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L’article 1242 du code civil énonce qu’on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait mais également de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.
Il est constant qu’une chose inerte ne peut être considérée comme l’instrument du dommage que s’il est rapporté la preuve qu’elle occupait un position anormale ou qu’elle était en mauvais état. Il appartient en conséquence à la victime de rapporter la preuve du rôle causal de la chose qui a été, de quelque manière et ne fût-ce qu’en partie, l’instrument du dommage et que, s’agissant d’une chose inerte, elle occupe une position anormale ou qu’elle soit en mauvais état. Le 27 mai 2020, Mme [G] [U] a chuté devant le magasin SCHMIDT à [Localité 6], en trébuchant sur un panneau publicitaire déplaçable. Cette chute lui a causé des blessures à l’épaule, au poignet et à la main droites. Elle est assurée par la MATMUT, qui a fait réaliser une expertise médicale concluant à une incapacité permanente partielle (AIPP) de 5%. La MATMUT a demandé à l’assureur de la société SCHMIDT, les MMA, de prendre en charge le sinistre, mais ces derniers ont refusé, estimant que la responsabilité de leur assurée n’était pas engagée. En conséquence, Mme [G] [U] et la MATMUT ont assigné la SAS GROUPE SCHMIDT, les MMA et la CPAM de la Gironde devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, demandant la reconnaissance de la responsabilité de la SAS GROUPE SCHMIDT et la réparation de son préjudice corporel. Les demandeurs ont formulé plusieurs demandes, incluant la reconnaissance de la responsabilité de la SAS MNB CUISINES (intervenant en lieu et place de la SAS GROUPE SCHMIDT), la liquidation de leur préjudice, et des indemnités pour divers postes de préjudice. En défense, les MMA et la SAS MNB CUISINES ont contesté la responsabilité, affirmant que le panneau publicitaire était en position normale et n’avait pas causé l’accident. La CPAM de la Gironde a également intervenu, demandant la reconnaissance de la responsabilité de la SAS MNB CUISINES et le remboursement de ses frais engagés pour Mme [G] [U]. L’affaire a été mise en délibéré après l’audience du 6 mai 2024, avec une ordonnance de clôture rendue le 20 février 2024. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 01 Juillet 2024
58G
RG n° N° RG 23/01152
Minute n°
AFFAIRE :
[G] [U]
Mutuelle MATMUT
C/
S.A.S. SCHMIDT GROUPE
CPAM DE LA GIRONDE
S.A. MMA IARD
Mutuelle MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
INTER VOLONT
S.A.S. MNB CUISINES
Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
la SELARL BOERNER & ASSOCIES
la SELAS CABINET LEXIA
Me Benjamin LAJUNCOMME
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :
Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition.
DEBATS :
à l’audience publique du 06 Mai 2024
JUGEMENT :
Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe
DEMANDERESSES
Madame [G] [U]
née le [Date naissance 3] 1966 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Maître Jean-david BOERNER de la SELARL BOERNER & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
Mutuelle MATMUT prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 8]
[Localité 11]
représentée par Maître Jean-david BOERNER de la SELARL BOERNER & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSES
S.A.S. SCHMIDT GROUPE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 7]
[Localité 9]
représentée par Me Benjamin LAJUNCOMME, avocat au barreau de BORDEAUX
CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualités audit siège
[Adresse 14]
[Localité 4]
représentée par Maître Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocats au barreau de BORDEAUX
S.A. MMA IARD
[Adresse 1]
[Localité 10]
représentée par Me Benjamin LAJUNCOMME, avocat au barreau de BORDEAUX
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 1]
[Localité 10]
représentée par Me Benjamin LAJUNCOMME, avocat au barreau de BORDEAUX
PARTIE INTERVENANTE
S.A.S. MNB CUISINES prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Localité 6]
représentée par Maître Benjamin LAJUNCOMME de la SELAS CABINET LEXIA, avocats au barreau de BORDEAUX
Le 27 mai 2020, Mme [G] [U] a été victime d’une chute devant le magain SCHMIDT de [Localité 6] en trébuchant sur le pied d’un panneau publicitaire déplaçable se trouvant devant l’entrée du magasin. Elle a présenté, à la suite de cette chute, un traumatisme de l’épaule droite, du poignet et de la main droite.
Mme [G] [U] est assurée à la MATMUT dans le cadre d’un contrat d’assurance multirisque accidents de la vie. Une expertise médicale confiée au docteur [V] par la MATMUT a conclu le 22 mars 2021 à une AIPP de 5%.
La MATMUT a demandé à la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES (les MMA), assureur de la société SCHMIDT la prise en charge du sinistre. Les MMA ont refusé leur garantie, considérant que la responsabilité de leur assurée n’était pas engagée.
C’est dans ces conditions que par acte d’huissier délivré les 17, 20 et 24 janvier 2023, Mme [G] [U] et la MATMUT ont fait assigner la SAS GROUPE SCHMIDT, les MMA et la CPAM de la Gironde devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour voir reconnaître la responsabilité de la SAS GROUPE SCHMIDT dans l’accident et obtenir la liquidation du préjudice corporel de Mme [G] [U].
Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 octobre 2023, Mme [G] [U] et la MATMUT demandent au tribunal de :
Vu l’article 1242-1 du code civil
Vu l’article 22 des conditions générales du contrat la Matmut
Vu les articles L. 121-12, L. 131-2 et L. 211-25 du Code des Assurances
Vu le rapport d’expertise du Docteur [V]
Vu les pièces versées aux débats
– Donner acte de l’intervention volontaire de la SAS MNB CUISINES en lieu et place de la SAS SHMIDT GROUPE.
– Donner acte à Madame [U] et la MATMUT de leur désistement d’instance à l’encontre de la SAS GROUPE SCHMIDT.
– Juger la SAS MNB CUISINES responsable des préjudices résultant de l’accident dont a été victime Madame [U] le 27 mai 2020 ;
– Condamner in solidum la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD
Assurances Mutuelles à réparer l’entier préjudice corporel de Madame [U] ;
A titre principal
– Liquider le préjudice corporel de Madame [U] comme suit :
* Dépenses de santé actuelles : 100,35 €
* Déficit Fonctionnel Temporaire : 1 575 €
* Déficit Fonctionnel Permanent (résultant de la réduction définitive des capacités
physiques ou intellectuelles) : 6 500 €
* Souffrances Endurées : 3 600 €
– Condamner in solidum la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Madame [U] la somme de 11 775,35 € en réparation de de son préjudice corporel.
A titre subsidiaire, si le Tribunal ne s’estimait pas suffisamment informé sur le préjudice corporel de Madame [U]
– Condamner in solidum la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à Madame [U] la somme provisionnelle de 10 000 euros à valoir sur l’indemnisation définitive de son préjudice corporel.
– Ordonner une expertise médicale de Madame [U].
– Condamner in solidum la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à la MATMUT la somme de 412.70 € (prestation en nature) versée au titre du contrat accident de la vie souscrit par son assurée.
En tout état de cause,
– Débouter la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles de leurs demandes, fins et conclusions
– Condamner in solidum la SAS MNB CUISINES avec MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser aux requérantes la somme de 1 500 € chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– Les Condamner aux entiers dépens.
En défense, dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 4 janvier 2024, les MMA et la SAS MNB CUISINES demandent au tribunal de :
Vu l’article 1242 du Code civil,
Vu la jurisprudence applicable en la matière,
Vu les pièces versées au débat,
– donner acte à la SAS MNB CUISINES de son intervention volontaire en lieu et place de la SAS GROUPE SCHMIDT
A titre principal,
– juger que le panneau publicitaire dans lequel Madame [U] s’est entravée se trouvait dans une position normale,
– juger que le panneau publicitaire n’a joué aucun rôle causal dans le dommage subi par Madame [U],
En conséquence,
– juger qu’aucune part de responsabilité ne saurait être imputée à la SAS MNB CUISINE dans la survenance du dommage subi par Madame [U],
– débouter Madame [U] et la MATMUT de leurs demandes indemnitaires formulées à l’encontre de la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
– condamner Madame [U] et la MATMUT à indemniser la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à hauteur de 1 500 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, soit 3 000 euros au total,
– condamner Madame [U] et la MATMUT aux dépens de l’instance,
A titre subsidiaire,
– débouter Madame [U] de sa demande subsidiaire tendant à l’organisation d’une expertise judiciaire et au versement d’une provision à valoir de 10.000 euros alors même que les concluantes acceptent le principe de la liquidation du préjudice de la demanderesse sur le fondement du rapport d’expertise établi le 10 mars 2021 par le Docteur [V], rendant ces demandes infondées.
– liquider le préjudice de Madame [U] et le réduire à de plus justes proportions, notamment :
– débouter Madame [U] de sa demande au titre des dépenses de santé actuelles (DSA), celle-ci n’étant pas justifiée,
– statuer ce que de droit sur la demande de Madame [U] au titre du déficit fonctionnel temporaire (DFT),
– réduire à de plus justes proportions l’indemnisation de Madame [U] au titre du déficit fonctionnel permanent (DFP), et la LIMITER à de 5 000 euros,
– réduire à de plus justes proportions l’indemnisation de Madame [U] au titre des souffrances endurées, et la LIMITER à 3 000 euros,
– statuer ce que de droit sur le recours subrogatoire formulé par la MATMUT à l’encontre des MMA,
– réduire à de plus justes proportions la demande formulée par la MATMUT et Madame [U] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
En tout état de cause,
– débouter Madame [U] et la MATMUT de toute demande plus ample ou contraire formulée à l’encontre de la SAS MNB CUISINE, la SA MMA IARD et la SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 juin 2023, la CPAM de la Gironde demande au tribunal de :
Vu les dispositions de l’article 1242 du Code civil et la Jurisprudence,
Vu les pièces du dossier,
– déclarer la CPAM DE LA GIRONDE recevable et bien fondée en ses écritures, demandes, fins et prétentions ;
En conséquence,
– recevoir l’intervention volontaire de la SAS MNB CUISINES ;
– déclarer la SAS MNB CUISINES responsable de l’accident dont a été victime Madame [G] [U] le 27 mai 2020 et des préjudices qui en ont résulté pour la CPAM DE LA GIRONDE
– déclarer que le préjudice de la CPAM DE LA GIRONDE est constitué par les sommes exposées dans l’intérêt de son assuré social, Madame [G][U] ;
A titre principal :
– condamner solidairement la SAS MNB CUISINES et ses assureurs les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à rembourser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 24.630,09 € en réparation de son préjudice ;
– condamner solidairement la SAS MNB CUISINES et ses assureurs les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1.162,00 euros au titre de l’indemnité forfaitaire en application des articles 9 et 10 de l’ordonnance n°96-51 du 24 Janvier 1996 ;
– dire et juger que ces sommes seront assorties des intérêts de retard au taux légal à compter de la décision à intervenir, et ce, en application des dispositions de l’article 1231-6 du Code Civil;
– ordonner la capitalisation des intérêts ;
A titre subsidiaire, si le Tribunal devait ordonner l’expertise sollicitée à titre subsidiaire par Madame [G] [U] :
– condamner solidairement la SAS MNB CUISINES et ses assureurs les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à indemniser la CPAM DE LA GIRONDE de son préjudice
– ordonner l’expertise médicale sollicitée par Madame [G] [U] ;
– surseoir à statuer sur le montant de l’indemnité due à la CPAM DE LA GIRONDE dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise ;
En tout état de cause,
– condamner solidairement la SAS MNB CUISINES et ses assureurs les SA MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à verser à la CPAM DE LA GIRONDE la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens ;
– dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit.
Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 6 mai 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour.
Sur l’intervention volontaire de la SAS MNB CUISINES
La SAS MNB CUISINES intervient volontairement à l’instance en lieu et place de la SAS GROUPE SCHMIDT et les demandeurs déclarent se désister de leurs demandes à l’encontre de cette dernière.
L’intervention volontaire de la SAS MNB CUISINES est recevable et le désistement d’instance des demandeurs à l’encontre de la SAS GROUPE SCHMIDT sera constaté.
Sur la responsabilité
Mme [G] [U] explique que le 27 mai 2020, elle s’est entravée le pied dans un panneau publicitaire placé devant l’entrée du magasin SCHMIDT de [Localité 6] et qu’elle a chuté. Les demandeurs et la CPAM de la Gironde fondent leur action sur les dispositions de l’article 1242 du code civil. Ils soutiennent que le panneau publicitaire et notamment son pied en étoile, qui se trouvait en sortie d’un passage piéton, occupait une position anormale et entravait le cheminement normal des piétons qui ne pouvaient aisément le contourner en raison de plots délimitant le trottoir et du drapeau flottant.
La SAS MNB CUISINES et les MMA considèrent que les demandeurs ne rapportent pas la preuve du positionnement anormal du panneau publicitaire. Elles expliquent que ce panneau, qui est parfaitement visible pour mesurer plusieurs mètres de hauteur et être agrémenté d’un drapeau flottant, est positionné à une distance parfaitement raisonnable du passage piéton et excentré par rapport à celui-ci. Il est en outre systématiquement collé à un plot bordant le passage pour prendre le moins de place possible et n’entraver ni le trottoir, ni la sortie du passage piéton. Elles demandent en conséquence au tribunal de débouter les demandeurs de l’intégralité de leurs demandes.
L’article 1242 du code civil énonce qu’on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait mais également de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.
Il est constant qu’une chose inerte ne peut être considérée comme l’instrument du dommage que s’il est rapporté la preuve qu’elle occupait un position anormale ou qu’elle était en mauvais état. Il appartient en conséquence à la victime de rapporter la preuve du rôle causal de la chose qui a été, de quelque manière et ne fût-ce qu’en partie, l’instrument du dommage et que, s’agissant d’une chose inerte, elle occupe une position anormale ou qu’elle soit en mauvais état.
En l’espèce, il n’est pas discuté que le 27 mai 2020, Mme [G] [U] a chuté alors qu’elle se trouvait à proximité du magasin SCHMIDT de [Localité 6]. Elle soutient qu’elle s’est entravé dans le pied d’un panneau publicitaire qui se trouvait en position anormale en empêchant le cheminement normal des piétons.
Elle produit le témoignage de M. [T] qui indique que “j’ai aidé à se relever et accompagné une dame à sa voiture après qu’elle ait trébuché sur le pied de l’enseigne SCHMIDT au complexe commercial de [Localité 6]”. Si ce témoignage permet de confirmer que Mme [G] [U] a effectivement trébuché sur le pied du panneau, il ne permet pas de caractériser la position anormale du panneau publicitaire.
Les parties ont chacune produit des photographies des lieux, qui permettent de constater que le panneau publicitaire litigieux est un drapeau flottant d’une certaine hauteur dont le mat est enserré dans un pied métallique en étoile. À l’endroit où s’est produit l’accident, le trottoir bordant différents magasins est délimité par des plots installés de façon régulière. Deux de ces plots encadrent la sortie d’un passage piéton. Tant les photographies produites par la victime que par les défendeurs montrent que le pied du panneau incriminé était installé contre l’un de ces plots. Si la vue d’ensemble de l’enseigne publicitaire permet de constater que compte tenu de sa hauteur, cette enseigne est visible, la photographie du pied montre qu’il est certes collé contre un plot fixé en limite de trottoir, mais qu’il déborde de ce plot en sortie directe du passage piéton de telle sorte qu’un piéton normalement vigilant peut aisément s’y entraver. Il est donc susceptible d’entraver le cheminement des piétons et ce d’autant plus qu’il est posé en sortie d’un passage piéton.
Mme [G] [U] rapporte en conséquence la preuve que le pied de l’enseigne publicitaire occupait une position anormale sur la chaussée. La SAS MNB SCHMIDT doit en conséquence être déclarée responsable de l’accident par application des dispositions de l’article 1242 du code civil. Elle sera condamnée, in solidum avec son assureur les compagnies MMA à l’indemniser intégralement de son préjudice.
Sur la liquidation du préjudice de Mme [G] [U]
Mme [G] [U] demande la liquidation de son préjudice sur la base du rapport d’expertise amiable établi par le docteur [V] mandaté par la MATMUT le 22 mars 2021. À titre subsidiaire, elle sollicite une expertise médicale judiciaire.
Dans leurs écritures, les défendeurs déclarent accepter la liquidation des préjudices subis par Mme [G] [U] sur la base de ce rapport amiable.
Il y a lieu en conséquence de liquider le préjudice subi par Mme [G] [U] au vu du rapport amiable établi par le docteur [V].
Il résulte de ce rapport que Mme [G] [U], née le [Date naissance 3] 1966, a présenté à la suite de l’accident dont elle a été victime le 27 mai 2020 un traumatisme direct sur l’épaule droite, le poignet et la main droite. L’expert note que la chute du 27 mai 2020 a entraîné la décompensation douloureuse et fonctionnelle d’un état antérieur concernant l’épaule droite.
L’expert a retenu :
– AIPP de 5% pour une raideur douloureuse de l’épaule droite chez une droitière, avec limitation des mouvements forcés d’élévation antérieure et latérale, de la rotation externe et du mouvement complexe main-dos.
– consolidation le 11 janvier 2021
– arrêt de travail du 27 mai 2020 au 8 janvier 2021
– gêne temporaire partielle de classe III du 27 mai 2020 au 3 septembre 2020, puis de classe I du 4 septembre 2020 au 11 janvier 2021
– souffrances endurées de 2,5/7 pour l’ensemble des souffrances en rapport avec l’accident jusqu’à la consolidation
– retentissement professionnel : elle pourra conserver une gêne dans les mouvements répétitifs en rapport avec son activité professionnelle d’employée de maison mais sans nécessité d’une réorientation professionnelle
– aide humaine non spécialisée sur la base d’une heure par jour sept jour sur sept pendant la période de gêne temporaire de classe III.
Au vu de ce rapport et de l’ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Mme [G] [U] sera réparé ainsi qu’il suit, étant observé qu’en application de l’article 31 de la loi du 5 juillet 1985,“Les recours subrogatoires des tiers payeurs s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’elles ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel.
Conformément à l’article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l’indemnisation, lorsqu’elle n’a été indemnisée qu’en partie ; en ce cas, elle peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence au tiers payeur dont elle n’a reçu qu’une indemnisation partielle.
Cependant, si le tiers payeur établit qu’il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s’exercer sur ce poste de préjudice”.
I – Préjudices patrimoniaux :
1 – Dépenses de santé actuelles (DSA) :
Ces dépenses correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d’hospitalisation pris en charge par les organismes sociaux ou restés à la charge effective de la victime.
La créance de la CPAM de la Gironde au titre des dépenses de santé prises en charge pour le compte de Mme [G] [U] s’élève à la somme de 808,13 €.
Mme [G] [U] sollicite le remboursement de la somme de 100,35 € au titre de frais pharmaceutiques restés à charge, demande à laquelle s’opposent les défendeurs considérant qu’il n’est pas établi de lien entre ces frais et l’accident.
Il est produit les factures de ces frais qui permettent d’établir que les frais pharmaceutiques d’un montant de 6,70 €, de 15,24 € et de 13,40 € sont directement imputables à l’accident. Il en est de même du resté à charge sur les honoraires du docteur [H] pour un montant de 50 €. La demande au titre de la somme de 15,01 € n’apparaît par contre pas justifiée puisqu’elle concerne une prescription antérieure à l’accident. Il sera en conséquence fait droit à la demande à concurrence de la somme de 85,34 €.
DSA : 893,47 €.
2 – Perte de gains professionnels actuels (PG.P.A.) :
Elles concernent le préjudice économique de la victime imputable au fait dommageable, pendant la durée de son incapacité temporaire.
La créance de la CPAM de la Gironde au titre des indemnités journalières versées à Mme [G] [U] s’élève à la somme de 23.821,96 €. Elle n’est pas discutée et il n’est pas fait valoir d’autre perte de gains.
PGPA : 23.821,96 €.
II – Préjudices extra-patrimoniaux :
A – Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :
1 – Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :
Ce poste de préjudice indemnise l’aspect non économique de l’incapacité temporaire, c’est-à-dire l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subi par la victime jusqu’à sa consolidation. Ce préjudice correspond à la gêne dans tous les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant sa maladie traumatique et à la privation temporaire de qualité de vie.
L’expert a retenu les périodes de déficit fonctionnel temporaire suivantes :
– gêne temporaire partielle de classe III du 27 mai 2020 au 3 septembre 2020, puis de classe I du 4 septembre 2020 au 11 janvier 2021
Il est sollicité l’indemnisation de ce préjudice à hauteur de 1.575 € sur la base d’une somme de 25 € par jour qui n’est pas discutée en défense.
DFT : 1.575 €.
2 – Souffrances endurées (SE) :
Elles sont caractérisées par les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, sa dignité, des traitements subis.
Les souffrances endurées ont été évaluées par l’expert à 2,5/7 pour l’ensemble des souffrances en rapport avec l’accident jusqu’à la consolidation. Il est sollicité le paiement d’une indemnité de 3.600 € qui n’apparaît pas excessive au regard de l’importance de ces souffrances. Il sera fait droit à la demande.
SE : 3.600 €.
B – Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :
1 – Le déficit fonctionnel permanent (D.F.P.) :
Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Plus précisément, il s’agit du préjudice non économique lié à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable, à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte à la vie de tous les jours.
Le déficit fonctionnel permanent a été évalué à 5% par l’expert au regard des séquelles de l’épaule. Mme [G] [U] était âgée de 54 ans à la date de consolidation. Elle peut être indemnisée comme demandé sur la base d’un point d’une valeur de 1.300 € soit une indemnité de 6.500 €.
DFP : 6.500 €.
Les divers postes de préjudices seront récapitulés comme suit :
– dépenses de santé actuelles DSA:893,47 €
– perte de gains actuels PGPA: 23.821,96 €
– déficit fonctionnel temporaire : 1.575 €
– déficit fonctionnel permanent : 6.500 €
– souffrances endurées: 3.600 €
TOTAL: 36.390,43 €.
Imputation de la créance de l’organisme social:
La créance de l’organisme social s’imputera sur les postes de préjudices suivants :
prestations en nature : dépenses de santé actuelles DSA
prestations en espèce : perte de gains actuels PGPA.
Le détail de cette créance est le suivant :
– prestations en nature: 808,13 €
– prestations en espèces: 23.821,96 €
Total de la créance présentée: 24.630,09 €
Les prestations en nature absorbent en partie le poste Dépenses de Santé Actuelles et les prestations en espèces absorbent le poste Perte de Gains Professionnels Actuels.
L’organisme social a été ou sera désintéressé dans le cadre des dispositions du Protocole de 1983 ou de celui prévu à l’article 376-1 alinéa 6 du Code de la Sécurité Sociale modifié par la loi du 21 Décembre 2006.
Après déduction de la créance des tiers-payeurs, le solde dû à Mme [G] [U] et à la charge in solidum de la SAS MNB CUISINES de son assureur s’élève à la somme de 11.760,34 €.
Conformément à l’article 1231-7 du Code Civil, les indemnités allouées à la victime porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement.
Sur les demandes de la CPAM de la Gironde
C’est à bon droit que la CPAM de la Gironde demande en application de l’article L376-1 du code de la sécurité sociale, la condamnation de SAS MNB CUISINES, tiers responsable in solidum avec ses assureurs les sociétés MMA à lui rembourser la somme de 24.630,09 € au titre des débours exposés pour son assurée sociale, outre la somme de 1.162 € au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion prévue à l’article L.376-1 du code de la sécurité sociale.
Les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter du présente jugement, avec capitalisation des intérêts comme demandé dans les conditions prévues à l’article 1343-2 du code
civil.
Sur les demandes de la MATMUT
Mme [G] [U] a souscrit un contrat multirisques accident de la vie auprès de la MATMUT. En application de ce contrat, la MATMUT a pris en charge des prestations d’aide à domicile pour un montant de 412,70 € dont elle réclame le remboursement. Les défendeurs déclarent s’en remettre à l’appréciation du tribunal sur ce point.
La MATMUT produit les factures de l’ADHAP permettant d’établir qu’elle a pris en charge des prestations de service à la personne au titre de l’article 12 des conditions générales du contrat d’assurance souscrit, pour un montant de 412,70 €. Elle est donc bien fondée dans son recours subrogatoire à obtenir la condamnation in solidum des défendeurs au remboursement de cette somme. Il sera fait droit à la demande.
Sur les autres demandes
Succombant à la procédure, la SAS MNB CUISINES et les MMA seront condamnées in solidum aux dépens.
Il serait inéquitable de laisser à la charge des demandeurs les frais non compris dans les dépens. Il leur sera alloué la somme de 1.000 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il sera de même alloué à la CPAM de la Gironde une indemnité de 500 €.
Le Tribunal,
Déclare recevable l’intervention volontaire de la SAS MNB CUISINES ;
Constate le désistement d’instance de Mme [G] [U] et de la MATMUT à l’encontre de la SAS GROUPE SCHMIDT ;
Déclare la SAS MNB CUISINES responsable de la chute dont Mme [G] [U] a été victime le 27 mai 2020 ;
Fixe le préjudice subi par Mme [G] [U], suite à l’accident dont elle a été victime le 27 mai 2020 à la somme totale de 36.390,43 € selon le détail suivant :
– dépenses de santé actuelles DSA:893,47 €
– perte de gains actuels PGPA: 23.821,96 €
– déficit fonctionnel temporaire : 1.575 €
– déficit fonctionnel permanent : 6.500 €
– souffrances endurées: 3.600 € ;
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à Mme [G] [U] la somme de 11.760,34 euros au titre de l’indemnisation de son préjudice corporel, après déduction de la créance des tiers payeurs, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à la CPAM de la Gironde la somme de 24.630,09 € au titre des prestations versées pour le compte de son assurée sociale, Mme [G] [U], outre une indemnité forfaitaire de gestion d’un montant de 1.162 €, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et application des dispositions de l’article 1343-2 du Code civil ;
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à rembourser à la MATMUT la somme de 412,70 € au titre des prestations versées au titre du contrat accident de la vie souscrit par Mme [G] [U]
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES aux dépens ;
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à Mme [G] [U] et à la MATMUT la somme de 1.000 € chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum la SAS MNB CUISINES, la SA MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES à payer à la CPAM de la Gironde la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi fait et jugé les an, mois et jour susdits.
Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT