Sommaire Engagement et évolution de la relation de travailMonsieur [U] [K] a été engagé par la société Dauphine Isolation Gaines en tant que poseur de gaine par un contrat à durée déterminée du 11 décembre 2017 au 8 juin 2018, renouvelé jusqu’au 7 juin 2019. Un contrat à durée indéterminée a été établi à partir du 1er novembre 2018, avec une rémunération mensuelle brute de 3 480,15 euros. La convention collective applicable est celle du BTP IDF. Demandes de régularisation et licenciementM. [K] a sollicité par lettres recommandées la régularisation de salaires non payés pour plusieurs mois en 2019 et janvier 2020. Le 14 février 2020, il a été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire, et le 26 février 2020, il a été licencié pour faute grave. En mai 2020, il a saisi le conseil de prud’hommes pour réclamer des rappels de salaires et d’autres sommes. Jugement du conseil de prud’hommesLe 7 septembre 2021, le conseil de prud’hommes a débouté M. [K] de toutes ses demandes et a également débouté la société de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamnant M. [K] aux dépens. M. [K] a interjeté appel de ce jugement le 21 octobre 2021. Prétentions des parties en appelM. [K] a demandé à la cour d’infirmer le jugement et de condamner la société à lui verser diverses sommes, y compris des rappels de salaires et des indemnités. La société a demandé la confirmation du jugement initial et a réclamé des frais au titre de l’article 700. Analyse des rappels de salairesM. [K] a soutenu que son salaire n’avait pas été intégralement versé, notamment en raison d’une réduction unilatérale de son salaire horaire. La société a reconnu des erreurs dans le paiement des salaires, mais a contesté les montants réclamés par M. [K]. La cour a constaté que la société n’avait pas justifié le paiement des sommes dues. Licenciement sans cause réelle et sérieuseLa cour a jugé que le licenciement de M. [K] était sans cause réelle et sérieuse, en raison de l’absence de preuves des griefs invoqués par la société. Les motifs de licenciement n’étaient pas suffisamment étayés, et la cour a donc annulé le licenciement. Conséquences financières du licenciementEn raison de la nullité du licenciement, M. [K] a droit à des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu’à une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents. La cour a fixé les montants dus à M. [K] en fonction de son ancienneté et des dispositions légales. Autres demandes et décisions de la courLa cour a ordonné à la société de remettre un bulletin de salaire conforme et a condamné la société à rembourser les allocations de chômage versées à M. [K] dans la limite de six mois. La société a également été condamnée aux dépens et à verser une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelles sont les conséquences juridiques du licenciement de M. [K] ?Le licenciement de M. [K] a été déclaré sans cause réelle et sérieuse par la Cour, ce qui entraîne plusieurs conséquences juridiques importantes. Selon l’article L. 1232-1 du Code du travail, « tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ». En l’espèce, la Cour a constaté que les motifs invoqués par l’employeur, à savoir le non-respect des ordres d’un supérieur hiérarchique et le refus de restitution de véhicules, n’étaient pas justifiés. Ainsi, M. [K] a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui est fixée entre trois et trois mois et demi de salaire, conformément à l’article L. 1235-3 du Code du travail. La Cour a évalué son préjudice à 6 500 euros, tenant compte de son âge, de son ancienneté et de sa situation professionnelle. De plus, M. [K] a droit à une indemnité compensatrice de préavis, ainsi qu’à une indemnité de licenciement, conformément à l’article R. 1234-2 du Code du travail, qui stipule que « l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants : un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à dix ans ». En conséquence, la société Dauphine Isolation Gaines est condamnée à verser à M. [K] diverses sommes, incluant des rappels de salaires, des congés payés, et des indemnités, avec intérêts au taux légal à compter de la date de la convocation devant le conseil de prud’hommes. Quels sont les droits de M. [K] concernant les rappels de salaires et les congés payés ?M. [K] a le droit de réclamer des rappels de salaires et des congés payés non versés, conformément aux dispositions du Code du travail et de la convention collective applicable. L’article L. 3251-1 du Code du travail précise que « l’employeur ne peut opérer une retenue de salaire pour compenser des sommes qui lui seraient dues par un salarié pour fournitures diverses, quelle qu’en soit la nature ». Cela signifie que M. [K] ne peut pas être pénalisé par des retenues injustifiées sur son salaire. Dans le cas présent, M. [K] a soutenu que son salaire horaire avait été unilatéralement réduit sans avertissement, ce qui constitue une violation de ses droits. La Cour a reconnu que la société avait modifié son salaire de manière unilatérale, ce qui n’est pas conforme aux règles du droit du travail. La Cour a également constaté que la société avait reconnu que certaines absences étaient en réalité des jours travaillés, et a donc condamné la société à verser à M. [K] des rappels de salaires pour les périodes concernées, ainsi que les congés payés afférents. En résumé, M. [K] a le droit de recevoir les sommes dues pour les périodes de travail effectuées, ainsi que les congés payés correspondants, et la société est tenue de respecter ces obligations. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles, c’est-à-dire les frais engagés pour la procédure qui ne peuvent pas être récupérés autrement. Dans le cas présent, la société Dauphine Isolation Gaines a été condamnée à verser à M. [K] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700. Cette décision est fondée sur le fait que M. [K] a dû engager des frais pour faire valoir ses droits devant le conseil de prud’hommes et en appel. L’article 700 stipule que « le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme qui ne peut excéder 3 000 euros ». Cela permet de compenser les frais de justice et d’encourager l’accès à la justice pour les salariés. Ainsi, la condamnation de la société à verser cette somme à M. [K] reflète la reconnaissance de la nécessité de couvrir les frais engagés par le salarié pour défendre ses droits dans le cadre de ce litige. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 11 DECEMBRE 2024
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/08831 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CERQL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Septembre 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de BOBIGNY – RG n° F 20/00988
APPELANT
Monsieur [U] [K]
Né le 17 octobre 1991 en ROUMANIE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Montasser CHARNI, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB69
INTIMEE
S.A.S.U. DAUPHINE ISOLATION GAINES, prise en la personne de son représentant légal
N° RCS : 451 529 101
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Julie BELMA, avocat au barreau de PARIS, toque : E2040
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Didier MALINOSKY, magistrat honoraire exerçant des fonctions judiciaires, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Christophe BACONNIER, président de chambre
Marie-Lisette SAUTRON, présidente de chambre
Didier MALINOSKY, magistrat honoraire exerçant des fonctions judiciaires
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
Monsieur [U] [K] a été engagé par la société Dauphine Isolation Gaines, en qualité de poseur de gaine, ouvrier niveau I, position 1, coefficient 150 par un contrat à durée déterminée écrit à temps plein, en raison d’un accroissement d’activités, du 11 décembre 2017 au 8 juin 2018.
Ce contrat à durée déterminée a été renouvelé dans les mêmes conditions pour la période du 8 juin 2018 au 7 juin 2019.
Un contrat de travail à durée indéterminée écrit à temps plein a été régularisé entre les parties à compter du 1er novembre 2018 en qualité de poseur de gaines, ouvrier professionnel, niveau III, position 2, coefficient 230.
Dans le dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute de M. [K] s’élevait à 3 480,15 euros et à 1 480,00 euros selon la société.
La convention collective applicable est celle du BTP IDF et l’entreprise compte plus de onze salariés.
Par lettres recommandées des 19 décembre 2019 et 28 janvier 2020, M. [K] sollicite la régularisation des sommes non payées en octobre, novembre, décembre 2019 et janvier 2020.
Le 14 février 2020, M. [K] est convoqué à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, entretien fixé au 21 février 2020.
Le 26 février 2020, M. [K] est licencié pour faute grave.
Le 20 mai 2020, il saisit le conseil de prud’hommes de Bobigny en demande de rappels de salaires et congés payés afférents, ainsi qu’en paiement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Par un jugement du 7 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Bobigny a :
– Débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes,
– Débouté la société Dauphine Isolation Gaines de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamné M. [K] aux entiers dépens.
M. [K] a interjeté appel de ce jugement le 21 octobre 2021.
PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions récapitulatives déposées par messagerie électronique le 13 janvier 2022 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [K] demande à la cour de :
– Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
– Condamner la société dauphine Isolation Gaines à lui payer les sommes suivantes :
‘ 963,71 euros à titre de rappel de salaires du 7 au 14 octobre 2019 ;
‘ 96,37 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 249,10 euros à titre de rappel de salaires du 4 au 6 novembre 2019 ;
‘ 24,91 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires du 7 au 30 novembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires décembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés pays y afférents ;
‘ 96,87 euros à titre de rappel de salaires du 6 janvier 2020 ;
‘ 9,69 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de janvier 2020 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 3 480,15 euros à titre de rappel de salaires de février 2020 ;
‘ 348,01 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 37,26 euros à titre de rappel de notes de frais ;
‘ 6 960,30 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
‘ 696,03 euros à titre de congés payés y afférents ;
‘ 1 800 euros à titre d’indemnité de licenciement ;
‘ 12 180,53 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
‘ 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat ;
‘ 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Ordonner la remise des bulletins de salaires conformes sous astreinte de 300 euros par document et par jour de retard,
– Condamner la société aux intérêts au taux légal avec anatocisme,
– Condamner la société aux dépens.
Par conclusions récapitulatives déposées par messagerie électronique le 30 mars 2022 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Dauphine Isolation Gaines demande à la cour de :
– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bobigny qui a débouté M. [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
Y ajoutant,
– Condamner M. [K] à payer à la société Dauphine Isolation Gaines la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner M. [K] aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 17 septembre 2024 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 29 octobre 2024.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
Sur les rappels de salaire et accessoires de salaires
M. [K] soutient que son employeur ne lui a pas versé la totalité de ses salaires, notamment pour les périodes du 7 au 14 octobre 2019, du 4 au 6 novembre 2019, en décembre 2019, ainsi qu’en janvier, notamment la journée du 6, et en février 2020.
Il fait valoir que depuis novembre 2018 son salaire horaire a toujours été de 22,9455 euros mais que soudainement en novembre 2019 la société a unilatéralement décidé de diminuer son salaire sans avertissement à la somme de 13,8390 euros de l’heure.
Il sollicite le versement d’un rappel de salaire reconstitué sur la base horaire de 22,9455 euros, le paiement des jours travaillés que la société lui a déduit et des congés payés afférents outre le remboursement des frais occasionnés lors de ses déplacements.
La société soutient que le montant du salaire prévu au contrat de travail de M. [K] relève d’une erreur matérielle commise lors de la rédaction de ce dernier, le salaire habituel d’un poste d’aide-poseur étant de 1 480 euros et non de 3 480 euros. La société précise que le salarié a perçu pendant une année sa rémunération brute à hauteur de 22,9455 euros de l’heure et qu’il s’est abstenu de signaler cette erreur à la société.
La société fait valoir qu’elle a déjà réglé certaines sommes à M. [K], notamment celles correspondantes aux périodes du 7 au 14 octobre 2019 et du 4 au 6 novembre 2019, précisant qu’il s’agirait initialement de retenues sur salaires en raison d’absences autorisées, mais qu’elle a finalement considéré qu’il avait travaillé durant ces périodes. Elle indique avoir également réglé les sommes correspondantes aux autres périodes de novembre et décembre 2019.
Concernant le 6 janvier 2020, la société considère que M. [K] n’a pas travaillé cette journée-là, car elle l’avait chargé de récupérer un véhicule de location à [Localité 3] (93) pour le ramener à [Localité 6] (69) et que pour les mois de janvier et février 2020, ces demandes doivent être rejetées car reposant sur le montant erroné de la rémunération contractuelle.
Enfin, la société fait valoir qu’aucun élément ne permettrait d’identifier les demandes de paiement des notes de frais.
Sur ce,
Il est acquis aux débats que le contrat de travail à durée indéterminée du 1er novembre 2018 fixe, dans le chapitre relatif à la rémunération, ‘un salaire horaire brut de 22,95 euros (soit un salaire brut mensuel de 3 480,15 euros) pour un horaire hebdomadaire de 35heures soit 151,67 heures par mois)’ et que du 1er novembre 2018 au 31 octobre 2019, M. [K] a perçu sa rémunération sur cette base.
Il est aussi acquis aux débats que, de manière unilatérale et sans avertissement, la société a modifié la rémunération de M. [K] sur la base horaire de 13,839 euros à compter du 1er novembre 2019 et que suite aux réclamations du salarié des 19 décembre 2019 et 28 janvier 2020, elle a fait état d’une erreur de plume sur le contrat de travail.
Par ailleurs, la cour relève que la société reconnaît que les ‘absences autorisées’ d’octobre, novembre et décembre 2019 étaient en réalité des jours travaillés qu’elle devait lui rémunérer sur la base de :
963,71 euros pour octobre 2019, 249,10 euros pour novembre, 1381,19 pour décembre 2019 et 1422,76 euros pour janvier 2020.
Si la société a émis, au titre de février 2020, un bulletin de salaire reprenant les sommes débitées initialement pour absences, la cour relève que le bulletin de salaire mentionne un ‘net payé’ à ‘0,00 euros’ et que la société a établi une compensation d’un montant de 3 000 euros entre les salaires et une ‘provision facture location en attente’
Or, l’article L3251-1du code du travail dispose que ‘l’employeur ne peut opérer une retenue de salaire pour compenser des sommes qui lui seraient dues par un salarié pour fournitures diverses, quelle qu’en soit la nature’.
Par ailleurs, la société ne justifie pas du paiement du reliquat de salaire sollicité et des congés payés afférents.
Ainsi, en infirmation du jugement entrepris, il y a lieu de condamner la société à verser à M. [K] les sommes suivantes :
‘ 963,71 euros à titre de rappel de salaires du 7 au 14 octobre 2019 ;
‘ 96,37 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 249,10 euros à titre de rappel de salaires du 4 au 6 novembre 2019 ;
‘ 24,91 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires sur novembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires décembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés pays y afférents ;
‘ 96,87 euros à titre de rappel de salaires du 6 janvier 2020 ;
‘ 9,69 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de janvier 2020 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
Sur le salaire horaire, la cour relève que seul le rappel de salaire d’octobre a été calculé sur la base initiale horaire de 22,95 euros.
Par ailleurs, la cour relève que M. [K] a été embauché en qualité d’ouvrier niveau III, position 2 de la convention collective du BTP Île de France et que le salaire mensuel minimum conventionnel est d’un montant de 1865 euros sur la base de 151,67 heures soit 12,2964 euros de l’heure et qu’ainsi le salaire proposé par la société est supérieur au minimum conventionnel.
Ainsi, la cour fixe le salaire horaire de M. [K], au 1er novembre 2019, à la somme de 13,839 euros soit 2 098,96 euros mensuels.
Sur le paiement du salaire de février 2020
M. [K] sollicite le paiement du salaire de février 2020 dont il allègue d’une part, l’absence de paiement et d’autre part, que ce paiement doit se faire sur la base d’un salaire horaire de 22,95 euros.
La société soutient qu’elle a procédé au paiement du salaire de février 2020 sur la base horaire de 13,839 euros.
Sur ce,
La cour relève que la société a bien émis un bulletin de salaire pour février 2020 mais que ce dernier mentionne un ‘net à payer’ à ‘0,00″ et que la société ne justifie pas du paiement du salaire de février, soit par la production d’un chèque, d’un versement bancaire ou de toute autre pièce comptable.
Ainsi, en infirmation du jugement entrepris, la cour condamne la société à verser à M. [K] la somme de 2 098,96 euros outre 209,90 euros au titre des congés payés afférents.
Sur le paiement des frais de déplacement
M. [K] sollicite le versement d’une somme de 37,26 euros à titre de frais.
La société indique que le salarié ne justifie pas de leur réalité.
Sur ce,
La convention collective du BTP prévoit des dispositions particulières pour les ouvriers dont les fonctions amènent à se déplacer sur des chantiers situés en dehors de la résidence administrative de la société. Ces indemnités sont soit celles relatives à des frais de repas, des frais de trajet, des frais de nuitée dite de petits déplacements soit des frais liés à des grands déplacements.
Par ailleurs, M. [K] produit un relevé de note de frais, accompagnés des justificatifs, pour le mois de février 2020 sur lequel un solde ‘non payé’ de 37,26 euros est indiqué.
En outre, la société ne justifie pas des sommes versées à M. [K] au titre des notes de frais conventionnel du mois de février 2020.
Ainsi, la cour, infirmant le jugement, condamne la société à payer à M. [K] la somme de 37,26 euros à titre des frais professionnels.
Sur l’exécution déloyale du contrat de travail
M. [K] sollicite une somme de 10 000 euros pour une exécution déloyale du contrat de travail sans justifier des moyens de droit sur lesquels il s’appuie.
La société Dauphine Isolation Gaines relève que la demande de M. [K] au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ne serait motivée ni en fait, ni en droit.
Sur ce,
A défaut pour M. [K] de justifier des moyens de droits et de faits sur lesquels il fonde ses prétentions, la cour rejette sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail.
Sur le licenciement
M. [K] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, son employeur ne lui reprochant que des faits non justifiés et non liés aux fonctions de son contrat de travail. Le salarié rappelle que sa qualification est celle d’un ouvrier professionnel du BTP et non d’un convoyeur de voiture.
La société soutient que le salarié n’a pas respecté les consignes de son supérieur hiérarchique lorsqu’il a récupéré le véhicule le 4 février à [Localité 4] et qu’il a gardé par-devers lui deux véhicules qui lui ont été affecté soit avant le 4 février soit après le 4 février 2020.
Sur ce,
En application des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail, ‘tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute persiste, il profite au salarié.
La faute grave, résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail, ou des relations de travail, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis, étant en outre rappelé qu’aux termes de l’article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance’.
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est rédigée en ces termes :
‘( …) nous avons le regret de vous informer que nous avons décidé de mettre fin au contrat de travail qui vous lie à notre entreprise.
Nous vous rappelons ci-après les raisons qui ont motivé notre décision :
Vous avez désobéi aux instructions directes de votre supérieur hiérarchique M. [D] [T]. En effet, ce dernier vous avez demandé de venir effectuer un chantier sur [Localité 5]. Pour cela, vous deviez prendre le train jusqu’à [Localité 4] pour y récupérer un véhicule de la société et le descendre à [Localité 5]. Vous avez pris 1e train le mardi 4 février, en arrivant sur [Localité 4], vous avez récupérer le camion et sans même attendre que le responsable d’agence vous foumisse les documents de ce dernier (contrôle technique et macaron vert d’assurance), vous êtes parti.
En fin de journée, M [T] n’ayant aucune nouvelle, vous a contacté pour apprendre que vous étiez rentré à votre domicile sur [Localité 3] alors qu’il vous attendait sur [Localité 5].
Depuis ce jour, vous n’avez toujours pas rendu 1e véhicule appartenant à la société. Avant de récupérer ce véhicule, vous aviez un véhicule de location que vous deviez rendre le 06 février 2020. Vous avez refuse de restituer ce véhicule et nous avons dû prolonger le contrat de location de 15 jours.
En conséquence, vous ne ferez plus partie de notre personnel à compter de la présentation du présent courrier, conformément at la réglementation en vigueur.(…)’.
Ainsi, il est reproché à M. [K] un non respect des ordres de son supérieur et un refus de restitution des véhicules qui lui ont été affecté.
Il est acquis aux débats que M. [K] a été embauché en qualité de ‘poseur de gaine’, statut d’ouvrier, niveau III, position 2, coefficient 230 de la convention collective du BTP et que le 4 février 2020, il s’est rendu à [Localité 4] pour récupérer un véhicule utilitaire de la société.
Il est, aussi, acquis aux débats que la société, outre son siège social de [Localité 6], possède trois autres agences, une autre en Rhône Alpes, une en Languedoc Roussillon et une en région PACA.
Sur le grief de non respect des ordres d’un supérieur hiérarchique, la cour relève que la société ne produit aucun élément justifiant des consignes de se rendre sur un chantier à [Localité 5] ni d’un refus de prendre les documents obligatoires du véhicule alors qu’il est justifié que le salarié a travaillé sans interruption sur d’autres chantiers jusqu’à 27 février 2020, période sur laquelle lui est reproché son refus de se rendre à [Localité 5].
Sur le grief d’un refus de restitution des véhicules qui lui ont été affecté, la cour relève que la société ne fournit aucun élément justifiant ni de la non restitution du véhicule de location et du véhicule de la société ni d’une prolongation d’un contrat de location.
A défaut, pour la société de justifier de la réalité des griefs mentionnés dans la lettre de licenciement, la cour dit que le licenciement de M. [K] est sans cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences financières
Le licenciement de M. [K] ayant été déclaré sans cause réelle et sérieuse, le salarié est en droit de solliciter, outre une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents outre une indemnité de licenciement
Sur ce,
L’article 10.1.1 de la convention collective du BTP, relatif au préavis, stipule que, ‘en cas de rupture du contrat de travail après l’expiration de la période d’essai, la durée du délai de préavis que doit respecter, selon le cas, l’employeur ou l’ouvrier, est fixée comme suit :
a) En cas de licenciement :
– de la fin de la période d’essai jusqu’à 3 mois d’ancienneté dans l’entreprise : 2 jours ;
– de 3 à 6 mois d’ancienneté dans l’entreprise : 2 semaines ;
– de 6 mois à 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise : 1 mois ;
– plus de 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise : 2 mois.
(…)’.
M. [K] ayant une ancienneté de deux ans, deux mois et seize jours, il lui sera fait droit d’une indemnité compensatrice de préavis de 4 197,92 euros outre 419,79 euros au titre des congés payés afférents.
L’article R 1234-2 du code du travail dispose que ‘l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :
1° Un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à dix ans ;
2° Un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de dix ans’.
M. [K] ayant une ancienneté de deux ans, quatre mois et seize jours, préavis inclus, la cour condamne la société à lui verser, à ce titre, la somme de 1 246,26 euros.
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
En application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, M. [K], ayant une ancienneté de deux ans et quatre mois et seize jours, préavis inclus, est fondé à obtenir, dans les limites de sa demande, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre trois et trois mois et demi de salaire, soit entre 6 296,88 euros et 7 346,36 euros.
Au moment de la rupture, M. [K] était âgé de vingt huit ans et il ne justifie pas d’une indemnisation Pôle Emploi, au vu de cette situation, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, il convient d’évaluer son préjudice à la somme 6 500 euros.
L’article L. 1235-4 du code du travail dispose que, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.
Ainsi, il y a lieu de condamner la société au remboursement des allocations du Pôle Emploi éventuellement versées à M. [K] dans la limite de six mois d’indemnité.
Sur les autres demandes
I1 y a lieu d’ordonner à la société de remettre un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la présente décision dans un délai d’un mois à compter de sa notification, sans qu’il soit nécessaire de fixer une astreinte, étant rappelé que le présent arrêt est exécutoire de droit.
Il n’y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes, soit le 20 mai 2020 et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation étant ordonnée.
La société Dauphine Isolation gaines qui succombe à l’instance sera condamnée aux dépens toutes causes confondues et à payer à M. [U] [K] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile toutes causes confondues.
La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement du 8 juillet 2021 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que le licenciement de M. [U] [K] est sans cause réelle et sérieuse ;
Fixe le salaire horaire de M. [U] [K] à compter du 1er novembre 2019 à la somme de 13,839 euros ;
Condamne la société Dauphine Isolation Gaines à payer à M. [U] [K] les sommes suivantes :
‘ 963,71 euros à titre de rappel de salaires du 7 au 14 octobre 2019 ;
‘ 96,37 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 249,10 euros à titre de rappel de salaires du 4 au 6 novembre 2019 ;
‘ 24,91 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires sur novembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de salaires décembre 2019 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés pays y afférents ;
‘ 96,87 euros à titre de rappel de salaires du 6 janvier 2020 ;
‘ 9,69 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 1 381,19 euros à titre de rappel de janvier 2020 ;
‘ 138,12 euros au titre des congés payés y afférents ;
‘ 4 197,92 euros à titre d’indemnité compensatrice ;
‘ 419,79 euros au titre des congés payés afférents ;
‘ 1 246,26 euros à titre d’indemnité légale de licenciement.
Avec intérêts au taux légal à compter du 20 mai 2020.
– 6 500 euros au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Avec intérêts au taux légal à compter du 12 décembre 2024.
– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile toutes causes confondues
Ordonne la capitalisation des intérêts légaux ;
Ordonne à la société Dauphine Isolation Gaines de remettre à M. [U] [K] un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la présente décision dans un délai d’un mois à compter de sa notification, sans qu’il soit nécessaire de fixer une astreinte, étant rappelé que le présent arrêt est exécutoire de droit. ;
Condamne Dauphine Isolation Gaines au remboursement des allocations du Pôle Emploi, éventuellement versées à M. [U] [K], dans la limite de six mois d’indemnité. ;
Déboute M. [U] [K] du surplus de ses demandes ;
Déboute la Dauphine Isolation Gaines de ses demandes incidentes ;
Condamne la Dauphine Isolation Gaines aux dépens toutes causes confondues
Le greffier Le président