Prolongation de la rétention administrative : Évaluation des diligences administratives et des droits des étrangers en situation de non-reconnaissance consulaire.

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Prolongation de la rétention administrative : Évaluation des diligences administratives et des droits des étrangers en situation de non-reconnaissance consulaire.

Identification des Parties

Monsieur [T] [N] [D], né le 9 avril 2003 en Libye, se présente comme M. [D] [T] [N]. Il est actuellement retenu au Centre de Rétention Administrative (CRA) de [Localité 2] et est assisté par Me Frédérique Kuchly, avocat au barreau de Versailles. La préfecture des Hauts-de-Seine, représentée par Me Bruno Mathieu, est la défenderesse dans cette affaire.

Contexte de la Rétention

Le 27 septembre 2024, Monsieur [D] [T] [N] a reçu une obligation de quitter le territoire français. Le 6 novembre 2024, un arrêté préfectoral a ordonné son placement en rétention pour une durée de quatre jours. Par la suite, le tribunal judiciaire de Versailles a prolongé cette rétention à plusieurs reprises, d’abord pour 26 jours, puis pour 30 jours supplémentaires, en raison de l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement.

Appel de l’Ordonnance

Le 9 décembre 2024, Monsieur [D] [T] [N] a interjeté appel de l’ordonnance du 7 décembre 2024, demandant son annulation ou, à titre subsidiaire, la réformation de l’ordonnance et la fin de sa rétention. Il a soulevé l’insuffisance des diligences de l’administration concernant la délivrance de documents de voyage.

Arguments des Parties

Lors de l’audience, l’avocat de Monsieur [D] [T] [N] a soutenu que la préfecture n’avait pas effectué les diligences nécessaires pour obtenir un laissez-passer et organiser un vol. Des échanges entre la préfecture et le consulat d’Égypte ont été évoqués, indiquant que la préfecture avait laissé entendre qu’une fin de rétention était envisageable en février 2025, sans que des actions concrètes ne soient entreprises.

Recevabilité de l’Appel

L’appel a été jugé recevable, car interjeté dans les délais légaux et motivé conformément aux articles du code de l’entrée et du séjour des étrangers. Le tribunal a confirmé que les conditions de recevabilité étaient remplies.

Prolongation de la Rétention

Le tribunal a examiné la demande de prolongation de la rétention. Selon le code de l’entrée et du séjour des étrangers, la prolongation est possible dans des cas spécifiques, notamment en cas d’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement. Dans ce cas, la préfecture a démontré qu’elle avait effectué les diligences nécessaires, mais que la délivrance des documents de voyage par le consulat libyen n’avait pas été obtenue.

Décision du Tribunal

Le tribunal a confirmé l’ordonnance de prolongation de la rétention, considérant que la préfecture avait agi conformément aux exigences légales. La décision a été rendue publiquement et est susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de deux mois.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelle est la recevabilité de l’appel de Monsieur [D] [T] [N] ?

L’appel de Monsieur [D] [T] [N] est déclaré recevable en vertu de l’article R 743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Cet article stipule que l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel dans les 24 heures suivant son prononcé.

Ce délai court à compter de la notification de l’ordonnance à l’étranger lorsque celui-ci n’assiste pas à l’audience. En l’espèce, l’appel a été interjeté dans les délais légaux, et il est motivé, ce qui le rend recevable.

De plus, l’article R 743-11 précise que le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel motivée. Le délai est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile, ce qui renforce la légitimité de l’appel.

Ainsi, le tribunal a confirmé la recevabilité de l’appel, considérant que toutes les conditions légales étaient remplies.

Quelles sont les conditions pour prolonger la rétention administrative ?

La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Cet article stipule que lorsque vingt-six jours se sont écoulés depuis l’expiration d’une première période de rétention de 4 jours, le magistrat peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours.

Les conditions de prolongation sont les suivantes :

1. En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;

2. Lorsque l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation de son identité, ou de l’obstruction volontaire à son éloignement ;

3. Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, ou lorsque la délivrance est intervenue trop tardivement ;

b) de l’absence de moyens de transport.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention pour une durée maximale de trente jours. La durée totale de la rétention ne doit pas excéder soixante jours.

Dans le cas de Monsieur [D] [T] [N], la prolongation a été justifiée par l’absence de documents de voyage, ce qui a été reconnu par le tribunal.

Quelles sont les conséquences de l’absence de diligence de l’administration ?

L’absence de diligence de l’administration peut avoir des conséquences significatives sur la légalité de la rétention administrative. Selon l’article L. 742-4, la prolongation de la rétention doit être justifiée par des éléments concrets, tels que l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement.

Dans le cas présent, Monsieur [D] [T] [N] a soulevé l’insuffisance des diligences de l’administration, arguant que la préfecture n’avait pas pris les mesures nécessaires pour obtenir un laissez-passer consulaire. Cependant, le tribunal a constaté que la préfecture avait effectivement engagé des démarches auprès des consulats concernés.

Il a été établi que le consulat libyen n’avait pas reconnu Monsieur [D] [T] [N] comme son ressortissant, ce qui a conduit la préfecture à solliciter d’autres consulats. Le tribunal a jugé que la préfecture avait accompli toutes les diligences attendues, et que l’absence de documents de voyage ne pouvait pas être imputée à une négligence de l’administration.

Ainsi, l’absence de diligence ne peut pas être invoquée pour contester la prolongation de la rétention dans ce cas précis.

Quelles sont les voies de recours possibles après la décision de prolongation de la rétention ?

Après la décision de prolongation de la rétention, plusieurs voies de recours sont possibles. Selon l’article R 743-20 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance du premier président de la cour d’appel ou de son délégué n’est pas susceptible d’opposition.

Cependant, le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a placé l’individu en rétention, ainsi qu’au ministère public. Les articles 973 à 976 du code de procédure civile précisent que le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au greffe de la Cour de Cassation, signée par un avocat au Conseil d’État et à la Cour de Cassation.

La déclaration doit être remise au secrétariat-greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de défendeurs, plus deux. Le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification de la décision.

Dans le cas de Monsieur [D] [T] [N], il a été informé que la décision était susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de deux mois, ce qui lui laisse la possibilité de contester la décision de prolongation de sa rétention.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 décembre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG
24/07465
COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14H

N° RG 24/07465 – N° Portalis DBV3-V-B7I-W4VF

Du 10 DECEMBRE 2024

ORDONNANCE

LE DIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE

A notre audience publique,

Nous, Nathalie BOURGEOIS-DE RYCK, Première présidente de chambre à la cour d’appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président afin de statuer dans les termes de l’article L 743-21 et suivants du code de l’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile, assistée de Maëva VEFOUR, Greffière, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [T] [N] [D] se disant M. [D] [T] [N]

né le 09 Avril 2003 à [Localité 4] (LIBYE)

de nationalité lybienne

Actuellement retenu au CRA de [Localité 2]

Comparant par visioconférence

assisté de Me Frédérique KUCHLY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 461, commis d’office

DEMANDEUR

ET :

PREFECTURE DES HAUTS DE SEINE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Bruno MATHIEU de la SELAS MATHIEU ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R079, non présent

DEFENDERESSE

Et comme partie jointe le ministère public absent

Vu l’extrait individualisé du registre prévu par l’article L.744-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’obligation de quitter le territoire français en date du 27 septembre 2024 notifiée par le préfet des Hauts de Seine à Monsieur [D] [T] [N] le 27 septembre 2024 ;

Vu l’arrêté du préfet des Hauts de Seine en date du 6 novembre 2024 portant placement en rétention de Monsieur [D] [T] [N] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 4 jours, notifiée le 6 novembre 2024 ;

Vu la décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Versailles du 11 novembre 2024 qui a déclaré recevable la requête aux fins de prolongation de la rétention administrative, a fait droit à la requête en prolongation de la rétention administrative, a prolongé la rétention de Monsieur [D] [T] [N] pour une durée de vingt-six jours ;

Vu l’ordonnance sur requête en mainlevée de prolongation de la rétention administrative en date du 15 novembre 2024,

Vu la requête du préfet des Hauts de Seine pour une deuxième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [T] [N] en date du 6 décembre 2024 et enregistrée le même jour à 8h58 ;

Vu la décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Versailles du 7 décembre 2024 qui a déclaré la requête en prolongation de la rétention administrative recevable, déclaré la procédure diligentée à l’encontre de Monsieur [D] [T] [N] régulière, et prolongé la rétention de Monsieur [D] [T] [N] pour une durée supplémentaire de 30 jours ;

Le 9 décembre 2024 à 8h54, Monsieur [D] [T] [N] a relevé appel de cette ordonnance prononcée en sa présence, à distance à l’aide d’un moyen de télécommunication audiovisuelle par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Versailles le 7 décembre 2024 à 11h00.

Il sollicite, dans sa déclaration d’appel, l’annulation de l’ordonnance, à titre subsidiaire la réformation de l’ordonnance et la fin de la rétention. A cette fin, il soulève l’insuffisance des diligences nécessaires de l’administration.

Les parties ont été convoquées en vue de l’audience.

A l’audience, le conseil de Monsieur [D] [T] [N] a soutenu le moyen développé dans la déclaration d’appel. La préfecture n’a pas fait les diligences nécessaires sur le Laissez-passer et le vol, Il y a des échanges entre la préfecture et le consulat d’Egypte, qui a auditionné monsieur et le consulat d’Egypte proposent une audition pour le 18/03/2025. La préfecture répond au consulat d’Egypte, une fin de rétention en février 2025. Elle laisse penser au consulat que celle-ci a le temps de prévoir un LP consulaire, le consulat égyptien répond ensuite qu’elle n’a pas de date pour le moment. Il n’y a pas de diligences effectives.

Le préfet n’a pas comparu.

Monsieur [D] [T] [N] a indiqué souhaiter être remis en liberté.

SUR CE

Sur la recevabilité de l’appel

En vertu de l’article R 743-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel dans les 24 heures de son prononcé, ce délai courant à compter de sa notification à l’étranger lorsque celui-ci n’assiste pas à l’audience. L’article R 743-11 du même code prévoit que le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel motivée. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

En l’espèce, l’appel, dont le délai a été prorogé au jour ouvrable suivant dès lors qu’il a expiré un samedi, un dimanche ou un jour férié, a été interjeté dans les délais légaux et il est motivé. Il doit être déclaré recevable.

Sur la deuxième prolongation

En vertu de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, quand un délai de vingt-six jours s’est écoulé depuis l’expiration du délai de rétention de 4 jours, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;

2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité, ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque, la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;

b) de l’absence de moyens de transport ;

L’étranger peut être maintenu à la disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L.742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.

En l’espèce, malgré les diligences de l’administration, la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé,

Le fait que la délivrance d’un laissez-passer permettant la mise en ‘uvre immédiate du retour ne soit pas intervenue lors de la première période de rétention n’est pas un obstacle à la poursuite de la rétention dès lors que l’éloignement demeure une perspective et qu’en l’espèce c’est l’absence de document de voyage qui est à l’origine du retard dans la mise en ‘uvre du départ.

En l’espèce, le consulat libyen ne l’a pas reconnu comme son ressortissant le 25 novembre 2024, suite à l’audition consulaire. La préfecture a alors saisi le 29 novembre 2024 les consulats de Tunisie, d’Egypte et d’Algérie, M. [T] [N] se réclamant de ses nationalités. Il est mal fondé à invoquer un manque de diligence en raison des délais annoncés au consulat égyptien alors que lui-même persiste à revendiquer à l’audience être libyen alors qu’il n’a pas été reconnu par la Libye. La préfecture a donc accompli toutes les diligences attendues.

En conséquence, il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire,

Déclare le recours recevable en la forme,

Confirme l’ordonnance entreprise.

Fait à VERSAILLES le 10 décembre 2024 à h

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Reçu copie de la présente décision et notification de ce qu’elle est susceptible de pourvoi en cassation dans un délai de 2 mois selon les modalités laissée ci-dessous.

l’intéressé, l’interprète, l’avocat

POUR INFORMATION : le délai de pourvoi en cassation est de DEUX MOIS à compter de la présente notification.

Article R 743-20 du CESEDA :

‘ L’ordonnance du premier président de la cour d’appel ou de son délégué n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui l’a placé en rétention et au ministère public. ‘.

Articles 973 à 976 du code de procédure civile :

Le pourvoi en cassation est formé par déclaration au greffe de la Cour de Cassation, qui est signée par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation ;

La déclaration est remise au secrétariat-greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de défendeurs, plus deux ;


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