Affaire OMNES c. CNOM: l’exercice du droit de réponse

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Affaire OMNES c. CNOM: l’exercice du droit de réponse
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Conseils juridiques :

1. Attention à la prescription des actions en matière de droit de réponse : Il est recommandé de respecter les délais légaux pour initier des actions en insertion forcée de droit de réponse. Dans le cas présent, la demanderesse a agi en temps utile en formant son assignation dans les trois mois suivant l’obligation de publication du droit de réponse. Il est déterminant de bien calculer les délais à partir de la date à laquelle aurait dû être publiée la réponse requise pour éviter toute forclusion de l’action.

2. Attention à la pertinence des demandes de droit de réponse : Il est recommandé de s’assurer que les demandes de droit de réponse sont justifiées et conformes aux dispositions légales. Le droit de réponse est un droit général et absolu destiné à protéger la personnalité, mais il doit être strictement limité à la défense de cette personnalité. Il est déterminant de veiller à ce que la réponse sollicitée ne devienne pas une tribune pour promouvoir des thèses ou des intérêts autres que la protection de la personnalité.

3. Attention à la recevabilité des demandes en référé : Il est recommandé de vérifier la recevabilité des demandes en référé, notamment en ce qui concerne les conditions requises pour l’insertion forcée d’un droit de réponse. Dans le cas où l’association OMNES n’était pas nommée ou désignée dans le passage contesté, il est déterminant de s’assurer que les demandes en référé sont fondées sur des bases juridiques solides pour éviter un rejet de la demande.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne une demande en référé de l’Organisation de la Médecine Naturelle et de l’Education Sanitaire (l’OMNES) contre le Docteur [I] [G] et le Conseil National de l’Ordre des Médecins. L’OMNES demande la publication d’un droit de réponse dans un rapport critiquant la naturopathie, ainsi qu’une indemnisation pour préjudice subi. Le Docteur [I] [G] et le Conseil National de l’Ordre des Médecins contestent la recevabilité de la demande de l’OMNES et demandent à être déboutés de toutes les demandes. L’affaire a été mise en délibéré pour le 8 mars 2024.

Les points essentiels

Contexte de la Publication

Le 27 juin 2023, le Conseil de l’Ordre des Médecins (CNOM) a publié sur son site internet, et le 30 juin 2023 en version papier, un document intitulé “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”. Ce document, structuré en six parties, aborde divers aspects des pratiques de soins non conventionnelles, y compris l’exercice illégal de la médecine et les dérives sectaires. Les passages contestés se trouvent dans l’annexe traitant des “Fiches PSNC” (Pratiques de soins non conventionnelles).

Passages Contestés

Le premier passage contesté, à la page 69, concerne la “Geophagie”, définie comme l’“Ingestion volontaire de terre et d’argile”. Le CNOM mentionne l’Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire (OMNES) comme organisme de formation en géophagie. Le second passage, à la page 81, traite de la naturopathie et inclut une mention indiquant qu’il n’y a “Aucune reconnaissance scientifique ni formation reconnue” pour cette pratique.

Réaction de l’OMNES

Par lettre recommandée du 26 septembre 2023, l’OMNES a demandé au CNOM de modifier ces mentions et d’insérer un droit de réponse. L’OMNES a contesté la mention de son nom en tant qu’organisme de formation en géophagie et a affirmé que la naturopathie est soutenue par de nombreuses études scientifiques. Le CNOM a répondu le 4 octobre 2023, sans donner suite aux demandes de l’OMNES.

Nouvelle Demande et Réponse du CNOM

Le 1er décembre 2023, l’OMNES a renouvelé sa demande d’insertion de droit de réponse. Le CNOM a répondu le 4 janvier 2024, indiquant avoir supprimé la référence à l’OMNES en page 69 du rapport publié en ligne. Cette réponse n’a pas satisfait l’OMNES, qui a alors initié une action en justice.

Sur la Forclusion

Le CNOM a soutenu que l’action de l’OMNES était forclose, car non initiée dans les trois mois suivant la publication. Cependant, la demanderesse a argumenté que l’action avait été initiée dans les trois mois suivant l’obligation de publication du droit de réponse. Le tribunal a constaté que l’action n’était pas prescrite, car l’assignation avait été délivrée dans les délais légaux.

Sur le Trouble Manifestement Illicite

L’OMNES a sollicité l’insertion forcée d’un droit de réponse, en se basant sur les articles de loi relatifs à la presse et à la communication en ligne. Le tribunal a examiné les demandes concernant les supports papier et en ligne séparément.

Sur le Document Papier

Le tribunal a jugé que l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 n’était pas applicable, car le document en cause n’était pas un écrit périodique. De plus, les demandes de l’OMNES fondées sur l’article 1240 du code civil n’ont pas été retenues, faute de preuve suffisante du préjudice, de la faute, et du lien entre les deux.

Sur le Support en Ligne

Le CNOM a soutenu que le droit de réponse concernant la page 69 était devenu sans objet après la suppression de la mention litigieuse. Concernant la page 81, le tribunal a constaté que l’OMNES n’était pas nommée ou désignée dans le passage contesté. Par conséquent, l’OMNES n’était pas recevable à solliciter un droit de réponse pour ce passage.

Rejet des Demandes de l’OMNES

Le tribunal a rejeté les demandes d’insertion forcée de l’OMNES concernant les deux supports litigieux. En conséquence, la demande indemnitaire de l’OMNES a également été rejetée.

Condamnation aux Dépens

L’OMNES a été condamnée aux dépens de l’instance, en application de l’article 696 du code de procédure civile. De plus, l’association a été condamnée à verser au CNOM et à son directeur de publication la somme de 2000€ au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Les montants alloués dans cette affaire: – Somme allouée au CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS et à [I] [G]: 2000€
– Somme allouée aux dépens par l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE

Réglementation applicable

Articles des Codes Cités et Texte de Chaque Article

Code de procédure civile
– Article 835 :
“Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.”

Loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique
– Article 6 IV :
“Les personnes nommées ou désignées dans un service de communication au public en ligne disposent d’un droit de réponse. La demande d’insertion de la réponse doit être adressée au directeur de la publication dans un délai de trois mois à compter de la mise à disposition du public du message justifiant cette demande. Les conditions d’insertion de la réponse sont celles prévues par l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.”

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse
– Article 13 :
“Le directeur de la publication sera tenu d’insérer dans les trois jours de leur réception les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le journal ou écrit périodique quotidien ; en ce qui concerne les journaux ou écrits périodiques non quotidiens, la réponse devra être insérée dans le numéro qui suivra le surlendemain de la réception. L’action en insertion forcée se prescrira après trois mois révolus, à compter du jour où la publication aura eu lieu.”

Code civil
– Article 1240 :
“Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.”

Résumé des Motifs de la Décision

Contexte de Publication
Le Conseil de l’Ordre des Médecins a publié un document intitulé “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives” le 27 juin 2023 en ligne et le 30 juin 2023 en version papier. Ce document inclut des fiches sur diverses pratiques, dont la géophagie et la naturopathie, qui ont été contestées par l’OMNES.

Demande de Droit de Réponse
L’OMNES a demandé la modification de certaines mentions et l’insertion d’un droit de réponse, fondant sa demande sur la loi du 29 juillet 1881 et la loi pour la confiance dans l’économie numérique. Le CNOM a supprimé une mention litigieuse en ligne mais n’a pas accédé à toutes les demandes de l’OMNES.

Sur la Forclusion
Le CNOM a soutenu que l’action était forclose car non initiée dans les trois mois suivant la publication. Cependant, la demande d’insertion de droit de réponse a été formée dans les délais, et l’action en insertion forcée a été intentée dans les trois mois suivant la date à laquelle la réponse aurait dû être publiée. L’action n’était donc pas prescrite.

Sur le Trouble Manifestement Illicite
L’article 835 du Code de procédure civile permet de prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite. L’insertion forcée d’un droit de réponse est sollicitée au visa de l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 pour la publication papier et de l’article 6 IV de la loi du 21 juin 2004 pour la publication en ligne.

Sur le Document Papier
L’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 n’est pas applicable car le document n’est pas un écrit périodique. Les demandes de l’OMNES fondées sur l’article 1240 du Code civil ne peuvent prospérer car le préjudice, la faute, et le lien entre les deux ne sont pas établis avec l’évidence requise en référé.

Sur le Support en Ligne
Le droit de réponse concernant la page 69 est devenu sans objet après le retrait de la mention litigieuse. Concernant la page 81, l’OMNES n’est pas nommée ou désignée dans le passage contesté, et ne peut donc exercer un droit de réponse. La demande de l’OMNES est rejetée.

Sur les Autres Demandes
L’OMNES est condamnée aux dépens de l’instance et à verser au CNOM et à [I] [G] la somme de 2000€ au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Anne-victoria FARGEPALLET
– Maître Jérôme CAYOL

Mots clefs associés & définitions

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

8 mars 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
24/50232
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/50232 – N° Portalis 352J-W-B7I-C3VPP

N° : 1/MC

Assignation du :
03 Janvier 2024
Dénonciation de l’assignation au parquet le 08 janvier 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 mars 2024

par Delphine CHAUFFAUT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Marion COBOS, Greffier.
DEMANDERESSE

L’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE ( O.M.N.E.S.), représentée par son Président Monsieur [W] [U]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Anne-victoria FARGEPALLET de la SELAS CABINET D’AVOCAT ANNE-VICTORIA FARGEPALLET, avocat au barreau de PARIS – L0249

DEFENDEURS

CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MÉDECINS, représenté par son directeur de publication le Docteur [I] [G]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Maître Jérôme CAYOL de la SELAS SELAS CAYOL CAHEN TREMBLAY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS – R0109

DOCTEUR [I] [G], en sa qualité de directeur de publication
[Adresse 2]
[Localité 4]

représenté par Maître Jérôme CAYOL de la SELAS SELAS CAYOL CAHEN TREMBLAY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS – R0109

Assignation dénoncée à Madame La Procureure de la République du Tribunal judiciaire de PARIS le 08 janvier 2024

DÉBATS

A l’audience du 26 Janvier 2024, tenue publiquement, présidée par Delphine CHAUFFAUT, Juge, assistée de Marion COBOS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties comparantes,

Vu l’assignation en référé délivrée le 3 janvier 2024 au Docteur [I] [G] ainsi qu’au CONSEIL NATIONAL DE L ORDRE DES MEDECINS (CNOM) et dénoncée au ministère public le 8 janvier 2024, à la requête de l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L EDUCATION SANITAIRE (l’OMNES) laquelle, au visa des articles 835 du code de procédure civile, 13 de la loi du 29 juillet 1881, 6 IV et V de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique et son décret d’application du 24 octobre 2007, nous demande :
– de condamner conjointement et solidairement les défendeurs à publier le droit de réponse de l’OMNES, en page 69 d’une part, en page 81 d’autre part du rapport litigieux, tel que précisé dans l’assignation, sous astreinte de 1000 euros par jour à compter de la minute de l’ordonnance rendue,
– Juger que l’ordonnance sera exécutoire sur minute, nonobstant appel ou opposition,
– de condamner les défendeurs conjointement et solidairement à payer à l’OMNES la somme de 25 000 euros à titre de provision sur la réparation des préjudices subis, outre 4500 euros sur le fondements de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Vu les conclusions déposées à l’audience du 26 janvier 2024 par lesquelles la demanderesse maintient ses demandes, à l’exception de celle portant sur la page 69 du rapport, dont nous est demandé de constater que la mention litigieuse a été supprimée et les demandes subséquentes d’insertion abandonnées. Elle sollicite en outre oralement, pour la version papier du rapport, l’interruption de la diffusion et le retrait des exemplaires, ainsi que l’insertion, dans une éventuelle nouvelle version, du droit de réponse demandé.
Elle expose que, association reconnue ayant pour objet la promotion de la naturopathie, elle avait constaté, le 27 juin 2023, la publication, sous format papier et sur le site internet du conseil national de l’ordre des médecins, d’un rapport intitulé “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”, qui apportait à deux reprises des informations erronnées sur la naturopathie. L’association avait alors vainement sollicité la suppression d’une mention, outre l’insertion de deux droits de réponse dans le rapport, qu’elle demande désormais judiciairement, en temps utile et selon des modalités conformes aux textes. Elle justifie sa demande indemnitaire par la diffusion du rapport auprès d’un public de médecins, ternissant l’image de la discipline qu’elle défend.

Vu les conclusions déposées à l’audience par le conseil de [I] [G] et le Conseil National de l’Ordre des Médecins, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, qui nous demandent, au visa des articles 122 du code de procédure civile, 13 et 65 de la loi du 29 juillet 1881et 6 IV de la loi du 21 juin 2004 et son décret d’application du 24 octobre 2007, de :
– déclarer la demande formée par l’OMNES irrecevable comme forclose,
– subsidiairement, la débouter de toutes ses demandes, d’insertion forcée, de modication du texte et de condamnation à des dommages et intérêts,
– la condamner reconventionnellement à payer aux défendeurs la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Les conseils des parties ont été entendus en leurs observations à l’audience du 26 janvier 2024 à l’issue de laquelle ils ont été informés que la décision était mise en délibéré au 8 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le contexte de publication :

