Sommaire Contexte de l’affaireLe fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions a assigné [B] [D] devant le tribunal judiciaire de Nice le 18 août 2023. Cette action vise à obtenir la condamnation de [B] [D] à verser une somme de 55 441,25 euros, en tant que subrogé dans les droits de [X] [O], ainsi qu’une indemnité de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Demandes et oppositionsLe fonds de garantie a maintenu ses demandes initiales, y compris les intérêts au taux légal à partir de l’assignation. En revanche, [B] [D] a contesté ces demandes, arguant du désistement d’instance et d’action de [X] [O] et demandant la déclaration d’irrecevabilité des demandes du fonds. Il a également proposé une évaluation de son préjudice, chiffré à 15 201,25 euros, et a sollicité une expertise judiciaire. Éléments de preuve et décisions judiciairesLe fonds de garantie a justifié sa demande par un jugement du tribunal correctionnel de Monaco, qui a condamné [B] [D] pour des violences commises sur [X] [O]. Ce dernier a été déclaré entièrement responsable des conséquences de ses actes. [X] [O] a accepté une offre d’indemnisation de 55 441,25 euros, homologuée par la commission d’indemnisation. Le tribunal a rejeté les arguments de [B] [D] concernant l’irrecevabilité et la nécessité d’une expertise judiciaire, considérant que les preuves fournies étaient suffisantes. Jugement finalLe tribunal a condamné [B] [D] à rembourser la somme de 55 441,25 euros au fonds de garantie, avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2023. De plus, [B] [D] a été condamné à verser 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Le jugement est exécutoire de droit par provision. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelle est la base légale de la demande du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions ?La demande du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions repose sur les dispositions de l’article 706-11 du Code de procédure pénale. Cet article stipule que : “Le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l’infraction ou tenues à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l’indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes. Le recours du fonds ne peut s’exercer contre l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.” Ainsi, le fonds de garantie a le droit d’agir en justice pour obtenir le remboursement des sommes versées à la victime, en l’occurrence [X] [O], suite aux violences subies. Quelles sont les conséquences du désistement d’instance et d’action de [X] [O] ?Le désistement d’instance et d’action de [X] [O] devant le tribunal correctionnel de Monaco a été invoqué par [B] [D] pour contester la recevabilité des demandes du fonds de garantie. Cependant, il est important de noter que ce désistement a été motivé par le fait que [X] [O] a initié une procédure d’indemnisation en France. L’article 386 du Code de procédure civile précise que : “Le désistement d’instance est l’acte par lequel une partie renonce à poursuivre l’instance. Il peut être total ou partiel.” Dans ce cas, le tribunal a considéré que le désistement n’affectait pas la possibilité pour le fonds de garantie d’agir en tant que subrogé dans les droits de la victime, car la demande d’indemnisation a été faite dans un cadre différent. Comment le tribunal a-t-il évalué le préjudice de [X] [O] ?Le tribunal a pris en compte plusieurs éléments pour évaluer le préjudice de [X] [O]. Les préjudices ont été classés en préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux, comme suit : – Préjudice patrimonial : assistance à tierce personne : 240 € – Préjudice extra-patrimonial : La somme totale des préjudices a été évaluée à 15 201,25 euros. Le tribunal a également noté que l’évaluation du préjudice a été fondée sur des expertises médicales et psychologiques, ce qui a permis de déterminer l’ampleur des souffrances et des incapacités de [X] [O]. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés pour la défense de ses droits. Cet article stipule que : “Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par celle-ci pour la défense de ses droits.” Dans cette affaire, le tribunal a condamné [B] [D] à payer la somme de 1500 € au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions sur le fondement de cet article. Cela reflète la reconnaissance des frais engagés par le fonds pour obtenir réparation au nom de [X] [O]. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur les dépens ?La décision du tribunal a également des implications sur les dépens, qui sont les frais de justice engagés par les parties. Selon l’article 696 du Code de procédure civile : “Les dépens comprennent les frais de justice exposés par les parties, y compris les frais d’expertise, les frais de déplacement, et les frais de représentation.” Dans ce cas, le tribunal a condamné [B] [D] aux dépens, ce qui signifie qu’il devra supporter les frais de la procédure, y compris ceux engagés par le fonds de garantie. Cela souligne la responsabilité de la partie perdante dans le cadre des litiges civils. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE
GREFFE
(Décision Civile)
JUGEMENT : Organisme FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERROR ISME ET D’AUTRES INFRACTIONS c/ [B] [D]
MINUTE N° 24/
Du 10 Décembre 2024
3ème Chambre civile
N° RG 23/03127 – N° Portalis DBWR-W-B7H-PCYB
Par jugement de la 3ème Chambre civile en date du dix Décembre deux mil vingt quatre
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Corinne GILIS, Président, assisté de Audrey LETELLIER-CHIASSERINI, Greffier, présente uniquement aux débats
Vu les Articles 812 & 816 du Code de Procédure Civile sans demande de renvoi à la formation collégiale ;
DÉBATS
A l’audience publique du 14 Octobre 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 10 Décembre 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction ;
PRONONCÉ
Par mise à disposition au Greffe le 10 Décembre 2024 , signé par Corinne GILIS, Présidente, assistée de Louisa KACIOUI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DE LA DÉCISION : contradictoire, en premier ressort, au fond.
Grosse délivrée à
Me Jean-vincent DUPRAT
Me David GERBAUD-EYRAUD de la SELARL TGE
expédition délivrée à
le
mentions diverses
DEMANDERESSE:
Organisme FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERROR ISME ET D’AUTRES INFRACTIONS
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Maître David GERBAUD-EYRAUD de la SELARL TGE, avocats au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, avocats plaidant
DEFENDEUR:
Monsieur [B] [D]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Jean-vincent DUPRAT, avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant
Par acte de commissaire de justice en date du 18 août 2023, le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions a fait assigner [B] [D] devant le tribunal judiciaire de Nice afin d’obtenir sa condamnation :
–à lui payer en tant que subrogé dans les droits de [X] [O] la somme de 55 441,25 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 29 juin 2023, par application de l’article 1344-1 du Code civil,
–à lui payer une indemnité de 1500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Aux termes de ces dernières conclusions signifiées par le RPVA le 12 juillet 2024, le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions s’oppose à l’ensemble des demandes formées par le défendeur et maintient l’intégralité de ses demandes initiales en sollicitant les intérêts au taux légal à compter de l’assignation introductive d’instance du 18 août 2023, valant mise en demeure.
Selon ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 21 juin 2024, [B] [D] demande au tribunal :
–compte tenu du désistement d’instance et d’action de [X] [O],
–déclarer irrecevables les demandes de [X] [O] et du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions,
–les débouter de toutes leurs demandes,
A titre subsidiaire,fixer le préjudice de la manière suivante :
-préjudice patrimonial soit assistance à tierce personne : 240 €
-préjudice extra patrimonial:
*gêne temporaire à 15 % x 1122 jours= 4207,50 euros
*gêne temporaire partielle à 25 % x 31 jours= 193,75 euros
*souffrances endurées 2/7= 2500 €
*préjudice esthétique temporaire de 300 €
*déficit fonctionnel permanent 5 %= 7500 €
*préjudice esthétique permanent 1/7= 500 €
soit la somme totale de 15 201,25 euros.
–Ordonner telle expertise judiciaire médicale que de droit afin d’évaluer le prédice corporel de [X] [O], l’expert médecin étant inscrit sur une liste en dehors de la cour d’appel d’Aix-en-Provence compte tenu de la qualité professionnelle de [X] [O],
–statuer ce que de droit sur les dépens.
Pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été clôturée au 30 septembre 2024 et fixée pour être plaidée à l’audience du 14 octobre 2024.
A l’issue des débats les parties ont été informées de la mise à disposition du jugement au greffe le 10 décembre 2024, en application de l’article 450 du code de procédure civile.
Sur la demande principale
Aux termes des dispositions de l’article 706-11 du code de procédure pénale “le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l’infraction ou tenues à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l’indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes. Le recours du fonds ne peut s’exercer contre l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.”
Le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions justifie que [X] [O] a été victime entre le 5 et le 8 novembre 2018 de violences commises par son conjoint [B] [D] à son encontre.
En effet, par jugement du tribunal correctionnel de la principauté de Monaco en date du 11 janvier 2022 [B] [D] a été condamné pour ces faits à la peine de deux ans d’emprisonnement avec sursis et a été déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables résultant de l’infraction commise.
[X] [O] a saisi la commission d’indemnisation de Nice et le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions lui a adressé le 10 janvier 2023 une offre d’indemnisation à hauteur de 55 441,25 euros, qu’elle a accepté.
Le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions sollicite la condamnation de [B] [D] à lui payer cette somme outre intérêts, en ce qu’elle est subrogée dans les droits de [X] [O].
[B] [D] s’oppose à cette demande en faisant valoir que [X] [O] s’est désistée d’instance et d’action devant le tribunal correctionnel de Monaco statuant sur intérêts civils le 20 janvier 2023, de sorte que toute demande ultérieure est manifestement irrecevable ; mais cet argument est inopérant dans la mesure où comme le souligne le dit tribunal ce désistement est intervenu parce que [X] [O] a initié une procédure d’indemnisation en France.
Le défendeur fait également valoir une différence entre la première prétention de [X] [O] devant la juridiction correctionnelle à hauteur de 22 800 euros et la somme allouée par le le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions à hauteur de 55 441,25 euros, justifiant selon lui une expertise judiciaire afin d’évaluer le préjudice corporel réellement subi par celle-ci puisqu’aucune expertise judiciaire de droit français n’a été effectuée.
Il convient toutefois d’observer que la première réclamation envisagée par [X] [O] n’a jamais été formulée puisque les conclusions en vue de l’audience sur intérêts civils du tribunal correctionnel de Monaco n’ont jamais été déposées en raison de son désistement; de surcroît, ce n’est qu’à l’issue des expertises physiques et psychologiques que [X] [O] a été en mesure d’appréhender l’ampleur de son préjudice; c’est dans ces conditions qu’elle a déposé le 21 novembre 2022 une requête devant la commission d’indemnisation des victimes près le tribunal de Nice sollicitant une somme totale de 71 914,50 euros outre 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. En retour, le fonds de garantie lui a fait une proposition d’indemnisation à hauteur de 55 441,25 euros, qu’elle a acceptée et l’accord a été homologué par le président de la CIVI.
Enfin, la demande d’expertise judiciaire formée par [B] [D] n’est pas justifiée; le Docteur [K] est expert près la cour d’appel de Marseille et le Docteur [T] est expert près la cour d’appel d’Aix-en-Provence, ils ont donc l’un et l’autre une parfaite maîtrise de l’expertise judiciaire et d’ailleurs le défendeur ne formule aucune critique utile à l’encontre des rapports déposés dont aucun élément ne permet de douter de leur loyauté et de leur impartialité.
Le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions produit aux débats:
-le jugement du tribunal correctionnel de la principauté de Monaco du 11 janvier 2022,
-le rapport d’expertise médicale concernant [X] [O] déposé le 4 juillet 2022 par l’expert judiciaire le Docteur [J] [K], mandaté par le tribunal de Monaco,
-l’examen psychologique de [X] [O] réalisé par l’expert psychologue le Docteur [T] le 4 juin 2022 ayant été désigné en qualité de sapiteur par le médecin expert le Docteur [K],
-la décision d’homologation rendue le 16 mars 2023 par le président de la CIVI de Nice concernant l’accord transactionnel conclu entre [X] [O] et le fonds de garantie portant sur l’offre d’indemnisation acceptée de 55 441,25 euros,
-le justificatif de paiement de cette somme le 29 mars 2023,
-les mises en demeure adressées à [B] [D] le 10 mai 2023, le 24 mai 2023 et le 29 juin 2023, sans toutefois que soient produits les accusés réception de ces courriers.
Dans ces conditions,le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions est fondée à obtenir, sur le fondement de l’article 706-11 du code de procédure pénale, la condamnation de [B] [D] à lui rembourser la somme de 55 441,25 euros et ce avec intérêts au taux légal à compter du 18 août 2023 date de l’assignation valant mis en demeure.
Sur les demandes accessoires
Succombant à la procédure, [B] [D] sera condamné aux dépens.
Il conviendra également de condamner [B] [D] à payer au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 1500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est rappelé que la présente décision est exécutoire de droit par provision en application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire, par mise à disposition au greffe, et à charge d’appel,
Condamne [B] [D] à payer au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions,représenté par son représentant légal, la somme 55 441,25 euros au titre des sommes versées à [X] [O] en réparation de son préjudice corporel suite aux violences commises entre le 5 et 8 novembre 2018 par [B] [D] à son encontre et indemnisées par
le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions,
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 18 août 2023,
Condamne [B] [D] à payer au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne [B] [D] aux dépens,
Rappelle que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire,
Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,
Et la Présidente a signé avec la greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE