Activité inventive en droit des Brevets : Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 2, 16 décembre 2022, 20/10947

·

·

Activité inventive en droit des Brevets : Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 2, 16 décembre 2022, 20/10947

uropéen EP 188415B1 de la société B&F Baumaschinen & Factoring AG est nul pour défaut d’activité inventive,

– annuler les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet européen EP 188415B1 de la société B&F Baumaschinen & Factoring AG,

– débouter, en conséquence de la nullité de son brevet européen EP 188415B1, la société B&F Baumaschinen & Factor
* * *
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 16 DECMBRE 2022

(n°175, 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/10947 – n° Portalis 35L7-V-B7E-CCFBO

Jonction avec le dossier 20/11919

Décision déférée à la Cour : jugement du 11 juin 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°18/09151

APPELANTES et INTIMEES

S.A. B&F BAUMASCHINEN & FACTORING AG, société de droit suisse, agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

Märtmattenstrasse 3

3930 VISP

SUISSE

Représentée par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistée de Me Carlyne SEVESTRE plaidant pour la SAS DE GAULLE – FLEURANCE & ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, toque K 35

S.A.S. COFRASUD, agissant en la personne de son représentant légal, M. [C] [M], domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs de Montauban sous le numéro 338 536 626

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocate au barreau de PARIS, toque B 515

Assistée de Me Caroline NARDONE plaidant pour la SELARL PINT AVOCATS et substituant Me Cendrine CLAVIEZ, avocate au barreau de MARSEILLE

INTIMEES et APPELANTES

Société B&F BAUMASCHINEN & FACTORING AG, société de droit suisse, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

Märtmattenstrasse 3

3930 VISP

SUISSE

Représentée par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistée de Me Carlyne SEVESTRE plaidant pour la SELAS DE GAULLE – FLEURANCE & ASSOCIES, avocate au barreau de PARIS, toque K 35

S.A.S.U. COFRASUD, prise en la personne de son représentant légal, M. [C] [M], domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Immatriculée au rcs de Montauban sous le numéro 338 536 626

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocate au barreau de PARIS, toque B 515

Assistée de Me Caroline NARDONE plaidant pour la SELARL PINT AVOCATS et substituant Me Cendrine CLAVIEZ, avocate au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 6 octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Véronique RENARD, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire en date du 11 juin 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Paris qui a :

– déclaré valable le brevet EP 1 888 415 B1 (EP415),

– dit qu’en commercialisant le produit ‘rack de rangement et de transport galvanisé’, la société Cofrasud a commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415,

– déclaré la société Cofrasud responsable des faits de contrefaçon,

– fait interdiction à la société Cofrasud d’importer, commercialiser, offrir à la vente et vendre des dispositifs de transport de clôtures reproduisant les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415, sous astreinte de 1 000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la signification du jugement, et pour une durée de six mois,

– ordonné le rappel, la confiscation et la destruction de l’ensemble des stocks des dispositifs de transport de clôtures restant en possession de la société Cofrasud reproduisant les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415 sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, laquelle commencera à courir à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la signification du jugement,

– dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes,

– condamné la société Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG la somme de 90 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon,

– débouté la société B&F Baumaschinen & Factoring AG de sa demande de publication judiciaire,

– condamné la société Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG la somme de 40 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement, sauf en ce qui concerne la mesure de destruction des stocks des dispositifs de transport de clôtures,

– condamné la société Cofrasud au remboursement des frais de la saisie contrefaçon du 28 juin 2018, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Vu l’appel interjeté le 27 juillet 2020 par la société Cofrasud,

Vu l’appel interjeté le 10 août 2020 par la société B&F, limité aux mesures de rappel, confiscation et destruction sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et au quantum des condamnations prononcées,

Vu la jonction des procédures par ordonnance du 24 septembre 2020,

Vu l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 mai 2021 qui a dit n’y avoir lieu à radiation et ordonné la poursuite de l’instance,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 mai 2022 par la société Cofrasud, appelante qui demande à la cour :

– d’infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 11 juin 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la société B&F Baumaschinen & Factoring AG de sa demande de publication judiciaire et du surplus de ses demandes,

En conséquence,

– recevoir la société Cofrasud en son appel et la dire bien fondée,

A titre principal,

– juger que le brevet européen EP 188415B1 dont est titulaire la société B&F Baumaschinen & Factoring AG est nul pour défaut de nouveauté,

– juger que le brevet européen EP 188415B1 de la société B&F Baumaschinen & Factoring AG est nul pour défaut d’activité inventive,

– annuler les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet européen EP 188415B1 de la société B&F Baumaschinen & Factoring AG,

– débouter, en conséquence de la nullité de son brevet européen EP 188415B1, la société B&F Baumaschinen & Factoring AG de son action en contrefaçon de brevet,

A titre subsidiaire,

– dire et juger que la société Cofrasud bénéficie d’un droit de possession antérieure sur les caractéristiques du brevet européen EP 188415B1 dont est titulaire la société B&F Baumaschinen & Factoring AG,

– débouter, en conséquence, la société B&F Baumaschinen & Factoring AG de son action en contrefaçon de brevet,

A titre infiniment subsidiaire,

– dire et juger que la société B&F Baumaschinen & Factoring AG ne démontre pas l’existence des préjudices qu’elle aurait subis et qui ne sont en tout état de cause pas fondés,

– réformer le montant des dommages et intérêts alloués à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG,

En tout état de cause,

– condamner la société B&F Baumaschinen & Factoring AG à verser la somme de 36 051 euros à parfaire à la société Cofrasud au titre de l’article 700 (du code de procédure civile),

– condamner la société B&F Baumaschinen & Factoring AG aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Nadia Bouzidi-Fabre, avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 6 mai 2022 par la société B&F Baumaschinen & Factoring AG, intimée, qui demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal judiciaire du 11 juin 2020 sauf en ce qu’il a :

– condamné la SAS Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG la somme de 90 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice matériel et moral imputable à la contrefaçon,

– débouté la société B&F Baumaschinen & Factoring AG de sa demande de publication judiciaire,

Et statuant à nouveau,

– condamner la société Cofrasud à réparer le préjudice subi par la société B&F Baumaschinen & Factoring AG, au titre de la contrefaçon de ses droits sur le brevet EP 1 888 415 B1, et donc de lui payer la somme de 1 410 496 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels, sauf à parfaire, notamment en fonction des éléments qui auront pu être obtenu par la société B&F Baumaschinen & Factoring AG dans le cadre de l’exercice de son droit d’information, qu’elle se réserve d’ores et déjà le droit d’exercer devant le juge de la mise en état, au titre de l’article 615-5-2 du Code de la propriété intellectuelle,

– ordonner la publication d’un extrait du jugement (sic) à intervenir dans 5 périodiques au choix de la société B&F Baumaschinen & Factoring AG dans la limite de 10 000 euros hors taxe par insertion, aux frais de la société Cofrasud, et sur le site internet www.cofrasud.com,

En tout état de cause,

– condamner la société Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG la somme totale de 31 545 euros, sauf à parfaire, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG l’ensemble des frais de justice qui seront recouvrés par la SAS De Gaulle Fleurance & Associés au titre de l’article 699 du code de procédure civile,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 19 mai 2022 ;

SUR CE,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que la société de droit suisse Baumaschinen & Factoring AG (ci-après la société B&F) est spécialisée, depuis sa création en 2000, dans la fabrication et la vente de machines de construction.

Elle est titulaire du brevet européen EP 1 888 415 B1 (EP 415) intitulé ‘dispositif de transport conçu pour des éléments de clôture et des pieds supports’, déposé le 27 avril 2006 sous priorité d’une demande de brevet allemand du 29 avril 2005. Le brevet, publié le 20 février 2008, a été délivré le 15 avril 2009 et les annuités correspondantes ont été régulièrement acquittées.

La société Cofrasud, immatriculée le 21 août 1986 au Registre du Commerce et des sociétés de Montauban, est spécialisée dans l’import, l’export, la vente et la revente de coffrages, matériels et produits pour la construction.

La société B&F indique avoir découvert que la société Cofrasud faisait la promotion sur son site internet accessible à l’adresse ‘www.cofrasud.com’ d’un produit dénommé ‘rack de rangement galvanisé pour rangement et transport de clôtures’ désignant un dispositif de transport pour des éléments de clôture et des pieds supports, qui reproduit les caractéristiques des revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415.

La société Cofrasud oppose qu’elle achetait et commercialisait des racks de stockage avant le dépôt du brevet EP 415 par la société B&F.

Par courrier du 4 décembre 2017, le conseil allemand de la société B&F a mis en demeure la société Cofrasud de cesser toute contrefaçon du brevet EP 415 et de lui indiquer l’identité du fabricant de sa palette de transport. Une seconde lettre de mise en demeure a été adressée à la société Cofrasud le 26 janvier 2018. Par courrier du 5 février 2018, cette dernière a répondu que les accusations portées contre elle lui semblaient fondées sur des recherches incomplètes et qu’elle transmettait le dossier à son avocat.

Autorisée par ordonnance du 22 juin 2018, la société B&F a fait pratiquer une saisie-contrefaçon au siège de la société Cofrasud le 28 juin 2018 avant de la faire assigner, selon acte d’huissier de justice du 20 juillet 2018, devant le tribunal de grande instance de Paris devenu tribunal judiciaire, en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415 dont elle est titulaire.

Sur la portée du brevet EP 415

L’invention concerne un dispositif de transport conçu pour des éléments de clôture et des pieds supports.

Selon la partie descriptive, des clôtures mobiles sont utilisées pour fermer temporairement et sécuriser notamment des chantiers et des lieux de manifestations.

Il est indiqué qu’elles sont généralement composées d’éléments de clôture grillagés formant un cadre, dont les tubes verticaux latéraux sont emboîtés dans des pieds supports lourds en béton, en métal, en plastique ou en matériau recyclé, et que pour le transport des clôtures mobiles depuis et vers le lieu d’installation, on utilise en général des palettes de transport configurées spécifiquement pour le type d’élément de clôture, dans lesquelles respectivement un tube vertical terminal de chaque élément de clôture est emboîté dans des dispositifs de retenue dirigés vers le haut.

Les dispositifs de retenue peuvent être formés à partir d’une multitude d’embouts tubulaires ou tenons cylindriques disposés les uns à côté des autres, dans lesquels les extrémités des tubes verticaux sont emboîtées ou bien sur lesquels les extrémités des tubes sont posées.

Les pieds supports sont acheminés avec des dispositifs de transport séparés.

Il est ajouté que lors du montage d’une clôture, il faut d’abord déposer les pieds supports avant d’y insérer les éléments de clôture mais que ceux-ci ne peuvent en principe pas être déposés avec suffisamment de précision pour que les éléments de clôture puissent être emboîtés dans ceux-ci lors de la prochaine étape sans décaler par la suite les pieds supports.

Un autre inconvénient résultant de cette manière de procéder est que les pieds supports déposés au préalable sans les éléments de clôture emboîtés représentent un obstacle et une source d’accident pour les passants et les ouvriers. De plus, toute la longueur de la clôture doit être parcourue deux fois, une fois avec les pieds supports et une deuxième fois avec les éléments de clôture.

Le but de l’invention est de remédier à ces inconvénients en proposant un dispositif de transport dont l’utilisation permet d’ériger et de démonter plus rapidement et sûrement les segments de clôture élaborés à partir des éléments de clôture et des pieds supports.

Ces objectifs sont atteints grâce à un dispositif de transport comportant les caractéristiques de la revendication 1 qui comprend au moins un élément de clôture, au moins un pied support et une palette de transport, dans lesquels des dispositifs de retenue dirigés vers le haut sont prévus pour recevoir par emboîtement les extrémités des tubes verticaux des éléments de clôture.

Il est indiqué que le point central de l’invention réside dans le fait de transporter et de stocker sur la même palette de transport les pieds supports et les éléments de clôture fixés au-dessus des pieds supports par un dispositif de retenue, ce qui simplifie le montage de la clôture mobile et le rend plus sûr.

Ceci est possible en ce que l’intervalle qui sépare les arêtes inférieures des éléments de clôture emboîtés dans un segment compris entre les tubes verticaux et le fond de palette correspond à au moins 1,2 fois la longueur libre d’une extrémité d’un tube saillant vers le bas au-delà des arêtes inférieures, de sorte que, grâce à l’intervalle créé entre l’arête inférieure de l’élément de clôture et le fond de palette, les éléments de clôture et les pieds supports peuvent être transportés et stockés ensemble sans aucun dispositif supplémentaire. Aussi, le montage d’une clôture mobile est possible en un seul passage, les pieds supports étant disposés au fur et à mesure que les éléments de clôture sont encastrés dans les pieds supports, tandis que le risque d’accident est réduit.

La partie descriptive développe en outre les modes de réalisation de l’invention.

Le brevet se compose à cette fin de 23 revendications dont seules sont invoquées les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 dont la teneur suit :

1. Dispositif de transport comprenant au moins un élément de clôture , qui présente des tubes verticaux et une arrête inférieure entre les tubes verticaux, et une palette de transport, des barres longitudinales et des barres transversales formant un cadre support horizontal de configuration rectangulaire pour la palette de transport qui comporte des dispositifs de retenue dirigés vers le haut aux fins de recevoir par emboîtement les extrémités des tubes verticaux des éléments de clôture, caractérisé en ce qu’un fond de palette s’étend entre les barres longitudinales et les barres transversales, au moins un pied support étant disposé sur la palette de transport et l’intervalle qui sépare les arêtes inférieures des éléments de clôture emboîtés dans un segment compris entre les tubes verticaux et le fond de palette correspondant à au moins 1,2 fois la longueur libre d’une extrémité d’un tube saillant vers le bas au-delà des arêtes inférieures.

2. Dispositif de transport selon la revendication 1, caractérisé en ce qu’au moins une barre transversale présente une section transversale en forme de L.

3. Dispositif de transport selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que les barres longitudinales et les barres transversales sont disposées dans un plan.

4. Dispositif de transport selon l’une des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que les barres transversales s’étendent sur la totalité de la largeur du cadre support et sont disposées dans un intervalle (AM) permettant de recevoir une fourche de chariot élévateur.

19. Dispositif de transport selon l’une des revendications 1 à 15, caractérisé en ce que le fond de palette repose sur le cadre support.

20. Dispositif de transport selon l’une des revendications 1 à 19, caractérisé en ce que des tôles de fermeture sont disposées latéralement sur les dispositifs de retenue.

22. Dispositif de transport selon l’une des revendication 1 à 21, caractérisé en ce que le fond de palette comprend des ouvertures d’évacuation d’eau.

Sur la validité du brevet EP 415

La société appelante conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande tendant à la nullité des revendications opposées du brevet EP 415 et sollicite, aux termes de ses dernières écritures la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415 pour défaut de nouveauté ainsi que, pour la première fois devant la cour, pour défaut d’activité inventive.

Sur la nullité de la revendication 1

* pour défaut de nouveauté

Aux termes de l’article 52 de la Convention sur le Brevet Européen (CBE) ‘les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu’elle soit nouvelle, qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application industrielle’.

Selon l’article 54 de la CBE ‘Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique.

L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet européen par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.

Est également considéré comme compris dans l’état de la technique le contenu de demandes de brevet européen telles qu’elles ont été déposées, qui ont une date de dépôt antérieure à celle mentionnée au paragraphe 2 et qui n’ont été publiées qu’à cette date ou à une date postérieure (…)’.

Il est constant que pour être comprise dans l’état de la technique et privée de nouveauté, l’invention doit se trouver toute entière et dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat.

En l’espèce, la société Cofrasud ne fait état d’aucune antériorité destructrice de nouveauté des revendications opposées du brevet EP 415 mais invoque au soutien de sa demande de nullité pour défaut de nouveauté :

– une commande de réalisation de racks de rangement et de transport pour clôtures mobiles et plots de béton faite en novembre 2003 auprès de la société Idée Bat Méditerranée attestée par le témoignage du président de cette société M. [D] (pièce n°3) auquel sont joints des plans de ces racks datés de 2003,

– la commercialisation en 2004 du rack de rangement et de transport pour clôtures mobiles et plots de béton (pièces n°48 et 49),

– l’intégration en janvier 2005 d’un rack de rangement et de transport pour clôtures mobiles et plots de béton à son catalogue (pièces n°11 et 39) .

M. [D] déclare, dans une attestation sur l’honneur du 14 décembre 2017, avoir développé à la demande et pour le compte de la société Cofrasud un rack permettant le stockage et la manutention de clôtures de chantier avec ses plots de stabilisation en béton en novembre 2003, et que cette attestation est accompagnée d’un dossier numérique de plans, de photographies ainsi que de pièces comptables datées ‘qui prouvent l’existence et la vente de ces matériels rendus à la connaissance du public dès 2004’.

Toutefois, cette attestation a été signée le 14 novembre 2017 de la main de M. [D], soit un mois avant sa rédaction, et n’est accompagnée que de plans à l’exception des autres pièces annoncées. Ces incohérences et dissimulations lui retirent ainsi toute force probante alors que, en tout état de cause, elle n’établit pas, pas plus que les uniques plans qui y sont joints, que le rack en question présenterait les mêmes caractéristiques que celui objet de la revendication 1 du brevet EP 415.

Les pièces n°48 et 49 produites par la société Cofrasud sont constituées, pour la première d’une attestation du gérant de la société Midimat accompagnée d’une facture du 31 mars 2004 et de copies de photographies, et pour la seconde, d’une attestation du directeur général de la société Crespy accompagnée d’une facture du 30 septembre 2004 et également de copies de photographies. Ces documents concernent des ‘rack de rangement et de transport pour clôtures mobiles’ et ‘rack de clôture de chantier universel Galva ‘, dont les caractéristiques techniques ne sont pas révélées, y compris par les photographies jointes qui ne sont pas datées et dont la provenance est ignorée.

La société Cofrasud a également produit, en dernière pièce n°50, une attestation de M. [X] gérant de la société éponyme, accompagnée d’une facture du 31 juillet 2005 et de photographies qui concernent également des ‘racks de clôture de chantier universel Galva’ dont les caractéristiques techniques ne sont pas plus révélées, et qui en tout état de cause ont été achetés postérieurement à la date de priorité du brevet opposé.

S’agissant enfin des pages de catalogue dont l’appelante se prévaut, force est de constater que la pièce 39 qui est produite devant la cour est composée d’une seule page non identifiable ni datée et que si la pièce 11 est censée reproduire une page du catalogue Cofrasud 2005, outre le fait que plusieurs versions de celle-ci ont été communiquées, cette page montre au moins deux racks différents de rangement et de transport pour clôtures.

La description que fait l’appelante du rack qu’elle dit avoir intégré à son catalogue 2005 ne peut donc s’appuyer sur ces éléments pas plus que sur les plans annexés à l’attestation du 14 décembre 2017 susvisée.

En définitive, aucun des documents opposés n’est de nature à constituer une antériorité de toute pièce destructrice de la nouveauté de la revendication 1 du brevet B&F.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

* pour défaut d’activité inventive

Selon l’article 56 de la CBE, ‘une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique (…)’.

En cause d’appel, la société Cofrasud indique que si par impossible, la cour jugeait que, les pièces qu’elle verse aux débats ne démontrent pas que la divulgation du Rack Cofrasud 2005 est destructrice de nouveauté de la revendication 1 du brevet B&F, alors il y aurait lieu de considérer que les six premières caractéristiques de la revendication 1 du brevet B&F sont divulguées, et qu’en outre, ce Rack Cofrasud 2005 montre clairement la possibilité de disposer des pieds de maintien (ou plots béton) sur le fond de palette, en dessous des clôtures, et donc sous les arêtes inférieures des clôtures, de sorte que la revendication 1 du brevet serait dépourvue d’activité inventive.

Si aucune des parties n’a défini dans ses écritures l’homme du métier auquel il convient de se référer dans le cadre du présent litige, celui-ci est à rechercher dans le domaine technique considéré et en conséquence est en l’espèce le fabricant de matériel de chantier de construction et de sécurité.

Pour autant, la société Cofrasud considère que la caractéristique de la revendication 1 du brevet B&F ‘relative à la distance des arêtes inférieures vis-à-vis du fond de palette et sur la longueur libre qui dépasse vers le bas au-delà des arêtes inférieures d’une extrémité d’un tube vertical’ n’est pas inventive au regard de la divulgation de son propre rack de 2005.

Toutefois, il a été dit qu’aucune preuve n’est rapportée de ce que les dispositifs reproduits en photographies ou sur les plans que la société Cofrasud a versés aux débats en tant qu’antériorités correspondent aux caractéristiques du rack objet de la revendication 1.

L’absence d’activité inventive ne peut donc résulter d’une antériorités dont les caractéristiques ne sont pas établies.

En conséquence, il y a lieu de considérer que la revendication 1 du brevet EP 415 est porteuse d’activité inventive.

La revendication 1 du brevet EP 415 est donc valable.

Sur la nullité des revendications dépendantes 2, 3, 4, 19, 20 et 22

Les revendications 2,3, 4, 19, 20 et 22 placées dans la dépendance directe ou indirecte de la revendication 1 avec laquelle elles se combinent doivent également être déclarées valables et le jugement sera également confirmé de ce chef.

Sur la possession antérieure

La société Cofrasud fait valoir à titre subsidiaire, qu’elle bénéficie d’un droit de possession personnelle antérieure de l’invention lui permettant d’exploiter celle-ci sur le territoire français malgré l’existence du brevet B& F, dès lors qu’il y a eu une divulgation en 2005 de son propre rack.

Ce rack correspondrait ainsi au rack de rangement et de transport pour clôtures mobiles et pieds de maintien figurant dans son catalogue du 1er janvier 2005, donc antérieurement à la date de priorité du brevet EP 415.

Or d’une part, il résulte tant du procès-verbal de constat sur internet du 14 juin 2018 que de la requête en saisie contrefaçon et du procès-verbal de saisie contrefaçon du 28 juin 2018, que le dispositif Cofrasud incriminé référence 20937, objet de l’action en contrefaçon de la société B&F est un ‘rack de rangement galvanisé pour rangement et transport de clôture’ de décembre 2016 qui figure dans son catalogue 2018, ce qui n’est pas contesté par la société Cofrasud.

Si l’appelante soutient que les dispositifs en cause présentent ‘quelques modifications mineures’ avec le rack de 2005, il n’en demeure pas moins qu’elle ne peut revendiquer une possession antérieure sur un dispositif qui a subi des modifications, mêmes mineures comme elle le soutient, qui porte une autre référence et qui ne correspond pas au produit argué de contrefaçon.

D’autre part, il a été dit que l’extrait du catalogue Cofrasud 2005 (pièce n°11 de l’appelante) montre des images différentes de celles figurant sur les pièces qu’elle verse aux débats et notamment de celles constituées de captures d’écran des fichiers numériques du même catalogue 2005 issues d’un constat d’huissier de justice du 21 octobre 2020, lequel n’a en tout état de cause fait qu’assister à ‘la réinscription de deux CD-R’, le premier censé contenir le catalogue 2005 des produits commercialisés par la société Cofrasud et le second un dossier intitulé ‘Racks Clôtures Métal et Plots’, dont les dates ont pu être modifiées. La présence supposée du catalogue invoqué sur des fichiers informatiques qui ont été réinscrits est en conséquence insuffisante à établir que le rack Cofrasud 2005 présente les mêmes caractéristiques que le rack breveté.

En conséquence la possession antérieure invoquée par la société appelante n’est pas établie.

Sur la contrefaçon

Aux termes de l’article 64 de la CBE, ‘le brevet européen confère à son titulaire, à compter de la date à laquelle la mention de sa délivrance est publiée au Bulletin européen des brevets et dans chacun des Etats contractants pour lesquels il a été délivré, les mêmes droits que lui conférerait un brevet national délivré dans cet Etat. Toute contrefaçon du brevet européen est appréciée conformément à la législation nationale (…)’.

Selon l’article L 613-3 du code de la propriété intellectuelle, ‘sont interdites, à défaut de consentement du propriétaire du brevet :

a) la fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, l’importation, l’exportation, le transbordement, ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ;

b)l’utilisation d’un procédé objet du brevet ou, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que l’utilisation du procédé est interdite sans le consentement du propriétaire du brevet, l’offre de son utilisation sur le territoire français ;

c)l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, l’importation, l’exportation, le transbordement ou la détention aux fins précitées du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet’.

Enfin, conformément à l’article L 615-1 du même code, ‘toute atteinte portée aux droits du propriétaire du brevet, tels qu’ils sont définis aux articles L. 613-3 à L. 613-6, constitue une contrefaçon’.

En l’espèce, la société Cofrasud qui se prévaut d’une possession antérieure du rack de rangement objet du du brevet EP 415 ne conteste pas la matérialité des actes de contrefaçon qui lui sont reprochés.

Il résulte en tout état de cause tant de la fiche technique du ‘rack de rangement galvanisé pour rangement et transport de clôtures’, disponible sur le site internet de la société Cofrasud , que du procès-verbal de constat d’huissier de justice du 14 juin 2018 et du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 28 juin 2018 et des photographie qui y sont annexées, que le dispositif de transport litigieux offert à la vente par Cofrasud reproduit les caractéristiques des revendications 1, 2 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415 dont est propriétaire la société B&F.

En effet, l’huissier de justice instrumentaire, après avoir relevé la présence de racks de transport correspondant aux produits désignés dans le catalogue de produits Cofrasud, de dix-huit racks de transport ne comportant pas d’éléments de clôture et de deux racks de transport dont l’un comporte deux éléments de clôture grillagés emboîtés, a constaté que :

– les racks de transport comprennent au moins un élément de clôture qui présente des tubes verticaux et une arête inférieure entre les tubes verticaux,

– les racks comprennent également une palette de transport dans lesquels des barreaux longitudinaux et des barreaux transversaux forment un cadre porteur horizontal de configuration rectangulaire pour la palette de transport,

– le cadre porteur comporte des dispositifs de retenue dirigés vers le haut aux fins de recevoir par emboîtement les extrémités des tubes verticaux des éléments de clôture,

– un fond de palette s’étend entre les barreaux longitudinaux et les barreaux transversaux,

– sur la palette de transport est agencé au moins un pied de maintien,

– la distance des arêtes inférieures des éléments de clôture enfichés dans un tronçon entre les tubes verticaux vis-à-vis du fond de palette correspond à au moins 1,2 fois la longueur libre, qui dépasse vers le bas au-delà des arêtes inférieures, d’une extrémité d’un tube.

En effet, après la réalisation de différentes mesures, il s’est avéré que la distance qui sépare les arêtes inférieures des éléments de clôture emboîtés dans un segment compris entre les tubes verticaux et le fond de la palette est égal à 25,7 – 1,2 cm (correspondant à la mesure de l’ergot vertical qui dépasse par rapport à l’arrête) = 24,5 cm, et que la longueur libre d’une extrémité d’un tube saillant vers le bas au-delà des arêtes inférieures est égale à 18,5 cm ‘ 1,2 cm = 17,3 cm, d’où un ratio supérieur à 1,2 (24,5 / 17,3 = 1,4).

En conséquence, les dispositifs incriminés reproduisent l’ensemble des caractéristiques de la revendication 1 du brevet EP 415.

Par ailleurs, l’huissier de justice a constaté que :

– le long de chaque élément transversal formant le cadre, à l’intérieur de ce cadre, est soudé un nouvel élément métallique plié en angle droit sur lequel est également soudé le panneau grillagé formant le fond du cadre,

– les arêtes longitudinales et transversales du cadre du rack sont disposées dans un même plan,

– le dispositif Cofrasud comporte des barres longitudinales et transversales formant le cadre et sous les deux profils longitudinaux, se trouvent deux encoches de forme rectangulaire constituées par un unique élément de métal soudé sur la partie inférieure du profil, M. [M] de la société Cofrasud ayant déclaré que ces encoches sont destinées à recevoir les fourches des chariots élévateurs,

– les racks sont constitués de quatre profils creux qui paraissent de section rectangulaire, soudés, positionnés horizontalement et formant un cadre rectangulaire. A l’intérieur de ce cadre se trouve un fond métallique grillagé. Celui-ci est soudé sur les profils formant le cadre ainsi que sur dix profils de section carrée, soudés sur les profils longitudinaux, à équidistance, dans le sens de la largeur du cadre,

– les dix-neuf plaques servant de dispositif de maintien des éléments de clôture sont liées par un élément métallique plat soudé le long du côté intérieur du cadre, à mi-hauteur de chaque plaque.

– le rack de rangement et de transport galvanisé incriminé comprend un fond de palette de transport constitué par un grillage, permettant ainsi l’évacuation de l’eau.

En conséquence, la contrefaçon des revendications 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415 est également établie.

Sur les mesures réparatrices

La société Cofrasud conclut à la diminution des dommages et intérêts qui ont été alloués à la société B&F, soit 30 000 euros à titre de préjudice matériel et 60 000 euros à titre de préjudice moral en réparation d’actes de contrefaçon commis entre 2013 et 2020, en faisant valoir qu’elle n’a pas la qualité de fabricant des produits qu’elle commercialise et n’avait pas connaissance du brevet EP 415 avant la première mise en demeure qui lui a été adressée, qu’elle a produit des attestations de son expert comptable dont une du 22 septembre 2020, postérieure au jugement, qui révèlent les chiffres de ses ventes et les marges réalisées. Elle ajoute qu’aucun préjudice moral n’est établi par la société B&F.

Cette dernière a quant à elle formé appel incident sur le quantum des dommages et intérêts qui lui ont été alloués et sollicite paiement de la la somme de 1 310 496 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels, sauf à parfaire, en fonction des éléments dont elle se réserve le droit de réclamer la communication devant le juge de la mise en état, en réparation de son préjudice matériel ainsi que la somme de 100 000 euros, à parfaire également, en réparation de son préjudice moral, soit un total de 1 410 496 euros.

Elle fait valoir en substance que les factures initialement produites par Cofrasud ne listent pas l’ensemble de ses fournisseurs, qu’il existe des incohérences sur le nombre de racks vendus, de sorte que le nombre à prendre en considération est de 2 200 alors qu’aucune information fiable sur le prix de vente des dispositifs n’a été donnée ; pour justifier d’un préjudice moral, elle fait valoir que la société Cofrasud a agi avec une très grande légèreté puisqu’elle n’a répondu qu’à la suite de la réception d’un second courrier de mise en demeure et ce pour indiquer qu’en raison de la gravité des accusations elle transmettait le dossier à son conseil qui prendrait contact avec le conseil allemand de B&F, ce qui n’a jamais été fait, qu’elle s’est toujours montrée particulièrement indifférente au préjudice subi par elle et partant n’a jamais donné suite aux propositions de règlement amiable du litige, enfin que la société Cofrasud a continué de vendre les racks litigieux après les mises en demeure et l’assignation en contrefaçon et a contrevenu aux termes de l’ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris, en refusant de donner le moindre élément comptable ou financier, relatif aux circuits de fabrication et de distribution du produit litigieux.

Aux termes de l’article L. 615-7 du code de la propriété intellectuelle, ‘pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée’.

Selon l’article L.615-1 du même code , ‘toute atteinte portée aux droits du propriétaire du brevet, tels qu’ils sont définis aux articles L 613-3 à L. 613-6, constitue une contrefaçon.

La contrefaçon engage la responsabilité civile de son auteur.

Toutefois, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, la détention en vue de l’utilisation ou la mise dans le commerce d’un produit contrefaisant, lorsque ces faits sont commis par une autre personne que le fabricant du produit contrefaisant, n’engagent la responsabilité de leur auteur que si les faits ont été commis en connaissance de cause’.

En l’espèce, il est constant que la société Cofrasud, dont l’activité consiste en l’import, l’export, la vente et la revente de coffrages, matériels et produits pour la construction, n’a pas la qualité de fabriquant des produits qu’elle commercialise.

Toutefois, il résulte des pièces versées aux débats et notamment de l’attestation de M. [D] susvisée, que ce dernier a développé à la demande et pour le compte de la société Cofrasud un rack permettant le stockage et la manutention de clôtures de chantier avec ses plots de stabilisation en béton en novembre 2003, ces équipements ayant été vendus à la société Cofrasud dès le mois de janvier 2004. Les factures d’achats produites par la société Cofrasud montrent qu’elle a acquis ses produits auprès de la société Idée Bat Méditerranee jusqu’en 2009, puis auprès de différents fournisseurs pour commercialiser un nouveau produit ‘rack de clôture de chantier universel Galva Q’, dont les références correspondent au dispositif contrefaisant.

C’est donc par une exacte appréciation des faits de la cause et de la règle de droit que le tribunal a considéré que la société Cofrasud, en sa qualité de professionnel des matériels et produits pour la construction, a commis les faits qui lui sont reprochés en connaissance de cause. En conséquence, il n’y a pas lieu de réduire la période d’indemnisation de la société B&F à la période postérieure à la première mise en demeure adressée à la société Cofrasud.

Cette dernière a produit des récapitulatifs du nombre de racks vendus du 1er janvier 2010 au 2 novembre 2018, du chiffre d’affaires HT correspondant aux racks vendus du 1er janvier 2010 au 2 novembre 2018 et de sa marge réalisée sur les ventes de racks vendus du 1 er janvier 2010 au 2 novembre 2018 ainsi qu’un état comptable des stocks de racks à clôtures, le tout certifié par son expert comptable, desquels il résulte que, sur la période courant de 2013 à 2018, 66 racks contrefaisants ont été vendus, avec une marge cumulée de 5 322,47 euros.

Elle produit devant la cour une attestation de son cabinet d’expertise comptable, en date du 22 septembre 2020, selon laquelle elle a vendu en 2019, 30 des racks jugés contrefaisants pour une marge cumulée de 2.780,05 euros et 7 sur les 2 premiers trimestres 2020 pour une marge cumulée de 652,31 euros, soit un total de ventes pour 2019-2020, de 37 racks pour une marge cumulée de 3.432,36 euros et de 103 depuis 2013, pour une marge cumulée sur l’intégralité de cette période de 8 754,83 euros.

En considération de ces éléments appréciés distinctement, la cour est donc à même de fixer à la somme de 30 000 euros l’indemnisation totale due à la société B&F en réparation de son préjudice patrimonial subi du fait des actes de contrefaçon retenus. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Il sera également confirmé en ce qu’il a fait interdiction à la société Cofrasud d’importer, commercialiser, offrir à la vente et vendre des dispositifs de transport de clôtures reproduisant les revendications 1, 2, 3, 4, 19, 20 et 22 du brevet EP 415, sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée, ladite astreinte commençant à courir à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la signification du jugement, et pour une durée de six mois.

En revanche, la société B&F qui n’argumente que sur la légèreté dont la société Cofrasud aurait fait preuve dans la conduite de sa défense, sera déboutée de sa demande relative à son préjudice moral dont l’existence n’est pas démontrée.

Le préjudice de la société intimée étant intégralement réparé par l’octroi des dommages et intérêts ci-dessus déterminés, le jugement sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de publication.

Sur les autres demandes

La société Cofrasud qui succombe sera condamnée aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Enfin la société B&F a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement dont appel sauf sur le montant des dommages et intérêts alloués à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG (B&F) au titre de son préjudice moral à hauteur de 60 000 euros.

Statuant de nouveau de ce chef et y ajoutant,

Déboute la société B&F Baumaschinen & Factoring AG (B&F) de sa demande formée au titre d’un préjudice moral.

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires.

Condamne la société Cofrasud à payer à la société B&F Baumaschinen & Factoring AG (B&F) la somme de 30 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel en ce compris le coût du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 28 juin 2018.

Condamne la société Cofrasud aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente


Chat Icon