions subséquentes, un respect des dispositions protectrices du consommateur, outre qu’il ne peut être appliqué aux contrats non régularisés dans le cadre d’un démarchage à domicile (résidence, etc…) et ne s’y soumettant pas volontairement, les dispositions des articles L 121-21 et suivants du Code de la consommation, il doit être souligné qu’il ne résulte aucunement des termes des contrats de 1997 qu’ils aient été régularisés dans un tel cadre.
Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a considéré que les conventions de 2013 n’étaient pas soumises aux dispositions du Code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
S’agissant des dispositions de ce code relatives aux contrats conclus à distance, il doit être souligné que l’appelant fait grief à la convention de 2013 de ne pas mentionner le délai d’installation du panneau ainsi que la date de mise en fonction de cet équipement pas plus que la marque du matériel entrepris et les conditions d’intervention du preneur.
Cependant il doit être souligné que courant 2013, il a été régularisé entre les parties des conventions portant ‘engagement locatif’ relatives à un terrain et non pas un contrat de vente voire même de location de matériel publicitaire.
Au surplus, il doit être souligné que l’appelant n’a aucunement commandé de panneaux publicitaires ou de prestation quelconque à ce titre.
Ainsi, les caractéristiques de l’équipement voire même de sa mise en fonction sont indifférentes. Par ailleurs, les conditions d’intervention du professionnel sur le terrain sont précisées, dès lors qu’il est prévu que le bailleur ‘s’engage à donner libre accès (…) sur le terrain (…) au personnel’.
Dans ces conditions et s’agissant d’un contrat au sein duquel l’appelant n’a commandé aucun bien ou prestation, son argumentaire fondé sur les dispositions des articles L 212-18 du Code de la consommation ne peut être accueilli.
Enfin, s’agissant de la soumission volontaire des contrats au Code de la consommation, par l’insertion d’un bordereau de rétractation, il ne peut qu’être constaté que l’appelant ne précise aucunement quelles seraient les dispositions de ce code qui seraient, dans ces conditions, applicables étant souligné que ce formulaire détachable ne précise aucunement la norme à laquelle il se rapporte.
De l’ensemble, il résulte que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes en annulation des conventions du mois d’octobre 2013.
Sur la résiliation des conventions du 3 octobre 2013
Le premier juge a rappelé que ces deux conventions avaient été régularisées avec effet aux 15 mai et 1er septembre 2015 (sic), en prévoyant faute de dénonciation par LRAR au moins trois mois avant leurs termes, un renouvellement par tacite reconduction pour des périodes d’un an. A ce titre, il a été constaté que ces durées et conditions de renouvellement étaient conformes aux prévisions de l’article L 581-25 du Code de l’environnement. Par ailleurs, s’agissant du courrier adressé par le demandeur le 20 mai 2015, et faisant, selon ce dernier, courir le délai de trois mois, il a été souligné que cette notification intervient en cours de contrat et bien avant le terme prévu. En outre, il a été retenu que les articles 3.4 des deux conventions, argués de clauses abusives, prévoyant qu’à défaut de paiement des loyers et après vaine mise en demeure, le contrat est résilié de plein droit passé un délai d’un mois, n’interdisent aucunement au bailleur de solliciter la résiliation de ces conventions pour d’autres manquements du locataire à ses obligations. De plus, il a été souligné que ces types de clauses ne sont pas présumés abusifs par l’article R132-1 du Code de la consommation et sont conformes aux dispositions de l’article L 581-25 du Code de l’environnement, de sorte qu’elles ont été considérées comme opposables aux parties. Dans ces conditions, au regard d’une lettre de résiliation intervenant hors des délais contractuellement fixés ; sans énoncer de motif de résiliation ; d’un courrier de mise en demeure du 2 juillet 2015, ne visant aucunement la clause résolutoire, ne comportant pas de décompte ou de délai pour régulariser les impayés et valant donc d’autant moins mise en demeure conforme à l’article 3.4, que les seules sommes visées ont été réglées par la société CBA et enfin d’une absence de démonstration par le demandeur de manquement à une obligation contractuelle revêtant un caractère de gravité suffisant, les demandes en résiliation des conventions aux torts du locataire ont été rejetées.
Parallèlement le premier juge constatant :
– que le locataire renonçait à l’exécution forcée des conventions, pour les périodes restant à courir à compter du mois de novembre 2015 ;
– que parallèlement et le 26 mai 2015, le propriétaire avait conclu une nouvelle convention avec une société tierce pour l’implantation d’un panneau numérique double face qui a été mis en place courant novembre 2015, alors même qu’il ne pouvait ignorer que les conventions précédemment conclues comportaient une clause d’exclusivité et qu’il se trouvait d’ores et déjà en conflit avec la société CBA s’agissant de la résiliation de ces contrats ;
– que le bailleur avait, après avoir irrégulièrement et unilatéralement dénoncé les contrats, et à compter du mois de novembre 2015, refusé les paiements adressés par la société CBA ;
a considéré que le demandeur avait manqué à ses obligations contractuelles dans des conditions justifiant du prononcé de la résiliation de ces conventions à ses torts exclusifs et cela à compter du 15 novembre 2015. Dans ces conditions, les sanctions visées aux articles 4.5 des conventions, qui n’ont pas été considérés comme des clauses abusives en ce qu’ils visent uniquement à s’appliquer en cas de manquement d’une gravité suffisante du bailleur, ont été retenues comme devant s’appliquer pour la période allant du 15 novembre 2015 au 15 mai 2019, mais devaient être modérées en application de l’article 1152 du Code civil (s’agissant d’une ‘indemnité forfaitaire’) de sorte que le bailleur a été condamné au paiement d’une somme de 15.000 euros à ce titre, au regard des gains justifiés par la société CBA. Enfin, il a été considéré qu’il n’était pas démontré l’existence d’un préjudice financier distinct ni du préjudice moral invoqué de sorte que ces prétentions ont été rejetées.
Aux termes de ses dernières écritures l’appelant rappelle que depuis 2008 il a été instauré une liste des clauses abusives et ‘parmi elles, la liste grise relative aux clauses présumées abusives fait mention de clauses imposant au consommateur qui n’exécute pas ses obligations une indemnité d’un montant manifestement disproportionné’. Or il souligne que l’application combinée des articles 3.4 (non paiement du loyer) et 4.5 (sanction de la privation de jouissance du bien loué) conduit à considérer qu’en dehors du cas d’impayé locatif, ‘le bailleur ne peut résilier la convention, sauf pour lui à verser au locataire l’indemnité forfaitaire’, ce qui induit un déséquilibre significatif entre les parties aux contrats. Il conclut donc au caractère non-écrit de l’article 4.5 des conventions.
Par suite, l’appelant indique qu’au regard du caractère abusif de cette dernière clause, il pouvait résilier les contrats sans être redevable de l’indemnité forfaitaire. Subsidiairement, l’appelant souligne qu’au regard du procès-verbal de constat produit, seule la visibilité d’une façade (sur deux) du panneau est gênée par la présence du nouveau panneau. Il en déduit donc qu’en contradiction avec l’article 4.5 la privation de jouissance n’est ni totale ni définitive. Plus subsidiairement, il sollicite la réduction du montant considéré comme excessif de cette clause pénale, mais également de tenir compte d’une période non pas de plus de 41 mois comme prévu par sa contradictrice mais 11,5 mois (entre le 4 décembre 2015, jour d’intervention de l’huissier et la présente assignation).
Concernant la résiliation des conventions, l’appelant indique avoir, dès avant les conventions de 2013 rencontré des difficultés dans la perception des redevances qui lui étaient dues, sa contractante souhaitant par ailleurs la réduction de leur montant. De plus et entre les 15 mai 2015 et 14 mai 2016, il soutient que sa contradictrice n’a pas respecté ses obligations de paiement dans les délais prévus. Il précise qu’en suite d’un entretien téléphonique avec un préposé de la société intimée, l’informant que cette dernière ne se trouvait pas en capacité d’honorer ses paiements, il a décidé de résilier les contrats du mois d’octobre 2013 par LRAR du 20 mai 2015. Par la suite et suivant courrier du mois juin suivant il a adressé une mise en demeure à la locataire qui n’a versé la somme de 696,96 euros que le 10 juillet suivant et le même montant le 29 de ce même mois. Il souligne que le montant total aurait dû être versé dès le 15 mai 2015 et au plus tard dans le mois suivant sa mise en demeure du 20 mai. Il en déduit donc que sa cocontractante n’a pas respecté son obligation de payer les loyers dans les délais, de sorte que ‘les contrats se trouvent (…) résiliés de plein droit aux termes de l’article 3.4 desdits contrats’.
De plus, et en application des dispositions anciennes de l’article 1184 du Code civil, il rappelle que l’intimée n’a pas respecté ses obligations de paiement, en faisant montre à ce titre de mauvaise foi, dès lors qu’il s’agissait de faire pression sur lui pour obtenir une diminution du montant des loyers. De plus, il précise que si ces redevances ne constituent pas l’essentiel de ses ressources, elles demeurent un complément à sa retraite, de sorte qu’il a subi un préjudice du fait des retards de paiement. Il en conclut donc que l’intimée n’a pas respecté les délais d’exécution de ses obligations et cela de mauvaise foi, ce qui caractérise une gravité justifiant du prononcé de la résiliation des conventions aux torts exclusifs de l’intimée.
Aux termes de ses dernières écritures, l’intimée principale rappelle que toutes les conventions régularisées entre les parties depuis 1997 prévoyaient que ‘le bailleur [lui] donnait à bail en exclusivité la totalité des lieux’, l’ensemble de ces contrats faisant par ailleurs état d’une durée de six années, tacitement reconductible pour des périodes annuelles sauf dénonciation trois mois avant leurs termes. Or, elle observe que plus de trois ans avant l’expiration des conventions 2013, son cocontractant a unilatéralement décidé d’y mettre un terme et faisant diligence à ce titre en permettant à un concurrent d’installer ses propres équipements masquant son panneau trois faces, de sorte qu’il ‘a rompu de manière brutale prématurée et abusive les contrats du 3 octobre 2013 et qu’il en doit des comptes’.
S’agissant des arguments développés par l’appelant, l’intimée souligne que le courrier portant résiliation du 20 mai a été adressé avant que quelque somme ne soit due mais surtout ne visait aucun motif et au demeurant le courrier postérieur sollicitant les paiements, ne fait état d’aucun montant et n’a été précédé d’aucun appel de fonds sous quelque forme que ce soit (le paiement demeurant quérable même s’il doit intervenir par terme à échoir). En tout état de cause elle indique avoir versé les montants dus pour le semestre courant jusqu’au 14 août 2015 en février 2015, de sorte qu’elle s’est acquittée le 2 juillet d’un trimestre, montant complété par la suite de sorte qu’elle indique avoir non seulement respecté le paiement des sommes dues mais également les modalités de leur versement.
Concernant ses propres demandes, l’intimée souligne que l’appelant, qui a permis l’installation d’un panneau publicitaire appartenant à un concurrent, alors même qu’elle avait versé les loyers dus jusqu’au mois de février 2016, ‘a incontestablement commis une faute dolosive puisqu’il a volontairement et délibérément, malgré les échanges, les paiements… violé la durée des contrats, méconnaissant en outre l’article 1.3 desdits contrats’ (priorité accordée en cas d’offre plus intéressante de la part d’un concurrent). Elle soutient donc avoir subi un préjudice du fait du comportement de son cocontractant de sorte que ce dernier se doit de respecter les termes de l’article 4.5 des conventions. A ce titre elle rappelle être privée de l’exploitation de son panneau trois faces depuis novembre 2015, alors qu’elle devait pouvoir en jouir jusqu’au 14 mai 2019, soit 41,5 mois x 2.787,83 € x 3 (indemnité forfaitaire) = 28.923,73 euros. S’agissant de la réduction du montant de cette clause, l’intimée souligne que la durée à prendre en considération est toute sa période de jouissance et que le fait que l’intégralité du panneau ne soit pas masquée n’est pas un argument valable alors même que l’existence d’un panneau concurrent constitue ‘une infraction à la clause d’exclusivité de location de terrain avec droit de préférence’. Elle conclut donc à l’infirmation de la décision de première instance s’agissant du montant de la sanction prononcée.
Aux termes de ses dernières écritures, l’intimée sur appel provoqué indique que les conventions litigieuses ont été résiliées de plein droit par application du 3ème alinéa de l’article L 581-25 du Code de l’environnement, pour défaut de paiement des loyers après vaine mise en demeure. A ce titre, elle soutient que l’intimée principale ‘n’a pas versé à [l’appelant] les loyers qu’elle lui devait au titre du 1er semestre de la 3ème année de contrat et qu’elle ne s’est pas exécutée dans le délai d’un mois suivant mise en demeure que lui a adressée ce dernier’. Ainsi, elle observe qu’en application des termes des contrats, au 15 mai 2015, la locataire devait verser une somme de l’ordre de 1.400 euros, le même montant devant être versé pour le semestre suivant pour le 15 novembre de la même année, le premier paiement n’étant pas justifié dans son intégralité dès lors qu’après mise en demeure seul 25% du loyer a été versé (moins de 700 euros). L’intimée en conclut donc que par application de l’article L 581-25 du Code de l’environnement ‘le contrat s’est trouvé résilié de plein droit’. A ce titre, elle indique que la mise en demeure n’avait pas à reprendre les termes de la clause résolutoire, pas plus que le législateur, dans le Code de l’environnement, n’impose la mention du ‘décompte des sommes à payer, ni le délai d’un mois’, ces dispositions ayant uniquement vocation à protéger les propriétaires face aux entreprises de publicité qui connaissent nécessairement la réglementation applicable et notamment l’article L 581-25 issu d’une loi de 1979. Dans ces conditions, l’intimée soutient que ‘la simple mention selon laquelle la lettre du 2 juillet 2015 était une ‘mise en demeure’ (ce qui apparaît à la fois dans l’objet de la lettre et dans le corps du texte), et la mention des sommes à régler (quand bien même leur montant n’était pas précisé) suffisait à faire courir le délai d’un mois’.
Sur ce :
En l’espèce, les conventions aujourd’hui litigieuses stipulaient notamment : ‘1.3. [Le bailleur] s’engage à ne pas louer à des fins publicitaires d’autres parties de la même propriété sans offre préalable par LRAR (…)
2.1. Le présent contrat est conclu pour une durée de 6 années. (…)
2.3. Sauf dénonciation par l’une des parties par lettre recommandée, 3 mois au moins avant son expiration, il est renouvelé par tacite reconduction par période d’un an. (…)
3.1. Le présent bail est consenti et accepté moyennant une redevance annuelle de [respectivement 2.787,83 et 668,92 euros] payable au domicile du bailleur par chèque ou virement bancaire à hauteur de 50% de la redevance annuelle à compter de la date d’installation du panneau et le solde à terme échu.
3.2. Le règlement de la 2ème année et des années suivantes s’effectuera à terme à échoir [mention manuscritement portée]. Pour toute redevance dont le montant est supérieur à 250 euros le règlement s’effectuera au semestre. (…)
3.4. A défaut de paiement du loyer, le contrat est résilié de plein droit au bénéfice du bailleur après mise en demeure de payer restée sans effet durant un mois. (…)
4.5. En cas de privation définitive de jouissance provenant du fait du bailleur, celui-ci sera tenu de verser au preneur une indemnité forfaitaire égale à trois fois le montant de la redevance pour la période de non jouissance’.
L’appelant soutient qu’elles ont pris fin par l’effet de l’article 3.4. ci-dessus repris et, à défaut, sollicite le prononcé de leur résiliation au regard du manquement de son cocontractant à ses obligations de paiement à bonne date.
A ce titre, il soutient avoir mis en demeure l’intimée de lui payer les sommes dues, à deux reprises.
Cependant, s’agissant du courrier du 20 mai 2015, il a pour objet ‘Résiliation des contrats’ et est ainsi rédigé : ‘Suite à l’entretien telephonique que j ai eu ce jour avec votre collaborateur concernant les contrats ci dessus
J’ai décidé de resilier les dits contrats avec date d’effet à trois (3) mois de la date de réception de la presente lettre recommandée.
Il va de soit que vous restez redevable du loyer courant sur la durée du préavis.
Vous devez prendre vos disposition pour liberer l’emplacement à l’echeance de ce même preavis’ (sic).
Ainsi, la seule lecture de ce courrier n’emporte aucune interpellation que ce soit au titre d’un paiement éventuellement en souffrance, son objet étant uniquement l’expression par le propriétaire de sa volonté de mettre un terme aux contrats conclus avec le destinataire de la missive.
Dans ces conditions, il ne peut aucunement être considéré que le délai d’un mois visé aux articles 3.4 des contrats et résultant effectivement des dispositions du Code de l’environnement (L 581-25) ait commencé à courir à compter de cette date.
S’agissant de la missive du 30 juin de la même année, elle précise que son objet est ‘mise en demeure règlement du trimestre de location couvrant le preavis’ (sic) et mentionne en son corps : ‘Par lettre recommandée en date du 20/5 dont accusé de reception du 27/05 je vous informait de ma décision de resilier le contrat qui nous liait pour les nos 3272181056 – A – B – C – compte tenu de l’entretien que j avais eu avec votre collaborateur qui m’informait de l’impossibilite dans laquelle se trouvait de regler le montant prévu
Neanmoins jusqu a ce jour je constate que la totalité des faces restent bien garnies de publicites hors le règlement se faisant d’avance je vous mets en demeure de me regler dans les meilleurs delais les sommes dues’ (sic).
Il résulte des termes combinés de l’objet et du corps de ce courrier que la mise en demeure de payer porte sur les sommes dues au titre d’une période correspondant à un trimestre de location et non pas, comme indiqué par l’appelant et l’intimée sur appel provoqué, à un semestre. Dans ces conditions et contrairement à ce qui est affirmé par l’intimée principale le montant de la mise en demeure est défini par ce courrier : un trimestre de loyer ou redevance.
Or et ainsi que l’admet l’appelant aux termes de ses dernières écritures, il lui a été payé deux fois la somme de 696,96 euros, les 10 et 29 juillet, soit l’équivalent d’un semestre de redevance et cela dans le mois de la mise en demeure.
Dans ces conditions, il ne peut qu’être constaté que les conditions d’application de l’article 3.4 des conventions litigieuses ne sont pas remplies.
S’agissant de l’argumentaire développé par l’appelant au titre du prononcé de la résiliation des conventions aux torts de son cocontractant, il fait grief en substance à cette dernière de n’avoir ‘honoré le paiement des échéances dues le 15 mai 2015 qu’en juillet 2015, et en deux fois, les 10 et 29 juillet’ aux fins d’obtention d’une diminution de leur montant et de n’avoir répondu à son courrier portant résiliation qu’au cours du mois d’octobre suivant, soit cinq mois plus tard, démontrant par l’ensemble son absence ‘de bonne foi dans l’exécution des contrats’.
Cependant, d’une part il ne peut être fait grief à un cocontractant de ne pas répondre promptement à un courrier de résiliation dont il n’est même plus soutenu en appel qu’il ait été adressé dans des conditions régulières et d’autre part, le fait que lors des négociations liées notamment aux modalités et montant des redevances devant être prévues aux conventions de 2013 et qu’au mois de mai 2015 le preneur ait été tardif dans le paiement des sommes dues ne constitue pas un manquement d’une gravité justifiant du prononcé de la résiliation des contrats de 2013 aux torts de l’intimée.
Parallèlement, il doit être souligné que l’appelant a mis un terme aux contrats, avant leurs termes et en dehors des conditions posées par ces mêmes conventions ; a conclu, dès le 26 mai 2015, un nouveau contrat de louage d’emplacement avec la société Oxial, en contradiction avec les termes de l’article 1.3 des conventions de 2013, et a, à compter du mois de novembre 2015, comme il l’indique aux termes d’un courrier du 3 de ce mois, effectivement refusé les paiements adressés par le preneur initial, comportements caractérisant des manquements contractuels du bailleur dont la gravité justifie que la décision de première instance soit confirmée en ce qu’elle a :
– rejeté la demande tendant à voir constater la résiliation de plein droit des contrats signés le 3 octobre 2013,
– rejeté la demande en prononcé de la résiliation de ces mêmes conventions aux torts du preneur,
– dit que ces mêmes contrats sont résiliés aux torts exclusifs du bailleur.
S’agissant de la clause pénale prévue aux articles 4.5 des deux contrats et de leur caractère abusif, il doit être souligné que contrairement aux affirmations de l’appelant les conventions litigieuses ne prévoient pas exclusivement la résiliation de la convention en cas de non paiement des loyers, mais également en cas de manquement du preneur à son obligation d’entretien des installations publicitaires et de réparation des dégâts qu’elles pourraient le cas échéant occasionner (article 4.3).
En tout état de cause, l’existence de l’article 3.4 de ces conventions n’implique aucunement que les plus amples obligations du preneur ne puissent pas être sanctionnées en cas de non exécution.
Il en résulte que l’article 4.5 ne peut être considéré comme étant une clause abusive, dès lors que seule la privation de jouissance du preneur y est visée, le bailleur demeurant libre d’obtenir la résiliation des conventions si les manquements du preneur présentent un caractère de gravité tel qu’ils justifient du prononcé d’une telle mesure.
Dans ces conditions la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté l’argumentaire relatif aux clauses abusives.
Sur le fond de la demande formée au titre de l’article 4.5 des conventions, il doit être souligné que suivant courrier du 3 novembre 2015, le propriétaire rappelant les termes de sa missive du mois de mai précédent, indique que ‘le délai de préavis qui était de trois mois étant épuise, je vous mets en demeure, par la présente, de procéder, sous huit jours, à l’enlèvement de votre matériel et à me restituer la sol en bon état initial, faute de quoi j’en réfèrerai au tribunal d’instance du Mans’ (sic).
Par ailleurs, suivant procès-verbal du 4 décembre 2015, le preneur a fait constater la présence d’un ‘panneau publicitaire de la société Oxialive (…) implanté, à environ 1,50 m devant [son] panneau publicitaire’ masquant la majorité de la visibilité de ce dernier équipement.
Il en résulte que non seulement en permettant l’installation d’un panneau publicitaire concurrent camouflant la visibilité de celui initialement installé mais également en mettant un terme unilatéralement aux conventions de 2013, l’appelant ne peut aucunement affirmer ne pas avoir privé ‘totalement et définitivement’ son cocontractant de la jouissance des droits qui lui étaient contractuellement accordés, dès lors qu’il remet complètement en cause l’existence des relations existant entre les parties à ces conventions.
Par ailleurs, le preneur éconduit est fondé à indiquer que sa privation de jouissance ne court pas uniquement jusqu’à la présente assignation, mais jusqu’au terme de la période contractuelle au cours de laquelle il pouvait légitimement envisager d’user de son panneau publicitaire.
Il en résulte qu’en application de la clause pénale visée, le preneur pourrait prétendre à une indemnité de près de 29.000 euros.
Cependant, il doit être souligné qu’aux termes mêmes de ses écritures cette société indique que ‘sa perte financière’, si elle devait poursuivre son exploitation des matériels publicitaires jusqu’à son terme, s’élèverait à 23.796,50 euros et cela en retenant uniquement les contrats conclus au cours de l’année 2015 (dont les deux seuls produits sont d’une durée d’un an).
A ce titre cette estimation unilatérale de la locataire éconduite correspond aux sommes qui, selon elle, auraient été perçues mais pour autant ne tient aucunement compte des coûts de l’exploitation de ces mêmes matériels comprenant notamment les loyers ou redevances, énergie, etc…
Dans ces conditions, le premier juge était fondé à considérer que le montant de la clause pénale était manifestement excessif de sorte que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a condamné M. [R] au paiement d’une somme de 15.000 euros à ce titre.
Sur les plus amples demandes de l’appelant au titre de la remise en état du fonds
Le premier juge, observant que la résiliation des conventions était prononcée aux torts du bailleur a considéré qu’il n’y avait pas lieu à faire droit à la demande de ce dernier visant à obtenir la remise en état des lieux par le preneur, le premier devant conserver la charge des coûts impliqués par ces travaux.
Aux termes de ses dernières écritures l’appelant indique qu’au regard de ses développements quant à l’acquisition de la clause résolutoire ou au prononcé de la résiliation des conventions aux torts de son cocontractant, ‘c’est [à ce dernier] de reprendre le matériel d’affiche publicitaire se trouvant sur [son] terrain et de remettre les lieux en état’. Il conclut donc à l’infirmation de la décision de première instance à ce titre.
Aux termes de ses dernières écritures, l’intimée indique que la mise à sa charge du coût de l’enlèvement des panneaux publicitaires, serait justifiée dans le cas d’une rupture ‘normale’ des relations contractuelles ou si cette dernière lui était imputable, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Au surplus, elle souligne que le non respect par l’appelant de ses propres obligations contractuelles ne lui permet pas de solliciter que pour sa part, elle les respecte quant à l’enlèvement des matériels. Elle conclut donc à la confirmation de la décision de première instance à ce titre.
Sur ce :
En l’espèce, contrairement aux demandes formées par l’appelant, la résiliation des conventions a été prononcée à ses torts de sorte qu’il n’est pas justifié de mettre à la charge de son ancien cocontractant les frais liés à la disparition de ces contrats. La décision de première instance doit donc être confirmée à ce titre.
Sur les demandes formées à l’encontre de la société Oxial
En droit, l’article 1382 du Code civil en sa version applicable au présent litige dispose que : ‘Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer’.
Le premier juge ayant rappelé que les contrats avaient été résiliés aux torts du bailleur a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Oxial tirée du défaut d’intérêt à agir de la société CBA (en ce qu’elle ne disposerait d’aucun droit d’exploitation des emplacements publicitaires). S’agissant de la demande en réparation pour concurrence déloyale et parasitisme, il a été souligné que rien n’empêchait au concurrent de contacter le propriétaire du terrain sur lequel était déjà implanté un dispositif publicitaire, aux fins de remplacement de ce dernier au terme de la convention en cours. A ce titre, il a été souligné que la convention secondairement conclue, prenait effet à compter de la date de mise en service du matériel ce qui supposait l’obtention des autorisations administratives ainsi que la fin, sous quelque forme que ce soit, des relations contractuelles existant avec la société CBA. Dans ces conditions, il a été considéré que la seule existence d’une convention régularisée le 26 mai 2015, ne démontre pas ‘la volonté de la société Oxial d’obtenir une éviction brutale de la société CBA du terrain’ alors même qu’à cette date, le propriétaire avait déjà adressé le courrier portant résiliation ; que le matériel n’a été mis en place qu’au cours du mois de novembre 2015 après autorisations et expiration du délai de préavis ; que le nouveau locataire avait été informé par le propriétaire que la rupture des conventions antérieures était liée à un défaut de paiement des loyers ; qu’il n’était pas démontré que le nouveau preneur avait connaissance du refus de la part de l’ancien locataire de prendre acte de la résiliation pas plus que n’était prouvée l’appropriation par le nouveau locataire des anciens annonceurs. De sorte que les actes de parasitisme ou de concurrence déloyale n’étant pas démontrés, les prétentions formées à ce titre ont été rejetées.
Aux termes de ses dernières écritures et sur la fin de non-recevoir soulevée à son encontre, l’appelante à titre incident et/ou provoqué indique que dès lors que la demande en annulation des contrats de 2013 ne peut être accueillie, elle justifie d’un intérêt à agir contre la société qu’elle a attraite en procédure par voie d’appel provoqué.
Sur le fond, la concluante rappelle que sa concurrente ‘ne pouvait ignorer que le terrain sur lequel elle envisageait d’installer un emplacement publicitaire [lui] avait déjà été loué par son propriétaire (…) puisque les panneaux publicitaires étaient déjà présents sur le terrain, étaient utilisés pour des annonces et qu’ils étaient donc bien ‘la propriété’ d’un concurrent bénéficiant d’un contrat de location’. Par ailleurs, elle souligne que si sa contradictrice soutient qu’il ne peut lui être fait grief de prospecter en vue de la fin des conventions courant 2019, le contrat conclu entre le propriétaire et la société Oxial l’a été le 26 mai 2015 et ne prévoit aucunement qu’il sera à effet quatre ans plus tard mais à compter de la mise en fonctionnement de l’écran. Au surplus elle souligne que sa contradictrice ne démontre aucunement s’être assurée de la résiliation ou des conditions de l’achèvement des contrats de 2013 pas plus qu’elle ne prouve que le propriétaire lui ait indiqué que ces conventions étaient réputées résiliées pour défaut de paiement des loyers, établissant ainsi sa volonté de jouir exclusivement de ce terrain et à cette fin avoir démarché l’appelant en lui proposant un loyer plus intéressant. Sur les actes de concurrence déloyale (désorganisation de l’activité commerciale d’un concurrent), elle soutient que ‘le détournement de contrats ou de commandes d’un concurrent (…) est patent et établi en l’espèce’, dès lors que sa contradictrice a démarché un propriétaire déjà engagé auprès d’elle et aux mêmes fins, et cela alors même qu’elle avait engagé des moyens humains et financiers importants afin de créer cet actif. Elle soutient donc qu’il s’agit d’un acte de parasitisme économique au sens où un ‘agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin d’en tirer profit, sans ne rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire’. Ainsi, elle souligne qu’en implantant un panneau publicitaire à l’endroit où un précédent se trouvait déjà sa contradictrice s’est ‘appropriée la clientèle et les annonceurs liés et fidélisés sur ce produit depuis 1997 par [elle]’ ainsi que ‘les qualités du produit lui-même’ au regard de la qualité de l’emplacement. Dans ces conditions, elle considère que ses contradicteurs lui doivent réparation in solidum de ses préjudices moral et matériel, le propriétaire ayant participé à la réalisation de son dommage.