Le Conseil de l’Ordre des Médecins a publié, Le 27 juin 2023 sur son site internet, et le 30 juin 2023 en version papier, un document identique, intitulé “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”, sous titré “Etat des lieux et propositions d’actions”. Ce document comprend 6 parties ainsi nommées : Pratiques de soins non conventionnelles, Excercice illégal de la médecine, Dérives thérapeutiques, Dérives sectaires, Actions réalisées par le CNOM, Propositions du CNOM. Après la conclusion, cinq annexes prolongent ces parties : Eléments constitutifs de l’exercice illégal de la médecine, Procédés thérapeutiques, Fiches CNOM PSNC, Fiches GAT PSNC, Encadrement déontologique des médecins.
Les passages querellés sont présentés dans l’annexe qui traite des “Fiches PSNC” (Pratiques de soins non conventionnelles).

Le premier passage, p69, concerne la “Geophagie”, définie, selon le CNOM, par ses promoteurs comme l’“Ingestion volontage de terre et d’argile”. Il est précisé dans cette fiche que des formations sont “Adressées à tout public, aucune reconnaissance scientifique. Organismes de formation : Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire (OMNES) et Association l’Homme et l’Argile.”

Le second, P81, concerne la fiche traitant de la naturopathie. Comme les autres fiches, celle-ci comprend une “Défintion donnée par les promoteurs”, un point sur les “Formations et séances”, les “Vigilances” les “Médecins proposant cette technique” et les “Non-professionnels de santé proposant cette technique”.

Par lettre recommandée datée du 26 septembre 2023, l’OMNES a écrit au directeur de publication du CNOM, le Dr [I] [G]. Fondant sa demande sur la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique, l’association, évoquant “le rapport sur les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives publié par le conseil national de l’Ordre des médecins le 27 juin 2023 tant sur votre site internet que par une édition papier”, demandait la modification de deux mentions de ce rapport, outre l’insertion d’un droit de réponse, dans les jours trois de réception du courrier :
“1. Mention litigieuse à supprimer en page 69 de votre rapport sur la géophagie : supprimer “Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire (OMNES) comme organisme de formation en géophagie.
Réponse à insérer : “Contrairement à ce qui est indiqué en page 69 du rapport du CNOM, l’OMNES, Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire, principale organisation professionnelle de naturopathes en France depuis 1981, n’est pas un organisme de formation en géophagie.”
2. Mention litigieuse en page 81 de votre rapport dans la partie “Formations et séances sur la naturopathie “Aucune reconnaissance scientifique ni formation reconnue.”
Réponse à insérer : “Contrairement à ce qui est indiqué en page 81 du rapport du CNOM, l’OMNES, Organisation de la médecine naturelle et de l’éducation sanitaire, principale organisation de naturopathes en France depuis 1981, confirme que la pratique de la naturopathie est soutenue par plus de 2000 études scientifiques revues par les pairs et plus de 300 études cliniques, comme le démontre la dernière publication de la Fédération Mondiale de Naturopathie, la WNF, en 2021 (document “Health Technology Assessement” sur l’évaluation des technologies de la santé en naturopathie, section 5 &6). L’Organisation Mondiale de la Santé classe la naturopathie parmi les trois principales médecines tradictionnelles pratiques dans le monde. Elle est également enregistrée par le Bureau International du Travail depuis 1969, est reconnue par l’UNESCO en tant que médecine traditionnelle et est reconnue comme médecine non conventionnelle par la résolution européenne Lanoye / Collins du 29 mai 1997″.
Le CNOM ne donnait pas suite à ces demandes, apportant une réponse sur les sources de son rapport, le 4 octobre 2023.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er décembre 2023, l’OMNES sollicitait de nouveau le CNOM en demande d’insertion de sa réponse. En réponse, le 4 janvier 2024, le CNOM indiquait avoir fait supprimer, en page 69 du rapport publié sur son site internet, la référence à l’OMNES.

C’est dans ces conditions qu’a été délivrée la présente assignation.

Sur la forclusion

Le CNOM soutient que, faute d’avoir été initiée dans les trois mois suivant la publication des deux supports, l’action est forclose. La demanderesse soutient au contraire que son assignation a été délivrée en temps utile, dans les trois mois suivant l’obligation de publication du droit de réponse précédemment et régulièrement formé.

L’article 6 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique prévoit, dans son IV, les modalités de l’exercice du droit de réponse de la personne nommée ou désignée dans un service de communication au public en ligne, et singulièrement le délai de trois mois à compter de la mise à disposition au public du message justifiant cette demande. Il renvoit, pour les conditions d’insertion de la réponse, à l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881.
Cet article prévoit que le directeur de publication est tenu d’insérer dans les trois jours de leur réception les réponses des personnes nommées ou désignées dans un journal ou écrit périodique quotidien – cette durée étant également celle à laquelle sont assujettis les directeurs de publication des supports en ligne -, et dans le numéro qui suit le surlendemain de la réception pour les journaux ou écrits périodiques non quotidiens. Il prévoit également que “L’action en insertion forcée se prescrira après trois mois révolus, à compter du jour où la publication aura eu lieu.”Il est constant que le point de départ de cette prescription est celui de la date à laquelle aurait dû être publiée la réponse requise.

Dès lors, alors que le document querellé a été publié le 27 juin 2023 sur le site internet du CNOM et le 30 juin 2023 en version papier, que la demande d’insertion de droit de réponse a été régulièrement formée auprès du directeur de publication le 27 septembre 2023, et réceptionnée le 4 octobre 2023 (pièce n°6 en demande), que cette réponse aurait dû être publiée dans les trois jours, et qu’à compter de cette date, la demanderesse disposait de trois mois pour former une action en insertion forcée, intentée par assignation du 3 janvier 2023, il convient de constater que son action n’était pas prescrite.

Sur le trouble manifestement illicite

L’article 835 du Code de procédure civile dispose que : “Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.”

Il est en l’espèce sollicité l’insertion forcée d’un droit de réponse, au visa de l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881, s’agissant de la publication papier, et de l’article 6 IV de la loi du 21 juin 2004, s’agissant de la publication en ligne.

Sur le document papier

Le CNOM fait valoir que l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 n’est pas applicable au litige, de sorte que la demanderesse doit être déboutée de sa demande.
L’association réplique que dès lors que le rapport a fait l’objet de deux supports de publication, il doit être identiquement présenté dans chacun, et qu’il est loisible au CNOM d’éditer un addendum à la version actuelle du rapport papier, et de modifier une éventuelle nouvelle édition. Elle ajoute que, si son préjudice n’est pas réparable sur le fondement de l’article 13 de la loi du 1881, il doit être réparé sur le fondement de l’article 1240 du code civil.

L’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 prévoit que le directeur de la publication sera tenu d’insérer dans les trois jours de leur réception les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le journal ou écrit périodique quotidien ; en ce qui concerne les journaux ou écrits périodiques non quotidiens, la réponse devra etre insérée dans le numéro qui suivra le surlendemain de la réception.

Il est constant que le document en cause ne s’apparente pas à un écrit périodique, de sorte que n’est pas applicable l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881.

Il sera par ailleurs rappelé que l’article 1240 du code civil prévoit que : “Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.” Il sera ici constaté que les demandes formées sur ce fondement par l’association, dans ses dernières conclusions ainsi qu’à l’audience, ne peuvent prospérer, dans la mesure où le préjudice, la faute, et le lien entre les deux, qui doivent être caractérisés pour permettre l’application de ce texte ne sont pas établis avec l’évidence requise en référé.

Il convient donc de dire, s’agissant de l’ensemble des demandes concernant le support papier – demande de retrait des exemplaires en circulation, d’ajout d’un addentum modificatif, de suppression de mentions et d’ajout d’un droit de réponse, dans les versions ultérieures – n’y avoir lieu à référé.

Sur le support en ligne

Soutenant que le droit de réponse, concernant la page 69, est devenu sans objet, dans la mesure où la mention litigieuse a été supprimée, le CNOM fait valoir que la demanderesse n’est pas nommée ou désignée dans le second passage litigieux, de sorte qu’elle n’est pas recevable à solliciter ce droit de réponse, celui-ci ne pouvant, par ailleurs, être accordé, dès lors d’une part que la réponse sollicitée s’apparente à une tribune de promotion de la naturopathie, non permise dans ce cadre, et, d’autre part, que sa taille excède la taille autorisée.

En réplique, l’association demanderesse constate effectivement le retrait de la mention querellée p.69, et abandonne en conséquence la demande de publication qu’elle avait formée, tout en insistant sur le fait que cette demande n’a été accordée qu’après initiation de l’instance, de sorte qu’elle maintient sa demande indemnitaire à ce titre sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle fait valoir, au soutien de sa demande maintenue de publication d’un droit de réponse pour les mentions de la page 81, que son association a pour objectif la défense des intérêts de la naturopathie, de sorte qu’elle doit être considérée comme concernée, qu’elle se contente d’exposer des faits, et que la taille de la réponse bénéficie d’une taille minimale et maximale, au sein desquelles elle se place.

Un droit similaire à celui prévu par l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 est reconnu par la loi 2004-575 du 21 juin 2004, dans son article 6 IV, aux personnes nommées ou désignées dans un service de communication au public en ligne, dans des conditions qui renvoient à l’article sus mentionné, ainsi qu’au décret n°2007-1527 du 24 octobre 2007, et singulièrement son article 2 qui prévoit que la demande d’insertion d’un droit de réponse indique les références du message, ses conditions d’accès sur le service de communication au public en ligne et, s’il est mentionné, le nom de son auteur. Elle précise s’il s’agit d’un écrit, de sons ou d’images. Elle contient la mention des passages contestés et la teneur de la réponse sollicitée.

Il résulte des textes sus-cités que le droit de réponse est un droit général et absolu, destiné à assurer la protection de la personnalité, mais qu’alors qu’il constitue une limite à la liberté d’expression puisqu’il conduit un directeur de la publication à faire publier un texte contre sa volonté, il doit, en application de l’article 10 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l’homme, être strictement limité à ce qui est nécessaire la défense de cette personnalité, et ne peut devenir une tribune libre pour défendre des thèses. Ainsi, si celui qui en use est seul juge de la teneur, de l’étendue, de l’utilité et de la forme de la réponse dont il requiert l’insertion, le refus d’insérer ne se justifie que si la réponse est contraire aux lois, aux bonnes mœurs, à l’intérêt légitime des tiers ou à l’honneur du journaliste ou si elle porte sur un objet différent de celui qui a été traité dans l’article étant rappelé que la réponse est indivisible et que le directeur de la publication ne peut en retrancher le moindre élément.

Il sera tout d’abord constaté l’accord des parties sur le retrait de la première mention litigieuse, initialement portée en page 69 du rapport, et désormais ôté de la version en ligne, et l’abandon subséquent de la demande d’insertion de droit de réponse pour cette mention.

S’agissant de la demande concernant la page 81 du rapport, il convient de constater que l’association OMNES n’est pas cité ni désignée dans le passage contesté : “Aucune reconnaissance scientifique ni formation reconnue”.
Elle justifie, par la production en pièce n°1, de ses statuts, avoir notamment pour objet de “promouvoir la naturopathie et le métier de Naturopathe par tous les moyens à sa disposition et en collaboration avec les autres acteurs de la profession (Fédération, associations, écoles, …)”. Cette circonstance n’est pourtant pas de nature à lui permettre, avec l’évidence requise en référé, l’exercice d’un droit de réponse, droit personnel destiné à assurer la protection de la personnalité et non de défendre des thèses.

Il convient dès lors de débouter l’association de ses demandes concernant le support numérique.

Alors que les demandes en insertion forcée concernant les deux supports litigieux ont fait l’objet d’un rejet, il convient de rejeter également la demande indemnitaire subséquence de l’association.

Sur les autres demandes

Succombant à l’instance, l’OMNES sera condamnée en application de l’article 696 du code de procédure civile aux dépens de l’instance.

L’association sera également condamnée, en application de l’article 700 du même code, à verser au CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS et à [I] [G] la somme de 2000€ au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,

REJETONS la demande du CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS et de [I] [G], visant à déclarer irrecevable les demandes de l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE, en raison de la forclusion ;

CONSTATONS l’accord des parties concernant la modification de la page 69 de la version numérique du rapport “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”, publié le 27 juin 2023 par le CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS ;

DEBOUTONS l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE de l’ensemble de ses demandes concernant la version papier du rapport “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”, publié le 30 juin 2023 par le CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS ;

DEBOUTONS l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE de ses demandes concernant la page 81 de la version numérique du rapport “Les pratiques de soins non conventionnelles et leurs dérives”, publié le 27 juin 2023 par le CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS ;

DEBOUTONS l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE de sa demande indemnitaire ;

REJETONS toute demande plus ample ou contraire ;

CONDAMNONS l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE à verser au CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS et à [I] [G] la somme de 2000€ (deux mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS l’ORGANISATION DE LA MEDECINE NATURELLE ET DE L’EDUCATION SANITAIRE aux dépens;

DIT n’y avoir lieu à juger que l’ordonnance est exécutoire sur minute.

RAPPELONS que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 08 mars 2024

Le Greffier,Le Président,

Marion COBOSDelphine CHAUFFAUT


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