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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT MIXTE
DU 21 DECEMBRE 2023
(Renvoi à l’audience du 7 mars 2024)
N° 2023/355
Rôle N° RG 19/10040 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEPAS
[P] [A]
[Y] [B] épouse [A]
C/
[E] [S]
Société BUNYESPO SL
SA AVENIR TELECOM
SCP [J] AVAZERI [D]
SCP [V] [H] & [F][W]
Association UNEDIC A.G.S CGEA DE [Localité 13]
SAS CARREFOUR HYPERMARCHES
Société BNP PARIBAS
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Anne-Sophie DELAVAUD
Me Roselyne SIMON-THIBAUD
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire de [Localité 13] en date du 04 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 2019M01932.
APPELANTS
Monsieur [P] [A]
né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 14],
demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Anne-Sophie DELAVAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame [Y] [B] épouse [A]
née le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 12],
demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Anne-Sophie DELAVAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Maître [E] [S], es qualité de contrîoleur de la SA AVENIR TELECOM
demeurant [Adresse 11]
défaillant
Société BUNYESPO SL, es qualité de contrôleur de la SA AVENIR TELECOM
dont le siège social est sis [Adresse 10]
défaillante
SA AVENIR TELECOM, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
SCP AVAZERI [D], prise en la personne de Maître [C] [D], pris en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de la Société AVENIR TELECOM, désigné à ces focntions par jugement du Trib unal de Commerce de Marseille en date du 10 juilelt 2017
dont le siège social est sis [Adresse 8]
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
SCP [V] [H] & [F][W], prise en la personne de Maître [V] [H], es qualité de mandataire judiciaire de la Société AVENIR TELECOM, dési gné à ces fonctions par jugement rendu le 4 Janvier 2016 par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE, et maintenu en cette qualité par jugement du même Tribunal en date du 10 Juillet 2017
dont le siège social est sis [Adresse 9]
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Association UNEDIC [F]G.S CGEA DE [Localité 13], es qualité de contrôleur de la SA AVENIR TELECOM
dont le siège social est sis [Adresse 3]
défaillante
SAS CARREFOUR HYPERMARCHES Es qualité de contrôleur de la SA AVENIR TELECOM,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
défaillante
SA BNP PARIBAS, es qualité de contrôleur de la SA AVENIR TELECOM
dont le siège social est sis [Adresse 6]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseillère
Madame Agnès VADROT, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 21 Décembre 2023.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Décembre 2023
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
M. [P] [A] et Mme [Y] [B] épouse [A] ont créé le 1er décembre 2011, la SAS CIG Concept, ayant pour objet la vente au détail de cigarettes électroniques et accessoires.
Le 7 février 2014, ils ont constitué une holding, la SAS CIG Holding, au capital social de 15 000 euros, M. [P] [A] détenant 60 % des actions et Mme [Y] [B] épouse [A], 40 %. Cette société, dont M. [P] [A] était le président, avait pour objet la prise de participation dans toutes sociétés industrielles ou commerciales.
C’est ainsi que la SAS CIG Holding détenait à 100 % :
– les actions de la SAS CIG Concept, précitée,
– les actions de la société CIG Développement, créée le 15 avril 2014, ayant pour objet une activité de grossiste.
La SAS CIG Concept a étendu ses points de vente et constitué un réseau de distribution sous l’enseigne ‘CIG Concept’ comptant une vingtaine de magasins indépendants franchisés en 2015, outre les treize magasins qu’elle exploitait directement.
La SAS CIG Holding et la société Avenir Télécom se sont rapprochées en 2015 et, par acte sous-seings privés du 30 septembre 2015, la société Avenir Télécom a apporté 25 fonds de commerce spécialisés dans la revente de téléphones, de cigarettes électroniques et accessoires pour un montant de 1 715 932 euros, à la société CIG Holding.
Par acte du même jour, la SA Avenir Télécom a fait apport sous condition suspensive, à la SAS CIG Holding, de 28 fonds pour une valeur de 3 263 225 euros. L’apport sera considéré comme définitif pour 24 fonds courant novembre 2015, pour une valeur de 2 914 225 euros.
Par suite de cet apport en nature, la société Avenir Télécom est devenue associée au sein de la SAS CIG Holding à hauteur de 47 % du capital social avec les époux [A], ces derniers détenant ensemble 53 % du capital social.
Ces opérations d’apports réciproques ont été accompagnées également :
– d’une convention de compte courant,
– d’un pacte d’actionnaires entre la société Avenir Télécom et les époux [A],
– d’un accord confidentiel entre les parties concernant la prise en charge par la société Avenir Télécom, sous certaines conditions, de frais occasionnés à CIG Holding par la fermeture prématurée de magasins.
Peu après, par jugement du 4 janvier 2016, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Avenir Télécom. La SCP [J]-Avazeri, représentée par Me [J] a été désigné en qualité d’administrateur judiciaire et la SCP [V]. [H] & [F] [W] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire. Cette procédure a donné lieu à l’arrêté d’un plan de redressement par continuation d’une durée de dix ans, suivant jugement du 10 juillet 2017.
La SAS CIG Holding et ses filiales ont été placées également en redressement judiciaire par jugement du 18 février 2016, converti en liquidation judiciaire par jugement du 31 mars 2016.
Les époux [A] ont déclaré entre les mains du mandataire judiciaire :
– le 16 mars 2016, une créance pour un montant de 333 541,84 euros, portant sur l’exécution d’un accord confidentiel du 30 septembre 2015, qui a fait l’objet d’une contestation par courriers respectifs du 3 février 2017 et des 23 et 24 février 2017.
– le 17 mars 2016, une créance pour un montant de 406 000 euros au titre de leur préjudice financier.
La première créance a fait l’objet d’un rejet par le juge commissaire, suivant ordonnance du 18 juillet 2017, frappée d’un appel par les époux [A].
S’apercevant que la créance de 406 000 euros ne figurait pas sur l’état des créances, les époux [A] ont saisi, par requête du 4 septembre 2018, le juge commissaire afin qu’il se prononce sur l’admission de cette créance.
Par ordonnance en date du 4 juin 2019, le juge commissaire a rejeté la créance déclarée par les époux [A].
M. [P] [A] et Mme [Y] [B] épouse [A] ont interjeté appel de cette ordonnance suivant déclaration du 21 juin 2019.
***
Par conclusions d’appelant n°3 déposées et notifiées par RPVA le 15 mars 2022, M. [P] [A] et Mme [Y] [B] épouse [A] demandent à la cour de :
– débouter la société Avenir Télécom de la fin de non recevoir et de sa demande tendant à voir déclarer irrecevable l’action des époux [A] ;
– infirmer l’ordonnance du 4 juin 2019 rendue par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille en toutes ses dispositions ;
– admettre la créance déclarée par les époux [A] le 17 mars 2016 au passif de la société Avenir Télécom pour la somme de 406 000 euros, comme étant bien fondée ;
– condamner la société Avenir Télécom à payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Ils font valoir :
– que la fin de non recevoir soulevée par la société Avenir Télécom est invoquée pour la première fois devant la cour d’appel, méconnaît l’effet dévolutif du litige et doit par conséquent être rejetée comme étant irrecevable et non sérieuse.
– l’existence d’une créance de dommages et intérêts contractuelle et extra contractuelle à l’encontre de la société Avenir Télécom, en raison de l’inexécution par celle-ci de ses engagements et les conséquences dommageables de cette inexécution sur la situation personnelle des époux [A] ;
– que cette créance est distincte de celle fondée sur l’indemnisation prévue par l’accord confidentiel du 30 septembre 2015 ;
– les fautes commises par la société Avenir Télécom et l’existence d’un lien contractuel entre les époux [A] et la société Avenir Télécom ; ils font grief au premier juge de ne pas les avoir invités à s’expliquer ni à produire des justifications supplémentaires pour établir la faute de la société Avenir Distribution engageant sa responsabilité contractuelle : la violation de son devoir de bonne foi, le défaut d’exécution de l’accord confidentiel signé le 30 septembre 2015, et sa responsabilité délictuelle : son comportement déloyal durant les négociations, le défaut d’avances en compte courant, la dissimulation de la situation financière réelle de la société Avenir Télécom.
**
Par conclusions d’intimés déposées et notifiées par RPVA le 6 mai 2020, la SCP [J] Avazeri [D], représentée par Me [M] [J], ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de redressement de la société Avenir Télécom, la SA Avenir Télécom et la SCP [V]. [H] et [F] [W] ès qualités de mandataire judiciaire demandent à la cour de :
– déclarer irrecevable l’action de M. [P] [A] et de Mme [Y] [B] épouse [A] initiée par leur déclaration de créance en date du 17 mars 2016 ;
– En tout état de cause, dire et juger que la société Avenir Télécom n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
En conséquence,
– confirmer l’ordonnance du juge commissaire du 4 juin 2019 en toutes ses dispositions ;
– rejeter la créance déclarée par les époux [A] au passif de la société Avenir Télécom pour un montant de 406 000 euros ;
– condamner in solidum M. [P] [A] et Mme [Y] [B] épouse [A] à payer à la société Avenir Télécom la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
Les parties intimées soulèvent, à titre principal, la fin de non recevoir tirée du non cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle et du principe de concentration des moyens et, subsidiairement, soutiennent l’absence de faute commise par la société Avenir Télécom au préjudice des époux [A].
La SA BNP Paribas, Carrefour Hypermarchés, M. [E] [S], parties intimées n’ont pas constitué avocat.
L’affaire a été fixée à l’audience du 14 septembre 2023 et la clôture a été prononcée le 6 juillet 2023.
Il sera renvoyé, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens respectifs.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande et sur la fin de non recevoir tirées du non cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle et du principe de concentration des moyens :
Pour soutenir l’irrecevabilité des demandes des époux [A], les intimées soutiennent qu’en vertu du principe de non cumul des deux régimes de responsabilités, la victime d’un dommage se rattachant à l’exécution d’obligations prises par son cocontractant à son égard, ne peut en demander réparation que sur le fondement contractuel, sans option possible avec les règles de la responsabilité extra contractuelle, quand bien même lui seraient-elles plus favorables.
Ils font valoir que la créance déclarée le 17 mars 2016 au titre de leur créance indemnitaire, est corrélée à l’exécution des conventions d’apports du 30 septembre 2015, du pacte d’actionnaire du 30 septembre 2015 et de l’accord confidentiel du 30 septembre 2015 et relève par conséquent de la responsabilité contractuelle dès lors qu’elle vise les mêmes faits et tend à la réparation du même préjudice, et se confond avec celle qui a fait objet de la déclaration de créance indemnitaire de nature contractuelle déposée le 16 mars 2016.
Par ailleurs, les intimés invoquent le principe de la concentration des moyens qui obligerait les demandeurs à exposer dès la déclaration de créance du 16 mars 2026, l’ensemble des moyens qu’ils estiment de nature à fonder leur demande.
Enfin, ils font valoir, en réplique au moyen tiré de l’irrecevabilité de la fin de non recevoir, qualifiée de demande nouvelle par les époux [A], qu’en application des articles 123 et 564 du code de procédure civile, les fins de non recevoir peuvent être soulevée en tout état de cause et, en particulier, en cause d’appel.
Les époux [A] rétorquent que la fin de non recevoir soulevée constitue une prétention nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile, soulevée pour la première fois en cause d’appel et doit être rejetée comme étant irrecevable et non sérieuse.
Ils soutiennent que les deux déclarations de créances n’ont pas les mêmes causes ni le même objet et que contrairement à ce qui est allégué, la première déclaration de créance a trait à l’exécution de l’accord de confidentialité, la somme déclarée résultant de l’application des garanties dues par la société Avenir Télécom en cas de fermeture des points de vente.
Concernant la seconde déclaration de créance, elle vise l’obligation à réparation du préjudice subi de la société Avenir Télécom à raison des diverses fautes commises par elle dont l’inexécution par elle de ses engagements qui a eu des répercussion sur la situation personnelle des époux [A].
Ils reprochent à la société Avenir Télécom des manquements à l’égard de ses associés, et sa déloyauté en prenant des engagements envers eux et envers la société CIG Holding sachant qu’elle n’était pas en mesure de les honorer en raison de sa situation économique dégradée, l’ensemble de l’opération n’ayant eu pour seul but que de se défaire des fonds non rentables ; une fois l’opération conclue, et dès la levée des conditions suspensive, la société Avenir Télécom a cessé toute relation avec M. [A] et la société CIG Holding et a demandé son placement en redressement judiciaire, entraînant par là même l’ouverture de procédures de redressement judiciaire pour la société CIG Holding et ses filiales, entre février et mars 2016. Pour les époux [A], ces derniers ont perdu leur principale source de revenus et le fruit de leur travail de longue date.
Sur ce,
Il résulte de l’article 122 du code de procédure civile que les fins de non recevoir soulevées par une partie aux fins de contester le droit d’action de son adversaire, c’est-à-dire son droit de présenter sa prétention à un juge pour qu’il la dise bien ou mal fondée peuvent être invoquées en tout état de cause, et pour la première fois en cause d’appel.
En conséquence, le moyen tiré de l’irrecevabilité de l’action des époux [A] du fait du non cumul possible des responsabilités contractuelle et délictuelle, est recevable.
Il ressort des pièces versées aux débats, comme le relève à juste raison le tribunal de commerce, que la société Avenir Télécom n’a traité pour ce qui concerne les apports réciproques en nature de fonds consentis le 30 septembre 2015, qu’avec la société CIG Holding, dont le président est M. [P] [A], détentrice de la totalité des actions des sociétés CIG Concept et CIG Développement et non pas avec les époux [A], lesquels ont la qualité d’associés au sein de CIG Holding, à raison de 2 100 actions (46,11 %) pour M. [P] [A], 1 400 actions (30,74 % pour Mme [Y] [A]) et 1 054 parts (23,14 % pour Avenir Télécom.
Le pacte d’actionnaire (pièce n°27 des appelants) conclu entre Avenir Télécom représentée par M [O] et M. et Mme [A], ne concerne que les conditions de la cession des actions à des tiers, le prix de cession, le transfert de propriété des actions sous promesse, l’augmentation du capital social, les informations périodiques, le recours à l’expertise ou à l’audit, le droit de retrait d’Avenir Télécom.
Concernant l’exécution de l’accord de confidentialité du 30 septembre 2015, celui-ci prévoyait que la société Avenir Télécom s’engageait à l’égard des époux [A], pour 30 % des points de vente apportés à la société CIG Holding exploités par elle-même ou par l’une de ses filiales, à prendre en charge les frais de licenciement des salariés concernés, sous certaines conditions et plafonds et à prendre en charge les frais de résiliation des baux dans la limite de 35 % du montant des loyers restant dus par la société CIG Holding ou l’une de ses filiales, ce qu’elle n’aurait jamais fait.
La créance de dommages et intérêts déclarée le 16 mars 2016, à hauteur de la somme de 333 541,84 euros, relative à l’exécution du dit accord de confidentialité a été contestée et a donné lieu à une ordonnance de rejet du juge commissaire du 18 juillet 2017, frappée d’appel sous le n° RG n°17/14471.
L’instance en appel, enregistrée sous le n° RG n°17/14471 est éteinte en raison de la péremption prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 15 octobre 2020.
Concernant la créance déclarée le 17 mars 2016, elle découle, selon les écritures des époux [A], de l’inexécution par la société Avenir Télécom de son obligation d’information précontractuelle (articles 1112-1 du code civil), de la dissimulation par elle de sa situation financière particulièrement compromise, devant la conduire à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire un mois et demi après le dernier apport intervenu le 16 novembre 2015, la date de cessation des paiements ayant été fixée au 24 novembre 2015 et d’avoir surévalué les apports.
Ils mettent en cause les agissements déloyaux de la SAS Avenir Télécom ayant présidé à ces apports de fonds, qui leur ont causé un préjudice personnel, dans la mesure où, s’ils avaient eu connaissance de la situation critique de cette dernière, ils n’auraient jamais accepté de s’associer avec elle, sachant qu’elle ne serait pas en mesure de les accompagner, ni de répondre aux garanties auxquelles elle s’est engagée ( notamment par des avances de trésorerie, qu’ils ont été contraints de faire en raison de la défaillance de la SAS Avenir Télécom).
Selon eux, les agissements déloyaux de la SAS Avenir Télécom et sa défaillance ont eu des répercussions non seulement sur la situation de la société CIG Holding dont la santé financière était jusqu’alors saine, mais également sur la situation des époux [A], leur occasionnant un préjudice financier qu’ils évaluent à 200 000 euros, au titre d’avances de fonds, à 195 000 euros au titre de leur engagement de caution à l’égard de CIG Holding et 11 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile (au total : 406 000 euros).
La contestation portant sur la recevabilité de l’action engagée par les époux [A] et sur les demandes indemnitaires formées à l’encontre de la société Avenir Télécom par M. et Mme [A], au titre de leur préjudice financier, parait sérieuse et excède les pouvoirs juridictionnels du juge commissaire et, à sa suite, de la cour d’appel statuant en matière d’admission de créance.
Conformément aux dispositions des articles L 624-2 et R 624-5 du code de commerce, le juge-commissaire qui constate que la contestation ne relève pas de sa compétence, doit constater son absence de pouvoir, surseoir à statuer sur l’admission de la créance et inviter les parties à saisir le juge compétent dans le délai d’un mois prévu à l’article R624-5, à peine de forclusion.
Dès lors, l’ordonnance querellée devra être infirmée en ce qu’elle a rejeté la créance déclarée par M. et Mme [A], le 17 mars 2016, au redressement judiciaire de la SA Avenir Télécom.
Il y a lieu par conséquent de renvoyer M et Mme [A] à saisir le juge compétent afin que soit tranchée la contestation soulevée portant, d’une part, sur la recevabilité de l’action indemnitaire engagée par les époux [A] à l’encontre de la SA Avenir Télécom et, d’autre part, en cas de recevabilité de l’action, sur l’obligation à réparation de la société Avenir Télécom du préjudice financier, subi par les époux [A] du fait de ses agissements prétendument fautifs commis à l’occasion des opérations d’apports réciproques intervenues entre la société Avenir Télécom et la société CIG Holding courant 2015 ; dans l’attente de la décision, le sursis à statuer sera ordonné.
Les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens seront réservés.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, mis à disposition au greffe,
Déclare recevable la fin de non recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’action des époux [A] soulevée par la SA Avenir Télécom ;
Dit que la contestation soulevée excède le pouvoir juridictionnel du juge commissaire saisi en matière de contestation de créance et de la cour d’appel par voie de conséquence ;
Infirme, par conséquent, l’ordonnance rendue le 4 juin 2019 par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille en ce qu’elle a rejeté la créance déclarée par M. et Mme [A] le 17 mars 2016 pour la somme de 406 000 euros au titre de leur préjudice financier.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Invite Mme [Y] [B] épouse [A] et M. [P] [A] à saisir le juge compétent dans le délai d’un mois visé à l’article R 624-5 du code de commerce, à peine de forclusion, afin que soit tranchée la contestation portant sur la recevabilité de l’action engagée par les époux [A] à l’encontre de la SA Avenir Télécom d’une part, et en cas de recevabilité de l’action, sur l’obligation à réparation de la société Avenir Télécom du préjudice financier subi par les époux [A] du fait de ses agissements prétendument fautifs commis à l’occasion des opérations d’apports réciproques intervenues entre la SA Avenir Télécom et la société CIG Holding courant 2015, d’autre part ;
Ordonne le sursis à statuer dans l’attente de la décision définitive à intervenir ;
Réserve les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Renvoie l’affaire à l’audience du 7 mars 2024 à 8h40 afin que les appelants justifient à l’audience de la saisine du juge compétent pour trancher la contestation, et dit qu’à défaut par eux de l’avoir fait, l’ordonnance du juge commissaire sera confirmée.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE