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Les supports de presse satiriques bénéficient d’une liberté d’expression étendue pouvant paralyser le délit d’injure et/ou d’atteinte à la dignité humaine.
Laurent Ruquier, l’animateur de l‘émission « On n’est pas couché » a été relaxé du délit de complicité de diffamation. L’association de Marine Le Pen à un dessin d’excrément (en couverture de Charlie Hebdo, filmée au cours de l’émission « On n’est pas couché ») n’a pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression. La chaîne de télévision France 2 a diffusé, dans l’émission « On n’est pas couché », une séquence au cours de laquelle, à l’issue de l’interview de l’un des candidats à l’élection présidentielle, ont été montrées des affiches, publiées trois jours auparavant par le journal « Charlie Hebdo », concernant ces candidats. L’une de ces affiches représentait un excrément fumant surmonté de la mention « Marine Le Pen, la candidate qui vous ressemble ».
Pour exclure l’injure ou l’atteinte à la dignité humaine, la Cour de cassation a pris en compte, le genre délibérément satirique, voire régulièrement scatologique, de l’hebdomadaire Charlie Hebdo. La liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique. Elle ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard de l’article 10, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La restriction qu’apportent à la liberté d’expression les articles 29, alinéa 2, et 33 de la loi du 29 juillet 1881, qui prévoient et répriment l’injure, peut donc être justifiée si elle poursuit l’un des buts énumérés à l’article 10, paragraphe 2, de cette Convention. Parmi ces buts, figure la protection de la réputation ou des droits d’autrui.
Il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que la réputation d’une personne, même lorsque celle-ci est critiquée au cours d’un débat public, fait partie de son identité personnelle et de son intégrité morale et, dès lors, relève de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, arrêt du 15 novembre 2007, Pfeifer c. Autriche, n° 12556/03, § 35).
Le droit au respect de la vie privée et le droit à la liberté d’expression ayant la même valeur normative, il appartient au juge saisi de rechercher, en cas de conflit, un juste équilibre entre ces deux droits.
La dignité de la personne humaine ne figure pas, en tant que telle, au nombre des buts légitimes énumérés à l’article 10, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Si elle est de l’essence de la Convention (CEDH, 22 novembre 1995, S.W. c. Royaume-Uni, n° 20166/92, § 44), elle ne saurait être érigée en fondement autonome des restrictions à la liberté d’expression. Dès lors, pour déterminer si la publication litigieuse peut être incriminée, il suffit de rechercher si elle est constitutive d’un abus dans l’exercice du droit à la liberté d’expression.
L’exigence de proportionnalité implique de rechercher si, au regard des circonstances particulières de l’affaire, la publication litigieuse dépasse les limites admissibles de la liberté d’expression. En l’absence de dépassement de ces limites, et alors même que l’injure est caractérisée en tous ses éléments constitutifs, les faits objet de la poursuite ne peuvent donner lieu à des réparations civiles.