Aux termes de ses dernières écritures la société intimée par voie d’appel provoqué indique que sa contradictrice ‘est dépourvue d’intérêt pour agir (…). En substance, [elle] sollicite l’octroi de dommages et intérêts destinés à réparer la perte d’exploitation résultant du masquage (…), du dispositif trivision qu’elle exploite sur une parcelle située (…). Toutefois [elle] ne disposait à la date de l’assignation (…) d’aucun droit pour exploiter ledit dispositif et ne pouvait donc se prévaloir d’aucun intérêt légitime pour exercer l’action. (…) En effet son dispositif a été implanté sur la base d’un contrat nul et, en toute hypothèse, résilié’, faute de paiement des loyers.
Sur le fond elle conteste avoir démarché l’appelant qui l’avait directement contactée en raison de ses difficultés à obtenir le paiement de ses loyers. Elle précise que la signature d’un contrat dès le 26 mai 2015, n’est pas une manoeuvre visant à obtenir une rupture de la précédente convention, mais une anticipation de la fin de bail, au regard des délais d’obtention des autorisations administratives pouvant impliquer des procédures contentieuses longues devant les juridictions de l’ordre administratif. Ainsi, elle souligne que la conclusion d’un contrat en mai 2016 n’est qu’une condition nécessaire au dépôt de son dossier auprès des administrations compétentes. Au demeurant, elle souligne que la prise d’effet de ce contrat était subordonnée à l’obtention des autorisations administratives, dès lors que la durée de la convention ne commençait à courir qu’à compter de la mise en service du matériel. A ce titre, elle indique que l’autorisation implicite ne lui a été accordée qu’au mois d’août 2015, période à laquelle le propriétaire lui avait indiqué que les conventions avaient été résiliées par application de l’article L 581-25 al 3 du Code de l’environnement. Elle conclut qu’il ne peut lui être reproché d’acte de concurrence déloyale et qu’en tout état de cause aucun acte de détournement n’est caractérisé. A ce titre, elle souligne que le démarchage du propriétaire d’un fonds sur lequel est déjà présent un matériel publicitaire n’est que l’illustration de la libre concurrence existant en la matière. Par ailleurs, elle souligne qu’il n’est pas démontré d’acte de parasitisme, dès lors qu’elle n’exerce aucune activité de régie publicitaire, se bornant à conclure des contrats de gestion exclusive des emplacements publicitaires avec la société Oxialive, de sorte qu’elle ne capte aucune clientèle, et en tout état de cause, l’intimée souligne que l’exploitant final de ses panneaux publicitaires n’a aucunement accès au fichier client de l’appelante à titre incident.
Aux termes de ses dernières écritures, l’appelant conclut uniquement au rejet des demandes formés par l’appelante à titre incident.
Sur ce :
En l’espèce dès lors que la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir est soulevée par la société Oxial au regard d’une annulation des conventions de 2013 voire d’une résiliation de ces mêmes conventions à l’initiative du bailleur pour défaut de paiement des loyers, demandes qui n’ont pas été accueillies, la présente juridiction ne peut que constater qu’au jour des faits dont il est affirmé qu’ils seraient constitutifs d’actes de concurrence déloyale voire de parasitisme, l’appelante à titre incident était liée au propriétaire du fonds par des contrats valides.
Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté cette fin de non-recevoir.
Sur le fond, la chronologie des faits imputés à faute par l’appelante à titres incident et provoqué, peut s’établir comme suit, par courrier du 20 mai 2015, le propriétaire a clairement exprimé sa volonté de rompre les relations contractuelles avec le premier locataire des lieux.
Ainsi au jour de la signature du contrat litigieux, le 26 mai 2015, le propriétaire s’était déjà manifesté auprès de son précédent cocontractant comme rappelé ci-avant.
A ce titre, la convention secondairement conclue précisait qu’elle s’appliquait (pour une durée de six années) à compter de la mise en service du matériel publicitaire, ce qui implique nécessairement l’écoulement d’un certain délai notamment aux fins d’obtention des autorisations administratives nécessaires à l’installation d’un tel dispositif. Autorisations qui ont été sollicitées suivant courrier du 3 juin 2015.
Par ailleurs et suivant courrier du 30 juin de la même année, le propriétaire a confirmé son intention de mettre un terme aux relations contractuelles ayant débuté courant 1997, en mentionnant le délai de préavis.
Le 20 octobre 2015, le cocontractant initial a adressé au propriétaire du fonds un courrier l’avisant de son refus ‘de prendre en considération [la] demande de résiliation des contrats’.
Le 3 novembre suivant le propriétaire l’a mis en demeure de procéder à l’enlèvement des matériels présents sur son fonds et de remettre ce dernier en état.
Au cours de la seconde moitié du mois de novembre 2015, le dispositif publicitaire du nouveau locataire a été mis en fonctionnement sur le fonds présentant d’ores et déjà des panneaux, la nouvelle implantation camouflant à tout le moins en partie la visibilité des matériels antérieurement implantés.
Au-delà de ces éléments et s’agissant des arguments présentés par le locataire initial, il doit être rappelé, ainsi que l’a valablement indiqué le premier juge, qu’il ne peut être imputé à faute le simple fait pour un concurrent de prendre attache avec le propriétaire d’un fonds sur lequel était déjà implanté un dispositif publicitaire.
A ce titre, si la présence de ce dispositif démontre que le second locataire ne pouvait ignorer qu’il avait existé un contrat de location avec une entreprise tierce, la seule reprise de la chronologie ne permet aucunement d’établir que l’intimée sur appel provoqué avait nécessairement connaissance du caractère infondé du congé.
Au surplus, il ne peut être fait grief à cette même société de ne pas avoir recherché l’assurance de l’effectivité du congé, en sollicitant la communication d’une décision judiciaire ou ‘un accord express de l’exploitant des panneaux sur ladite résiliation’ (sic), dès lors qu’au 26 mai 2015, la nouvelle preneuse à bail ne pouvait être informée que de l’existence d’un congé, aucune autre formalité n’ayant pu être réalisée et la locataire évincée ne peut faire grief à sa concurrente de ne pas avoir obtenu l’assurance d’un accord exprès alors même qu’elle n’a pas répondu au courrier qui lui a été adressé courant mai, attendant cinq mois avant de le faire.
Par ailleurs, il n’est aucunement affirmé par l’intimée qu’elle ait entendu ‘partager (…) les droits’ de sa concurrente anciennement présente sur les lieux.
Il résulte de ce qui précède que les seuls élément établis sont la conclusion d’un contrat postérieurement à l’émission d’une lettre de résiliation d’une précédente convention de location et l’installation subséquente d’un panneau. Or ces seuls faits ne sont pas de nature à démontrer la volonté d’appropriation des droits antérieurement obtenus par la société CBA par commission d”actes de parasitisme économique et concurrence déloyale’ invoquée par cette dernière.
De plus, ces mêmes faits sont également insuffisants à caractériser le ‘détournement de contrats ou de commandes d’un concurrent’ invoqué par cette même partie, la production d’une décision du tribunal de commerce de Caen impliquant la société Oxialine et faisant également état d’une implantation arguée d’illicite de panneau devant celui mis en oeuvre par un concurrent n’est pas de nature à démontrer quelque situation de concurrence déloyale voire de parasitisme dans la présente espèce. En effet, si la société CBA indique en substance que sa concurrente s’est immiscée dans son sillage aux fins de tirer profit de son travail, le seul fait de convoiter un emplacement ayant un potentiel publicitaire considéré comme relativement intéressant et dans ces conditions de négocier un contrat de location avec le propriétaire, qui sont les seuls éléments présentement établis, ne permettent aucunement de démontrer les manquements voire fautes invoqués.
Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes formées à titre de réparation de faits de concurrence déloyale.
Sur les demandes accessoires :
L’appelant qui succombe doit être condamné aux dépens, hormis ceux attachés à l’appel provoqué et ceux exposés par la société Oxial qui demeureront à la charge de la société CBA qui succombe en ses prétentions à son égard.
Par ailleurs l’équité commande de condamner, par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile :
– l’appelant au paiement à la société CBA de la somme de 3.000 euros,
– la société CBA au paiement à la société Oxial de la somme de 2.000 euros.
Les demandes formées par l’appelant, s’agissant des frais irrépétibles, seront pour leur part rejetées.
Enfin, eu égard à l’issue du présent litige, les dispositions de la décision de première instance à ces titres doivent être confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 11 septembre 2018 ;
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [V] [R] au paiement à la SAS Cadres Blancs Afficheurs de la somme de 3.000 euros (trois mille euros) par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS Cadres Blancs Afficheurs au paiement à la SARL Oxial de la somme de 2.000 euros (deux mille euros) par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS Cadres Blancs Afficheurs aux dépens exposés par la SARL Oxial et impliqués par l’appel provoqué ;
CONDAMNE M. [V] [R] aux plus amples dépens ;
ACCORDE aux conseils des SAS Cadres Blancs Afficheurs et SARL Oxial le bénéfice des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER