Aux termes de l’article 789, 1° du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance.
Selon l’article 73 du même code, constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. L’article 377 du code de procédure civile énonce qu’en dehors des cas où la loi le prévoit, l’instance est suspendue par la décision qui sursoit à statuer, radie l’affaire ou ordonne son retrait du rôle. L’article 378 du même code dispose que la décision de sursis à statuer suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’évènement qu’elle détermine. En application de l’article 379 du code de procédure civile, le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l’expiration du sursis, l’instance est poursuivie à l’initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d’ordonner, s’il y a lieu, un nouveau sursis. Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai. |
Résumé de l’affaire : La société ARCAL, fabricant de clôtures et titulaire du brevet français FR 3 070 109 B1, a demandé une saisie-contrefaçon contre la société AVEL DIFFUSION, qui commercialise des lames d’occultation, et la société GEPLAST, spécialisée dans les produits en plastique. Une ordonnance de saisie a été délivrée le 7 décembre 2022, et la saisie a eu lieu le 21 décembre 2022. ARCAL a ensuite assigné AVEL DIFFUSION et GEPLAST en contrefaçon de son brevet. En réponse, AVEL DIFFUSION a demandé en référé la rétractation de l’ordonnance de saisie, mais le tribunal a rejeté ses demandes le 15 mai 2024, condamnant AVEL DIFFUSION à verser 4.000 euros à ARCAL. AVEL DIFFUSION a interjeté appel de cette décision. Les deux sociétés ont ensuite demandé un sursis à statuer en attendant la décision de la Cour d’appel de Paris concernant un recours d’une autre société, OCÉANE PROFILS, contre le brevet d’ARCAL. Le juge de la mise en état a décidé de surseoir à statuer sur les demandes d’ARCAL en attendant l’arrêt de la Cour d’appel concernant le recours d’OCÉANE PROFILS, tout en déboutant AVEL DIFFUSION et GEPLAST de leur demande de sursis liée à leur appel. L’affaire a été renvoyée à une audience de mise en état prévue pour le 12 décembre 2024.
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Q/R juridiques soulevées :
Sommaire Quelles sont les conditions pour obtenir une saisie-contrefaçon selon le Code de la propriété intellectuelle ?La saisie-contrefaçon est une procédure permettant à un titulaire de droits de propriété intellectuelle de faire constater des actes de contrefaçon. Selon l’article L. 615-5 du Code de la propriété intellectuelle, le titulaire d’un brevet peut demander au juge des référés d’ordonner une saisie-contrefaçon. Cette demande doit être justifiée par des éléments de preuve suffisants, indiquant que des actes de contrefaçon sont susceptibles de se produire. Le juge peut autoriser la saisie si les conditions de l’article L. 615-5 sont remplies, notamment la nécessité de préserver les preuves et d’éviter la disparition des éléments constitutifs de la contrefaçon. Il est également important de noter que la saisie-contrefaçon doit être effectuée par un huissier de justice, qui dressera un procès-verbal des opérations. Quels sont les effets d’un sursis à statuer dans une procédure judiciaire ?Le sursis à statuer est une décision qui suspend le cours d’une instance jusqu’à la survenance d’un événement déterminé. L’article 377 du Code de procédure civile précise que l’instance est suspendue par la décision qui sursoit à statuer. Cela signifie que toutes les actions et décisions relatives à l’affaire sont mises en attente, et le juge ne peut pas statuer tant que le sursis est en vigueur. L’article 378 indique que cette suspension dure jusqu’à l’événement qui a été déterminé par le juge. Il est important de noter que le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge, et à l’expiration du sursis, l’instance reprend son cours. Comment se déroule la procédure de référé-rétractation selon le Code de procédure civile ?La procédure de référé-rétractation permet à une partie de demander la rétractation d’une ordonnance rendue en référé. L’article 488 du Code de procédure civile stipule que la demande de rétractation doit être formée dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l’ordonnance. La partie qui souhaite obtenir la rétractation doit justifier d’un motif légitime, tel qu’une erreur de droit ou de fait dans l’ordonnance contestée. Le juge examine alors la demande et peut décider de maintenir l’ordonnance, de la rétracter ou de la modifier. Il est également possible de faire appel de la décision rendue en référé, selon les dispositions de l’article 489 du même code. Quelles sont les conséquences financières d’une décision de justice en matière de dépens ?Les dépens sont les frais engagés par les parties dans le cadre d’une procédure judiciaire. L’article 696 du Code de procédure civile prévoit que la partie perdante est généralement condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge. Cela signifie que la partie qui a perdu le procès devra rembourser les frais engagés par la partie gagnante, tels que les frais d’huissier, d’avocat, et autres frais de justice. L’article 790 précise que le juge de la mise en état peut également statuer sur les demandes formées au titre de l’article 700, qui permet d’allouer une somme à titre de frais irrépétibles. Il est donc essentiel pour les parties de bien préparer leur dossier afin de minimiser les risques financiers liés à la procédure. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Le
Copie certifiée conforme délivrée à :
– Maître Vanner, vestiaire B260
– Maître Chirac Kollarik, vestiaire A747
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3ème chambre
3ème section
N° RG 23/00972 –
N° Portalis 352J-W-B7H-CY3LE
N° MINUTE :
Assignation du :
20 janvier 2023
incident
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 11 septembre 2024
DEMANDERESSE
S.A.S.U. ARCAL
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Maître Olympe VANNER de l’AARPI JACOBACCI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0260
DEFENDERESSES
S.A.S.U. AVEL DIFFUSION
[Adresse 5]
[Localité 1]
S.A.S. GEPLAST
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentées par Maitre Sandra CHIRAC KOLLARIK, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0747 et par Maître Etienne de MASCUREAU de la SCP ACR AVOCATS, avocat au barreau d’ANGERS, avocat plaidant
Décision du 11 septembre 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 23/00972 – N° Portalis 352J-W-B7H-CY3LE
MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT
Linda BOUDOUR, juge
assistée de Lorine MILLE, greffière
DEBATS
A l’audience sur incident du 23 mai 2024 , avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 11 septembre 2024.
ORDONNANCE
Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
La société ARCAL se présente comme un fabricant de clôtures, en particulier de lames d’occultation en matériau plastique, notamment en PVC, et de poteaux en aluminium, s’adressant aux particuliers à travers différents réseaux de distribution.
Elle est titulaire du brevet français FR 3 070 109 B1 intitulé « Système de clôture comprenant au moins un panneau treillis et au moins une lame occultante », dont la délivrance a été publiée le 4 décembre 2020.
La société AVEL DIFFUSION se présente comme ayant pour activité la commercialisation et l’installation de lames d’occultation en PVC, bois, composite (loryza) et aluminium et de clôtures en aluminium.
La société GEPLAST se présente comme ayant pour activité la fabrication et la transformation de produits en matière plastique, notamment l’extrusion de profilés.
Par requête du 6 décembre 2022, la société ARCAL a sollicité du président du tribunal judiciaire de Paris l’autorisation de faire procéder à une saisie-contrefaçon au siège social de la société AVEL DIFFUSION, laquelle a été délivrée par ordonnance du 7 décembre 2022. Les opérations de saisie-contrefaçon ont été réalisées le 21 décembre 2022.
Par actes de commissaire de justice du 20 janvier 2023, la société ARCAL a fait assigner la société AVEL DIFFUSION et la société GEPLAST devant le tribunal judiciaire de Paris en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 8, 11, 12 et 13 du brevet FR 3 070 109 B1.
Par acte de commissaire de justice du 23 octobre 2023, la société AVEL DIFFUSION a fait assigner la société ARCAL devant le président du tribunal judiciaire de Paris en référé-rétractation de l’ordonnance de saisie-contrefaçon du 7 décembre 2022.
Par ordonnance du 15 mai 2024, le président du tribunal judiciaire de Paris a rejeté l’ensemble des demandes de la société AVEL DIFFUSION et l’a condamnée à payer à la société ARCAL la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Selon déclaration du 22 mai 2024, la société AVEL DIFFUSION a interjeté appel de l’ordonnance du 15 mai 2024.
Par dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 22 mai 2024, auxquelles il est renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société AVEL DIFFUSION et la société GEPLAST demandent au juge de la mise en état, au visa des articles 377 et suivants et 789 du code de procédure civile, de :
« SURSEOIR à statuer dans la présente instance dans l’attente de la décision définitive qui sera rendue par la Cour d’appel de PARIS sur le recours en opposition formée par la société OCÉANE PROFILS à l’encontre du brevet ARCAL et de la décision définitive qui sera rendue par la Cour d’appel de PARIS dans le cadre de la procédure de référé-rétractation de l’ordonnance sur requête du 7 décembre 2022 ayant autorisé la saisie-contrefaçon du 21 décembre 2022 ;
RESERVER les dépens ».
Par dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 7 décembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société ARCAL demande au juge de la mise en état, au visa des articles 377 et suivants du code de procédure civile, de :
« REJETER la demande de sursis à statuer des sociétés AVEL DIFFUSION et GEPLAST fondée sur le référé-rétractation qui initiée le 23 octobre 2023 à l’encontre de l’ordonnance rendue par Monsieur le Président du tribunal Judiciaire de Paris le 7 décembre 2022 ayant autorisé la saisie chez AVEL DIFFUSION ;
PRENDRE ACTE que la société ARCAL s’en rapporte à la décision du Juge de la mise en état sur l’opportunité d’un sursis à statuer pour une bonne administration de la justice au regard du recours pendant devant la Cour d’appel de Paris formé par OCEANE PROFILS à l’encontre de la décision OPP21-0013 rendue par l’INPI, enrôlé sous le numéro de RG 23/06726 ;
En tout état de cause :
LIMITER le sursis à statuer au jour du prononcé de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris le cadre du recours formé par OCEANE PROFILS à l’encontre de la décision OPP21-0013 rendue par l’INPI, enrôlé sous le numéro de RG 23/06726 ;
RESERVER les dépens ».
Les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries.
Sur la demande de sursis à statuer
Aux termes de l’article 789, 1° du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance.
Selon l’article 73 du même code, constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours.
L’article 377 du code de procédure civile énonce qu’en dehors des cas où la loi le prévoit, l’instance est suspendue par la décision qui sursoit à statuer, radie l’affaire ou ordonne son retrait du rôle.
L’article 378 du même code dispose que la décision de sursis à statuer suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’évènement qu’elle détermine.
En application de l’article 379 du code de procédure civile, le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l’expiration du sursis, l’instance est poursuivie à l’initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d’ordonner, s’il y a lieu, un nouveau sursis. Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.
En l’espèce, il est constant que le 3 septembre 2021 la société OCEANE PROFILS a formé opposition au brevet FR 3 072 109 B1 dont la société ARCAL est titulaire en ce que l’objet des revendications 1 à 13 n’est pas nouveau et n’implique pas d’activité inventive. Par décision du 9 mars 2023, le Directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (ci-après INPI) a décidé que l’opposition est justifiée et que le brevet FR 3 072 109 B1 est maintenu sous une forme modifiée selon la requête principale du 6 décembre 2021 (pièce AVEL DIFFUSION et GEPLAST n° 9).
Selon déclaration du 12 avril 2023, la société OCEANE PROFILS a formé un recours en annulation devant la Cour d’appel de Paris contre cette décision du Directeur général de l’INPI en ce qu’elle a maintenu le brevet FR 3 072 109 B1 sous une forme modifiée selon la requête principale du 6 décembre 2021 et n’a pas fait droit à son opposition tendant à la révocation du brevet contesté dans son intégralité (pièce AVEL DIFFUSION et GEPLAST n°10).
Or, quel que soit son sens, l’arrêt à intervenir de la Cour d’appel de Paris statuant sur le recours en annulation formé par la société OCEANE PROFILS, laquelle invoque un défaut de nouveauté et un défaut d’activité inventive des revendications 1 à 13 du brevet FR 3 072 109 B1, aura nécessairement une incidence sur la solution du litige de l’action en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 8, 11, 12 et 13 du brevet FR 3 070 109 B1 pendante devant la 3ème chambre civile du tribunal judiciaire de Paris.
En conséquence, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, il convient de surseoir à statuer sur les demandes de la société ARCAL dans l’attente de l’arrêt définitif de la Cour d’appel de Paris statuant sur le recours en annulation formé par la société OCEANE PROFILS à l’encontre de la décision du Directeur général de l’INPI du 9 mars 2023 rendue sur opposition au brevet français FR 3 070 109 B1 dont la société ARCAL est titulaire.
En revanche, il n’y a pas lieu de sursoir à statuer jusqu’à l’arrêt définitif de la Cour d’appel de Paris statuant sur l’appel interjeté par la société AVEL DIFFUSION à l’encontre de l’ordonnance du Président du tribunal judiciaire de Paris du 15 mai 2024 rendue sur référé-rétractation à l’égard de l’ordonnance de saisie-contrefaçon du 7 décembre 2022, dès lors qu’il ressort tant de l’assignation délivrée le 20 janvier 2023 aux défenderesses que des conclusions récapitulatives n°1 de la société ARCAL notifiées par voie électronique le 26 mai 2023 que la demanderesse au fond n’invoque pas uniquement au soutien de ses prétentions le procès-verbal du 21 décembre 2022 de saisie-contrefaçon dans les locaux de la société AVEL DIFFUSION et le procès-verbal du 22 décembre 2022 de signification des photographies. Elle invoque également des procès-verbaux de constat des 7 décembre 2021 et 15 novembre 2022 ainsi que le procès-verbal du 27 avril 2023 de saisie-contrefaçon dans les locaux de la société GEPLAST. Par ailleurs, dans leurs conclusions d’incident les sociétés AVEL DIFFUSION et GEPLAST sollicitent un sursis à statuer jusqu’à l’arrêt définitif susvisé sans en exposer les motifs, se bornant à indiquer que la procédure est actuellement pendante devant la Cour d’appel de Paris. Leur demande sera en conséquence rejetée.
Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
Selon l’article 790 du même code, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens et les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente ordonnance ne mettant pas fin à l’instance, les dépens seront réservés.
Le juge de la mise en état,
Sursoit à statuer sur les demandes de la société ARCAL dans l’attente de l’arrêt définitif de la Cour d’appel de Paris statuant sur le recours en annulation formé par la société OCEANE PROFILS à l’encontre de la décision du Directeur général de l’INPI du 9 mars 2023 rendue sur opposition au brevet français FR 3 070 109 B1 dont la société ARCAL est titulaire ;
Déboute la société AVEL DIFFUSION et la société GEPLAST de leur demande de sursis à statuer jusqu’à l’arrêt définitif de la Cour d’appel de Paris statuant sur l’appel interjeté par la société AVEL DIFFUSION à l’encontre de l’ordonnance du Président du tribunal judiciaire de Paris du 15 mai 2024 rendue sur référé-rétractation à l’égard de l’ordonnance de saisie-contrefaçon du 7 décembre 2022 ;
Réserve les dépens ;
Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état (dématérialisée) du 12 décembre 2024 à 14h00.
Faite et rendue à Paris le 11 septembre 2024
La greffière Le juge de la mise en état
Lorine Mille Linda Boudour