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Affaire Jeff Koons au Centre Pompidou

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Affaire Jeff Koons au Centre Pompidou

Incompétence des juges français

Nous en parlions en 2015, les juges se sont prononcés sur le fond de l’affaire opposant les ayants droit du photographe Jean-François Bauret (auteur de la photographie « Enfants », 1975) à Jeff Koons (statut en porcelaine « Naked ») et au Centre Pompidou. La sculpture Naked ayant été retirée juste avant le début de l’ouverture au public de l’exposition, les juges se sont déclarés incompétents sur l’action en contrefaçon de l’œuvre réalisée aux États-Unis en 1988. Il s’agissait d’un fait commis aux États Unis qui échappait à la compétence de la juridiction française et seuls les faits d’exploitation de l’œuvre dite contrefaisante en France étaient susceptibles de poursuites au titre de la contrefaçon. L’œuvre n’ayant pas été présentée sur le territoire français, seuls les faits de reproduction de l’image de l’œuvre (de Jean-François Bauret) en France ont été abordés.

Mise hors de cause de Jeff Koons

Jeff Koons en qualité d’artiste a été mis hors de cause. En effet, ce dernier est intervenu dans la supervision de l’exposition du Centre Pompidou en tant que gérant de la société Jeff Koons LLC chargée de la promotion de ses œuvres et à aucun moment à titre personnel.  L’ action des ayants droit a été jugée irrecevable à son encontre.

Violation des droits de représentation

Le litige a pris corps sur le volet de l’atteinte aux droits de représentation de la photographie « Enfants » de Jean-François Bauret sous la forme d’une carte postale.  Cette dernière a été jugé originale au sens de l’arrêt du 1 er décembre 2011 (CJUE, 3e ch., 1 er déc. 2011, affaire C145/10, Eva-Maria P. c/Standard Verlags GmbH et a.,). Une photographie de portrait est susceptible en vertu de l’article 6 de la directive 93/98 d’être protégée par le droit d’auteur à condition, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier dans chaque cas d’espèce qu’une telle photographie soit une création intellectuelle de l’auteur reflétant la personnalité de ce dernier et se manifestant par des choix libres et créatifs lors de la réalisation de cette photographie.  Ainsi, l’auteur doit être en mesure d’expliciter les éléments permettant de comprendre son effort créatif et ce qu’il revendique comme étant l’empreinte qu’il a imprimée à cette œuvre et qui ressort de sa personnalité.

Pour comprendre les choix de Jean-François Bauret, le Tribunal a replacé dans son contexte l’activité créatrice de l’auteur. L’artiste s’est consacré aux portraits de nu dès son plus jeune âge ce qui dans les années 70 était une première qui lui a valu sa réputation professionnelle.

A la fin des années 1970 la France découvrait une libéralisation des mœurs pour laquelle l’artiste militait activement sur le terrain qu’il occupait dans la publicité.  C’est sous sa direction et non à l’occasion d’une séance de shooting d’enfants jouant librement, que le photographe a réalisé dans la technique traditionnelle de l’époque, sans retouche ni contrôle direct sur l’écran de l’appareil, différentes vues des enfants figurant sur la planche contact produite. Il ressortait du cliché une atmosphère de tendresse et de pureté qui révélait bien l’empreinte de la personnalité de l’auteur.

L’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque ».  Cette solution s’applique que la reproduction ou la représentation soit totale ou partielle ou que l’utilisation de l’œuvre se fasse sous une forme dérivée.  Le juge statue en fonction des ressemblances, la bonne foi étant indifférente.

Adaptation non autorisée

Outre la violation des droits de représentation, le Tribunal a aussi conclu à une adaptation non autorisée que l’artiste a délibérément incorporé dans son œuvre nouvelle, les composantes de la photographie constituant ainsi une œuvre composite qui ne pouvait se faire qu’avec l’accord de l’auteur de l’œuvre préexistante.

Pour rappel, est dite composite l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. Selon l’article L 113-4 du CPI, « l’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée, sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante ».

Pas d’exception au titre de la liberté d’expression

Les exceptions de parodie et de liberté d’expression artistique n’ont pas été retenues par les juges. Selon l’article L 122-5 du CPI, « Lorsque l’œuvre a été divulguée, l’auteur ne peut interdire … la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ».

La CJUE considère que la parodie a pour caractéristiques essentielles d’une part d’évoquer une œuvre existante dont elle doit se différencier de manière perceptible et d ‘autre part de constituer une manifestation d’humour ou une raillerie (CJUE, 3/09/2014 , affaire C201-2013)

Pour autant c’était la première fois que l’artiste américain évoquait l’existence de l’œuvre prétendument parodiée qu’il n’a jamais citée dans son discours artistique pour illustrer son inspiration.

Si l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme consacre le droit à l’information du public et la liberté d’expression- dont relève l’expression artistique- la propriété intellectuelle et la liberté d’expression sont aujourd’hui considérées comme deux droits fondamentaux d’une égale éminence essentiels tant pour l’individu que pour la société dans son ensemble. La Cour de Strasbourg retient que la liberté d’expression est dotée d’une force plus ou moins grande selon le type de discours en distinguant la situation où est en jeu l’expression strictement commerciale de l’individu, de celle où est en cause sa participation à un débat touchant l’intérêt général. Les  limitations à l’exercice de la liberté d’expression ne sont admises qu’à la condition qu’elles soient prévues par la loi, justifiées par la poursuite d’un intérêt légitime et proportionnées au but poursuivi c’est à dire rendues nécessaires dans une société démocratique.  L’adjectif “nécessaire” au sens de l’article 10 §2 implique un besoin social impérieux.  Or, l’artiste n’a pas établi en quoi son « œuvre transformative » était nécessaire à sa liberté artistique dans la mesure où le portrait en cause n’est pas familier du public.

Montant du préjudice

Sur le volet du préjudice, les ayants droit du photographe ont été indemnisés à hauteur de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice patrimonial et 10 000 euros au titre du préjudice moral.

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