Accident de la circulation et conséquences sur l’état de santé d’une victime au fil des années.

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Accident de la circulation et conséquences sur l’état de santé d’une victime au fil des années.
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Accident de la circulation

Le 19 septembre 1982, Mme [O] [B] a été blessée dans un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par son mari et celui de M. [V] [X].

Responsabilité et indemnisation initiale

Par un arrêt de la cour d’appel de Riom du 18 août 1988, M. [V] [X] a été déclaré responsable de l’accident et condamné in solidum avec la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (MATMUT) à réparer les conséquences de l’accident, le préjudice corporel de Mme [B] étant évalué à 767 507,32 francs.

Aggravation de l’état de santé

Le 17 juin 1992, le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand a confirmé que l’aggravation de l’état de Mme [B] était liée à l’accident, entraînant une indemnisation pour cette aggravation. Mme [B] a subi une nouvelle opération le 17 janvier 1994, et le tribunal a de nouveau indemnisé l’aggravation de son état par un jugement du 10 avril 1996, confirmé le 4 mars 1997.

Opération de 2017 et nouvelle demande d’indemnisation

Le 10 mai 2017, Mme [B] a subi une opération pour ablation du matériel d’ostéosynthèse. Par jugement du 18 décembre 2018, le tribunal a condamné la MATMUT à verser 11 610 euros à Mme [B] pour de nouvelles souffrances, un préjudice esthétique temporaire, un déficit fonctionnel temporaire, et une assistance par une tierce personne, tout en déboutant Mme [B] de sa demande d’indemnisation pour l’assistance après consolidation.

Nouvelle demande en 2023

Le 17 février 2023, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a condamné la MATMUT à verser 9 052,37 euros à Mme [B] pour des préjudices liés à l’accident, tout en déboutant Mme [B] du surplus de ses demandes. Mme [B] a interjeté appel le 6 avril 2023.

Demandes de Mme [B] en appel

Dans ses conclusions du 26 juin 2023, Mme [B] a demandé une révision du jugement concernant l’indemnisation pour l’assistance d’une tierce personne, ainsi que des sommes pour compenser le temps consacré par sa fille à son aide. Elle a également sollicité une nouvelle expertise pour évaluer ses besoins en assistance.

Réponse de la MATMUT

La MATMUT a demandé la confirmation du jugement et le rejet des demandes de Mme [B], tout en sollicitant sa condamnation aux dépens et au versement d’une somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ordonnance et expertises

Le 30 novembre 2023, le magistrat a constaté la caducité partielle de la déclaration d’appel, ne s’appliquant qu’à la CPAM, tandis que l’instance se poursuivait avec la MATMUT. L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juillet 2024.

Motivation du tribunal

Le tribunal a fondé sa décision sur l’expertise du Dr [N], notant que les conclusions du Dr [C] n’avaient pas été établies de manière contradictoire. Mme [B] a contesté l’évaluation de ses besoins en assistance, affirmant que son état s’était aggravé, tandis que la MATMUT a soutenu que certaines pathologies n’étaient pas directement liées à l’accident.

Conclusion du tribunal

Le tribunal a confirmé que l’expert n’avait pas retenu de nouveau déficit fonctionnel permanent et a limité l’indemnisation à la période du 15 mars 2019 au 13 février 2020. La demande d’indemnisation forfaitaire de 5 000 euros a également été rejetée. Mme [B] a été condamnée aux dépens d’appel, et chaque partie a été laissée à la charge de ses frais de défense.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

23 octobre 2024
Cour d’appel de Riom
RG n°
23/00606
COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 23 Octobre 2024

N° RG 23/00606 – N° Portalis DBVU-V-B7H-F7OA

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Arrêt rendu le vingt trois Octobre deux mille vingt quatre

Sur APPEL d’une décision rendue le 17 février 2023 par le Tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG n° 21/01079 ch1 cab2)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

Mme [O] [B] divorcée [Z]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Nathalie TIXIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

APPELANTE

ET :

MATMUT

Société d’assurance mutuelle à cotisations variables

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentant : Me François xavier LHERITIER de la SCP JAFFEUX-LHERITIER-DAUNAT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non représentée, non assignée

Ordonnance de caducité partielle en date du 30 novembre 2023

INTIMÉES

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, à l’audience publique du 05 Septembre 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame DUBLED-VACHERON, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 23 Octobre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 19 septembre 1982, Mme [O] [B] a été blessée dans un accident de la circulation impliquant le véhicule automobile conduit par son mari et le véhicule de M. [V] [X].

Par arrêt de la cour d’appel de Riom du 18 août 1988, M. [V] [X] a été déclaré responsable de l’accident et condamné in solidum avec la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes à en réparer les conséquences. Le préjudice corporel de Mme [B] a été évalué globalement à la somme de 767 507,32 francs.

Suivant jugement du 17 juin 1992, confirmée en appel, le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand a déclaré que l’aggravation de l’état de Mme [B] était en lien direct avec l’accident et indemnisé le préjudice découlant de cette aggravation.

Mme [B] a été de nouveau opérée le 17 janvier 1994 et par jugement du 10 avril 1996, le tribunal de grande instance a indemnisé l’aggravation de son état. Ce jugement a été confirmé par arrêt du 4 mars 1997.

Le 10 mai 2017, une opération chirurgicale a été pratiquée pour ablation du matériel d’ostéosynthèse placé en 1982. Mme [B] a de nouveau saisi le tribunal lequel a, par jugement du 18 décembre 2018, condamné la MATMUT à verser à Mme [B] la somme de 11 610 euros ventilée sur les postes suivants : nouvelles souffrances endurées, nouveau préjudice esthétique temporaire, déficit fonctionnel temporaire, assistance par une tierce personne. Mme [B] a été déboutée de sa demande d’indemnisation au titre de l’assistance par une tierce personne après consolidation.

Par jugement du 17 février 2023, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, saisi d’une nouvelle demande d’indemnisation de l’aggravation de l’état de santé de Mme [B], a :

-condamné la société MATMUT à payer à Mme [B] la somme de 9 052,37 euros en réparation des préjudices consécutifs à l’accident du 19 septembre 1982, somme détaillée comme suit :

-1 536 euros au titre de l’assistance par tierce personne temporaire

-495 euros au titre des frais divers

-3 090,62 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire

-3 000 euros au titre des souffrances endurées

-débouté Mme [B] du surplus de ses demandes ;

-précisé que la société Matmut prendrait en charge le règlement direct de la créance de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme ;

-condamné la société MATMUT à verser à Mme [B] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamné la société MATMUT aux dépens ;

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Mme [B] a relevé appel de cette décision le 6 avril 2023.

Aux termes de conclusions notifiées le 26 juin 2023, Mme [B] demande à la cour :

-de réformer le jugement en ce qu’il lui a octroyé la somme de 1 536 euros au titre du préjudice lié à l’assistance d’une tierce personne pour deux heures par semaine du 15 mars 2019 au 13 février 2020 ;

-de condamner la MATMUT à lui verser pour ce poste de préjudice les sommes suivantes :

-tierce personne à domicile de manière définitive sur une année : 5 824 euros

-tierce personne au-delà de la consolidation : 116 480 euros

A titre subsidiaire, pour la période du 15 mars 2019 au 29 juin 2020 : 7 752 euros

-d’allouer une somme forfaitaire de 5.000 euros pour compenser le temps consacré par sa fille qui a pris de ce fait du retard dans sa formation

-de condamner la MATMUT aux dépens ainsi qu’au versement d’une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire, d’ordonner une nouvelle expertise afin de déterminer le poste de préjudice de la tierce personne en confiant à l’expert la mission d’usage en pareille matière.

Aux termes de conclusions notifiées le 21 septembre 2023, la MATMUT sollicite :

– la confirmation du jugement et le rejet de toutes les demandes de Mme [B] ;

-la condamnation de Mme [B] aux dépens et au versement d’une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 30 novembre 2023, le magistrat chargé de la mise en état a constaté la caducité partielle de la déclaration d’appel et précisé que cette caducité ne produirait ses effets qu’à l’égard de la CPAM du Puy de Dôme et que l’instance se poursuivrait avec la MATMUT.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juillet 2024.

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions.

Motivation :

Le tribunal a fondé sa décision sur l’expertise réalisée par le Dr [N], expert judiciaire désigné par ordonnance de référé du 10 décembre 2019, rappelant que les conclusions du Dr [C], sur lesquelles Mme [B] fonde ses demandes consistent en un avis médico-légal et n’ont pas été établies contradictoirement.

Mme [B] indique que la cour peut se fonder sur un rapport d’expertise privé dès lors qu’il a pu être discuté contradictoirement et ce d’autant que copie de ce rapport a été transmis à la Matmut qui a pu faire des observations.

Mme [B] reproche au Dr [N] d’avoir sous-estimé l’aide humaine dont elle a besoin. Elle explique que sa fille a interrompu ses études et l’aide quotidiennement notamment dans les tâches ménagères mais également pour sa toilette, la cuisine, les déplacements en voiture les rendez-vous médicaux et paramédicaux. Elle souhaite donc que ce poste soit indemnisé de façon viagère puisque son état s’est aggravé tant au niveau du rachis cervical sous forme d’arthrose qu’au niveau des genoux sous forme de pathologies méniscales secondaires à l’accident. Ces pathologies sont la conséquence indirecte du traumatisme initial et lui occasionne un handicap certains dans les gestes du quotidien.

Elle répond à la Matmut qu’il n’existe pas de corrélation entre le taux d’AIPP et la nécessité d’une aide humaine.

La MATMUT rappelle que Mme [B] avait allégué d’un besoin d’aide à titre viager et en a été déboutée dans le cadre d’une décision définitive rendue le 8 décembre 2018.

Elle fait observer que :

Après analyse contradictoire de l’état de santé de Mme [B], l’expert a écarté toute demande viagère au titre de l’assistance tierce personne ;

Mme [B] refuse d’admettre que certaines de ses pathologies n’ont pas nécessairement de lien direct et certain avec l’accident de 1982 alors que l’expert n’a identifié comme seules conséquences de l’accident les périodes d’assistance tierce personne avant consolidation. Ainsi les troubles de l’équilibre allégués et les douleurs au genou droit n’ont pas été rattachées par l’expert de façon directe et certaine à l’accident.

Les certificats des Dr [T] et [C] ne comportent aucune analyse technique ni argumentation médicale et assènent un avis non contradictoire.

Mme [B] insiste sur le fait que son état s’est aggravé au niveau du rachis cervical et des genoux alors que le Dr [N] n’a pas retenu de nouveau déficit fonctionnel permanent.

Sur ce :

Mme [B] se fonde sur le rapport du Dr [C], médecin conseil de victime. Contrairement à l’expert judiciaire, ce dernier n’a pas examiné Mme [B]. L’expert judiciaire procède à un long commémoratif du parcours médical de Mme [B] ; il a recueilli les doléances de cette dernière puis les a confrontées à son propre examen clinique pour ensuite (au regard des soins suivis depuis la dernière expertise), déterminer quelle a été l’évolution de la victime et préciser quels sont les troubles qui sont en lien avec l’accident et qui caractérisent une aggravation de l’état de Mme [B]. Le Dr [C] n’opère pas ces dernières distinctions.

Le tribunal a donc justement retenu que le rapport de ce médecin conseil n’était pas de nature à remettre en question les conclusions circonstanciées de l’expert judiciaire.

Mme [B] a évoqué en cours d’expertise les difficultés suivantes :

-des douleurs lombaires plutôt latéralisées à droite, constituées d’un fond douloureux permanent et d’épisodes plus algiques survenant en moyenne trois fois par mois

-des douleurs cervicales plutôt gauches

-des troubles de l’équilibre permanents avec une impression de partir à gauche

-des douleurs de la jambe gauche à la marche.

Le Dr [N] indique que les troubles de l’équilibre, atypiques dans leur description, dont les explorations n’ont pas retrouvé d’origine précise, ne peuvent être rapportés de façon directe et certaine à l’accident du 19 septembre 1982 compte-tenu des lésions initiales médicalement attestées dans les suites proches de l’accident, du délai d’apparition de ces troubles mentionnés pour la première fois 11 ans après l’accident et de l’absence d’origine retrouvée aux divers bilans médicaux.

De la même façon, il impute les douleurs du genou droit à une lésion dégénérative du ménisque interne et en conclut que ces maux ne peuvent être rapportés de façon directe et certaine à l’accident.

S’agissant de l’impact de l’aggravation de l’état de la victime sur son activité quotidienne, il résulte de l’expertise que cette activité, telle que décrite par Mme [B], est comparable à celle mentionnée dans l’expertise précédente. Le Dr [I] n’avait alors pas retenu la nécessité d’une aide extérieure pour la période postérieure à la consolidation et le tribunal avait débouté Mme [B] de sa demande d’indemnisation au titre de l’assistance par tierce personne après la consolidation.

Ainsi, en retenant une aggravation de l’état rachidien de la victime depuis le 15 mars 2019, le Dr [N] a tenu compte de la nécessité d’une aide humaine notamment pour les activités ménagères et la conduite automobile, en rapport avec les seules conséquences de l’accident, de 2 heures par semaine du 15 mars 2019 au 13 février 2020.

Enfin, la Matmut fait observer à juste titre que l’expert n’a pas retenu de nouveau déficit fonctionnel permanent. Or ce poste indemnise la perte d’autonomie que vient compenser l’aide d’une tierce personne.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a limité cette indemnisation à la période du 15 mars 2019 au 13 février 2020 et à deux heures par semaine.

S’agissant de la demande d’indemnisation forfaitaire de 5.000 euros le tribunal a justement fait observer qu’aucun élément n’était produit en ce sens (aucune pièce nouvelle n’étant au demeurant communiquée en appel) et qu’il s’agissait d’un préjudice propre à la fille de Mme [B]. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Mme [B] succombant en ses demandes sera condamnée aux dépens d’appel.

L’équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses frais de défense.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [B] et la société Matmut des demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [O] [B] aux dépens d’appel.

Le greffier, La présidente,


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