Abus du CDD d’usage d’éclairagiste audiovisuel 
Abus du CDD d’usage d’éclairagiste audiovisuel 
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Preuve des raisons objectives

Le recours aux contrats de travail à durée déterminée et contrats de travail à durée déterminée d’usage (métiers d’électricien-éclairagiste) n’est régulier que si l’employeur justifie de raisons objectives s’entendant d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné.

Affaire France Télévisions

Or, si la société France Télévisions souligne que le salarié a travaillé pour plusieurs antennes régionales de France 3, elle ne produit aucun élément relatif aux projets particuliers ayant selon elle nécessité la conclusion des contrats litigieux. 

La seule référence à des besoins variables et ponctuels en fonction de l’actualité, de l’audimat et des modes sans aucune précision sur l’intitulé, la nature et la durée des programmes auxquels le salarié était affecté n’est pas suffisante pour établir le caractère temporaire de l’emploi occupé pour chacun des contrats. 

Quant au nombre de jours de travail effectués (10,34 jours par mois en moyenne de 1996 à 2020), il ne permet pas de démontrer la nature temporaire de l’emploi occupé.

Une réponse à un besoin permanent 

Il n’est dès lors pas établi que les nombreux contrats de travail à durée déterminée répondaient à une nature temporaire de l’emploi auquel il était affecté, à savoir éclairagiste.

Requalification en CDI 

Au contraire, pendant 24 années, le salarié a assuré de manière continue un poste technique nécessaire à l’activité normale et permanente du service de l’information de la société France Télévisions à savoir la production et diffusion audiovisuelle.

La relation contractuelle doit donc être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 9 avril 1996.

Le recours aux CDD d’usage 

Pour rappel, en vertu de l’article L1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

L’article L 1242-2 du code du travail dispose que ‘un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : (…) 3°) Emploi à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois’.

L’article L1244-1 du code du travail prévoit que “Les dispositions de l’article L1243-11 ne font pas obstacle à la conclusion de contrats de travail à durée déterminée successifs avec le même salarié lorsque le contrat est conclu dans l’un des cas suivants: (…)

3° Emplois (‘) pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;” .

Les “secteurs d’activité définis par décret” sont ceux visés à l’article D.1242-1du code du travail. Cet article précise:

“En application du 3° de l’article L. 1242-2, les secteurs d’activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois sont les suivants:

(‘) 6° Les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique, l’édition phonographique ;”

L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en ‘uvre par la directive n°1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

En outre, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d’usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné.

Il convient donc, d’une part, d’examiner les dispositions conventionnelles applicables, d’autre part, d’apprécier in concreto si les raisons objectives de nature à établir le caractère par nature temporaire de l’emploi occupé par M. [X].

L’article 1.2 de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles prévoit dans son paragraphe 1b que : « pour les métiers qui sont énumérés dans l’annexe 1, les parties reconnaissent, outre les dispositions de l’alinéa précédent, pour des activités temporaires, la possibilité de recourir à des contrats à durée déterminée en adaptant au cas particulier de ces contrats les règles prévues par l’article L. 122-1 ». L’annexe 1 mentionne les métiers d’électricien-éclairagiste.

L’article 1.1 de l’accord collectif national du 22 décembre 2006 de la branche de la télédiffusion relatif aux salariés employés sous contrats de travail à durée déterminée d’usage prévoit que ledit accord s’applique aux salariés employés sous contrats de travail à durée déterminée d’usage concourant aux activités de conception, de production, de fabrication de programmes audiovisuels ou de services, et exerçant un métier figurant dans les listes 1 et 2 du Titre IV du même accord.

L’article 1.2 de cet accord de branche relatif aux contrats de travail à durée déterminée d’usage dispose que ‘les éditeurs de services et de programmes audiovisuels sont amenés à concevoir, produire et fabriquer eux-mêmes tout ou partie des produits qu’ils diffusent. Ces activités susceptibles de s’exercer dans les différents domaines du programme, de l’information du sport et de la retransmission d’événements, quel qu’en soit le genre, permettent de recourir pour les fonctions listées en annexe au présent accord au contrat de travail à durée déterminée d’usage. Le recours à ce type de contrat n’est alors justifié que lorsque cet emploi s’exerce dans les circonstances suivantes : lors que pèsent sur ces activités des incertitudes quant à leur pérennité ou lorsqu’elles ont un caractère exceptionnel ou événementiel ou lorsqu’elles requièrent des compétences techniques ou artistiques spécifiques. La durée de collaboration est alors liée en tout ou partie à la durée du programme ou de la production objet du contrat.’

L’article 4.1 dispose que ‘ les fonctions pour lesquelles il est possible de recourir au contrat de travail à durée déterminée d’usage dans la branche de la télédiffusion sont répertoriés sur deux listes. Les fonctions de la liste 1 sont réparties en neuf filières et répertoriées à l’annexe I : (…) D- fabrication : plateau, peinture, tapisserie construction décors’.

L’annexe I intitulée ‘ Fonctions et filières d’usage’ mentionne sous la filière D ‘fabrication : plateau, peinture, tapisserie, construction, décors’ les fonctions d’«éclairagiste » et d’ «électricien» de sorte que pour ces fonctions le contrat de travail à durée déterminée d’usage peut être envisagé.

Quant à l’accord d’entreprise France Télévisions du 28 mai 2013 en vigueur à compter du 1er janvier 2013, il s’applique en vertu de son article 1.2, d’une part, à tous les salariés sous contrat de travail à durée indéterminée et contrat de travail à durée déterminée, d’autre part, aux salariés sous contrat de travail à durée déterminée conclus en application des articles L1242-2 alinéa 3 du code du travail pour les dispositions non couvertes par l’accord collectif national de branche de la télédiffusion relatif aux salariés employés sous contrat de travail à durée déterminée d’usage du 22 décembre 2006, de sorte qu’il n’est pas de nature à voir écarter les dispositions de l’accord de branche sus évoquées.

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