Actions de Groupe : Cour d’appel de Paris, Pôle 6 – Chambre 12, 2 septembre 2022, 21/04410

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Actions de Groupe : Cour d’appel de Paris, Pôle 6 – Chambre 12, 2 septembre 2022, 21/04410

tion en forçant chaque victime à saisir la commission puis le tribunal, et mise sur l’absence d’action de groupe en matière de sécurité sociale pour la forcer à engager un avocat.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, la CIPAV demande à la cour de :

-confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé de l’irrecevabilité du recours
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 12

ARRÊT DU 02 septembre 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 21/04410 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWOP

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Avril 2021 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 20/01802

APPELANT

Monsieur [J] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322

INTIMEE

LA CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PREVOYANCE ET D’ ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Hélène LECAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027 substituée par Me Kévin BOUTHIER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Pascal PEDRON, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Pascal PEDRON, Président de chambre

Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre

M. Raoul CARBONARO, Président de chambre

Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour initialement prévu le 01 jullet 2022 et prorogé au 2 septembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Pascal PEDRON, Président de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel interjeté par M. [J] [P] d’un jugement rendu le 07 avril 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Bobigny dans un litige l’opposant à la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Assurance Vieillesse (la CIPAV).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [P] exerce une activité professionnelle en qualité d’auto-entrepreneur et est affilié à la CIPAV; qu’il a contesté son relevé de situation de retraite individuelle au regard de son statut ; qu’après vaine saisine de la commission de recours amiable, il a porté le litige devant le tribunal judiciaire de Bobigny le 22 octobre 2020.

Par jugement en date du 07 avril 2021, le tribunal a :

– rejeté la requête de M. [P] ;

– débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [P] aux dépens ;

– ordonné l’exécution provisoire.

Le tribunal a retenu que M. [P] ne démontrait pas avoir obtenu ou sollicité une décision de la CIPAV au sujet des informations portées sur son relevé informatif, et n’est donc pas recevable à contester directement cet état devant la commission de recours amiable puis devant le tribunal en l’absence de réclamation préalable en rectification auprès de l’organisme concerné.

M. [P] a interjeté appel de ce jugement le 03 mai 2021.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, M. [P] demande à la cour par voie d’infirmation du jugement déféré, de :

-déclarer son recours recevable,

-condamner la CIPAV à rectifier les points de retraite complémentaire acquis par lui sur la période 2012-2019 selon le détail suivant : 274,5 points en 2012, 156,4 points en 2013, 107 points en 2014, 442 points en 2015, 450,5 points en 2016, 448,6 points en 2017, 530,1 points en 2018 et 533,6 points en 2019 ;

-condamner la CIPAV à lui transmettre et à lui rendre accessible, y compris en ligne, un relevé de situation individuelle conforme, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision et, passé ce délai, sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

-condamner la CIPAV à lui verser la somme de 3 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral ;

-condamner la CIPAV, outre aux dépens, à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il expose que le relevé de situation individuelle retranscrit les droits à la retraite comptabilisés par chaque caisse de retraite dont le professionnel relève ; que la demande en ligne de l’adhérent sur le site dédié du Groupement d’Intérêt Public (GIP) INFO RETRAITE auquel la CIPAV renvoie elle-même, génère autant de décisions dématérialisées que de caisses concernées dont la CIPAV en dernière page ; qu’en téléchargeant le document, l’adhérent obtient la décision individuelle prise par la CIPAV de minoration de points; que cette décision faisant à l’évidence grief pouvait donc être contestée directement devant la Commission de recours amiable puis devant le Tribunal peu important à cet effet que les données y figurant ne soient pas définitives ; que c’est d’ailleurs la position de la Cour de cassation qui, par un arrêt publié du 11 octobre 2018 et au visa de l’article R142-1 du Code de la sécurité sociale dont excipe la CIPAV, a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris qui avait considéré qu’un particulier n’était pas recevable à contester son relevé de carrière (2ème Chambre civile, 11 octobre 2018, n°17-25.956, publié) ; que différentes cours d’appel, dont celle de [Localité 4], ont rendu plusieurs décisions en ce sens ; que la CIPAV est légalement tenue de mettre à jour le relevé de situation individuelle de ses adhérents ; que, pour une raison inexpliquée, la CIPAV a pris la décision de ne pas renseigner les données de son adhérent à compter de 2016 de sorte qu’aux termes de son recours amiable, il sollicitait la mise en ligne conforme des données le concernant tant s’agissant de leur retranscription effective que s’agissant de leur quantum ;

que le 23 janvier 2020, par son arrêt Tate, la Cour de cassation a posé pour principe que l’article 2 du décret n° 79-262 du 21 mars 1979 est seul applicable à la fixation du nombre de points de retraite complémentaire attribués annuellement à l’auto-entrepreneur inscrit à la CIPAV; que selon ce texte et la Cour de Cassation, « ce nombre de points procède directement de la classe de cotisation de l’affilié, déterminée en fonction de son revenu d’activité » ; qu’est donc inévitable la censure de la pratique de la CIPAV consistant à allouer des points de retraite complémentaire d’un montant inférieur à ceux de la première classe (à savoir moins de 40 points en « classe 1 » entre 2009 et 2012 et moins de 36 points depuis 2013 en « classe A ») ; que pour l’auto-entrepreneur dont le revenu excède la première classe de revenu en vigueur à compter de 2014 (soit 26 420 euros), une acquisition différente de 72 points correspondant à la classe B, 108 points en classe C, 180 points en classe D, etc. viole les prévisions de l’article 2 du décret précité ;

que de manière constante, l’assiette à retenir pour déterminer la classe de revenu applicable de l’autoentrepreneur est celle du chiffre d’affaires qui constitue l’assiette spécifique des cotisations (forfait social) ; que si l’article L 131-6 du code de la sécurité sociale définit l’assiette de cotisation des professionnels libéraux « classiques » comme étant le revenu retenu « pour le calcul de l’impôt sur le revenu », cette disposition n’est pas applicable aux auto-entrepreneurs pour lesquels l’article L 133-6-8 du code de la sécurité sociale prévoit une assiette de cotisation différente tout en présumant un niveau de cotisations équivalent ; qu’à une assiette dissociée correspond ainsi une contribution réputée équivalente et des droits équivalents ; qu’au surplus, si l’auto-entrepreneur est autorisé à régler un impôt sur le revenu calculé sur la base de son chiffre d’affaires grâce au prélèvement libératoire (2,2% du chiffre d’affaires), l’abattement fiscal de 34% qui s’applique hors prélèvement libératoire ne peut pas être transposé, au demeurant sans fondement textuel (ni dans le code de la sécurité sociale, ni dans le décret 79-262), pour la détermination de la classe de revenu ;

que par conséquent, sur la base de la classe de revenu (chiffre d’affaires), aucune contestation n’existant sur le paiement effectif des cotisations spécifiques au régime de l’auto-entreprise, les points de retraite complémentaire qu’il a acquis s’établissent ainsi : 36 points en 2015, 72 points en 2016, 36 points en 2017, 36 points en 2018 et 36 points en 2019 ;

qu’il souffre d’une légitime exaspération au constat de l’obstruction par la CIPAVd’une décision de justice rendue au plus haut niveau, par la Cour de Cassation ; qu’il ne comprend pas que cette caisse investie d’une mission de service public élude aussi facilement, et spécialement dans la présente instance, l’apport clair, précis et non équivoque de l’arrêt Tate ;

que la CIPAV pratique l’obstruction en forçant chaque victime à saisir la commission puis le tribunal, et mise sur l’absence d’action de groupe en matière de sécurité sociale pour la forcer à engager un avocat.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l’audience par son avocat, la CIPAV demande à la cour de :

-confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé de l’irrecevabilité du recours de M. [P] pour absence de décision préalable susceptible de recours ;

-juger du bon calcul des points de retraite de base et de retraite complémentaire de M. [P];

-attribuer à M. [P] les points de retraite de base suivants: 181,2 points de retraite de base en 2012 103,2 points de retraite de base en 2013 70,6 points de retraite de base en 2014 291,8 points de retraite de base en 2015 313, 2 points de retraite de base en 2016 306,2 points de retraite de base en 2017 360,5 points de retraite de base en 2018 530,1 points de retraite de base en 2019, soit un total de 2156, 8 points ;

-attribuer à M. [P] les points de retraite complémentaire suivants :10 points de retraite complémentaire en 2012, 9 points de retraite complémentaire en 2013, 9 points de retraite complémentaire en 2014, 27 points de retraite complémentaire en 2015, 45 points de retraite complémentaire en 2016, 42 points de retraite complémentaire en 2017, 49 points de retraite complémentaire en 2018 82, points de retraite complémentaire en 2019, soit un total de 273 points ;

-débouter M. [P] de l’ensemble de ses demandes ;

-condamner M. [P] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que la demande portée directement devant la commission et le tribunal sans avoir été formulée au préalable devant l’organisme concerné est irrecevable ; qu’en effet, le document sur lequel se fonde M. [P] à savoir un relevé qu’il s’est procuré sur le site internet « GIP INFO RETRAITE » n’est aucunement une décision ni un document émanant de sa part ; qu’étant purement indicatif et provisoire, ce document ne saurait pouvoir constituer une décision faisant grief, susceptible de contestation devant la commission de recours amiable ; que différents tribunaux ont rendu plusieurs décisions en ce sens ; que de plus, le relevé de situation individuelle de l’adhérent n’indique aucune donnée concernant les droits à la retraite au titre de la période 2016 à 2019, ce qui ne peut précisément pas caractériser une quelconque décision prise par elle;

que le statut auto entrepreneur est un statut dérogatoire au régime « normal » ouvrant droit à un régime de cotisation spécifique ; que pour chaque période d’affiliation, le statut d’auto entrepreneur permet aux professionnels libéraux, en fonction du chiffre d’affaire déclaré et donc du montant cotisé, de valider des trimestres de retraite et d’acquérir des points de retraite de base et de retraite complémentaire ; que selon l’article D 131-5-1 du code de la sécurité sociale, pour les professionnels libéraux affiliés auprès d’elle relevant du régime de l’auto entrepreneur, le taux du forfait social est fixé à 22 % ; qu’elle ne perçoit elle-même que 52,5 % du forfait social acquitté par l’auto-entrepreneur ;

que pour la période antérieure à 2016, le BNC est bien l’assiette de calcul des points ; qu’en effet, dans le régime de droit commun, les cotisations dues au titre de la retraite complémentaire sont assises sur le revenu professionnel déclaré par l’adhérent à savoir son bénéfice non commercial ; que cependant, l’auto-entrepreneur ne déclare qu’un chiffre d’affaires brut mensuel ou trimestriel, c’est-à-dire le montant de ses recettes brutes correspondant aux factures effectivement encaissées, sur lequel il ne peut pas déduire ses charges ; que dans ces conditions, afin d’obtenir une assiette de cotisations équivalente au régime de droit commun, les cotisations de l’auto-entrepreneur sont calculées sur le CA après abattement de 34% reconstituant ainsi un revenu correspondant au BNC et en application des dispositions des articles L133-6-8 du code de la sécurité sociale et 102 ter du code général des impôts ; que M. [P] commet une erreur en se fondant sur son chiffre d’affaires dans le calcul de ses points de retraite de base et complémentaire pour la période antérieure à 2016; que, s’agissant de la retraite complémentaire, ses statuts s’appliquent à tous ses assurés, quel que soit leur régime (régime de droit commun ou auto-entreprise) ; que ses statuts prévoient (article 3-12) une possibilité de réduction de 75 %, de 50 % ou de 25 % du montant de la cotisation pour les assurés dont les revenus d’activité sont inférieurs à un seuil fixé annuellement par le conseil d’administration ; que les auto-entrepreneurs étant soumis à un seuil de chiffre d’affaires ne peuvent en tout état de cause prétendre à 40 points sur le période de 2009 à 2012, ni à 36 points sur 2013 ; qu’il convient de calculer les points de retraite complémentaire pour la période antérieure à 2016, en prenant en compte le bénéfice non commercial déclaré de l’autoentrepreneur affilié afin de déterminer la plus faible cotisation non nulle dont il aurait pu être redevable au titre du régime classique en application de l’article 2 du décret du n°79262 du 21 mars 1979 et conformément à l’article R.133-30-10 du code de la sécurité sociale ; que depuis le 1er janvier 2016, la compensation de l’Etat ayant été supprimée, il y a lieu de vérifier pour chaque année, en application du décret, le montant de la cotisation versée par l’adhérent au titre de la retraite complémentaire pour lui attribuer les droits correspondants à la cotisation payée ; que le calcul des points acquis par l’adhérent ne résulte que de l’application des dispositions réglementaires applicables au régime de l’auto entrepreneur et du principe de proportionnalité des droits à la retraite aux cotisations versées ; que ce mode de calcul a été expressément validé à la fois par le Ministère de l’économie et des finances, le Ministère des affaires sociales et de la santé et le secrétaire d’état chargé du budget ;

que M. [P] ne subit aucun préjudice et qu’il ne peut lui être reproché aucune faute au regard d’une simple divergence d’interprétation des textes applicables à la situation litigieuse.

SUR CE, LA COUR

En l’espèce, à la suite de l’obtention de son relevé individuel de situation édité le 04 mars 2020 portant mention d’un certain nombre de points pour les années 2012 à 2015 au titre du régime de retraite de base et du régime de retraite complémentaire de la CIPAV, M. [P], affilié à la CIPAV à effet du 01er janvier 2012, a saisi la commission de recours amiable de la caisse d’une réclamation, sollicitant la rectification de ses droits à la retraite en terme d’attribution de points de retraite de base et de points de retraite complémentaire au titre des années 2012 à 2019.

Il résulte des conclusions de M. [P] que celui-ci réclame au dispositif de celles-ci la rectification de ses points uniquement de retraite complémentaire acquis par lui sur la période 2012-2019 à hauteur de 274,5 points en 2012, 156,4 points en 2013, 107 points en 2014, 442 points en 2015, 450,5 points en 2016, 448,6 points en 2017, 530,1 points en 2018 et 533,6 points en 2019, alors que dans le corps de ses écritures il articule sa demande à ce titre pour 36 points en 2015, 72 points en 2016, 36 points en 2017, 36 points en 2018 et 36 points en2019.

Il y a donc lieu d’ordonner la réouverture des débats dans les conditions fixées au dispositif à l’effet de permettre à M. [P] de s’expliquer sur ces contradictions, et de fournir le détail des calculs, année par année, aboutissant aux montants de points qu’il sollicite.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

SURSOYANT à statuer sur toutes les demandes :

ORDONNE la réouverture des débats à l’audience de la chambre 6- 12 en date du :

Jeudi 15 décembre 2022 à 13h30

en salle Huot-Fortin, 1H09, escalier H, secteur pôle social, 1er étage,

afin que M. [P] s’explique sur les contradictions susvisées figurant à ses écritures, et fournisse le détail des calculs, année par année, aboutissant aux montants de points sollicités.

DIT que la notification de la présente décision vaudra convocation des parties à cette audience.

DIT que M. [P] devra conclure en la matière avant le 31 octobre 2022.

DIT que la CIPAV pourra conclure en réplique avant le 05 décembre 2022.

La greffièreLe président


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