Contrefaçon : faut-il demander la rétention douanière ?
Contrefaçon : faut-il demander la rétention douanière ?
Ce point juridique est utile ?

Paradoxalement, il peut être intéressant, sur le terrain du préjudice, de laisser commercialiser une contrefaçon avant de saisir les juridictions. En effet, une rétention douanière prive le titulaire des droits de l’octroi de dommages et intérêts au titre de la commercialisation des produits contrefaits.

Rétention douanière de sacs YSL

Dans cette affaire, la société Yves Saint Laurent (YSL) a été informée par la direction de la douane de la mise en retenue de 563 sacs de la société Tournesol soupçonnés de porter atteintes à ces marques.  Par la suite, la société YSL a fait assigner la société Tournesol devant le TGI de Paris en contrefaçon de marques et concurrence déloyale.

Contrefaçon établie

Le signe contesté n’étant pas la reproduction à l’identique des marques invoquées, faute de les reproduire sans modification ni ajout en tous les éléments les composant, les juges ont recherché s’il existait entre les signes en présence un risque de confusion, lequel comprend le risque d’association, qui doit être apprécié globalement à la lumière de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble par eux produite, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants.

Visuellement, la similitude entre le signe contesté et les marques semi-figuratives YSL tenait  à la reprise de l’agencement spécifique de ces marques de présentation identique composée de 3 lettres majuscules superposées à savoir : Y en partie haute, S en partie centrale et, L en partie inférieure, ces 3 lettres s’entrelaçant sur un axe oblique.

Intellectuellement, l’adjonction d’un dessin de lapin revêt dans le signe litigieux un caractère accessoire de décoration qui sera spontanément compris comme se superposant à un dessin de lettres qui par sa disposition graphique évoque un logo. Conceptuellement cette représentation renvoie spontanément au monogramme formant les marques semi-figuratives YSL par une construction typique d’enchevêtrement de trois mêmes lettres capitales.

Il s’infère de la comparaison visuelle, phonétique et intellectuelle des signes en présence une impression d’ensemble suffisamment proche pour créer un risque de confusion, pour des produits identiques ou similaires, dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne, normalement informé et raisonnablement avisé des produits désignés par les marques YSL, lequel serait fondé à considérer le signe contesté comme une déclinaison des dites marques et à attribuer aux produits en cause une origine commune ou à tout le moins à les associer comme provenant d’entreprises économiquement liées.

Préjudice limité

Le préjudice moral subi, en ce compris la banalisation du signe YSL tel que déposé, résultant de cette importation en vue de la commercialisation, mais également de la revente admise, demeurait toutefois limité et les bénéfices réalisés par la société Tournesol comme les conséquences économiques négatives dont le manque à gagner ou la perte subie par la société YSL ne pouvaient qu’être minimes compte tenu du nombre de ventes réalisées, mêmes si la société YSL a pu plusieurs années avant les faits reprochés proposer des sacs en tissu, similaires, sur lesquels étaient apposés sa marque YSL (10 000 euros).


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