Expertise et Responsabilités dans le Cadre de Travaux de Construction : Évaluation des Désordres et Obligations des Parties

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Expertise et Responsabilités dans le Cadre de Travaux de Construction : Évaluation des Désordres et Obligations des Parties

Contexte de l’affaire

Monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] ont assigné plusieurs entreprises, dont la société MAISON LUDO, la société MAGNE et la société TML RENOVATIONS, devant le tribunal judiciaire de Valenciennes. Ils demandent une expertise concernant des désordres survenus lors de la construction d’un immeuble à [Localité 16] et réclament également des frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les travaux et les désordres constatés

Les demandeurs ont fait construire un immeuble entre 2022 et 2023, confiant les travaux de maçonnerie à MAISON LUDO, d’électricité et de plâtrerie à MAGNE, et d’étanchéité à TML RENOVATIONS. Ils ont constaté des malfaçons, notamment des non-conformités dans les briques de parement, des défauts dans les travaux d’électricité et d’étanchéité, ainsi qu’une absence de levée de réserves sur les travaux de TML RENOVATIONS.

Réponses des défendeurs

La société MAGNE a laissé le soin au juge d’apprécier la nécessité d’une expertise, tout en émettant des réserves. MAISON LUDO a également contesté les allégations, soulignant que les matériaux provenaient de DOCKS DE L’OISE. TML RENOVATIONS a nié toute malfaçon, affirmant que les travaux étaient conformes et que les demandeurs n’avaient pas réglé le solde de leur facture.

Demande d’expertise et jonction des instances

Le tribunal a ordonné la jonction des deux instances, considérant qu’elles concernaient le même litige. Il a également reconnu un motif légitime pour ordonner une expertise judiciaire afin d’évaluer les désordres allégués et d’en déterminer les responsabilités.

Décision sur la provision

La société TML RENOVATIONS a demandé une provision de 14 675,86 euros pour des travaux réalisés. Les demandeurs ont contesté cette demande en invoquant des malfaçons et une retenue de garantie, mais n’ont pas fourni de preuve de cette garantie dans le contrat. Le tribunal a donc condamné les demandeurs à payer cette provision.

Conclusion et ordonnances du tribunal

Le tribunal a ordonné la réalisation d’une expertise judiciaire, désignant un expert pour évaluer les désordres et malfaçons. Les demandeurs ont été condamnés à payer la provision à TML RENOVATIONS et aux dépens, tandis que leurs demandes d’indemnisation au titre de l’article 700 ont été rejetées. La décision a été signée le 10 décembre 2024.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les conditions pour ordonner une expertise judiciaire selon le Code de procédure civile ?

L’article 145 du Code de procédure civile stipule que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Dans le cas présent, les demandeurs, monsieur et madame [I], ont exposé des désordres et malfaçons concernant les travaux réalisés par les sociétés défenderesses.

Ils ont justifié leur demande d’expertise par des constats d’huissier et des rapports d’expertise d’assurance, ce qui constitue un motif légitime pour ordonner une expertise judiciaire.

Ainsi, le juge a considéré qu’il était dans l’intérêt de la justice d’organiser une expertise pour déterminer l’ampleur des désordres et les responsabilités des parties impliquées.

Quelles sont les implications de la jonction des instances selon le Code de procédure civile ?

L’article 367 du Code de procédure civile précise que « le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. »

Dans cette affaire, les instances RG 24/00196 et RG 24/00246 ont été jugées liées, car elles concernent le même litige relatif aux travaux de construction.

Le juge a donc ordonné la jonction des instances pour une meilleure administration de la justice, permettant ainsi de traiter toutes les questions soulevées dans un cadre unifié.

Quelles sont les conditions pour qu’une provision soit accordée en référé ?

L’article 835 du Code de procédure civile stipule que « le juge des référés, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier. »

Dans le cas présent, la société TML RENOVATIONS a demandé une provision de 14 675,86 euros, se basant sur une facture de situation.

Les demandeurs, monsieur et madame [I], ont contesté cette demande en invoquant des malfaçons. Cependant, le juge a constaté que la société TML RENOVATIONS avait émis une facture correspondant à des travaux réalisés, bien que potentiellement défectueux.

Ainsi, l’existence de l’obligation de paiement n’était pas sérieusement contestable, justifiant l’octroi de la provision.

Quelles sont les conséquences de la décision sur les dépens et les frais irrépétibles ?

L’article 491 alinéa 2 du Code de procédure civile indique que « le juge des référés statue sur les dépens. »

De plus, l’article 700 du même code précise que « dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »

Dans cette affaire, les époux [I] ont été condamnés aux dépens, car ils ont succombé dans leur demande de provision.

Cependant, le juge a également décidé de débouter les parties de leurs demandes indemnitaires au titre de l’article 700, considérant qu’aucune des parties n’avait droit à une indemnisation pour les frais exposés.

Cela signifie que les époux [I] devront supporter les frais de la procédure, sans compensation pour leurs frais d’avocat ou autres dépenses.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 décembre 2024
Tribunal judiciaire de Valenciennes
RG n°
24/00196
N° RG 24/00196 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GMFV

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES
O R D O N N A N C E de R E F E R E – N° RG 24/00196 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GMFV
Code NAC : 54Z Nature particulière : 0A

LE DIX DECEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

1ère affaire : n° 196/2024 :

DEMANDEURS

Mme [V] [U] épouse [I], née le 23 février 1993 à [Localité 17], et M. [A] [I], né le 08 février 1987 à [Localité 18], demeurant [Adresse 6] – [Localité 16];

représentés par la SCP LEFEBVRE & THEVENOT, avocats au barreau de VALENCIENNES,
D’une part,

DEFENDERESSES

La société TML RENOVATIONS, dont le siège social est sis [Adresse 5] – [Localité 9], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par la SELARL PAPIACHVILI AVOCATS, avocats au barreau de LILLE,

La S.A.R.L. MAGNE, dont le siège social est sis [Adresse 4] – [Localité 7], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par Me Aude BREMBOR, avocat au barreau de VALENCIENNES,

La S.A.S.U. MAISON LUDO, dont le siège social est sis [Adresse 13] – [Localité 8], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par la SCP TIRY-DOUTRIAUX, avocats au barreau de VALENCIENNES,

D’autre part,

2ème affaire : n° 246/2024 :

DEMANDERESSE

La S.A.S.U. MAISON LUDO, dont le siège social est sis [Adresse 13] – [Localité 8], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par la SCP TIRY-DOUTRIAUX, avocats au barreau de VALENCIENNES,

D’une part,

DEFENDERESSE

La S.A. DOCKS DE L’OISE, dont le siège social est sis [Adresse 2] [Localité 12], prise en son établissement secondaire POINT P sis [Adresse 14] [Localité 10], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par la SELAS BIGNON LEBRAY AVOCATS, avocats au barreau de LILLE,

D’autre part,

LE JUGE DES RÉFÉRÉS : Louis-Benoît BETERMIEZ, président

LE GREFFIER : Stéphanie BUSIER, adjoint administratif faisant fonction de greffier,

DÉBATS : en audience publique le 12 novembre 2024,

ORDONNANCE : rendue par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024,

EXPOSE DU LITIGE

Par actes en date du 13 août 2024, enregistrés sous le numéro RG : 24/00196, monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] ont assigné la société par actions simplifiée à associé unique (SASU) MAISON LUDO, la société à responsabilité limitée (SARL) MAGNE et la société par actions simplifiée (SAS) TML RENOVATIONS devant le président du tribunal judiciaire de Valenciennes, statuant en référé, aux fins que soit ordonnée une expertise de divers désordres résultant des travaux réalisés par les défenderesses à l’occasion de la construction d’un immeuble situé [Adresse 6], à [Localité 16], ainsi que chaque défendeur soit condamné à leur payer la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par acte du 4 octobre 2024, enregistré sous le numéro RG : 24/00246, la société MAISON LUDO a assigné la société anonyme (SA) DOCKS DE L’OISE, prise en son établissement secondaire  » POINT P  » à Aniche, devant le président du tribunal judiciaire de Valenciennes, statuant en référé aux fins que lui soient déclarées communes et opposables les opérations d’expertise ordonnée, le cas échéant, par le juge des référés.

À l’appui de leur demande principale, madame et monsieur [I] exposent qu’ils ont fait bâtir un immeuble d’habitation à [Localité 16] entre 2022 et 2023 et qu’ils ont confié, dans le cadre de cette construction, les travaux de maçonnerie à la société MAISON LUDO, les travaux d’isolation, de plâtrerie et d’électricité à la société MAGNE, les travaux d’étanchéité des toitures terrasse à la société TML RENOVATIONS.
Ils font valoir qu’ils ont constaté que les briques de parement et leurs joints n’étaient pas conformes au devis établi par la société MAISON LUDO, que les travaux de plâtrerie et d’électricité comportaient des malfaçons dans diverses pièces, que leur toiture comportait des désordres techniques et esthétiques ; qu’une expertise d’assurance réalisée à leur demande a confirmé les désordres et malfaçons dont ils se plaignent ; qu’ils ont sollicité une reprise de ces désordres en vain.
Ils estiment, dès lors, disposer d’un intérêt légitime à obtenir la mise en place d’une mesure d’instruction qu’il sollicite à l’égard de tous les défendeurs.
Ils ajoutent que, s’agissant de la société TML RENOVATIONS, ils ont réceptionné les travaux opérés par cette dernière avec des réserves qui n’ont pas été levées et que cette absence de levée des réserves a justifié le non-paiement de la dernière facture de la défenderesse, ce d’autant que les travaux ont été abandonnés.
Ils considèrent qu’aucune demande de provision à ce titre ne peut aboutir, pas plus qu’une demande de consignation judiciaire.

En réponse, la société MAGNE s’en rapporte à l’appréciation du juge sur l’opportunité de mettre en œuvre une mesure d’expertise et émet les protestations et réserves d’usage au cas où elle serait ordonnée.
Elle s’oppose également au règlement de toutes sommes au titre des frais irrépétibles.

De son côté, la société MAISON LUDO émet également les protestations et réserves d’usage en cas d’expertise judiciaire.
Elle souligne que les litiges la concernant étaient en lien avec des matériaux qu’elle a acquis auprès de la société DOCK DE L’OISE et justifie de la sorte l’appel à la cause de cette dernière.

Pour sa part, la société TML RENOVATIONS soutient que les travaux qu’elle a réalisés pour le compte des demandeurs ne sont affectés d’aucun désordre et que cette absence de désordres a été confirmée par l’expert mandaté par les époux [I]. Elle en déduit que ces derniers n’ont aucun motif légitime à obtenir une expertise sur les travaux qu’elle a réalisés.
Par ailleurs, elle argue que les demandeurs se sont abstenus de lui régler le solde de son marché et que cette abstention ne peut correspondre à une retenue de garantie.
Elle conclut, à titre principal au débouté de la demande d’expertise présentée par Madame et Monsieur [I] ; à titre subsidiaire, à ce que l’expert se prononce sur le compte entre les parties ; à titre reconventionnel, à ce que les demandeurs soient condamnés à lui verser la somme de 14 675,86 euros à titre provisionnel ; à titre subsidiaire, à ce qu’ils soient condamnés à consigner la somme précitée auprès de la Caisse des dépôts et consignations et à justifier de cette consignation sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la décision à intervenir ; en tout état de cause, à ce que les demandeurs soient condamnés aux dépens et à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin, la société DOCKS DE L’OISE s’en rapporte à l’appréciation du juge sur l’opportunité de mettre en œuvre une mesure d’expertise et émet les protestations et réserves d’usage au cas où elle serait ordonnée.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré pour être rendue ce jour.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction des instances :

Selon l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

En l’espèce, il ressort des pièces fournies par les parties que les instances ouvertes sous les numéros RG 24/00196 et N° RG 24/00246 concernent un même litige.

Elles présentent un lien tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne administration de la justice de les faire juger ensemble.

En conséquence, il sera ordonné la jonction de ces instances, sous le plus ancien des numéros.

Sur la demande d’expertise :

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats par les parties que madame et monsieur [I] ont dans le cadre de l’édification d’un immeuble à usage d’habitation au [Adresse 6], à [Localité 16], confié à la société MAISON LUDO le lot « gros œuvre », à la société MAGNE les lots « électricité » et « plâtrerie/isolation », à la société TML RENOVATIONS le lot « couverture/étanchéité « .

Il en ressort également que le devis signé entre les demandeurs et la société MAISON LUDO a prévu le recours à des joints noirs pour une zone de maçonnerie réalisée en briques noires ; que madame et monsieur [I] se sont plaints de ce que les joints dans la zone précitée étaient de couleur gris clair ; que par procès-verbal dressé le 22 novembre 2023 par Maître [Z], huissier de justice, il a été constaté que les joints en question paraissaient grisâtres ; que les époux [I] ont échangé sur ce défaut par rapport au devis avec la société MAISON LUDO, mais aussi avec la société DOCKS DE L’OISE, ayant fourni les sacs de joint ; que leurs pourparlers n’ont pas abouti ; que les demandeurs ont reçu les travaux de la société MAISON LUDO le 25 avril 2024 en émettant des réserves sur la couleur des joints des zones en briques noires.

Il en ressort aussi que madame et monsieur [I] se sont plaints de malfaçons dans les travaux réalisés par la société MAGNE ; que, par procès-verbal dressé le 26 septembre 2023 par Maître [Z], huissier de justice, il a été constaté des jonctions visibles dans le placoplâtre du garage de l’immeuble construit, la présence, sur le tableau électrique, d’un seul fusible pour l’éclairage de l’étage, des traces d’enduit non-lissé sur le plafond de la chambre parentale, des écarts entre un escalier et un mur, un enduit irrégulier sous une fenêtre d’étage, un enduit non-droit dans le bureau, des murs enduit mais non-lissés dans une autre chambre, la présence d’une laine de verre posée mais non soufflée dans les combles ; que ces constats ont été globalement repris dans un procès-verbal dressé le 22 mai 2024 par Maître [Z], huissier de justice, valant réception des travaux de la société MAGNE avec réserves.

Il en ressort, enfin, que dans le cadre des travaux qui lui ont été confiés, la société TML RENOVATIONS a réalisé l’étanchéité des toitures terrasse avec une membrane EPDM ; qu’après la pose de celle-ci, les époux [I] se sont plaints de ce qu’elle était mal tendue et non conforme au DTU; qu’ils se sont également plaints d’un arrêt du chantier; que, sur leur demande, une expertise d’assurance a été réalisée par monsieur [H] [M] ; que, dans un rapport du 4 juillet 2023, l’expert commis a noté des ondulations sur la membrane posée tout en notant que ces désordres n’affectaient pas l’étanchéité de l’ouvrage; que les demandeurs, contestant ses conclusions, ont produit un avis de Monsieur [T] [O], se présentant comme expert, indiquant que les boursouflures de la membrane pouvaient affecter la durabilité et la robustesse de celle-ci dans le temps; qu’ils ont également fait réaliser une expertise privée par Monsieur [G] [C], qui a conclu, dans un rapport du 22 mai 2024, que le positionnement de la membrane pourrait entraîner son usure prématurée voir son déchirement.

La société TML RENOVATIONS conteste que les travaux de pose de la membrane puissent être affectés du moindre désordre.

Elle verse, en ce sens, un rapport de visite du fabricant de la membrane mentionnant que le chantier n’est pas esthétique en raison de plis sur la toiture et qu’aucune infiltration n’est constatée, mais aussi que des patches sont à ajouter pour la pérennité du système.

Or, il n’est pas justifié que les patches préconisés ont été ajoutés.

En outre, les demandeurs produisent un avis de nature à interroger sur la qualité de la pose de la membrane.

De la sorte, il ne peut qu’être considéré que madame et monsieur [I] justifient d’un motif légitime à l’expertise des travaux réalisés par la société TML RENOVATIONS sur leur toiture terrasse.

Plus globalement, au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, il doit être considéré que les demandeurs présentent un motif légitime à ce qu’une expertise judiciaire et contradictoire des désordres allégués concernant les travaux des sociétés MAISON LUDO, MAGNE et TML RENOVATIONS soit organisée, afin notamment d’en déterminer l’ampleur, les responsabilités et les moyens d’y remédier.

Par conséquent, l’expertise sollicitée par madame et monsieur [I] sera ordonnée, à leurs frais.

Sur la demande de provision :

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, juge des référés, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier.

En outre, selon l’article 1 de la loi n°71-584 du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l’article 1779-3° du code civil, les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l’article 1779-3° du code civil peuvent être amputés d’une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l’exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l’ouvrage.
Le maître de l’ouvrage doit consigner entre les mains d’un consignataire, accepté par les deux parties ou à défaut désigné par le président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce, une somme égale à la retenue effectuée.
Dans le cas où les sommes ayant fait l’objet de la retenue de garantie dépassent la consignation visée à l’alinéa précédent, le maître de l’ouvrage devra compléter celle-ci jusqu’au montant des sommes ainsi retenues.
Toutefois, la retenue de garantie stipulée contractuellement n’est pas pratiquée si l’entrepreneur fournit pour un montant égal une caution personnelle et solidaire émanant d’un établissement financier figurant sur une liste fixée par décret.

Il en résulte que maître d’ouvrage ne peut se prévaloir du mécanisme de la retenue de garantie que si celle-ci est prévue contractuellement.

En l’espèce, la société TML RENOVATIONS sollicite la condamnation des époux [I] à leur payer une provision d’un montant de 14 675,86 euros, en se prévalant d’une facture de situation du 12 avril 2023.

Madame et monsieur [I] s’opposent à cette demande en reprochant à la société TML RENOVATIONS des malfaçons dans les travaux objet de la facture de situation précitée et en invoquant la retenue de garantie prévue par la loi du 16 juillet 1971.

Or, ils ne versent aux débats aucune pièce contractuelle stipulant l’existence de cette garantie et n’allèguent pas l’avoir prévue dans le marché dévolu à la société TML RENOVATIONS, de sorte que leur moyen de contestation ne peut prospérer.

Les demandeurs invoquent également une contestation sérieuse consistant dans le non-achèvement des travaux par la société TML RENOVATIONS et un abandon de chantier.

À cet égard, il convient de relever que, d’une part, la société précitée a établi la facture de situation du 12 avril 2023 en ne comptabilisant pas des travaux que madame et monsieur [I] disent non-effectués et que, d’autre part, les demandeurs ont reçu les travaux en question en émettant des réserves.

Il s’ensuit qu’il est établi, de façon non-sérieusement contestable, que la société TML RENOVATION a émis une facture de situation du 12 avril 2023, correspondant aux travaux effectués, bien que potentiellement atteints de défauts, de sorte que les époux [I] sont tenus incontestablement dans régler le prix, en l’absence de tout mécanisme contractuel contraire.

En conséquence, ils seront condamnés à payer à la société TML RENOVATIONS une provision d’un montant de 14 675,86 euros, au titre des travaux réalisés par cette dernière.

Sur les demandes accessoires :

En application de l’article 491 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés statue sur les dépens.

En outre, aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

En l’espèce, dans la mesure où est ordonnée une mesure d’instruction dans l’intérêt du demandeur et où madame et monsieur [I] succombent relativement à la demande de provision, ces derniers seront seuls tenus aux dépens, étant rappelé que la présente décision n’a pas l’autorité de la chose jugée et que le juge du fond, en cas de saisine ultérieure, pourra régler différemment le sort des dépens.

En revanche, par équité, au stade actuel de la procédure, tant les époux [I] que la société TML RENOVATIONS seront déboutés de leurs demandes indemnitaires présentées a ces u titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort ;

ORDONNONS la jonction des instances ouvertes sous les numéros RG 24/00196 et RG 24/00246, sous le premier d’entre eux,

ORDONNONS une expertise judiciaire ;

DÉSIGNONS en qualité d’expert, M. [N] [B], [Adresse 3] [Localité 11] – tél : [XXXXXXXX01] – [Courriel 15], avec pour mission, les parties régulièrement convoquées, après avoir pris connaissance du dossier, s’être fait remettre tous documents utiles et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant, de :

– Voir et visiter monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I], situé [Adresse 6], à [Localité 16] ;

– examiner les désordres, malfaçons et non-conformités allégués dans l’assignation délivrée par monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] concernant les travaux réalisés par la société par actions simplifiée à associé unique (SASU) MAISON LUDO, par la société à responsabilité limitée (SARL) MAGNE et par la société par actions simplifiée (SAS) TML RENOVATIONS ; les décrire, en indiquer la nature, l’importance, la date d’apparition ; en rechercher la ou les causes ;

– Dire si chaque ouvrage a fait l’objet d’une réception expresse ; le cas échéant, en préciser la date, indiquer les réserves y figurant en relation avec les désordres allégués, préciser, parmi les désordres malfaçons, non façons, non-conformités contractuelles allégués, lesquels étaient apparents à cette date ;

– En l’absence de réception expresse, fournir tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer la date à laquelle l’ouvrage était en état d’être conforme à son usage,

– Préciser quels désordres étaient apparents à cette date ;

– Préciser la date d’apparition des désordres dans toutes leurs composantes, leur ampleur et leurs conséquences (date des premières manifestations, aggravation éventuelle depuis la réception des
travaux) ;

– Préciser de façon motivée si les désordres compromettent, actuellement ou indiscutablement avant l’expiration d’un délai de dix ans après la réception de l’ouvrage, la solidité de celui-ci ou si, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, ils le rendent impropre à sa destination ;

– Dans le cas où ces désordres, malfaçons, non façons, non-conformités contractuelles constitueraient des dommages affectant l’ouvrage dans un de ses éléments d’équipement sans rendre l’immeuble impropre à sa destination, de dire si cet élément fait ou non indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, fondation, ossature, clos ou couvert ;

– Dans l’affirmative, préciser si ces désordres affectent la solidité du bien ou son bon fonctionnement ;

– Donner tous éléments motivés sur les causes et origines des désordres et malfaçons dont s’agit en précisant s’ils sont imputables :
– à la conception,
– à un défaut de direction ou de surveillance,
– à l’exécution,
– aux conditions d’utilisation ou d’entretien, – à une cause extérieure
et, dans le cas de causes multiples, évaluer les proportions relevant de chacune d’elles, en précisant les intervenants concernés;

– Après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres, et leurs délais d’exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’oeuvre, le coût de ces travaux ;

– Fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ;

– Dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l’aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l’affirmative, à la demande d’une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire
qui devra être déposé aussitôt que possible ;

– Faire les comptes entre les parties, en tant que de besoin ;

– faire toute observation utile à la solution du litige ;

DISONS que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original au greffe du tribunal de Valenciennes, service du contrôle des expertises, dans le délai de six mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties) ;

DISONS que l’expert devra, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera a une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d’éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu’à l’issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle ;

DISONS que, sauf accord contraire des parties, l’expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction ;

DISONS que l’expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelons qu’il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

DÉSIGNONS le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents ;

DISONS que l’expert désigné pourra, en cas de besoin, s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir simplement avisé les conseils des parties et le magistrat chargé du contrôle des expertises,

DISONS que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément 48 aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

FIXONS à la somme de 3.000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par la partie demanderesse entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal judiciaire de Valenciennes, dans le délai maximum de six semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis ;

DISONS que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;

CONDAMNONS monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] à payer à la société par actions simplifiée (SAS) TML RENOVATIONS une somme provisionnelle d’un montant de 14 675,86 euros, au titre des travaux réalisés par cette dernière ;

CONDAMNONS monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] aux dépens ;

DEBOUTONS monsieur [A] [I] et madame [V] [U] épouse [I] et la société par actions simplifiée (SAS) TML RENOVATIONS de leurs demandes présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELONS que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire ;

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président et le greffier, le 10 décembre 2024.

Le greffier, Le président,


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