Sommaire Contexte de l’accidentLe 14 février 2019, Monsieur [P] [L], employé en tant que chauffeur poids lourds par la société ENTREPRISE [6], a subi un accident du travail sur un chantier. Cet accident, survenu lors d’une chute de plain-pied, a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, qui a reconnu l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels. Circonstances de l’accidentLa déclaration d’accident mentionne que Monsieur [P] [L] a chuté en empruntant un escalier encombré de gravats pour rejoindre son véhicule. Un certificat médical a été établi le même jour, indiquant des douleurs lombaires. Son état de santé a été déclaré consolidé le 14 juillet 2019, sans séquelles indemnisables. Procédure judiciaireAprès une tentative de conciliation infructueuse, Monsieur [P] [L] a saisi le tribunal judiciaire de Marseille pour faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur. L’affaire a été mise en délibéré et a été appelée à l’audience le 10 octobre 2024. Arguments de Monsieur [P] [L]Monsieur [P] [L] soutient que l’accident est dû à des conditions de travail non sécurisées, notamment un escalier défectueux. Il affirme que son employeur a reconnu la défectuosité de l’escalier et n’a pas pris les mesures nécessaires pour prévenir l’accident. Il conteste également l’argument de l’employeur selon lequel il aurait dû emprunter un chemin plus sécurisé. Arguments de l’employeurLa société ENTREPRISE [6] conteste les demandes de Monsieur [P] [L] et soutient qu’il a commis une faute en empruntant un escalier non recommandé. Elle affirme avoir mis en place des mesures de sécurité sur le chantier et que la responsabilité de l’accident incombe à d’autres entreprises impliquées dans le projet. Position de la CPCAMLa CPCAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître, s’en remet à l’appréciation du tribunal concernant la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. Elle précise que l’état de santé de Monsieur [P] [L] a été déclaré consolidé sans séquelles indemnisables. Analyse de la faute inexcusableLe tribunal rappelle que l’employeur a une obligation légale de sécurité envers ses salariés. La faute inexcusable est caractérisée si l’employeur avait conscience du danger et n’a pas pris les mesures nécessaires pour protéger le salarié. Les documents fournis par l’employeur montrent des manquements à cette obligation de sécurité. Évaluation des mesures de sécuritéLe tribunal constate que l’escalier emprunté par Monsieur [P] [L] n’était pas conforme aux normes de sécurité. Les mesures de prévention des risques n’ont pas été respectées, et l’employeur n’a pas pris les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité des circulations sur le chantier. Conséquences de la faute inexcusableLa reconnaissance de la faute inexcusable ouvre droit à une indemnisation complémentaire pour Monsieur [P] [L]. Le tribunal ordonne une expertise pour évaluer les préjudices subis, notamment le déficit fonctionnel permanent et les souffrances physiques et morales. Décision du tribunalLe tribunal déclare que l’accident est dû à la faute inexcusable de la société ENTREPRISE [6]. Il ordonne une expertise judiciaire pour évaluer les préjudices et condamne l’employeur à rembourser les frais d’expertise ainsi qu’à verser une somme à Monsieur [P] [L] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire du jugement est également ordonnée. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de sécurité au travail ?L’employeur a une obligation légale de sécurité et de protection de la santé envers ses salariés, comme le stipule l’article L. 4121-1 du Code du travail : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1. L’évaluation des risques pour la santé et la sécurité au travail ; L’employeur doit donc veiller à l’adaptation de ces mesures de sécurité pour tenir compte des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. Il doit également éviter les risques et évaluer ceux qui ne peuvent pas l’être, combattre les risques à la source, et adapter le travail à l’homme, notamment en ce qui concerne la conception des postes de travail et le choix des équipements. Qu’est-ce que la faute inexcusable de l’employeur ?La faute inexcusable de l’employeur est définie par l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale : « La faute inexcusable de l’employeur est caractérisée lorsque celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. » Il appartient au salarié de prouver que l’employeur avait conscience du danger et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Il est indifférent que la faute inexcusable ait été la cause déterminante de l’accident ; il suffit qu’elle en soit la cause nécessaire pour engager la responsabilité de l’employeur. La jurisprudence précise que la conscience du danger s’apprécie in abstracto, c’est-à-dire qu’il suffit de prouver que l’employeur « ne pouvait ignorer » le danger. Quels sont les droits de la victime en cas de reconnaissance de la faute inexcusable ?En cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, l’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale prévoit que : « Indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. » La victime peut donc demander une indemnisation complémentaire pour les préjudices non couverts par les dispositions du livre IV du Code de la sécurité sociale. Cela inclut des préjudices tels que le déficit fonctionnel temporaire, les dépenses liées à la réduction de l’autonomie, et le préjudice moral. Comment se déroule l’expertise judiciaire dans ce type de litige ?L’expertise judiciaire est ordonnée pour évaluer les préjudices subis par la victime. Selon l’article R. 142-16 du Code de la sécurité sociale, l’expert doit : 1. Convoquer les parties et recueillir leurs observations ; L’expert doit également établir un rapport détaillé qui sera communiqué aux parties, et il devra répondre aux observations formulées par celles-ci. L’expertise est essentielle pour déterminer l’étendue des préjudices et les indemnités qui peuvent être accordées à la victime. Quelles sont les conséquences financières pour l’employeur en cas de faute inexcusable ?En cas de reconnaissance de la faute inexcusable, l’employeur est tenu de rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie (CPCAM) les sommes avancées pour l’indemnisation de la victime. L’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale précise que : « La réparation des préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur. » Cela signifie que l’employeur doit rembourser les frais engagés par la CPCAM pour l’indemnisation de la victime, ce qui peut inclure des rentes, des frais médicaux, et d’autres indemnités. En outre, l’employeur peut également être condamné à payer des dommages-intérêts à la victime, ainsi qu’à couvrir les frais d’expertise. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 2]
JUGEMENT N°24/04783 du 10 Décembre 2024
Numéro de recours: N° RG 21/01891 – N° Portalis DBW3-W-B7F-ZAQW
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [P] [L]
né le 06 Août 1978 à [Localité 8] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 5]
[Localité 4]
représenté par Me Delphine BELOUCIF, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Elisabeth BEDROSSIAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
c/ DEFENDERESSE
S.A.S. ENTREPRISE [6]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 1]
comparante en personne assistée de Me Pascal CERMOLACCE, avocat au barreau de MARSEILLE
Appelée en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Localité 3]
dispensée de comparaître
DÉBATS : À l’audience publique du 10 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : PASCAL Florent, Vice-Président
Assesseurs : MAUPAS René
MITIC Sonia
L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 10 Décembre 2024
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
Le 14 février 2019, Monsieur [P] [L], salarié de la société ENTREPRISE [6] en qualité de chauffeur poids lourds depuis le 14 mai 2018, a été victime d’un accident du travail pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie (ci-après la CPCAM ou la caisse) des Bouches-du-Rhône au titre de la législation sur les risques professionnels selon notification en date du 09 mai 2019.
La déclaration d’accident du travail établie le 15 février 2019 par l’employeur mentionne les circonstances suivantes : » chute de plain-pied sur le sol lors d’un déplacement sur un chantier à pied « . Les explications des parties révèlent qu’il a fait une chute en empruntant un escalier encombré de gravats sur un chantier de construction en voulant rejoindre son véhicule.
Le certificat médical initial établi le 14 février 2019 par le Docteur [N] [S] fait état de douleurs lombaires suite à un choc.
L’état de santé de Monsieur [P] [L] a été déclaré consolidé suite à cet accident du travail le 14 juillet 2019 sans séquelles indemnisables.
À la suite d’une vaine tentative de conciliation, matérialisée par un procès-verbal de non-conciliation dressé le 25 mars 2021 par la CPCAM des Bouches-du-Rhône, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception reçue le 20 juillet 2021, Monsieur [P] [L] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Après une phase de mise en état clôturée par ordonnance du 29 mai 2024 avec effet différé au 26 septembre 2024, l’affaire a été appelée à l’audience au fond du 10 octobre 2024.
Monsieur [P] [L], représenté par son conseil soutenant oralement ses conclusions, demande au tribunal de :
Reconnaître la faute inexcusable de la société [6] ; Désigner un expert afin de déterminer les préjudices personnels qu’il a subis ;Dire et juger le jugement à intervenir commun et opposable à la CPCAM des Bouches-du-Rhône ; Dire que la CPCAM des Bouches-du-Rhône sera tenue de faire l’avance de ces sommes ;Condamner la société [6] à rembourser à la CPCAM des Bouches-du-Rhône les sommes dont elle sera tenue de faire l’avance ; Assortir la décision à intervenir de l’exécution provisoire ; Condamner la société [6] à lui payer la somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
À l’appui de son recours, il soutient que l’accident a eu lieu car le chantier, et en particulier l’escalier qui a provoqué sa chute, n’était pas aux normes de sécurité et que son employeur dont il affirme qu’il reconnait la défectuosité de l’escalier, n’a pas pris les mesures nécessaires pour éviter l’accident.
Il soutient également que contrairement à ce que prétend l’employeur, il était naturel d’emprunter cet escalier et ce d’autant plus qu’il affirme qu’un monticule de gravier se trouvait derrière son camion ce qui ne l’incitait pas à passer derrière son véhicule pour emprunter le chemin auquel fait allusion l’employeur.
Enfin, il soutient que son employeur ne saurait se dédouaner de sa responsabilité en matière de santé et de sécurité en invoquant le fait qu’il existait une coordination de sécurité-santé sur le chantier en raison de l’intervention de plusieurs entreprises.
La société ENTREPRISE [6], représentée par son avocat soutenant oralement ses dernières conclusions, demande au tribunal de :
Rejeter toutes les prétentions contraires ; Débouter Monsieur [P] [L] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;Condamner Monsieur [P] [L] à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que le salarié a commis une faute car il n’aurait pas dû emprunter l’escalier duquel il a chuté dans la mesure où il existait un accès plus direct, plat et sécurisé.
Elle soutient également qu’il existait des mesures de préventions des risques sur le chantier puisqu’un plan général de coordination de sécurité et de protection de la santé (PGCSPS) a été établi par un coordinateur chargé de la sécurité et de la protection de la santé, lequel a désigné l’entreprise chargé du gros œuvre, et non la société ENTREPRISE [6], d’établir le plan d’installation de chantier, les prestations liées à la modification de l’environnement de chantier ainsi que les circulations horizontales, de sorte que si une responsabilité devait être recherchée dans la réalisation de l’accident elle ne lui serait pas imputable.
Enfin, elle soutient que Monsieur [P] [L] a bénéficié de mesure de prévention et de formation à la sécurité matérialisé par une visite médicale d’embauche, une formation d’accueil en matière de sécurité à l’issue de laquelle il lui a été remis un livret d’accueil, et qu’il a bénéficié de l’actualisation permanente de ses CACES.
La CPCAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître, aux termes de ses écritures régulièrement communiquées aux parties avant l’audience, s’en rapporte à l’appréciation du tribunal quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Si la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, elle demande au tribunal de:
Dire qu’elle ne majorera ni rente, ni capital à l’égard du salarié du fait que son état de santé a été déclaré consolidé sans séquelles indemnisables le 14 juillet 2019 ; Constater qu’elle ne s’oppose pas à la mise en place d’une expertise afin de déterminer les préjudices indemnisables ; Dire que la caisse primaire fera l’avance des sommes à devoir au titre de la faute inexcusable de l’employeur ; Condamner l’employeur à lui rembourser les conséquences financières de cette faute inexcusable.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux écritures déposées par les parties à l’audience pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.
L’affaire a été mise en délibéré au 10 décembre 2024.
Sur la faute inexcusable de l’employeur
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation légale de sécurité et de protection de la santé, en ce qui concerne tant les accidents du travail que les maladies professionnelles.
L’employeur a, en particulier, l’obligation de veiller à l’adaptation de ces mesures de sécurité pour tenir compte des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. Il doit éviter les risques et évaluer ceux qui ne peuvent pas l’être, combattre les risques à la source, adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions du travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants.
Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L .452 1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Il est de jurisprudence constante qu’il appartient au salarié qui souhaite voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur ou de ceux qu’il s’est substitué dans la direction dans la survenance de son accident d’établir que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident du salarié. Il suffit qu’elle en soit la cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage.
Ainsi, il importe peu que le salarié ait lui-même commis une imprudence ayant concouru à son dommage. Cette circonstance ne peut atténuer la gravité de la faute de l’employeur (Cass. 2e civ., 12 oct. 2017, n° 16-19.412).
Enfin, la conscience du danger exigée de l’employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective de celui-ci. En d’autres termes, il suffit de constater que l’auteur » ne pouvait ignorer » celui-ci ou » ne pouvait pas ne pas [en] avoir conscience » ou encore qu’il aurait dû en avoir conscience. La conscience du danger s’apprécie au moment ou pendant la période de l’exposition au risque.
Sur la conscience du danger
En l’espèce, la société ENTREPRISE [6] allègue qu’elle ne pouvait pas avoir conscience des dangers du chantier de construction sur lequel a eu lieu l’accident du travail.
La preuve de la conscience du danger découle toutefois des documents qu’elle verse aux débats.
Elle produit en effet le plan général de coordination. Ce plan comporte ainsi un point n°13 intitulé » clôture de chantier – accès chantier » qui prévoit notamment que soient mise en œuvre dès que nécessaire des » éléments de clôtures intérieurs à l’emprise, pour matérialisation des circulation piétonnes sécurisées « .
Concernant l’accès piéton, il indique que » un cheminement propre et sécurisé donnera accès, depuis la limite de l’emprise, aux cantonnements. Les flux engins / pétons devront être différentiés « .
Le point n° 14 de ce plan afférent aux circulations horizontales dispose que » A chaque phase de travaux, la matérialisation de toutes les circulations piétonnes sécurisées devra être effectuée, depuis les limites d’emprise et le cantonnement jusqu’aux postes de travail.
Leur entretien et leur adaptation quotidienne seront due jusqu’à réception des travaux. « .
Il précise également que » Les zones non accessibles aux piétons seront interdits d’accès par barriérage et panneautage avertisseur adéquat « .
Ce plan dispose également que » avant toute intervention sur le chantier, chaque entreprise (y compris sous-traitante) devra établir et remettre au coordinateur sécurité son plan particulier de sécurité et de protection de la santé (P.P.S.P.S). Un exemplaire de ce document devra être consultable en permanence du chantier, et consultable à tout moment » et que » chaque entreprise devra assurer l’accueil de son personnel affecté au chantier « .
Elle verse également un » flash sécuri’TP » qui énonce que » L’analyse de notre accidentologie place la circulation sur chantier et les chutes de plain-pied comme typologie les plus fréquentes depuis 2015 « . Il dispose également que les causes de chutes sont liées à l’environnement de travail tel qu’un » sol en mauvais état, glissant, encombrement / désordre, obstacles imprévus, … « .
Enfin, le compte-rendu de visite d’inspection commune du 24 novembre 2017, signé par la société ENTREPRISE [6], vise également l’aménagement d’un cheminement piéton pour séparation flux engins/piétons en concertation avec le gros œuvre et précise que les circulations horizontales et verticales sont à la charge de la société ENTREPRISE [6] pour les circulations liées au terrassement.
Ce premier élément de la faute inexcusable de l’employeur est donc caractérisé.
Sur les mesures de prévention des risques
À l’appui de sa prétention, Monsieur [P] [L] soutient que l’accident a eu lieu car l’escalier duquel il a chuté n’était pas aux normes professionnelles alors qu’il était censé être sur un chantier sécurisé, ce qui n’était pas le cas.
S’il ressort des explications de la société ENTREPRISE [6] qu’un chemin sécurisé permettait à Monsieur [P] [L] de rejoindre son véhicule, il est en revanche incontestable que l’escalier emprunté par le salarié n’était pas aux normes de sécurités.
La non-conformité aux normes de sécurité de cet escalier est frappante lorsqu’on le compare à l’escalier en pente douce en métal dessiné dans le plan général de coordination dans la rubrique » circulations horizontales » alors qu’il ressort des photographies versées aux débats tant par Monsieur [P] [L] que par la société ENTREPRISE [6] que l’escalier où a eu lieu l’accident du travail est un vieil escalier de marches en bois.
Il ressort également de ces photographies que l’escalier en cause dans l’accident de Monsieur [P] [L] était encombré de gravats et que l’écart entre la terre ferme et la première marche de l’escalier était très important, ce qui constituent deux facteurs d’amplification du risque de chute.
En outre, si des mesures de sécurité avaient été prises préalablement au chantier de construction, force est de constater que les mesures de sécurité mentionnées dans le compte-rendu d’inspection du chantier et celles visées dans le plan de coordination afférentes aux circulations horizontales n’ont pas été respectées.
En effet, le plan de coordination mentionne expressément que » chaque entreprise générant des risques exportés (voir PPSPS) sera en charge du balisage ou de la restriction d’accès, délimitant ainsi un périmètre sécurité « , et il ressort du compte-rendu de visite d’inspection commune du 24 novembre 2017 que la société ENTREPRISE [6] était en charge de la mise en commun de moyens concernant les circulations horizontales et verticales liées au terrassement.
Or, l’analyse de l’accident du travail de Monsieur [P] [L] effectué par société ENTREPRISE CALVIN FRERES démontre que parmi les trois actions de prévention à mettre en œuvre il convenait de :
veiller à entretenir et ordonner les espaces et installations dédiés à la circulation sur chantier ; baliser les cheminements piétons, et condamner les accès désaffectés.
La mise en place de panneau de signalisation mettant en garde contre la dangerosité de l’escalier et la mise en place de barrières afin d’interdire aux salariés d’emprunter cet escalier avant l’accident du travail auraient permis de réduire voire d’annihiler le risque qui s’est matérialisé.
Il convient de noter que la responsabilité éventuelle d’un tiers n’a pour effet d’exonérer l’employeur de l’obligation de veiller personnellement à la sécurité de ses propres salariés (Cass Crim. 7 novembre 2000, n° 00-83.035).
Dès lors, la société ENTREPRISE [6] ne saurait se retrancher derrière la responsabilité de la société en charge du gros œuvre pour échapper à sa propre responsabilité, ceci d’autant plus que le compte-rendu de visite d’inspection commune du 24 novembre 2017, signé par la société ENTREPRISE [6], précise que les circulations horizontales et verticales sont à la charge de société ENTREPRISE [6] pour les circulations liées au terrassement.
En outre, le plan de coordination rappelait que » chaque entreprise devra assurer l’accueil de son personnel affecté au chantier. Une formation spécifique selon besoin sera également assurée « .
Il prévoyait aussi que » avant toute intervention sur le chantier, chaque entreprise (y compris sous-traitante) devra établir et remettre au coordinateur sécurité son plan particulier de sécurité et de protection de la santé (P.P.S.P.S) » et que » Un exemplaire de ce document devra être consultable en permanence du chantier, et consultable à tout moment « .
Or, ce P.P.S.P.S. n’est pas versé aux débats par la société ENTREPRISE [6] et il n’est pas démontré que ce document était consultable en permanence sur le chantier.
Comme le rappelle justement le juge départiteur prud’homal dans son jugement du 14 juin 2023, la société ENTREPRISE [6] ne justifie pas avoir transmis à Monsieur [P] [L] le plan d’installation de chantier alors que ce plan liste, notamment, l’organisation du trafic piéton, des véhicules et engins autours du chantier ainsi que les principes de circulation et voies piétonnes, en lien direct avec l’accident du travail du 14 janvier 2019.
Dès lors, il importe peu que Monsieur [P] [L] ait commis une éventuelle imprudence en n’empruntant pas le chemin le plus court, le plus direct et/ou le plus sécurisé pour rejoindre son véhicule. Cette imprudence n’a pas pour effet d’exonérer l’employeur de sa faute inexcusable.
Il est donc établi que la société ENTREPRISE [6] a commis des manquements à son obligation de sécurité alors qu’elle avait conscience du danger que représente les circulations horizontales sur un chantier de construction et qu’elle n’a pas mis en œuvre les mesures de préventions pourtant édictées préalablement au chantier.
Enfin, il n’est pas davantage démontré que Monsieur [P] [L] ait bénéficié d’une réelle formation à la sécurité en lien avec l’accident du travail.
En effet, le livret d’accueil remis et commenté par Madame [Y] [H] le jour de son embauche à Monsieur [P] [L] n’est pas versé aux débats. Le tribunal se trouve donc dans l’impossibilité de vérifier son contenu.
L’attestation d’assiduité à une formation daté du 27 septembre 2018 versée aux débats par société ENTREPRISE CALVIN FRERES, ne portait pas sur la sécurité dans les déplacements sur un chantier mais avait pour objectifs d’utiliser et d’entretenir les engins et leurs accessoires en maîtrisant les techniques de travail en toute sécurité et de présenter les tests CACES R372m catégorie 10.
De même, le fait que Monsieur [P] [L] ait obtenu le titre CACES R372m relatif à l’utilisation des engins de chantier ne signifie pas pour autant qu’il a été sensibilisé aux mesures de sécurité relatives aux déplacements horizontaux sur un chantier.
Enfin, le » flash sécuri’TP » versé aux débats par la société ENTREPRISE [6] n’est ni daté ni signé par Monsieur [P] [L], de sorte qu’il n’est pas rapporté la preuve qu’il en a eu connaissance.
L’ensemble de ces éléments démontrent que la société ENTREPRISE [6] n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver Monsieur [P] [L] du risque de chute lors de déplacements à pied sur le chantier.
En conséquence, il convient de dire et juger que l’accident dont a été victime Monsieur [P] [L] le 14 février 2019 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société ENTREPRISE [6].
Sur les conséquences de la faute inexcusable de l’employeur
Sur la majoration de la rente
L’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale dispose que la reconnaissance de la faute inexcusable ouvre droit à la majoration de la rente ou le doublement du capital versé par l’organisme social à l’assuré victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
En l’espèce, la CPCAM des Bouches-du-Rhône indique que l’état de santé de Monsieur [P] [L] a été déclaré consolidé à la date du 14 juillet 2019 sans séquelles indemnisables. Elle précise que la date de consolidation et l’absence de séquelles indemnisables ne sont plus contesté par Monsieur [P] [L], puisqu’il s’est désisté de sa contestation sur ces points, et verse aux débats une ordonnance présidentielle du 05 juillet 2023 constatation ledit désistement.
En outre, Monsieur [P] [L] ne demande pas la majoration d’une rente ou d’une indemnité en capital.
Il n’y a donc pas lieu de statuer sur la majoration d’une rente ou d’une indemnité en capital à laquelle la victime n’a pas droit.
Sur la demande d’expertise
Conformément à l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.
Aux termes de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, » indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle « .
Selon la décision du Conseil constitutionnel en date du 18 juin 2010, en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime peut demander à celui-ci réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
En outre, par quatre arrêts rendus le 4 avril 2012, la Cour de cassation a précisé l’étendue de la réparation des préjudices due à la victime d’un accident du travail en cas de faute inexcusable de son employeur.
Il en résulte que la victime ne peut pas prétendre à la réparation des chefs de préjudices suivants déjà couverts :
le déficit fonctionnel permanent (couvert par L. 431-1, L. 434-1 et L. 452-2) ;les pertes de gains professionnels actuelles et futures (couvertes par les articles L. 431 1 et suivants, et L. 434-2 et suivants) ;l’incidence professionnelle indemnisée de façon forfaitaire par l’allocation d’un capital ou d’une rente d’accident du travail (L. 431-1 et L. 434-1) et par sa majoration (L. 452-2) ;l’assistance d’une tierce personne après consolidation (couverte par l’article L. 434 2 alinéa 3) ;les frais médicaux et assimilés, normalement pris en charge au titre des prestations légales.
En revanche, la victime peut notamment prétendre à l’indemnisation, outre celle des chefs de préjudice expressément visés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale :
du déficit fonctionnel temporaire, non couvert par les indemnités journalières qui se rapportent exclusivement à la perte de salaire,des dépenses liées à la réduction de l’autonomie, y compris les frais de logement ou de véhicule adapté, et le coût de l’assistance d’une tierce personne avant consolidation,du préjudice sexuel, indépendamment du préjudice d’agrément.
Jusqu’en 2023, la Cour de cassation jugeait de manière constante que la rente prévue par le code de la sécurité sociale versée aux victimes de maladie professionnelle ou d’accident du travail en cas de faute inexcusable de l’employeur, indemnisait tout à la fois la perte de gain professionnel, l’incapacité professionnelle et le déficit fonctionnel permanent (le handicap dont vont souffrir les victimes dans le déroulement de leur vie quotidienne). Pour obtenir de façon distincte une réparation de leurs souffrances physiques et morales, ces victimes devaient rapporter la preuve que leur préjudice n’était pas déjà indemnisé au titre de ce déficit fonctionnel permanent.
Par deux arrêts du 20 janvier 2023, la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, a opéré un revirement de jurisprudence en décidant non seulement que les souffrances physiques et morales endurées après consolidation pourront dorénavant faire l’objet d’une réparation complémentaire, mais également que la rente versée par la caisse de sécurité sociale aux victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle n’indemnise pas leur déficit fonctionnel permanent.
Dès lors que le déficit fonctionnel permanent n’est plus susceptible d’être couvert en tout ou partie par la rente et donc par le livre IV du code de sécurité sociale, il peut faire l’objet d’une indemnisation, compte-tenu de la réserve d’interprétation posée par le Conseil constitutionnel et rappelée ci-dessus, selon les conditions du droit commun.
Eu égard à sa finalité de réparation d’une incapacité permanente de travail, qui lui est assignée à l’article L. 431-1 du code de la sécurité sociale, et à son mode de calcul appliquant au salaire de référence de la victime le taux d’incapacité permanente défini à l’article L. 434-2 du même code, la rente d’accident du travail doit être regardée comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l’accident, c’est-à-dire ses pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité, et non le poste de préjudice personnel.
Par conséquent, le taux d’incapacité permanente partielle fixé par la caisse sert pour la majoration de la rente servie en application de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, et le déficit fonctionnel permanent ainsi que le taux retenu pour l’évaluer relèvent désormais de l’application du droit commun, étant rappelé que ce poste de préjudice répare les incidences du dommage qui touchent exclusivement la sphère personnelle de la victime.
Le taux d’incapacité permanente partielle et le taux de déficit fonctionnel sont donc deux notions distinctes qui ne se confondent pas.
En effet, ce poste de préjudice (dit DFP) permet d’indemniser non seulement le déficit fonctionnel au sens strict, c’est-à-dire la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel définitive, après consolidation, mais également les douleurs physiques et psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence, après la consolidation.
Dès lors, même si Monsieur [P] [L] ne s’est pas vu attribué un taux au titre d’une incapacité permanente partielle du fait que la CPCAM des Bouches-du-Rhône considère qu’il n’y avait pas de séquelles indemnisables, cela ne signifie pas automatiquement que l’assuré n’a pas subi un déficit fonctionnel permanent.
Ainsi, Monsieur [P] [L] est bien fondé à solliciter une expertise afin d’évaluer s’il a subi un déficit fonctionnel permanent, et dans l’affirmation évaluer son taux.
Il convient donc de compléter la mission d’expertise aux fins de faire évaluer par l’expert le déficit fonctionnel permanent en tenant compte de la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel définitive, après consolidation, mais également les douleurs physiques et psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence.
Il convient de rappeler, s’agissant du préjudice d’agrément, que l’expert pourra caractériser l’impossibilité de pratiquer de manière régulière une activité sportive ou de loisir du fait de l’accident, et il appartiendra le cas échéant à Monsieur [P] [L] de rapporter la preuve de la pratique régulière de cette activité avant la survenance de son accident.
Par ailleurs, la preuve d’un préjudice lié à la perte de chance de promotion professionnelle et aux frais divers ne relève pas quant à elle d’investigation médicale.
L’évaluation des préjudices nécessitant dans le cas d’espèce une expertise médicale, sera ordonnée en application de l’article R. 142-16 du code de la sécurité sociale, selon les modalités précisées dans le dispositif du présent jugement.
La CPCAM des Bouches-du-Rhône fera l’avance des frais d’expertise.
Sur l’action récursoire de la CPCAM des Bouches-du-Rhône
En application des dispositions de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale qui dispose que la réparation des préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur, la CPCAM des Bouches-du-Rhône, dans le cadre de son action récursoire, sera habilitée à récupérer auprès de la société ENTREPRISE CALVIN FRERES les sommes dont elle sera tenue de faire l’avance au titre de la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Sur les demandes accessoires
En application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, la société ENTREPRISE [6], qui succombe à ses prétentions, sera condamnée aux dépens.
L’équité justifie d’allouer à Monsieur [P] [L] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande de la société ENTREPRISE [6] à ce titre sera rejetée.
La nature et l’ancienneté du litige justifient que le présent jugement soit assorti de l’exécution provisoire.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :
DIT que l’accident du travail dont a été victime Monsieur [P] [L] le 14 février 2019 est dû à la faute inexcusable de la société ENTREPRISE [6] ;
AVANT-DIRE DROIT sur la liquidation des préjudices subis par Monsieur [P] [L] :
ORDONNE une expertise judiciaire aux frais avancés de la CPCAM des Bouches-du-Rhône et commet pour y procéder le Docteur [U] [W], expert judiciaire inscrit sur la liste établie près la cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui pourra s’adjoindre tout sapiteur de son choix, avec mission de :
Convoquer les parties et recueillir leurs observations ;Se faire comuniquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies, en particulier le certificat médical initial ;
Fournir le maximum de renseignements sur l’identité de la victime et sa situation familiale, son niveau d’études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l’accident ;
Procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé de Monsieur [P] [L] en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime en décrivant un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles ;
Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec les lésions occasionnées par l’accident, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou habituelles ; si l’incapacité fonctionnelle n’a été que partielle, en préciser le taux ;
Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique (avant consolidation), du fait des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles ; les évaluer selon l’échelle de sept degrés ;
Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique temporaire (avant consolidation), le décrire précisément et l’évaluer selon l’échelle habituelle de sept degrés ;
Décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et, lorsque la nécessité d’une aide temporaire avant consolidation est alléguée, indiquer si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne (étrangère ou non à la famille) a été nécessaire en décrivant avec précision les besoins (nature de l’aide apportée, niveau de compétence technique, durée d’intervention quotidienne ou hebdomadaire) ;
Indiquer si, après la consolidation, la victime subit un déficit fonctionnel permanent :dans l’affirmative chiffrer, par référence au » Barème indicatif des déficits fonctionnels séquellaires en droit commun » le taux éventuel de déficit fonctionnel permanent (état antérieur inclus) imputable à l’accident ou la maladie, résultant de l’atteinte permanente d’une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation, le taux de déficit fonctionnel devant prendre en compte, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes qu’elle ressent, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après consolidation ;dans l’hypothèse d’un état antérieur, préciser en quoi l’accident a eu une incidence sur celui-ci et décrire les conséquences de cette situation ;dire si des douleurs permanentes existent et comment elles ont été prises en compte dans le taux retenu ; décrire les conséquences de ces altérations permanentes et de ces douleurs sur la qualité de vie de la victime ;
Lorsque la victime allègue un préjudice d’agrément, à savoir l’impossibilité de se livrer à des activités spécifiques sportives ou de loisir, ou une limitation de la pratique de ces activités, donner un avis médical sur cette impossibilité ou cette limitation et son caractère définitif, sans prendre position sur l’existence ou non d’un préjudice afférent à cette allégation ;
Lorsque la victime allègue une répercussion dans l’exercice de ses activités professionnelles, recueillir les doléances et les analyser ; Étant rappelé que pour obtenir l’indemnisation du préjudice résultant de la perte ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle, la victime devra rapporter la preuve que de telles possibilités préexistaient;
Établir un état récapitulatif de l’ensemble des postes énumérés dans la mission ;
Rappelle que la consolidation de l’état de santé de Monsieur [P] [L] résultant de l’accident du travail du 14 février 2019 a été fixée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône à la date du 14 juillet 2019 sans séquelles indemnisables et qu’il n’appartient pas à l’expert de se prononcer sur la date de consolidation, ni sur le taux d’incapacité permanente partielle ;
Rappelle que la CPCAM des Bouches-du-Rhône devra faire l’avance des frais d’expertise ;
Dit que l’expert fera connaître sans délai son acceptation, qu’en cas de refus ou d’empêchement légitime, il sera pourvu aussitôt à son remplacement ;
Dit que l’expert pourra s’entourer de tous renseignements utiles auprès notamment de tout établissement hospitalier où la victime a été traitée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé ;
Dit que l’expert rédigera, au terme de ses opérations, un pré-rapport qu’il communiquera aux parties en les invitant à présenter leurs observations dans un délai maximum d’un mois ;
Dit qu’après avoir répondu de façon appropriée aux éventuelles observations formulées dans le délai imparti ci-dessus, l’expert devra déposer au greffe du pôle social du tribunal judiciaire un rapport définitif en double exemplaire dans le délai de huit mois à compter de sa saisine ;
Dit que l’expert en adressera directement copie aux parties ou à leurs conseils ;
DIT que la CPCAM des Bouches-du-Rhône versera directement à Monsieur [P] [L] les sommes dues au titre de l’indemnisation complémentaire ;
DIT que la CPCAM des Bouches-du-Rhône pourra recouvrer le montant des indemnisations à venir accordées à Monsieur [P] [L] à l’encontre de la société ENTREPRISE [6] et condamne à ce titre cette dernière à les rembourser, ainsi qu’au remboursement du coût de l’expertise ;
DÉBOUTE la société ENTREPRISE [6] de l’ensemble de ses demandes ;
CONDAMNE la société ENTREPRISE [6] à payer à Monsieur [P] [L] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement ;
DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.
LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT