Suspension des Prestations Familiales : Conséquences d’une Absence à l’Audience et Prescription des Droits

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Suspension des Prestations Familiales : Conséquences d’une Absence à l’Audience et Prescription des Droits

Contexte de l’affaire

M. [E] [M] et Mme [S] [M], parents de trois enfants, ont bénéficié d’allocations familiales et d’un complément familial. Cependant, ces prestations ont été suspendues sans préavis depuis plusieurs mois, ce qui a conduit le couple à contacter la caisse d’allocations familiales de Loire-Atlantique (CAF) pour demander des précisions et le paiement des sommes dues.

Demande de régularisation

Le 21 mai 2018, M. et Mme [M] ont sollicité la CAF pour obtenir le rappel des prestations non versées, incluant le complément familial d’avril 2012 à avril 2018 et les allocations familiales de juillet 2015 à avril 2018. En réponse, la CAF a reconnu un rappel de 16 810,17 euros pour la période de mai 2016 à mai 2018, mais a refusé de verser les prestations antérieures en raison de la prescription biennale.

Recours et décisions judiciaires

Le 5 juillet 2018, M. et Mme [M] ont contesté la décision de la CAF, demandant de ne pas appliquer la prescription en raison de la suspension unilatérale des prestations. La commission de recours amiable a rejeté leur contestation le 29 août 2018. M. [M] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Loire-Atlantique le 12 septembre 2018.

Jugement du tribunal

Le 10 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Nantes a condamné la CAF à verser 13 400,93 euros à M. [M] pour réparer son préjudice et a ordonné la prise en charge des dépens. La CAF a interjeté appel de ce jugement le 5 décembre 2022.

Procédure d’appel

Lors de l’audience du 16 octobre 2024, la CAF n’était pas présente, bien qu’elle ait été régulièrement avisée de la date et de l’heure. La cour a noté que l’organisme n’avait pas demandé de dispense de comparution et n’avait pas justifié son absence, ce qui a conduit à une absence de moyens soulevés à l’appui de son appel.

Décision de la cour d’appel

La cour a confirmé le jugement initial, précisant que la somme de 13 400,93 euros devait être versée à M. [M]. De plus, la CAF a été condamnée aux dépens de l’appel, en raison de son absence lors de l’audience et de son incapacité à justifier son appel.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelles sont les conséquences de la prescription biennale sur les demandes de rappel de prestations familiales ?

La prescription biennale est régie par l’article L. 553-1 du Code de la sécurité sociale, qui stipule que les droits à prestations sont soumis à une prescription de deux ans. Cette prescription commence à courir à compter du jour où le droit peut être exercé.

Dans le cas présent, la CAF a informé M. et Mme [M] qu’ils ne pouvaient pas percevoir les prestations pour la période d’avril 2012 à avril 2016 en raison de cette prescription.

Il est important de noter que la prescription peut être interrompue dans certaines circonstances, notamment en cas de demande de prestations ou de reconnaissance de la dette par l’organisme. Cependant, dans ce litige, la CAF a considéré que la demande de M. et Mme [M] ne pouvait pas interrompre la prescription pour la période antérieure à mai 2016.

Ainsi, la prescription biennale a eu pour effet de limiter le droit des requérants à obtenir le rappel des prestations pour la période antérieure à cette date, ce qui a été confirmé par la commission de recours amiable.

Quels sont les droits des allocataires en cas de suspension des prestations sans information préalable ?

Les droits des allocataires en matière de prestations familiales sont protégés par le Code de la sécurité sociale, notamment par l’article L. 531-1 qui impose à la CAF de notifier les décisions de suspension des prestations.

Dans le cas présent, M. et Mme [M] ont subi une suspension des versements sans information préalable, ce qui soulève des questions sur le respect de leurs droits.

L’article L. 531-1 précise que toute décision de suspension doit être notifiée à l’allocataire, lui permettant ainsi de contester cette décision. En l’absence de notification, l’allocataire peut arguer que ses droits n’ont pas été respectés, ce qui pourrait constituer un motif de contestation.

M. et Mme [M] ont donc légitimement contesté la suspension des prestations, en invoquant l’absence d’information préalable, ce qui a conduit à une demande de non-application de la prescription.

Quelles sont les implications de l’absence de représentation de la CAF lors de l’audience ?

L’article 446-1 du Code de procédure civile stipule que, dans le cadre d’une procédure sans représentation obligatoire, les parties doivent comparaître ou se faire représenter pour formuler valablement leurs prétentions.

Dans cette affaire, la CAF n’a pas comparu à l’audience, ce qui a eu des conséquences sur la procédure. En effet, la cour a constaté qu’elle n’avait pas été informée des moyens que la CAF souhaitait soulever à l’appui de son appel.

L’absence de la CAF a conduit la cour à confirmer le jugement de première instance, car elle n’avait pas connaissance des arguments de l’appelante. Cela souligne l’importance pour les parties de se présenter ou de se faire représenter lors des audiences, afin de défendre leurs intérêts.

Ainsi, la cour a statué en l’absence de moyens d’appel, confirmant le jugement initial et condamnant la CAF aux dépens, ce qui illustre les conséquences de son absence.

Comment la cour a-t-elle déterminé le bénéficiaire du versement des sommes allouées ?

La cour a précisé que, bien que le jugement initial ait omis de mentionner le bénéficiaire du versement de la somme de 13 400,93 euros, il était évident que ce bénéficiaire était M. [M], étant donné qu’il était le seul demandeur en première instance.

Cette précision est conforme à l’article 455 du Code de procédure civile, qui exige que les décisions judiciaires soient claires et motivées.

En l’espèce, la cour a donc rectifié le dispositif du jugement pour indiquer que la somme devait être versée à M. [M]. Cela démontre l’importance de la clarté dans les décisions judiciaires et le respect des droits des parties.

Ainsi, la cour a confirmé le jugement tout en précisant le bénéficiaire, garantissant ainsi que les droits de M. [M] soient respectés dans le cadre de l’exécution de la décision.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 décembre 2024
Cour d’appel de Rennes
RG
22/07260
9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 22/07260 – N° Portalis DBVL-V-B7G-TLHC

CAF LOIRE-ATLANTIQUE

C/

[E] [M]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 DECEMBRE 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Madame Adeline TIREL lors des débats et Monsieur Philippe LE BOUDEC lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Octobre 2024

devant Madame Véronique PUJES, magistrat chargé d’instruire l’affaire, tenant seule l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 11 Décembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 10 Novembre 2022

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal Judiciaire de NANTES – Pôle Social

Références : 19/08376

APPELANTE :

LA CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE LOIRE-ATLANTIQUE

[Adresse 2]

[Localité 4]

non représentée à l’audience

INTIMÉ :

Monsieur [E] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [E] [M] et Mme [S] [M], parents de trois enfants, ont été bénéficiaires des allocations familiales et du complément familial.

Par courrier du 21 mai 2018, M. et Mme [M] ont sollicité la caisse d’allocations familiales de Loire-Atlantique (la CAF) en raison de la suspension du versement de ces prestations depuis plusieurs mois sans information préalable de l’organisme. Ils lui ont en conséquence demandé le paiement du rappel du complément familial du mois d’avril 2012 à avril 2018 ainsi que le rappel des allocations familiales de juillet 2015 à avril 2018.

Par courrier du 14 juin 2018, la CAF a répondu à M. [M] que la régularisation de son dossier entraînait un rappel de prestations de 16 810,17 euros pour la période de mai 2016 à mai 2018 mais qu’il ne pouvait pas percevoir les prestations pour la période d’avril 2012 à avril 2016 en raison de la prescription biennale.

Le 5 juillet 2018, M. et Mme [M] ont pris acte de la régularisation tout en demandant à la caisse de ne pas appliquer la prescription de deux ans au regard de la décision unilatérale de l’organisme, et sans avis préalable, de suspendre le versement des prestations familiales qu’ils percevaient depuis plus de dix ans.

Analysant ce courrier comme valant recours, la commission de recours amiable a rejeté cette contestation lors de sa séance du 29 août 2018.

M. [M] a alors porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Loire-Atlantique le 12 septembre 2018.

Par jugement du 10 novembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Nantes, devenu compétent, a :

– condamné la CAF à verser la somme de 13 400,93 euros en réparation de son préjudice (sic) ;

– condamné la CAF aux dépens de l’instance conformément aux dispositions de l’article 399 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée le 5 décembre 2022 par courrier recommandé avec avis de réception, la CAF a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 16 novembre 2022.

M. [M] a sollicité la confirmation du jugement pour appel non soutenu par la caisse.

Sur interpellation de la cour, il a demandé que l’arrêt à venir en rectifie néanmoins le dispositif qui a omis de préciser le bénéficiaire du versement de la somme allouée.

Bien que régulièrement avisée par mail, la CAF n’était ni présente ni représentée à l’audience du 16 octobre 2024 à 9 h 15, date à laquelle l’affaire a été appelée.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera observé à titre liminaire que si le jugement entrepris a omis dans son dispositif de préciser la personne à qui la caisse était condamnée à verser la somme de 13 400,93 euros, il s’agissait bien de M. [M] dès lors qu’il était seul demandeur en première instance, son épouse n’étant pas à la cause.

L’avis d’audience a été transmis à l’appelante par mail du 7 février 2024, dans le respect des dispositions de l’article 937 du code de procédure civile telles qu’issues du décret n°2015-282 du 11 mars 2015 en vigueur à compter du 15 mars 2015, prévoyant que le ‘demandeur est avisé par tous moyens des lieu, jour et heure de l’audience’.

Régulièrement avisée des lieu, jour et heure de l’audience, alors que l’appelante a eu connaissance de cet avis, de telle sorte que les dispositions de l’article 938 du code de procédure civile n’ont pas à recevoir application en l’espèce, la CAF n’a pas comparu, ni personne pour elle.

Il appartenait à l’organisme social de s’enquérir du sort de l’appel qu’il avait interjeté.

Il résulte des dispositions des articles 946 et 446-1 du code de procédure civile que l’oralité de la procédure sans représentation obligatoire applicable au contentieux général de la sécurité sociale impose aux parties, sauf dispense accordée par le juge, de comparaître ou de se faire représenter pour formuler valablement leurs prétentions et en justifier, seules les conclusions écrites, réitérées verbalement à l’audience des débats, saisissant valablement la cour.

La CAF n’a jamais obtenu, ni même sollicité, de la cour la dispense de comparaître de l’article 446-1 alinéa 2 du code de procédure civile. Par suite, l’organisme n’ayant pas comparu, ni personne pour lui, la cour reste dans l’ignorance des moyens qu’il entendait soulever à l’appui de son appel.

Par ailleurs, la cour n’en relève aucun d’ordre public qui puisse justifier l’annulation ou l’infirmation du jugement déféré.

Sans porter atteinte au principe de l’égalité des armes, la cour, requise de rendre un arrêt sur le fond et qui n’est ainsi saisie d’aucun moyen par l’appelante, ne peut que confirmer le jugement déféré.

Sur les dépens

Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de la CAF qui succombe à l’instance.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris sauf à préciser que la condamnation de la caisse d’allocations familiales de la Loire-Atlantique à payer la somme de 13 400,93 euros est prononcée au profit de M. [M] ;

Condamne la caisse d’allocations familiales de la Loire-Atlantique aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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