Sommaire Déclaration de l’accident du travailLe 8 août 2017, la SARL a signalé un accident du travail impliquant Mme [E] [W], une salariée intérimaire en tant qu’agent de production. Mme [W] a déclaré avoir glissé sur un morceau de beurre, entraînant une chute qui a causé une fracture de l’épaule gauche, comme indiqué dans le certificat médical établi le même jour. Prise en charge par la caisse d’assurance maladieLa caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois a reconnu l’accident comme un accident du travail et a pris en charge les soins. Un certificat médical a prescrit un arrêt de travail jusqu’au 14 août 2017. Par la suite, la caisse a fixé la date de Jonction au 14 août 2018 et a attribué un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 25 % à compter du 15 août 2018. Contestation du taux d’incapacitéLa société a contesté le taux d’IPP et a saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité de Rennes le 9 octobre 2018. Le jugement du 1er avril 2022 a confirmé le taux d’IPP de 25 %, débouté la société de ses demandes et condamné celle-ci aux dépens. Appel de la décisionLa société a interjeté appel de ce jugement le 10 mai 2022, demandant à la cour de réformer la décision et de fixer le taux d’IPP à 17 % ou, subsidiairement, d’ordonner une mesure d’instruction pour évaluer le taux d’IPP. Arguments des partiesLa caisse n’a pas comparu à l’audience. La société a soutenu que le médecin conseil avait sous-estimé le taux d’incapacité, citant des rapports médicaux proposant des taux d’IPP de 18 % et 17 %. Elle a contesté la prise en compte des complications d’algodystrophie et de pseudarthrose, affirmant que ces conditions étaient guéries. Évaluation médicale et barème indicatifLe jugement a rappelé que le barème d’évaluation des incapacités est indicatif et que le médecin doit évaluer la situation de la victime en tenant compte de divers facteurs. Les limitations de mouvement de l’épaule gauche de Mme [W] ont été mesurées, et le médecin a constaté une raideur marquée et des douleurs persistantes. Décision de la courLa cour a confirmé le jugement initial, considérant que l’évaluation du médecin conseil était conforme au barème indicatif et que les éléments de preuve étaient suffisants pour trancher le litige. La demande d’expertise supplémentaire a été rejetée, et la société a été condamnée aux dépens. |
Questions / Réponses juridiques :
Quel est le cadre légal pour la détermination du taux d’incapacité permanente partielle (IPP) en cas d’accident du travail ?Le cadre légal pour la détermination du taux d’incapacité permanente partielle (IPP) est principalement régi par le Code de la sécurité sociale, notamment par l’article L. 434-2. Cet article stipule que le taux de l’incapacité permanente est déterminé en fonction de plusieurs critères, tels que la nature de l’infirmité, l’état général de la victime, son âge, ainsi que ses facultés physiques et mentales. Il est également précisé que le taux doit tenir compte des aptitudes et de la qualification professionnelle de la victime, en se basant sur un barème indicatif d’invalidité. Ce barème, bien qu’indicatif, sert de référence pour l’évaluation des préjudices consécutifs aux séquelles des accidents du travail. L’article R. 434-32 du même code précise que la caisse primaire d’assurance maladie se prononce sur l’existence d’une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci, en se basant sur les renseignements recueillis. Les barèmes indicatifs d’invalidité sont annexés au livre du Code de la sécurité sociale, et il est important de noter que ces barèmes ne sont qu’indicatifs et que le médecin chargé de l’évaluation peut s’en écarter en justifiant sa décision. Comment la cour a-t-elle évalué le taux d’IPP dans le cas de Mme [W] ?Dans le cas de Mme [W], la cour a évalué le taux d’IPP à 25 % en se basant sur plusieurs éléments médicaux et sur les barèmes indicatifs d’invalidité. La cour a pris en compte la nature de l’infirmité, qui était une fracture multifragmentaire de l’extrémité proximale de l’humérus gauche, ainsi que les complications qui en ont découlé, telles que l’algoneurodystrophie et la pseudarthrose. Le médecin conseil a constaté une raideur marquée de l’épaule gauche, avec des limitations mesurées des amplitudes articulaires. Par exemple, l’antepulsion a été mesurée à 100° (norme à 180°), l’abduction à 80° (norme à 170°), et la rotation externe à 30° (norme à 60°). Ces limitations ont été jugées modérées, ce qui a conduit à une évaluation conforme au barème indicatif qui prévoit un taux de 20 % en cas de limitation modérée de tous les mouvements de l’épaule dominante. La cour a également noté que les douleurs persistantes et la raideur articulaire ont justifié une majoration du taux d’IPP. En conséquence, la cour a confirmé le jugement initial qui avait fixé le taux d’IPP à 25 %. Quelles sont les implications de la décision de la cour concernant les dépens ?La décision de la cour concernant les dépens stipule que la SARL [5] est condamnée à supporter les dépens de la procédure, étant la partie perdante. Selon l’article 696 du Code de procédure civile, les dépens comprennent les frais de justice exposés par les parties, tels que les frais d’huissier, les frais d’expertise, et les frais de greffe. La cour a statué que les dépens de la présente procédure seraient laissés à la charge de la société, ce qui signifie qu’elle devra rembourser les frais engagés par la partie adverse, en l’occurrence la caisse primaire d’assurance maladie, ainsi que ses propres frais. Cette décision est conforme aux principes généraux du droit, qui prévoient que la partie perdante dans un litige doit supporter les frais de la procédure. Il est important de noter que cette disposition vise à décourager les recours abusifs et à garantir que les parties agissent de manière responsable dans le cadre des procédures judiciaires. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/03026 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SXW4
Société [5]
C/
CPAM DE L’ARTOIS
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 11 DECEMBRE 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Clotilde RIBET, Présidente de chambre
Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère
Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère
GREFFIER :
Madame Adeline TIREL lors des débats et Monsieur Philippe LE BOUDEC lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 15 Octobre 2024
devant Madame Clotilde RIBET, magistrat chargé d’instruire l’affaire, tenant seule l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 11 Décembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 01 Avril 2022
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Tribunal Judiciaire de Rennes – Pôle Social
Références : 18/10978
APPELANTE :
LA SOCIÉTÉ [5]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Florence GASTINEAU, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALDIEDE L’ARTOIS
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
non représentée
Le 8 août 2017, la SARL [5] (la société), a déclaré un accident du travail, concernant Mme [E] [W], salariée intérimaire en tant qu’agent de production, survenu le même jour dans les circonstances suivantes ‘Mme [W] affirme avoir glissé sur un morceau de beurre et n’a pas pu se rattraper car le tapis était glissant’.
Le certificat médical initial, établi le 8 août 2017 fait état de ‘chute sur membre supérieur gauche ->fracture de l’épaule gauche’, avec prescription d’un arrêt de travail jusqu’au 14 août 2017.
La caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois (la caisse) a pris en charge l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels.
Par courrier du 4 septembre 2018, après avis du médecin conseil, la caisse a fixé la date de Jonction au 14 août 2018.
Par décision du 27 septembre 2018, la caisse a notifié à la société le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) attribué à Mme [W] fixé à 25 % à compter du 15 août 2018.
La société, contestant ce taux, a saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité de Rennes le 9 octobre 2018.
Par jugement du 1er avril 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes, désormais compétent, a :
– dit qu’à la date du 15 août 2018, le taux d’IPP opposable à la société suite à l’accident du travail en date du 8 août 2017 sur la personne de Mme [W] est de 25 % ;
– débouté la société de ses demandes ;
– condamné la société aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018 ;
– rejeté les demandes plus amples ou contraires formées par les parties.
Par déclaration adressée le 10 mai 2022 par communication électronique, la société a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 22 avril 2022.
Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 23 septembre 2022 auxquelles s’est référé et qu’a développées son conseil à l’audience, la société demande à la cour :
– de dire son recours recevable et bien fondé ;
– en conséquence, de réformer la décision entreprise ;
à titre principal,
– de dire que, dans le cadre de ses rapports avec la caisse, le taux d’IPP devant être attribué à Mme [W] à la suite de son accident du 8 août 2017, devra être fixé à 17 % ;
à titre subsidiaire,
– d’ordonner dans le cadre de ses rapports avec la caisse la mise en oeuvre d’une mesure d’instruction qui pourra prendre la forme d’une consultation sur pièces, afin de déterminer le taux d’IPP relatif aux seules séquelles consécutives à l’accident déclaré par Mme [W] le 8 août 2017.
La caisse, convoquée par mail du 3 juillet 2024, ne s’est pas présentée à l’audience et n’a pas sollicité une dispense de comparution ; le présent arrêt sera réputé contradictoire.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
Sur l’opposabilité du taux d’IPP à l’employeur
L’article L. 434-2, 1er alinéa du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
Comme l’a jugé la cour de cassation, il appartient au juge de se prononcer sur l’ensemble des éléments concourant à la fixation de celui-ci. (2e Civ., 11 juillet 2019, pourvoi n° 18-18.938).
Selon l’article R. 434-32 du même code, au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l’existence d’une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit. Les barèmes indicatifs d’invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d’incapacité permanente d’une part en matière d’accidents du travail et d’autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d’invalidité en matière d’accidents du travail.
L’annexe I applicable aux accidents du travail est issue du décret n°2006-111 du 2 février 2006. L’annexe II applicable aux maladies professionnelles est en vigueur depuis le 30 avril 1999.
En son chapitre préliminaire, au titre des principes généraux, il est rappelé à l’annexe I que ce barème répond à la volonté du législateur et qu’il ne peut avoir qu’un caractère indicatif. Les taux d’incapacité proposés sont des taux moyens, et le médecin chargé de l’évaluation garde, lorsqu’il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier, l’entière liberté de s’écarter des chiffres du barème; il doit alors exposer clairement les raisons qui l’y ont conduit.
Le barème indicatif a pour but de fournir les bases d’estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l’article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole. Il ne saurait se référer en aucune manière aux règles d’évaluation suivies par les tribunaux dans l’appréciation des dommages au titre du droit commun.
Les quatre premiers éléments de l’appréciation concernent donc l’état du sujet considéré, du strict point de vue médical.
Le dernier élément concernant les aptitudes et la qualification professionnelle est un élément médico-social ; il appartient au médecin chargé de l’évaluation, lorsque les séquelles de l’accident ou de la maladie professionnelle lui paraissent devoir entraîner une modification dans la situation professionnelle de l’intéressé, ou un changement d’emploi, de bien mettre en relief ce point susceptible d’influer sur l’estimation globale.
Les éléments dont le médecin doit tenir compte, avant de proposer le taux médical d’incapacité permanente, sont donc :
1° La nature de l’infirmité. Cet élément doit être considéré comme la donnée de base d’où l’on partira, en y apportant les correctifs, en plus ou en moins, résultant des autres éléments. Cette première donnée représente l’atteinte physique ou mentale de la victime, la diminution de validité qui résulte de la perte ou de l’altération des organes ou des fonctions du corps humain. Le présent barème doit servir à cette évaluation.
2° L’état général. Il s’agit là d’une notion classique qui fait entrer en jeu un certain nombre de facteurs permettant d’estimer l’état de santé du sujet. Il appartient au médecin chargé de l’évaluation d’adapter en fonction de l’état général, le taux résultant de la nature de l’infirmité. Dans ce cas, il en exprimera clairement les raisons.
L’estimation de l’état général n’inclut pas les infirmités antérieures – qu’elles résultent d’accident ou de maladie – ; il en sera tenu compte lors de la fixation du taux médical.
3° L’âge. Cet élément, qui souvent peut rejoindre le précédent, doit être pris en considération sans se référer exclusivement à l’indication tirée de l’état civil, mais en fonction de l’âge organique de l’intéressé. Il convient ici de distinguer les conséquences de l’involution physiologique, de celles résultant d’un état pathologique individualisé. Ces dernières conséquences relèvent de l’état antérieur et doivent être estimées dans le cadre de celui-ci.
On peut ainsi être amené à majorer le taux théorique affecté à l’infirmité, en raison des obstacles que les conséquences de l’âge apportent à la réadaptation et au reclassement professionnel.
4° Facultés physiques et mentales. Il devra être tenu compte des possibilités de l’individu et de l’incidence que peuvent avoir sur elles les séquelles constatées. Les chiffres proposés l’étant pour un sujet normal, il y a lieu de majorer le taux moyen du barème, si l’état physique ou mental de l’intéressé paraît devoir être affecté plus fortement par les séquelles que celui d’un individu normal.
5° Aptitudes et qualification professionnelles. La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s’agit là des facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
Lorsqu’un accident du travail ou une maladie professionnelle paraît avoir des répercussions particulières sur la pratique du métier, et, à plus forte raison, lorsque l’assuré ne paraît pas en mesure de reprendre son activité professionnelle antérieure, le médecin conseil peut demander, en accord avec l’intéressé, des renseignements complémentaires au médecin du travail. La possibilité pour l’assuré de continuer à occuper son poste de travail – au besoin en se réadaptant – ou au contraire, l’obligation d’un changement d’emploi ou de profession et les facultés que peut avoir la victime de se reclasser ou de réapprendre un métier, devront être précisées en particulier du fait de dispositions de la réglementation, comme celles concernant l’aptitude médicale aux divers permis de conduire.
S’agissant des atteintes des fonctions articulaires concernant le membre supérieur, le chapitre 1.1.2 du barème indicatif d’invalidité en matière d’accident du travail, auquel il est renvoyé, prévoit :
‘Blocage et limitation des mouvements des articulations du membre supérieur, quelle qu’en soit la cause.
Epaule :
La mobilité de l’ensemble scapulo-huméro thoracique s’estime, le malade étant debout ou assis, en empaumant le bras d’une main, l’autre main palpant l’omoplate pour en apprécier la mobilité :
– Normalement, élévation latérale : 170° ;
– Adduction : 20° ;
– Antépulsion : 180° ;
– Rétropulsion : 40° ;
– Rotation interne : 80° ;
– Rotation externe : 60°.
La main doit se porter avec aisance au sommet de la tête et derrière les lombes, et la circumduction doit s’effectuer sans aucune gêne.
Les mouvements du côté blessé seront toujours estimés par comparaison avec ceux du côté sain. On notera d’éventuels ressauts au cours du relâchement brusque de la position d’adduction du membre supérieur, pouvant indiquer une lésion du sus-épineux, l’amyotrophie deltoïdienne (par mensuration des périmètres auxilaires vertical et horizontal), les craquements articulaires. Enfin, il sera tenu compte des examens radiologiques.’
Pour une limitation légère de tous les mouvements, le taux médical est proposé entre 10 à 15 % pour le membre dominant et entre 8 à 10 % pour le membre non dominant. Concernant une limitation moyenne de tous les mouvements, le taux médical proposé est de 20 % pour le membre dominant et de 15 % pour le membre non dominant. Le barème admet en outre la majoration du taux de 5 points pour des douleurs résiduelles de type périarthrite scapulo-humérale.
Il ressort de la notification de la décision attributive de rente adressée à la société que le taux d’IPP de 25 % a été fixé au regard des éléments suivants : ‘Séquelles indemnisables de l’accident du travail du 8 août 2017 chez une gauchère travailleuse manuelle sans état antérieur ayant présenté une fracture multi fragmentaire de l’extrémité proximale de l’humérus gauche opérée le 11 août 2017 (matériel d’ostéosynthèse encore en place) et compliqué d’algoneurodystrophie et de pseudarthrose : persistance d’importantes limitations douloureuses de l’épaule gauche.
La société conteste ce taux, s’appuyant pour ce faire sur deux mémoires de ses médecins de recours, l’un du docteur [M] en date du 8 décembre 2021 et l’autre du docteur [H] en date du 6 mai 2022 qui proposent un taux de 18% pour le premier et de 17% pour le second estimant que l’examen du médecin conseil est incomplet, que la limitation moyenne des mouvements n’en atteint que certains et que les complications d’algodystrophie et de pseudarthrose sont guéries.
Il résulte des rapports précités que suite à son accident de travail, Mme [W] a présenté une fracture multifragmentaire de l’extrémité proximale de l’humérus de l’épaule gauche dominante ayant nécessité un traitement chirurgical notamment pour mise en place de matériel d’ostéosynthèse ; que les suites se sont compliquées d’algoneurodystrophie et d’une pseudarthrose du col chirurgical de l’humérus gauche ; que le médecin conseil a relevé une raideur marquée de l’ensemble des amplitudes articulaires de l’épaule dominante et mesuré l’antepulsion à 100 °, l’abduction à 80°, la rotation externe à 30°, la rétropulsion à 15°, une rotation interne altérée évaluée par le seul mouvement complexe main à la fesse ; qu’il a constaté, aussi une amyotrophie de la partie supérieure de l’épaule mais sans mensuration effectuée et un syndrome douloureux persistant important.
Il convient de rappeler que le barème de maladie professionnelle n’est qu’indicatif et que les juges apprécient souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve produits aux débats et des rapports d’expertise. En application de ces principes, la Cour de cassation n’a pas entendu censurer les juges qui ont estimé que le barème, qui prévoit pour une limitation légère de tous les mouvements de l’épaule dominante un taux d’incapacité partielle de 10 à 15 %, ne retient pas de réduction dans les cas où tous les mouvements ne sont pas atteints. (Civ.2, 13 mars 2014, 13-13.291)
Dès lors, l’interprétation restrictive du barème telle que proposée par la société ne peut être entérinée, le barème demeurant en tout état de cause indicatif et n’exigeant nullement que soit constatée une limitation de toutes les amplitudes articulaires. Il appartient en effet au médecin conseil de moduler le taux en fonction de l’atteinte, totale ou partielle qu’il objective des amplitudes articulaires, ou de l’une ou de l’autre de ces amplitudes.
Il convient de retenir une limitation modérée de l’abduction mesurée à 80° pour une norme à 170°, de l’antepulsion mesurée à 100° pour une norme à 180°, de la rotation externe mesurée à 30° pour une norme à 60° et de la rétropulsion mesurée à 15° pour une norme à 40°, limitation modérée admise d’ailleurs par les médecins de recours.
Il résulte de la scintigraphie effectuée début 2018 que l’algodystrophie a disparu.
Les docteurs [M] et [H] soutiennent qu’il n’y a pas lieu de prendre en compte non plus la pseudarthrose dès lors qu’il résulte de la radio de contrôle du 3 juillet 2018 que la fracture est consolidée.
Toutefois, il convient de relever que le médecin conseil évoque les complications d’algodystrophie et de pseudarthrose pour expliquer la persistance importante des douleurs, étant rappelé que la fracture était plurifragmentaire, que le matériel d’ostéosynthèse est toujours en place et que la pseudarthrose qui a existé est responsable d’une plus grande raideur articulaire.
Dès lors, l’évaluation qu’il a effectuée est conforme au barème indicatif précité qui prévoit un taux de 20% en cas de limitation modérée de tous les mouvements de l’épaule dominante, taux qui a pu être majoré en raison de la raideur marquée de l’ensemble des amplitudes articulaires de l’épaule dominante et de l’importance des douleurs qui persistent.
Il résulte de la combinaison des articles 10, 143 et 146 du code de procédure civile que les juges du fond apprécient souverainement l’opportunité d’ordonner les mesures d’instruction demandées. Le fait de laisser ainsi au juge une simple faculté, sans qu’il ne soit contraint d’y donner une suite favorable, ne constitue pas en soi une violation des principes du procès équitable, tels qu’issus de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ou du principe du contradictoire.
Au regard de l’ensemble des pièces produites, qui sont suffisantes pour trancher le litige soumis à la cour, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’expertise sollicitée.
Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement qui a déclaré le taux d’incapacité de 25 % opposable à l’employeur.
Sur les dépens
Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de la société, partie perdante.
La COUR, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne la SARL [5] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT